Les Clowns
Les Clowns texte et mis en scène de François Cervantès.
Catherine Germain en Arletti, petite bonne femme à la voix acidulée, Bonaventure Gacon en Boudu, fruste et ronchon et Dominique Chevallier en Zig, lunaire et hypersensible, font les clowns. Trois façons d’être au monde : «Boudu, c’est la grotte où il se terre ; Zig, appartient plus à l’espace des rêves, Arletti est plus liée à l’espace du théâtre», spécifie François Cervantès.
L’auteur-metteur en scène orchestre ces trois univers. Ils se croisent, se heurtent, se disputent ou s’accordent, dans un mouvement perpétuel pour le plus grand plaisir du public. A cours d’idée et de texte, les voilà qui dénichent dans un coin du théâtre King Lear. Arletti propose à ses acolytes de jouer la pièce : elle dirige les opérations et elle interprète le vieux roi. Zig sera un mixte des deux méchantes filles aînées et Boudu, la douce Cordelia.
Le texte est tout aussi concis que la distribution mais va à l’essentiel et décape la fable. Cervantès traduit Shakespeare en langue clown : ça se passe «en Angleterre, il y a très longtemps. Il y avait des bêtes et les gens, ils avaient les chocottes, ils restaient enfermés chez eux et ils claquaient des dents. »
Les régisseurs auront tôt fait de construire la muraille du château en cartons d’emballage, derrière laquelle s’enferme la mauvaise fille après avoir chassé son père. Lear erre dans la lande et parmi le public, sous les clameurs de l’orage. « Tu sais que ta sœur m’a fait du mal, bousille la», ordonne-t-il à Cordélia. Celle-ci attaque le château, juchée sur patins à roulettes … « On est mort, faut plus bouger, c’est fini, musique ! » annonce Lear-Arletti.
Les clowns, évoluent dans un monde parallèle au notre, où l’individu est pulsion, sentiment brut. Ils prennent les mots au pied de la lettre, les choses à cœur, et flirtent de cette la manière avec la philosophie.
François Cervantès écrit qu’ils sont « des poèmes sur pattes », des «livres de chair» et à ce titre privilégie autant le travail corporel que le texte. Pour la plus grande jubilation des spectateurs qui ne boudent pas leur plaisir, d’autant que le spectacle est non seulement drôle mais pétillant d’intelligence. On peut aussi y amener les enfants.
Mireille Davidovici
Théâtre de la Cité Internationale : 17 boulevard Jourdan 75014 jusqu’au 3 août à 20h30 ; dimanche 17 h Festival Paris quartier d’été 2013 Tél : 01 44 94 98 01 et Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon du 3 au 7 décembre.