Le mâle entendu
Le mâle entendu , idée originale et mise en forme par Nancy Huston.
La devise de la pièce : » On ne naît pas femme, on le devient ». La célèbre phrase de Simone de Beauvoir, est ici, pourrait-on dire antinomique, puisque le thème du spectacle est comment devient-on un homme. Nancy Huston a recueilli les témoignages des trois musiciens du Trio Viret qui l’accompagnent.
Réflexion sur les femmes, la sexualité et les qualités typiquement masculines à partir de leur enfance jusqu’au présent.
Le thème n’est pas neuf! Chaque année, paraît un livre, ou est créée une pièce révélant (enfin !) tous les secrets féminins ou (et) masculins. Pourtant, la nature de l’homme est telle qu’il aspire à concevoir ou, du moins à imaginer, ce que nous ne serons jamais!
La lecture du texte par Nancy Huston qui joue ici un homme, se conjugue avec les improvisations du trio de jazz à la virtuosité remarquable (Jean-Philippe Viret à la contre-basse, Edouard Ferlet au piano et Fabrice Moreau à la batterie).
La récitante, en costume/cravate, est l’homme : avec un chapeau d’homme sans qu’on voit ses cheveux. Et son attitude comme ses mouvements sont un peu macho…
Nancy Huston jette, de temps en temps, un regard sur le texte posé sur un pupitre mais ne prétend pas mener son discours à la première personne. La mise en scène en renforce la nature conventionnelle, puisque le héros principal, un homme, est interprété ici par une femme.
Le trio de jazz suit la narration, en accentuant les moments marquants de la lecture par le rythme et par la mélodie. Par deux fois, les musiciens laissent leurs instruments et viennent tour à tour à l’avant-scène pour lire quelques phrases et Nancy Huston, elle, joue quelques improvisations au piano.
« Les hommes ne peuvent pas pleurer même s’ils en ont souvent envie. Peut-être, faut-il créer une profession de pleureur… Ces hommes auraient été « des saules pleureurs « ; » J’adore regarder les filles dans les rues. Je le fais sans me rendre compte. Il me semble parfois que ce n’est pas moi qui les regarde, mais mon œil qui fonctionne séparément de moi ». « La nature de l’homme consiste en ce qu’il doit être le prédateur. Parfois si je veux séduire une femme, ce n’est pas elle que je veux, mais j’y suis presque obligé, car je suis le prédateur. Je me dis : « Vas-y, tu dois le faire « : les thèmes développés dans Le Mâle entendu ont beaucoup en commun, et depuis longtemps, avec de textes littéraires sur la sexualité de l’homme mais, ici, sa mise en forme scénique est intéressante: il s’agit d’une expérience aux confins de la musique, de la lecture et d’une interprétation « à l’envers » .
Nancy Huston rappelle ainsi, non sans une certaine ironie, tout ce qui a créé et continue à créer des malentendus entre l’homme et la femme.
Anastasia Patts
Spectacle créé au Café de la Danse. Et le 8 février au Nevers Festival Tandem.