Festival d’Avignon: Je suis/Tu es/Calamity Jane

Festival d’Avignon: Je suis/ Tu es/ Calamity Jane, texte et mise en scène de  Nadia Xerri-L.

 

Festival d'Avignon: Je suis/Tu es/Calamity Jane 82-img_4484Une jeune fille un peu seule et réfugiée dans ses livres se passionne pour Calamity Jane. Elle se met sur son chemin  et stoppe la route de Calamity qui fendait l’air au volant de sa petite autobianchi rouge figée sur la scène et qui  nous regarde de ses deux phares. Calamity Jane, chapeau vissé sur les yeux, revient pour mourir, et n’a donc  aucune envie de faire la conversation et d’alimenter les délires d’une  fan .
Elle se montre bourrue et peu encline 
à accueillir la jeune fille. Elles font quand même un bout de route ensemble. Quand la jeune fille tourne la radio qui diffusait de la country et qu’elle tombe sur le tube italien guimauve La Solitudine, elles se mettent à chanter toutes les deux à tue-tête. C’est là le début d’un rapprochement… qui ne se fera pas facilement.
 Road movie théâtral donc fixe, impliquant un espace restreint où les deux femmes vont cohabiter et  apprendre à se connaître, cela se passe  dans une ambiance sonore de  cigales et de chouettes, quand ce ne sont pas des  coyotes ou des loups.
Leçon de tir au revolver, initiation au poker, Calamity Jane endosse finalement le rôle de la mère, ou du moins de celle qui  va transmettre ce qu’elle sait de la vie. Elle commence par se livrer un peu et nous apprend que sa vie à elle,  rêvée par  la jeune fille, est loin d’être enviable  et truffée de mensonges peu glorieux.
Avec ce spectacle qui peut jouer quasiment partout, Nadia Xerri-L revendique la construction en deux volets de chacune de ses  créations : une pièce qui se joue sur un plateau  de théâtre et «une petite forme attenante jouée  sur les territoires ». Auteur de ses textes, elle s’applique à ce que chaque forme puisse  fonctionner indépendamment de l’autre. La  petite forme existe donc par elle-même et  pas seulement  en avant-goût  qui aurait pour but de nous convaincre de voir la grande.
Vanille Fiaux -la jeune fille- et Clara Pirali-Calamity, sont très convaincantes malgré  l’espace  réduit où elles évoluent (dans et autour de la voiture). On est pourtant avec elles le long des grandes plaines américaines et on imagine bien les néons crépitants des motels au bord des routes. La mise  en scène, calme subtile,  nous permet de nous plonger dans cet univers féminin empreint de non-dits et de concessions.

