Ugzu.

Ugzu. p127987_3Ugzu de et avec Jean-Claude Leguay, Christine Murillo, Grégoire Oestermann.

Ugzu. Qu’est-ce que c’est ? Une tribu des îles Marquises, un oiseau rare, une maladie ? Ne cherchez pas plus loin, c’est tout simplement une «urne dont on ne sait pas quoi faire une fois les cendres dispersées». Un tracas de plus qui frappe nos trois compères et dont il veut mieux rire ensemble. Un rire de connivence car qui n’a pas connu certains de leurs déboires ?
Après Xu(objet bien rangé mais où ?) et Oxu (objet qu’on vient de retrouver et qu’on reperd aussitôt), Christine, Jean-Claude et Grégoire,  poursuivent leur recherche sémantique pour les petits maux qui n’ont pas encore de mots. Cette fois, ils traquent les « petits bonheurs » à baptiser. Mais attention : un petit bonheur c’est un tracas qui se repose.  Par exemple : « Quel est votre dernier pire meilleur souvenir ? « Les réponses fusent : « J’ai avalé la fève pour échapper à la couronne des rois. » Le plaisir a toujours son envers ,ainsi : « une vue splendide qui ne donne rien sur la photo ».

Construit comme une séance de travail, le spectacle se déploie dans un décor de bric et de broc: chaises bricolées  et de toute taille qu’on trimballe,  espèce de loupe géante, qui se déplace tel un travelling, comme pour scruter le monde. Entre une Christine Murillo facétieuse et autoritaire, un Jean-Claude Leguay mi-amer, mi- désabusé et un Grégoire Oestermann rêveur et imprévisible, difficile parfois de se construire un lexique commun et de trouver le diapason…
Bon an mal an, ils parviennent pourtant  à se mettre d’accord. Et tout finira par des chansons! Ceux qui ont suivi l’aventure du trio depuis ses débuts ne retrouveront peut-être pas la légèreté des premiers spectacles, mais on aura plaisir à suivre cette chasse aux mots jubilatoire.

Mireille Davidovici

Théâtre du Rond-Point  jusqu’au 30 juin.  T :  01 44 95 98 21.
www.theatredurondpoint.fr

A lire : Le Baleinié volume 4. Dictionnaire des tracas et des petits bonheurs, éditions Points. Le Baleinié l’intégrale, éditions Points
A voir : le DVD  Xu, éditions Copat


Archive pour 26 mai, 2013

la nouvelle saison du théâtre de la ville

La nouvelle saison du Théâtre de la Ville.

