Le 20 novembre

Le 20 novembre de Lars Norén, traduction de Katrin Ahlgren,  adaptation  et mise en scène de Brigitte Haentjens.

 

Le 20 novembre  novembre20securedownloadCréé en français en 2007 quand  Norén, auteur suédois bien connu, avait  dirigé Anne Tismer au festival de Liège, ce monologue  a vu le jour à Montréal en 2011. C’est l’histoire d’un jeune Allemand, (Christian Lapointe), qui nous lance froidement un défi.Le regard glacial,  un gros sac bourré de tout le nécessaire pour mettre fin aux jours d’une petite communauté d’élèves,  il est là devant nous, nerveux, tendu, inquiet,  avec le regard d’un  fauve, tout à fait  dans le sillage de ces autres êtres profondément troublés (Ingeborg Bachmann et  Sylvia Plath), et dont la vie tragique avait déjà attiré l’attention de la  metteuse en scène montréalaise.
La pièce est inspirée des notes et d’un film postés sur YouTube par  ce  jeune  de 18 ans, peu avant de tuer  élèves et professeurs de son ancienne école. La matière est donc authentique mais Norén explore le  comportement du jeune homme  et essaye de comprendre les causes de cette mise à mort collective qui a choqué le pays tout entier. Le monologue de Norén devient une rencontre en temps réel, entre le public et le jeune homme, une heure avant son geste meurtrier.
Le voici, avec son fusil, gesticulant, hurlant ou parlant plus doucement, quand il affirme : « Il n’y a plus de retour  » « Je ne peux plus vivre parmi vous ». Il estime avoir le droit de  se venger  de cette société bourgeoise qu’il déteste, puisque, selon lui, elle l’a blessé et brûlé. Les explications de sa révolte seraient presque banales. Mais,  grâce à Christian Lapointe, la manière qu’il a de livrer des déclarations confuses met en évidence notre impuissance. Dès que l’acteur  disparait brusquement, c’est la fin, mais le public  ne bouge pas. On ne sait pas s’il faut applaudir ou  s’en aller discrètement.
Il y a, en fait,  dans ce spectacle, une  certaine confusion esthétique. D’abord, la présence  de l’acteur a quelque chose de tellement fort que l’effet de réel est presque parfait, du moins pour ceux qui n‘ont jamais  vu une pièce de Lars Norén, ni  Christian Lapointe. Les spectateurs étaient sidérés par ses envolées délirantes, ses plaintes , sa rage contre un système qui n’a pas permis à un jeune de vivre sa vie librement. Sébastian est un écorché vif qui porte tous les maux de sa génération. Il insiste souvent: « Je ne suis pas nazi « . Mais le poids de l’histoire allemande semble  trop lourd à porter pour cette jeunesse, même après tant d’années.
Curieusement, dans le même souffle, il  développe en effet  un discours xénophobe et raciste,  inspiré de celui des skinheads, pour se réapproprier un passé dont on ne parle plus, pour défier les bien-pensants qui ne veulent pas le voir. Les contradictions sont flagrantes et suffisent à faire comprendre la confusion qui règne dans cette tête,  brûlante de haine,  contre les professeurs, les parents, le système….
Pour le prouver, il menace le public : « Vous allez voir « ,  » Vous allez payer « ,   » Cela suffit maintenant « . Son regard est pénétrant, terrifiant. Il nous fixe des yeux et nous empêche de regarder ailleurs. Sa vengeance a déjà commencé et nous  n’avons pas la possibilité de nous enfuir. Mais le jeu  de Christian Lapointe finit par  tomber dans  une vision  hyperthéâtrale qui neutralise l’effet de réel et change radicalement nos rapports avec cette figure inquiétante. L’horreur de la situation ne nous bouleverse plus et il est évident que l’acteur fait alors semblant.
Sebastian a une  voix d’ange exterminateur :  » Je ne serai pas le dernier », et le voilà visionnaire qui annonce les autres victimes qui suivront. La colère et le délire s’installent. Il saute comme un animal, lèche l’eau dans une assiette comme un chien. Il ouvre la bouche mais sa voix se bloque. Avec un ton de menace à peine voilée,  il invite  des spectateurs à parler: « Vous avez quoi comme voiture?  » Pour qu’ils étalent leurs habitudes de consommation au grand jour, question de leur faire honte et de les punir! Le public est invité à parler mais  on le lui refuse!  Aucun échange en effet entre l’artiste et le public n’est prévu dans le texte: la dictature des institutions  enlève la liberté de parole … Tout n’est que paraître et on  ne peut  plus avancer….
Nous connaissons en effet la suite de l’affaire; nous comprenons les mobiles de son choix de vie. Il n’y a donc plus rien à découvrir et nous avons déjà tout compris. Les gestes du jeune homme, comme ses paroles, deviennent alors  répétitifs,  et le spectacle s’essouffle. Le 20 novembre  commence bien, soutenu par un comédien très solide mais  perd de sa vitalité,  quand il plonge dans un spectaculaire qui s’essouffle.  Captivés  au départ, nous  refusons de nous  laisser prendre à un jeu qui, à la fin,  tourne à vide.
Ce monologue de Norén est  si délicat et fragile qu’il est difficile de prévoir les retombées de la modulation d’un ton de voix, d’un geste, d’un regard, ou d’un effet scénique. Le 20 novembre nécessite une écoute  attentive comme pour Calme de ce  même auteur, que Jean-Louis Martinelli a mis récemment mis en scène au Théâtre Nanterre- Amandiers (voir Le Théâtre du Blog).
Mais Le 20 novembre est  une œuvre forte, et d’une  actualité qui devrait nous faire réfléchir.Norén, négligé au Canada,  devrait y être mieux connu.

