L’Effet scènes des Scènes nationales


L’Effet scènes des  Scènes nationales du 18 au 24 mars.

 L'Effet scènes des  Scènes nationales leffet-scenesLes Scènes nationales? Piqûre de rappel: en 82, souvenez-vous pour ceux qui étaient déjà nés, c’était la deuxième année de François Mitterrand à la Présidence de la République  et le budget du Ministère de la Culture, sous le règne de Jack Lang, était passé de 0,47 % à 0, 75 % du budget de l’Etat. E en 90, les huit Maisons de la Culture, les vingt  centres d’action culturelle et les vingt cinq centres de développement culturel, s’étaient regroupés sous l’appellation Scènes nationales.
Ce sont actuellement les héritières de la politique de décentralisation culturelle menée depuis la Libération que Charles Dullin, avec une belle lucidité, avait conseillé de mettre en place.  Actuellement réparties sur 56 départements, et non-comme l’indique la brochure édité pour l’occasion, sur 54 et  deux territoires d’outre-mer, entité juridique qui n’existe plus depuis 2003, elle sont implantées dans des villes et agglomérations de taille importante comme Nantes  ou Amiens, ou moyennes comme La Roche-sur-Yon,  Dunkerque, Foix, Belfort, Aubusson, Brest, Bourges, Narbonne, Sète, etc, sans oublier… Basse-Terre et Fort-de-France.
Mais-La France étant un pays compliqué, et le Ministère de la Culture encore plus et pas très performant quant au maillage du territoire-il reste un beau  désert au centre et le Sud de la France: le Cantal, l’Aveyron, la Corrèze, la Haute-Vienne, le Lot- il y a quelque huit ans, François Hollande avait demandé en 95 que sa bonne ville de Tulle dispose de ce label mais en vain… Saura-t-on jamais pourquoi ces régions  sont ignorées par les énarques culturels et considérées par eux comme des territoires négligeables! Cerise sur le gâteau, pour compliquer les choses, il y a aussi un réseau de scènes conventionnées… et des centres dramatiques nationaux et régionaux.
Lieux pluridisciplinaires, les Scènes nationales ont un nombre des salariés permanents et intermittents assez variable mais elles bénéficient du soutien financier de l’Etat et des collectivité locales. Elles  accueillent et soutiennent nombre de projets; et c’est un bilan tout à fait positif dont la France n’a pas à rougir. Il y a en effet peu d’équipes du spectacle vivant qui n’aient un jour ou l’autre  collaboré avec une des Scènes nationales pour la création de spectacles importants comme, par exemple,  Le Suicidé, mis en scène par Patrice Pineau avec un budget de 400.000 €, ou pour de plus petites formes.
Ainsi, Gérard Bono à Aubusson, a pu accompagner  Wajdi Mouawad ou le Collectif Les Possédés. Pour la troisième année de suite, comme l’a rappelé, lors de la conférence de presse, le président Jean-Pierre Angot, président  de l’Association des Scènes nationales, elles ont décidé de programmer, histoire de mettre un coup de projecteur sur leur action, cet Effet Scènes: un festival qui met  l’accent sur la création; en effet, on verra dans 68 endroits quelque 500 spectacles, expositions, rencontres, films, etc…) produits ou coproduits, à raison de 5, 8 millions d’ € chaque année dans ce réseau. Avec des artistes et des compagnies de toute discipline( théâtre, danse, musique, vidéo, etc…).  Ainsi verront le jour, entre autres, pendant cette semaine, Le Couloir des Exilés de Marcel Bozonnet à Amiens, Le Labo de Cyril Teste qui a été en résidence à Cavaillon, ou Les Concerts de Quatuor Diotima à Orléans.
Mais Aurélie Filipetti arrivera-t-elle à convaincre le premier ministre et le président de la République de maintenir sur les bases actuelles, l’intervention financière de l’Etat? On peut émettre quelques doutes malgré les  déclarations optimistes et les félicitations aux directrices et directeurs- comme celle de  la sénatrice Marie-Christine Blandin ou de Michel Orier,l’actuel directeur de la Création artistique au Ministère, et ancien directeur de la Maison de la Culture d’Amiens il y a dix ans et qui mena à bien le chantier de réhabilitation de celle de Grenoble.
Comme dans bien d’autres domaines artistiques, les schémas actuels ne correspondent plus toujours ni à une demande qui a beaucoup évolué,  ni à un public qui s’est beaucoup diversifié depuis une dizaine d’années. Et il y a un phénomène constant dont il faudra bien tenir compte: les jeunes artistes et les nombreux collectifs artistiques qui  naissent un peu partout, se méfient, et, non sans raison, de plus en plus des institutions.
Mais, comme on le sait, l’administration française aime beaucoup les changements à condition… que l’on ne remette pas en question la puissante et vieillotte machinerie de l’Etat  qui fonctionne le pus souvent sur d’anciens principes moteurs  qu’il est urgent selon elle de ne pas modifier…Et notre amie Edith Rappoport ne cesse ici, avec raison,  de le faire remarquer…