la nouvelle saison du théâtre de la ville photo-1Rituel du mois de juin: Le Théâtre de la Ville convie ses chers  critiques à sa conférence de presse annuelle. La présidente,  Dominique Alduy souligne la bonne santé du paquebot qui s’est promené cette année à Londres, aux Etats-Unis avec son Rhinocéros Victor ou les enfants au pouvoir ira  ainsi à Lisbonne et en Corée, Rhinocéros un peu partout en France mais aussi en Argentine et au Chili. Mais il est aussi le seul théâtre parisien à  accueillir autant de compagnies et de  spectacles étrangers.
 Emmanuel Demarcy-Motta,  qui va entamer sa cinquième saison  comme directeur, et  à qui on donne toujours vingt cinq ans,  souligne que dans les trois domaines Théâtre/ Danse/ Musique, il a en tout 100 programmes: 26 pour le théâtre et autant pour  la danse; 27 pour les musiques du monde et  13 pour le domaine classique pour une jauge d’environ 300.000 places sur les deux sites et ceux des théâtres partenaires comme le 104, Le Théâtre de la Cité internationale, Le Grand-Parquet, le Monfort et  cette année,  Le Nouveau théâtre de Montreuil. Avec une ouverture de septembre à juillet, y compris pendant les vacances scolaires, ce qui paraît normal mais qui devient presque exceptionnel  dans le paysage théâtral parisien.
 Ce qui, en ce ces périodes de vaches plutôt maigres, implique,  dit Emmanuel Demarcy-Motta,  une vigilance de tous les instants quant aux dépenses.  Et il a insisté sur l’importance d’une rigueur économique dans chaque secteur, s’il veut pouvoir continuer à co-produire autant de créations et programmer autant de tournées. Mais il y aussi, rappelle-t-il- le théâtre a vieilli!- et des travaux importants sont à prévoir , que  soit  pour  le proscenium bien  fatigué  ou  les loges d’artistes… Rançon d’un usage intensif!
 Ce sera aussi  la troisième édition du Parcours enfance et jeunesse,  avec l’aide des théâtre partenaires parisiens, soit neuf spectacles en danse, cinéma, théâtre,  et dès la rentrée 2013, dans le cadre de la réforme des rythmes éducatifs,  le Théâtre de la Ville proposera aussi , entre autres, des ateliers de pratique aux enfants et des séances de découverte des lieux de création.C’est-dit-il- d’une importance capitale de continuer un combat qu’avait initié Vitez à Chaillot puis Olivier Py à l’Odéon, en mettant aussi l’accent sur des spectacles en langue étrangère ,comme ce sera le cas cette saison avec, notamment, Peter Pan mis en scène par Bob Wilson.
Emmanuel Demarcy-Motta a aussi dit la nécessité qu’il y avait à penser l’activité de son théâtre en termes européens et sur la nécessité de faire sonner haut et fort la langue française chez nos voisins les plus proches, à commencer par l’Italie ou le Portugal qui sera cette année,  un partenaire privilégié.
Du côté de la programmation, que du solide!   Avec des metteurs en scène étrangers comme Christoph Marthaler, et surtout  Bob Wilson avec quatre spectacles:Living rooms au Musée du Louvre,   Peter Pan déjà évoqué plus haut, The Old Woman d’après Danill Harms en collaboration avec Mikail Baryshinikov et, enfin  la  reprise du mythique Einstein on the beach  créé il y a presque quarante ans déjà!
Thomas Ostermeier    viendra avec  Mort à Venise d’après Thomas Mann et Un ennemi du peuple de son cher Ibsen que le directeur de la Schaubühne continue à interroger. Et ,à voir absolument parce qu’il y a bien longtemps qu’on ne les avait pas vues: les très fameuses marionnettes du bunraku japonais mise en scène  par le photographe Hiroshi Sugimoto d’après  Double suicide à Sonezaki,  une œuvre de l’immense auteur et théoricien du 17 ème siècle, Chikamatu Monsaemon. Ne les ratez surtout pas!
Chez les Français, on ne  peut tout citer mais il y aura la reprise de Rhinocéros et l’excellent petit Ionesco suite, mise en scène par le patron ( voir le Théâtre du Blog) , ainsi que  Le Faiseur  cette pièce peu connue, et très noire, d’Honoré de Balzac .  La création par Eric Lacascade  d’une  des pièces les plus fortes de Techkov: Oncle Vania, et enfin Le Roi Lear; mise en scène de Christian Schiaretti.
Et enfin deux Corneille peu connues et jamais jouées, La Mort de Pompée et Sophonisbe,  mises en scène de Brigitte Jaques-Wajeman qui a, avec Corneille une vieille complicité et  qu’on pourra découvrir, même si elles ne sont pas de la veine du Cid…

Côté danse, notre ami Jean Couturier se prépare avec délectation à aller voir la  reprise de plusieurs spectacles des grandes dames de la danse contemporaine  qui se ont enfuies  il y a trois ans et cette année: Pina Bausch avec le fameux Palermo, Palermo et Trisha Brown avec deux programmes.
Mais il y aura aussi Anne Teresa de Keersmaeker, Jérôme Bel, et nombre de chorégraphes moins connus,  français comme étrangers. Tout se passe comme si l’innovation- même si c’est souvent les mêmes noms qui reviennent là aussi- était quand même plus évidente pour la danse dont les programmes attirent toujours les fans , que pour le théâtre,abonné, lui, aux valeurs sûres, quel que soit le type de création. Mais comment faire autrement si l’on veut équilibrer les finances tout en maintenant des pris de billets raisonnables? Elémentaire,  mon cher Wilson, dont on peut être sûr  que les   billets  hors abonnement pour ses spectacles partiront en quelques heures… Ce qui n’est pas  souvent  le cas  à  Chaillot,  pourtant doté d’une  riche programmation.
Reste, qu’on le veuille ou non, la nette impression que les programmes des institutions parisiennes, voire de banlieue, comme le Théâtre des Amandiers de Nanterre,  ont de plus en plus tendance à se ressembler. Et l’équation de la réussite: metteur en scène des plus connus étrangers ou français et/ou pièce connue ou ,du moins d’auteur connu, avec des comédiens renommés  voire célèbres,   n’ aura  jamais été aussi pratiquée. Mais au moins,  et on le dit pas assez ,Emmanuel Demarcy-Motta  sait s’entourer d’une bande  de  bons acteurs fidèles  qui ressemble de plus en plus à une véritable troupe, les emmener en tournée en France et à l’étranger.  Ce qui donne une véritable solidité à une grande maison…