Alvina Ruprecht

Théâtre français du Centre national des Arts à Ottawa. du 12 au 16 mars.

 


Un commentaire

  1. pierrot ermite des routes dit :

    Ici Pierrot, ermite des routes

    bravo à votre blogue
    (et vos articles sur les pièces de théâtre de Paris)
    à qui je dédie ma chanson,
    Molière:)))

    MOLIERE

    COUPLET 1

    ca n’me tente pas
    de chanter comme un vieux
    que tout l’Québec tient s’es pilules
    pour mieux le contrôler

    dans un mélange explosif
    d’anti-dépresseurs
    de somnifères
    moé ca m’écoeure

    j’me suis jure d’mourir dans rue
    mème malade même dans la gene
    comme Molière sur la scène

    EN HAUT

    Molière, Molière, Molière
    tu jouais l’malade imaginaire Molière

    t’es mort sous les applaudissements
    moi ce s’ra entre deux océans

    comme cercueil le Canada que j’aime tant
    comme cerceuil le Canada que j’aime tant

    Oh Molière,
    le dieu de ma langue française

    COUPLET 2

    ca n’me tente pas
    de chanter pour un chef d’État
    qui par une guerre s’amuse
    à mieux nous controler

    dans un mélange explosif
    de trop de jeunes soldats qui meurent
    des québécois, moi ca m’ecoeure

    j’me suis juré
    d’crier dans rue
    pour une fois votez du bon bord
    pour sortir nos trop jeunes soldats
    d’la mort

    EN HAUT

    Molière, Molière, Molière
    la guerre c’est rien d’imaginaire
    Molière

    t’es mort sous les aplaudissements
    mais icitte entre deux océans

    y a trop d’cercueils dans mon Québec
    que j’aime tant

    y a trop d’cercueils
    dans mon Québec
    que j’aime tant

    oh Molière
    le Dieu de ma langue française

    COUPLET 3

    ca n’me tente pas
    de chanter comme un vieux
    que tout l’Québec tient s’es pilules
    pour mieux le contrôler

    dans un mélange explosif
    d’une immense colère d’électeur
    parce qu’un malade imaginaire
    cultive la peur

    j’me suis juré d’chanter la rue
    pour que mes mots s’rendent à l’ONU
    au nom de millions d’enfants disparus