On l’a vu en particulier dans l’enseignement du théâtre et des arts plastiques où le Ministère n’a pas fait preuve depuis  dix ans, de beaucoup de courage et de lucidité… C’est même le moins que l’on puisse dire.Dans Le Théâtre et  le Prince, Robert Abirached, qui fut un temps directeur du Théâtre et des Spectacles faisait remarquer que l’investissement de l’Etat impliquait toujours plus de responsabilités. Et donc faire émerger  des esthétiques originales entraîne alorsdes obligations financières à court mais aussi à long terme… Mais c’est le prix à payer si on veut voir émerger dans quelque vingt ans des créateurs comme hier Valère Novarina, et,  plus  récemment, Joël Pommerat. Et cela demandera à la fois lucidité politique et volonté  de revoir les nominations dans le petit monde de la Culture… On souhaite bien du plaisir à Aurélie Filipetti.

Philippe du Vignal

Festival Effets Scènes du 18 au 24 mars. Pour connaître le programme intégral: www.scenes-nationales.fr


Archive pour 21 février, 2013

La maison Février et la plume dans tous ses états

La maison Février et la plume dans tous ses états !

 

La maison Février et la plume dans tous ses états fevrier« Mon truc en plume Plume de zoiseaux De z’animaux Mon truc en plume C’est très malin Rien dans les mains Tout dans l’coup d’reins « . Chanté par Zizi Jeanmaire sur des paroles de Serge Gainsbourg, ce refrain a immortalisé l’existence de la plume au music-hall.
La maison Février, depuis sa création en 1929, n’a cessé de travailler la plume pour le monde du spectacle.
A l’époque florissante des cabarets, les directeurs de salles comme les Folies-Bergère, le Lido, le Casino de Paris, l’Alcazar, La Paradis Latin ou Chez Michou travaillaient avec cette maison, qui a employé jusqu’à 28 plumassières. Elles ne sont plus que trois permanentes aujourd’hui …
La maison Février , reprise en 2009 par son plus prestigieux client, Le Moulin-Rouge, est aujourd‘hui installée  dans ses locaux.  Le Moulin-Rouge a voulu conserver ces métiers d’art français indispensables à la création artistique, et possède le label Entreprise du Patrimoine Vivant délivré par le Ministère de l’Economie et des Finances et par celui de l’Industrie, qui l’ont  distinguée, pour son savoir-faire artisanal d’excellence, où tout est fabriqué à la main!
La Comédie-Française, l’Opéra de Paris, le Cirque du Soleil ont recours à elle.Et depuis plusieurs années,  la maison Février travaille avec la haute couture (entre autres, Chanel, Jean-Paul Gautier, Christian Lacroix…), des modistes, et la Garde Républicaine  comme l’Académie-Française font appel  à cette maison.
Le simple particulier peut également être client de cette maison à part. Chapeaux, boas, éventails, ornements de tout style proviennent de plumes d’élevage. Celles de coq et faisan viennent de Chine et celles d’autruches d’Afrique du Sud. Mais toutes doivent  être dotées maintenant d’un certificat vétérinaire. Certaines plumes d’espèces protégées par la convention de Washington depuis 73 ne sont plus utilisées comme celles du héron, de l’aigrette-chère à Mistinguett-ou de l’oiseau de paradis, mais quelques exemplaires en sont encore précieusement conservés.
Il y a une vraie poésie dans les ateliers le travail  des  créations en cours  comme par les  noms employés: nageoire d’oie, faisan lady ou faisan vénéré… Féerie, la revue du Moulin-Rouge est jouée chaque jour deux fois et demande un constant entretien de ses costumes et de ses plumes,  comme , par exemple, les seize costumes identiques pour les seize Doriss Girls en plumes d’autruche rouges. (Mais il y en tout  soixante danseuses!).Le travail de coloration et de mise en forme d’une plume d’autruche demande un travail de deux jours à trois semaines ! Les plumassières ont toutes été élèves du lycée Octave Feuillet.
C’est une belle maison qui entretient la flamme de ce peuple non migrateur et qui apporte  grâce et légèreté à un pays qui en manque si souvent !