Côté musique, pourquoi changer une formule qui a fait ses preuves depuis quarante ans avec un savant équilibre entre  de merveilleuses musiques du monde qui ont toujours des inconditionnels et des concerts de musique classique.
Bref, Emmanuel Demarcy-Motta a  raison de ne pas avoir trop d’inquiétudes:i l sait visiblement anticiper et le paquebot, doté d’une  équipe efficace, suit sa route… Il a rappelé la phrase que Jean-Louis Barrault  avait emprunté à Paul Valéry: « Barboter dans ce que l’on ignore au moyen de ce que l’on sait, c’est divin ».

Philippe du Vignal

L’Après-midi d’un faune

L’Après-midi d’un faune chorégraphie de Nijinski, Afternoon of a Faun,  chorégraphie de Jerome Robbins, L’Oiseau de feu chorégraphie de Maurice Béjart, Boléro, chorégraphie de Sidi Larbi Cherkaoui et Damien Jalet sur une scénographie de Marina Abramovic.

L’Après-midi d’un faune  12-13-bol-006« M.  Nijinski, auteur du thème pittoresque de la chorégraphie et titulaire du rôle principal, méritait amplement l’honneur que vient de lui faire l’auteur de l’Après-midi d’un faune. Car, quoique à mon sens fondée sur une erreur de principe (la stylisation de la chorégraphie rejoignant non point le modèle naturel du geste humain, mais l’autre stylisation, des figures inscrites sur les vases grecs ou bien les bas-reliefs), la manière dont M.Nijinski interpréta plastiquement cette pièce m’avait paru riche de promesse et digne de toute sympathie pour ce qu’elle représentait de savoir, de conscience artistique et d’ingéniosité », écrivait un critique inspiré dans la revue Comœdia Illustré en 1913,  suite à la création de ce spectacle en 12,  d’abord au théâtre du Châtelet puis à l’Opéra de Paris de ce spectacle, sur une musique de Debussy,  avec des décors et costumes de Léon Bakst.
Depuis, cette version historique n’a cessé de rencontrer un succès public, et avec raison. En complément,  nous découvrons avec Afternoon of a Faun, la vision de Jerome Robbins, directeur  avec Balanchine du New York City ballet.  Ici le décor mythologique  est un studio de danse,  où on retrouve un très beau duo, empreint  de grâce et de sensualité. Il fait face au public qui représente un miroir virtuel de studio de répétition.
La soirée débute par L’Oiseau de feu,  chorégraphie de Maurice Béjart et musique d’Igor Stravinsky. Béjart  transporte cet autre succès des fameux Ballets russes-créé en 1910 à l’Opéra-dans les années soixante-dix: le mythe de la révolution idéale est symbolisé par le rouge des costumes et  celui du soleil. Béjart  disait: « L’Oiseau de feu est le Phénix qui renaît de ses cendres. Le poète, comme le révolutionnaire,  est un oiseau de feu». Ici, remarquablement dansé par Mathias Heymann.
Le  plus attendu: Le Boléro de Ravel, fruit de la collaboration de  Sidi Larbi Cherkaoui , Damien Jalet et  Marina Abramovic, performeuse et scénographe,  qui a conçu un grand miroir, en fond de scène, dédoublant les silhouettes des danseurs et permettant au public de voir les projections au sol. Les costumes sont de Riccardo Tisci, directeur artistique de Givenchy: des collants aux squelettes stylisés moulant le corps des  interprètes  qui font disparaître les différences physiques entre les deux sexes et qui nous donnent  à voir un bal de spectres envoûtants. Les mouvements circulaires des danseurs-dont Aurélie Dupont et Marie-Agnès Gillot-obéissent à une  cinétique très précise,  remarquable de précision.
Cette création d’une grande beauté a emporté l’enthousiasme des spectateurs et le nôtre.