    ne suis qu’un vagabond céleste
    loin de la haine et de tout l’reste

    qui trouve les pilules Oh Molière
    comme les bombes dans une guerre

    scandaleuses et obscènes

    Oh Molière
    le Dieu
    de ma langue française
    que j’aime

    Pierrot
    vagabond celeste

    Pierrot est l’auteur de l’Île de l’éternité de l’instant présent et des Chansons de Pierrot. Il fut cofondateur de la boîte à chanson Aux deux Pierrots. Il fut aussi l’un des tous premiers chansonniers du Saint-Vincent, dans le Vieux-Montréal. Pierre Rochette, poète, chansonnier et compositeur, est présentement sur la route, quelque part avec sa guitare, entre ici et ailleurs…

    ——-

    Dans le cadre
    de mon vagabondage poétique
    et numérique,

    permettez-moi de vous faire découvrir
    un conteur international du Québec
    Simon Gauthier,
    fascinant poète-passeur
    de la scène

    peut-être aurez-vous l’occasion
    d’assister à sa prestation

    PARIS

    SIMON GAUTHIER
    CONTEUR INTERNATIONAL DU QUEBEC
    SPECTACLE « LE VAGABOND CELESTE »

    25 MAI 2013,
    21 H À 22H 30
    LE PETIT NEY
    10 AVENUE PORTE-MONTMARTRE

    PARIS

    puis-je aussi me permettre de vous partager
    son courriel du 1ER MARS 2013

    ——–

    Allo Pierrot, je suis en France.
    Je rentre demain au Québec.

    Il fait froid et humide partout, même dans les lieux publics. Il fait gris et un brin de soleil redonnerait du tonus à tout le monde!

    Je voulais te dire que j’ai raconté (ou plutôt) le vagabond céleste est passé et a été entendu
    à Quévin (près de LOrient en Bretagne)
    Il a été entendu à la prison de Béthune (Nord de la France) et pas un prisonnier ne s’est levé durant le spectacle (comme il est de coutume) les
    gardiens mon dit que c’est la première fois qu’ils voyaient ca!)

    et le Vagabond à passé à Lille avec son et éclairage, 3 rappels!
    Les gens sont restés longtemps
    et plusieurs larmes d’espoir brillaient dans le noir.

    Plusieurs messages me sont parvenus pour te dire merci!
    Merci!
    Merci!
    ++++

    Autrement la tournée me rentre dans le corps. Un bon brin de fatigue et de
    grippe à la gorge.
    De bonnes tisanes et des amis pour guérir
    +

    +++
    J’espère que tu vas bien et que ton travail de vulgarisateur âme, société,
    gens et pays oeuvre d’art
    va bien!

    On se voit sous-peu
    en mars, si la vie le veut!
    pour aller plus loin!

    Bonne journée
    Simon :+)

    —–

    REPONSE DE PIERROT
    A SIMON GAUTHIER
    CONTEUR INTERNATIONAL DU QUEBEC

    Cher Simon

    Je te prédis un succès international
    parce que tu es un poète-passeur:)))