Jean Couturier

www.maisonfevrier.fr  www.patrimoine-vivant.com

Félicité

Félicité d’Olivier Choinière, mise en scène de Frédéric Maragnani.

 

Félicité felicite-dolivier-300x200Heureuse rencontre que celle de Choinière et de Maragnani! Olivier Choinière, enfant terrible de la scène québécoise, n’a pas cessé ,depuis sa première pièce, Le Bain des Raines (96),  de bousculer les normes du théâtre.
Ici encore, il tisse un récit à plusieurs niveaux, porté par Caro, une caissière de grand magasin, qui devenue Oracle (son prénom à l’envers), va, avec l’aide de ses trois collègues de travail, nous transporter dans des univers radicalement opposés.
Ce sont les destins inverses de Céline Dion, icône rayonnante de succès et de maternité et de l’une de ses fans, Isabelle, séquestrée depuis l’enfance par sa famille pour servir d’esclave sexuelle. Ce qui les relie : une lettre écrite depuis son lit d’hôpital par Isabelle  à Céline qui s’apprête à accoucher.
Les quatre récitants seront tour à tour membres du personnel du magasin, et protagonistes de ces deux histoires croisées.
Choinière, qui a puisé aussi bien dans la chronique people que dans le fait divers sordide, procède par tuilages successifs de personnages et de situations. Le metteur en scène, qui affectionne les défis et les expériences textuelles s’est glissé avec habileté et une évidente jubilation dans la forme stratifiée de Félicité.
Une grande table carrée surplombée de  tubes fluo est, tour à tour, comptoir de magasin, lit d’hôpital, cuisine d’Isabelle, appartement de luxe de Céline, et lieu de tous les récits… Anne Benoit est transfigurée par son récit : tout comme la pauvre Caro, qui méprisée de tous, elle accède enfin à la félicité d’un oracle.
Une belle et réjouissante aventure de théâtre à découvrir

Mireille Davidovici

 

Le Tarmac  (ancien T.E.P.)159 avenue Gambetta 75020 Paris  jusqu’au 2 mars


0143448080

www.letarmac.fr

 

A lire : Félicité, Montréal, Montréal, Dramaturges éditeurs et aussi Le Bain des raines, Montréal, Dramaturges éditeurs, Jocelyne en dépression, Montréal, Dramaturges éditeur