Julien Barsan


La Manufacture jusqu’au 27 Juillet


Archive pour juillet, 2013

Camping complet

Camping complet,  conception de Christophe Piret

Camping complet dioudioubero

Depuis 2002 le Théâtre de Chambre s’est installé au 232U à Aulnoye Aymeries, ancienne usine de construction ferroviaire, du nom de la dernière locomotive qui y a été fabriquée. Sa « bande de rêveurs qui réalisent des choses », dispose d’un lieu rénové  qui leur permet d’ouvrir leurs portes aux  voisins, avec des ateliers hebdomadaires et  des rendez-vous chez les habitants. Ils accueillent pendant leurs tournées d’autres équipes qui peuvent y répéter.
Depuis trois ans, le Théâtre de Chambre travaille à la Corrouze, nouveau quartier de Rennes qui s’édifie dans un ancien camp militaire, immense et boisé, qui accueillera, à terme, quelque 10.000 habitants. Une cinquantaine de personnes, artistes et habitants du Nord venus avec la troupe, participe à ce Camping complet qui peut mobiliser le public pendant six  heures.
Nous sommes guidés dans le dédale du chantier par un guide bénévole, notre groupe de six  personnes suivait la pancarte 13. On nous fait prendre l’ascenseur, pénétrer dans un appartement où une jeune femme peintre nous raconte sa vie devant ses oeuvres. Elle a vécu sa jeunesse en Afrique, en est partie, puis revenue, s’est installée dans ce nouveau quartier où elle ne sait si elle sera capable d’y rester. Elle nous offre à boire, il y a un mélange troublant entre le rêve et la réalité, on ne sait s’il s’agit de théâtre ou de la vraie vie…
Nous suivons ensuite notre guide à travers bois, le lieu est beaucoup plus grand que la Cartoucherie de Vincennes, jusqu’à un recoin où un homme tient son cheval par le licol, il le caresse avec affection et nous raconte sa vie dans une ferme d’où sa famille a été expropriée. Il évoque la brutalité de son père, le silence de sa mère, son installation dans une ferme plus petite, parce que leurs terres vont servir d’espace pour bâtir la métropole. Il va quitter sa ferme mais  ne sait où il ira. Lui aussi,  nous offre à boire.
Dernière station dans le sous-sol d’une grande banque, laquelle ? Il y a un couple, guitariste et chanteuse, années 70. Elle évoque en français les transformations inéluctables, chante en anglais, puis on nous ramène dans l’immense halle peuplée de caravanes où l’on peut boire et déguster des crêpes,  bretonnes forcément.
Puis nous sommes conviés à nous rassembler tous autour d’une grande tour métallique pour voir Blue Pillow, une synthèse de toutes ces rencontres… Une coupure d’électricité, rapidement rétablie, a dispersé la foule qui se rassemblait, nous avons heureusement retrouvé un tabouret pour regarder ces histoires de voisinages, long poème rock and roll porté par cinq  artistes performers, plutôt courageux, acrobates poétiques, nageurs d’aquarium, sur des musiques de Benjamin Delvalle, Gaël Desbois, Emmanuelle Destremau. 


Edith Rappoport

La Courrouze – Rennes (35)

http://www.theatredechambre.com.

Symphoca Princess Bari- The World

Symphoca Princess Bari- The World,  chorégraphie d’Eun-Me Ahn,

Symphoca Princess Bari- The World 8309_img1Devenu opéra pop, spectacle total mêlant théâtre, chant et danse (Symphoca) sous la direction de la chorégraphe Eun-Me Ahn, l’épopée millénaire de la Princesse Bari a fait l’objet dans son pays d‘origine de nombreux romans, mangas, adaptations pour la jeunesse.
Les Coréens possèdent donc  tous les codes de ce conte chamanique. Le spectateur occidental, lui, devra se contenter d’en décrypter le sens, sans tout comprendre. Peu importe, tant le spectacle fonctionne sur une énergie et des images fortes, musique, costumes et lumières à l’appui.
A partir de là,  on se raconte ce qu’on veut et surtout,  on se laisse submerger par le mouvement continuel qui règne sur le plateau de ce  théâtre éphémère. En fond de scène, l’orchestre mêle instruments traditionnels et contemporains ; il appuie l’action de ses percussions, vibrations du zheng et stridences du erhu et de la flûte. Musique lancinante et répétitive aux accents contemporains et anciens dont les variations rythmiques et modales marquent les tableaux successifs.
Le dispositif scénique distingue deux niveaux, figurant la hiérarchie prévalant en ce bas monde. Hiérarchie constamment bousculée par Eun-Me Ahn, qui  se joue de l’identité sexuelle des danseurs, mélange les genres et confie le rôle de la princesse à un homme.
En haut, les grands de ce monde : le roi, la reine, la princesse, le prêtre… figures hiératiques figées auxquelles le chant pansori sied particulièrement puisque cet art du récit chanté accompagnaient, à l’origine, les chamans : d’où son côté mystérieux et inhumain.
En bas,  s’agite le peuple : serviteurs, paysans, pêcheurs côtoyés par les esprits peuplant les eaux et les bois avec  un chœur de danseurs bondissant sautillant, pirouettant. Dans un grand déploiement de couleurs et de costumes, les tableaux s’enchaînent sans répit,  déclinant les périls que la princesse affronte à la suite de sa répudiation par le roi son père : diablotins en robes à pois fluo, sorciers montés sur talons aiguilles, monstres concupiscents, serviteurs du temple gantés de caoutchouc rose, démons flottant dans le plus simple appareil, voyous en scooter vrombissant…
Si l’on ne craint pas le dépaysement, on se laissera totalement séduire par ce spectacle flamboyant, en regrettant un peu de rester à la surface des choses,  faute de clefs pour aller au plus intime de la fable, que nous laissent entrevoir de purs moments de poésie, comme celui où une  ombrelle rouge est abandonnée au gré des vents.
C’est toujours un bonheur de découvrir de nouveaux artistes, même si Eun-Me Ahn n’est pas inconnue au bataillon, puisqu’elle a œuvré à New York, a été l’invitée de Pina Bausch à Wuppertal, et présenté ses spectacles dans de nombreux festivals. On espère que sa première apparition en France ne sera pas la dernière.