    Bravo Simon
    longue vie à ta vie d’artiste
    et de conteur international

    ——–

    JOURNAL LE REFLET DE TADOUSSAC
    VOLUME 7, NUMERO 34
    MERCREDI 29 AOUT 2012

    CRITIQUE

    DÉDÉTORIAL
    LE VAGABOND CELESTE DE SIMON GAUTHIER
    Bien fatigué, j’y suis allé avec la peur de m’endormir.
    Finalement je voulais que ce récit ne puisse finir afin de ne
    pouvoir partir pour continuer mes rêves.
    Quelle prestation! C’est l’histoire inspirée d’un personnage qui
    est passé par Tadoussac et que plusieurs ont eu la chance de
    côtoyer. Dans un premier temps il a séjourné trois semaines
    à l’Eau Berge puis il est revenu pour repartir sur la route de
    ses rêves. C’était un petit «grand homme» à chapeau, barbe
    blanche et guitare en bandoulière qui composait des chansons
    sur les gens rêveurs essayant de réaliser leurs rêves. Plusieurs
    personnages de Tadoussac ont noirci son cahier.
    Son Histoire remonte à plusieurs années alors qu’il était bien
    installé dans le nord de Mtl plus précisément à Val David. Là-bas,
    il avait tout pour être heureux, maison, femme, famille
    et argent……
    Un matin il s’est levé pour annoncer autour de lui qu’il laissait
    tout et partait sans le sous, vivre ses rêves. On a cru à un
    coup de déprime, on a tenté de le retenir mais devant ses
    arguments on a fini par le comprendre et lui souhaiter bonne
    chance dans son rêve. Pendant 5 ans il a fait les quatre coins
    du Québec sans rien demander à personne. Les hasards de
    la vie le guidaient au quotidien. Il attendait qu’on lui offre
    une «raye» pour avancer, sinon il marchait inlassablement.
    Jamais il a demandé à manger ou coucher, c’était… quand on
    l’invitait!
    Simon Gauthier l’a rencontré par le biais de Richard Fontaine
    qui lui aussi à sa façon, vagabondait ici et là avec ses pinceaux
    comme compagnons de route.
    Depuis, selon Simon ce «Vagabond Céleste» a balancé sa
    guitare à la rue pour s’installer dans une petite chambre
    dénudée près de l’Oratoire St Joseph, et il parcours les
    bibliothèques. A date il a à son actif une maîtrise et plusieurs
    doctorats en poche sur le rêve.
    Son nom est Pierrot (mais lequel?) Un monument existe
    encore en son honneur, rue St-Paul dans le bas le la ville de
    Mtl.
    Fondateur des Deux Pierrots dans le vieux, cette
    boite mythique des plus fréquentée encore, est le seul endroit
    qui ait survécu aux Boites à Chansons qui nous ont donné
    nos grands: Claude Léveillé, Vigneault, René Claude, Claude
    Gauthier, Raymond Lévesque, etc
    Si Pierrot en quittant, gloire, succès et argent pour vivre ses
    rêves est un message d’espoir, un baume sur le mal de vivre
    qui nous guette, Simon Gauthier par son spectacle nous a fait
    découvrir quelqu’un de chez nous porteur de bonheur.
    Simon offre à quiconque veut découvrir plus intimement
    ce personnage, de venir dans vos maisons, vos salons, vos
    verrières vous présenter cet être lumineux.
    Est-ce le présage que notre conteur national se prépare à
    parcourir les routes du monde avec dans son pack sac Pierrot
    le Vagabond Céleste disposé à vous faire du bien à l’âme et
    vous brasser les idées?

    L’OPINION D’UNE SIMPLE SPECTATRICE
    Bien sûr, l’avoir croisé à Natashquan au moment même
    où il rencontrait celui qui serait le personnage principal
    de son conte a ajouté beaucoup de magie au voyage
    onirique dans lequel m’a emporté Simon Gauthier ce
    mercredi¸15 août 2012 à Tadoussac.
    Pourtant, cela n’est pas nécessaire car le Vagabond
    Céleste transporte n’importe quel spectateur sans que
    celui-ci ne sourcille un instant, car nous apparaissent au
    travers de la voix du raconteur et de celle du musicien qui
    l’accompagne, Benoit Rolland, de «sacrés personnages»,
    au sens de personnes extraordinaires, dont on aime tirer
    exemple, car elles nous aident à vivre mieux.
    Lors de cette envolée entre réalité et rêve, entre un
    village et l’univers, entre ce que l’on est et ce que l’on
    voudrait être, on sourit, on rit parfois, on pleure même…
    Mais surtout, on touche du bout des doigts l’essence
    même de la vie: l’amour universel.
    Hier soir, mon esprit a grandi de cette bouleversante
    rencontre avec la vie d’un homme merveilleusement
    mise en mots par Simon Gauthier, et je souhaite qu’il en soit
    de même pour vous

    http://WWW.SIMONGAUTHIER.COM

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