Carnages

Carnages, texte et mise en scène de François Cervantès

Carnages carnages_rdl_0348

Les quatre cents places de la Cartonnerie sont  pleines pour la nouvelle création de François Cervantès qui, parallèlement au Prince séquestré, texte intime pour deux artistes égyptiens, (cf. Théâtre du Blog du 18 février) présente aussi Carnages,dans le cadre de Cirque en capitales. Ce temps fort du programme Marseille-Provence 2013- Capitale européenne de la culture met à l’affiche une diversité de spectacles dans ce domaine, car «le cirque réussit cette chimie d’être à la fois un art à la pointe des écritures contemporaines et de rester un grand art vivant qui rassemble tous les publics, toutes les générations».
Cervantès, en tant qu’auteur, illustre bien cette déclaration et sa démarche d’écriture engage sa troupe,
L’Entreprise, dans une belle aventure, celle du plateau : «Au fil des années, j’ai donné plus de responsabilités aux acteurs, car au théâtre, dit-il, c’est la soirée qui est une œuvre, et l’acteur en est le maître de cérémonie». 
Carnages
est «une fête collective, à partir du répertoire des grands clowns du vingtième siècle, Pipo et Rhum, Dario et Bario, les frères Fratellini, à l’époque où ils quittaient les cirques pour entrer dans les music-halls et les théâtres, et où ils avaient une relation prodigieuse avec le public». Sept comédiens (Dominique Chevallier, Nicole Choukroun, Emmanuel Dariès, Anne Gaillard, Catherine Germain, Stephan Pastor et Laurent Ziserman) s’inventent des mondes marginaux, à partir de cette forme théâtrale du clown qu’ils développent au sein de la compagnie, depuis de nombreuses années et où ils excellent . «Le clown est un poète, et même s’il est accompagné, entouré et conseillé pendant la création de ses spectacles, au bout du compte, son acte est absolument personnel et authentique» dit le metteur en scène.

Dans un bel espace de jeu, une ampoule pend,  une grande bassine ronde est au centre, une corde sert à la voltige et aux vols planés, un seau et des gants en caoutchouc passent de mains en mains. « Il y a quelqu’un ? ». On croise certains personnages que l’on identifie car on les connaît, pour les avoir rencontrés dans d’autres spectacles, comme Arletti et sa façon particulière de se mouvoir, ou Zig,  qui ressemble à un garde-champêtre, et qui pétarade comme une moto.

Des tableaux se succèdent, en fondu enchaîné : balais et personnages et ballet en tutu, chorégraphie pour quatre comparses qui,  gentiment, se tabassent. Zig, dont  le  chapeau laisse échapper de la fumée après un court-circuit qui suspend la musique.
Une séquence dans un  ciel habité d’elfes éthérés, avec des  antennes et à la drôle de dégaine, apporte fantaisie et poésie.  «Tu es arrivé chez les dieux» dit avec solennité Arletti, qui porte le rôle titre, celui de Dieu. On se croirait sur la lune. Cérémonial, extravagances, plantes et fumées semées dans ce jardin d’Eden… L’imaginaire est en mouvement. Au ciel, on voudrait des nouvelles de la terre et sur terre, on essaie d’imaginer le ciel!

Autre séquence, de la même veine, onirique, celle d’un garçon tout vert qu’on amène, endormi et roulé dans un tissu. Ronflements et visions l’accompagnent. Son chien ne le quitte pas, faux comme un plumeau au départ, avant apparition de l’animal, un vrai Milou sur quatre pattes. «Comment tu t’appelles?» lui demande -t-on, «Je ne me souviens pas», répond-il. Mimétisme d’une scène  entre un père et son fils adolescent : «Il se fout de tout», comme si on y était. Des ballons fluo s’envolent. Il y a de la féérie dans l’air…

La course-poursuite de l’enfant vert, comme dans une traque, qui sort et ré-apparaît avec une fluidité troublante, se dévoile, quand arrive un second garçon copie conforme et tout aussi vert, dans un jeu de dédoublement. Au final, il neige et, de la grande bassine, sort un jeune homme nu -l’enfant a-t-il grandi?- qui, très naturellement, s’habille et sort. Les lumières baissent et les applaudissements crépitent.
Il y a de l’illusion, de la prestidigitation et de la fantaisie dans ce spectacle, minutieusement écrit mais qui  donne pourtant une sensation de liberté, par son expression ouverte et maîtrisée, déclinée entre réel et imaginaire. La scénographie de François Cervantès,  Christophe Bruyas qui signe aussi les lumières, et  Xavier Brousse créateur du son, participent à l’élaboration d’un paysage dynamique et poétique, dans lequel on se laisse volontiers dériver.

Brigitte Rémer

Théâtre Massalia/Friche la Belle de Mai, La Cartonnerie, Marseille, jusq’au au 23 février .Espace Diamant d’Ajaccio, le 5 mars.  Théâtre de Sartrouville, CDN, du 16 au 19 avril. Grenoble MC2, du 14 au 24 mai. Théâtre National de La Criée, Marseille, les 6 et 7 juin.

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