Le Pouvoir des folies théâtrales de Jan fabre

Le Pouvoir des folies théâtrales de Jan fabre de-macht.-2012-1

 

Festival d’Avignon: Le pouvoir des folies théâtrales conception, mise en scène, scénographie, chorégraphie et lumière de  Jan Fabre.

 

  Jan Fabre, qui fut « artiste associé »du festival en 2005, revient avec une pièce qui date de… 1984: créateur polymorphe, formé à l’Académie des Beaux-Arts d’Anvers, il s’est défini comme «un guerrier de la beauté». Il est connu pour ses multiples provocations artistiques-dont l’érection de sa propre statue dorée qui avait beaucoup irrité les habitants d’Avignon, au point d’être plusieurs fois endommagée, (elle est aujourd’hui à l’abri à l’Ecole d’Art).
Il reprend ici  une de ses créations-marathon de 4 h 30 qui est  sans  doute  la plus ambitieuse et la plus emblématique de son œuvre. La salle  à l’italienne de l’Opéra-Théâtre convient à merveille à Jan Fabre qui veut dénoncer ici les fastes et les dorures du théâtre bourgeois du XIXème siècle. Il évoque l’histoire du théâtre avec la création en 1876 de L’Anneau du Nibelung de Wagner qui,  pour la première fois, fit éteindre la lumière de la salle durant une représentation, donnant alors à l’objet scénique  une vraie dimension esthétique.
  Il évoque aussi Les Habits neufs de l’empereur, un conte d’Andersen qui y dénonçait le mensonge du paraître au travers d’un personnage nu mais détenteur du pouvoir. Ultime référence historique- mentionnée à la fin comme au début du spectacle : une femme, fessée violemment,  énonce : «1982 , c’est du théâtre comme c’est à espérer et à prévoir». 1982, c’était aussi  l’année  de la première création scénique majeure de Jan Fabre à Bruxelles…
Pour lui,  «faire du théâtre,  c’est faire de l’expérimentation sur scène». Il choisit donc de  créer de l’art et de la beauté selon ses propres critères, en mêlant  nudité et cruauté, grotesque et beauté.
Durant ces longues heures,
Jan fabre multiplie les références  musicales: Richard Wagner, Richard Strauss ou Wim Mertens, ou picturales avec de  nombreuses toiles peintes-dont, à la fin, Le Verrou de Fragonard- qui sont projetées en fond de scène. Ses danseurs,  ou plutôt ses performeurs,  qu’il a collectionné  au cours de ses différentes créations,  sont les véritables moteurs visuels de cette succession de tableaux.
 C’est grâce à eux que cette reprise du spectacle maintient le public en éveil…mais difficilement ! De nombreux spectateurs n’ont  pas résisté en effet à cette succession de scènes, qui évoquent les  grandes œuvres de la danse ou du théâtre., et se sont enfuis discrètement après deux heures de spectacle…
 Mais Jan Fabre a ses partisans,  et la partie du public qui restée jusqu’au bout était  comme hypnotisée par le pouvoir de ses images. Celui qui se définit comme un mystique contemporain,  nous montre à quel point la beauté est fragile. Pour lui,  « c’est comme un papillon,  quand vous le touchez , vous le détruisez». Reste à savoir si, durant sa carrière , il n’a pas détruit aussi quelques-uns de ses danseurs,  symboles de beauté !  

Jean Couturier

Opéra-Théâtre, spectacle joué les 15 et 16 juillet.


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Archive pour 17 juillet, 2013

Festival d’Avignon: Je suis/Tu es/Calamity Jane

Festival d’Avignon: Je suis/ Tu es/ Calamity Jane, texte et mise en scène de  Nadia Xerri-L.

 

Festival d'Avignon: Je suis/Tu es/Calamity Jane 82-img_4484Une jeune fille un peu seule et réfugiée dans ses livres se passionne pour Calamity Jane. Elle se met sur son chemin  et stoppe la route de Calamity qui fendait l’air au volant de sa petite autobianchi rouge figée sur la scène et qui  nous regarde de ses deux phares. Calamity Jane, chapeau vissé sur les yeux, revient pour mourir, et n’a donc  aucune envie de faire la conversation et d’alimenter les délires d’une  fan .
Elle se montre bourrue et peu encline 
à accueillir la jeune fille. Elles font quand même un bout de route ensemble. Quand la jeune fille tourne la radio qui diffusait de la country et qu’elle tombe sur le tube italien guimauve La Solitudine, elles se mettent à chanter toutes les deux à tue-tête. C’est là le début d’un rapprochement… qui ne se fera pas facilement.
 Road movie théâtral donc fixe, impliquant un espace restreint où les deux femmes vont cohabiter et  apprendre à se connaître, cela se passe  dans une ambiance sonore de  cigales et de chouettes, quand ce ne sont pas des  coyotes ou des loups.
Leçon de tir au revolver, initiation au poker, Calamity Jane endosse finalement le rôle de la mère, ou du moins de celle qui  va transmettre ce qu’elle sait de la vie. Elle commence par se livrer un peu et nous apprend que sa vie à elle,  rêvée par  la jeune fille, est loin d’être enviable  et truffée de mensonges peu glorieux.
Avec ce spectacle qui peut jouer quasiment partout, Nadia Xerri-L revendique la construction en deux volets de chacune de ses  créations : une pièce qui se joue sur un plateau  de théâtre et «une petite forme attenante jouée  sur les territoires ». Auteur de ses textes, elle s’applique à ce que chaque forme puisse  fonctionner indépendamment de l’autre. La  petite forme existe donc par elle-même et  pas seulement  en avant-goût  qui aurait pour but de nous convaincre de voir la grande.
Vanille Fiaux -la jeune fille- et Clara Pirali-Calamity, sont très convaincantes malgré  l’espace  réduit où elles évoluent (dans et autour de la voiture). On est pourtant avec elles le long des grandes plaines américaines et on imagine bien les néons crépitants des motels au bord des routes. La mise  en scène, calme subtile,  nous permet de nous plonger dans cet univers féminin empreint de non-dits et de concessions.

Julien Barsan


La Manufacture jusqu’au 27 Juillet

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