Jean Couturier

Opéra de Paris, Palais Garnier jusqu’au 3 juin.

l’odeur des planches de Samira Sédira

L’Odeur des Planches de Samira Sédira.

l'odeur des planches de Samira Sédira dans analyse de livre 31tou1tydsl._sl160_  Formée  à l’école de Saint-Étienne, elle a joué au Théâtre de la Colline, au T.N.P. de Villeurbanne, au Théâtre National de Strasbourg, etc… mais   puis peu à peu, les contrats se sont arrêtés… Et, comme il faut bien vivre, Samira Sédira fait des ménages, vit la fatigue et l’humiliation de devoir pénétrer  chez des inconnus, de nettoyer leurs toilettes, de ramasser leur linge sale.
Dans son livre,  elle met en parallèle son
histoire, celle de ses parents avec sa rencontre avec le théâtre et son besoin de créer. Grâce à une amie, elle avait découvert  le théâtre à l’université;  ses premiers mots sur scènes sont ceux du Roi Lear : »Je ne sais plus quels étaient ces mots, mais je reste à jamais marquée par le silence de mes partenaires, leur incroyable écoute, si dense. Une émotion fiévreuse avait jailli de moi, comme si je n’avais pas parlé depuis des années (…) Alors sous les regards médusés et l’éclairage artificiel que j’absorbais par tous les pores de ma peau, j’ai laissé venir les larmes, la douce, la profonde montée des larmes, des sanglots longs qui venaient de loin.
« J’étais devenue lumière, je me sentais riche, enfin, et cette richesse me servirait tout au long de ma vie. J’avais le pouvoir »
Ses parents n’ont pas tout de suite compris quel était ce métier, cette voie qu’elle choisissait mais ils l’ont soutenue et tout se passait bien dans ce qu’elle croyait être « la grande famille du théâtre ». Quand elle n’a  plus de  travail, elle se renferme, ne sort plus et reste discrète sur son travail. « S’il m’arrive de croiser quelqu’un que je connais, je préfère dire que je ne fais rien pour l’instant, plutôt que d’avouer que je fais des ménages. Ou alors,  je mens, je m’invente des projets, je dis que je donne des cours de théâtre, à des enfants, dans les écoles, je raconte n’importe quoi »
Avec les Tchehkov, elle dit souvent qu’elle « a mal à Platonov », des mots qu’elle comprend parfaitement dans sa situation, quand il devient difficile de s’apprécier et  de vivre avec soi. Mais Samira Sédira se dit qu’elle doit faire quelque chose, elle a cette qualité qu’ont les créateurs, la capacité d’utiliser les arts pour éviter un trop plein, pour partager aussi. Ce qu’elle fait dans ce livre, qui n’est absolument pas porteur de ressentiment, et n’est pas là pour  montrer son c.v. et retrouver des contrats.
C’est simplement une confession courageuse, douce et sincère, crue quand il le faut. Et il n’est pas question que de théâtre: sa vie familiale s’imbrique au fur et à mesure du récit. Elle crée des rapprochements avec sa mère, fil rouge de cette histoire, cette mère, qui a fait un  mariage arrangé avec  son père, sans amour.  Samira Sédira, elle, est consciente de la chance de ne pas avoir eu à subir tout ça, ni le déracinement qu’a vécu sa mère…
Un récit bouleversant où il est question de théâtre et de création, une belle démonstration de courage et d’opiniâtreté. On a beaucoup de plaisir à la lire, et on espère  revoir très vite Samira Sédira sur une scène. Si le théâtre, provisoirement, ne l’aime plus, elle prouve ici son besoin de vivre au théâtre.

Julien Barsan

Editions La Brune au Rouergue 16€


p3230549 dans analyse de livre

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