Mireille Davidovici

 

Théâtre éphémère du Palais Royal à 20h 30 jusqu’au 18 juillet.

Festival Paris quartier d’été 2013

Tél : 01 44 94 98 01


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Festival d’Avignon: Yvonne, Princesse de Bourgogne

 Festival d'Avignon: Yvonne, Princesse  de Bourgogne  yvonne_3dominique-valles

Yvonne, princesse de Bourgogne de Witold Gombrowicz, mise en scène d’Anne Barbot

Yvonne, est une jeune fille que le prince Philippe, héritier du trône,  introduit à la cour de Bourgogne. Sans beaucoup d’attraits, elle a tout pour plaire:  à la fois, agaçante, timide, apeurée, en proie à un mutisme insupportable. Mais  le jeune  prince ne veut pas obéir à l’usage qui le contraindrait à n’aimer que les belles jeunes filles séduisantes.  Et il choisira Yvonne comme fiancée.
Introduite à la cour royale,  Yvonne, malgré son mutisme, est bien là et devient une sorte de bouc émissaire. « Un facteur de décomposition, dit Gombrowicz,. La  présence muette, apeurée, de ses multiples carences révèle à chacun,  ses propres failles, ses propres vices, ses propres saletés… La Cour n’est pas longue à se transformer en une couveuse de monstres. Et chacun de ces monstres rêve d’assassiner l’insupportable Yvonne. La cour mobilise enfin ses pompes et ses œuvres, sa supériorité et ses splendeurs, et, de toute sa hauteur, la tue ».
La pièce de Gombrowicz a de grandes qualités mais elle est  parfois assez bavarde et démonstrative;  souvent montée  par des metteurs en scène dix fois plus aguerris qu’Anne Barbot, elle ne rend pas toujours la monnaie de la pièce, et de loin!  C’est sa première mise en scène (2011) mais elle semble avoir déjà une sacrée maîtrise: d’abord de la dramaturgie- elle a bien fait de pratiquer des coupures,- et de la direction d’acteurs sur le plan gestuel et vocal,  de l’espace  scénographique, des costumes, et des maquillages,  des lumières et de la musique, c’est beaucoup oui, c’est, surtout chez une jeune metteuse en scène, et, croyez-nous, ce n’est pas si fréquent.
Quelques voiles transparents, une lumière bleue et l’on voit un des personnages avachi sur un canapé… Anne Barbot réussit à nous embarquer dans un univers très pictural avec des images de toute beauté. Où plane parfois l’ombre du grand  Tadeusz Kantor,  du théâtre nô qu’Anne Barbot a connu au Japon où elle a travaillé, et si, si, c’est vrai, d’Angélica Liddell. Il y a de plus mauvaises influences!
yvonne_12-dominique-valls-300x199D’abord avec un idée forte: Yvonne est la seule à n’être pas masquée, alors que tous les aristocrates, eux le sont. Et quels masques! -en fait des demi-masques, absolument sublimes comme les maquillages en noir et blanc qui les complètent,  à la fois grotesques et effrayants,  signés Yngvild Aspeli,  jeune créatrice norvégienne.

Anne Barbot sait visiblement  s’entourer: Charlotte Maurel, la scénographe, a bien réussi son coup avec un travail sans prétention mais absolument efficace; Jean-Marc Hoolbecq qui a assuré la chorégraphie,  ou Vincent Artaud qui a composé la musique de cette création. Les dix acteurs- en particulier Fanny Santer (Yvonne), David Lejard-Ruffet (Le Prince)  ont tous un jeu sobre, exempt de toute prétention mais singulièrement juste, et maîtrisent parfaitement les codes gestuels imposés par Anne Barbot dont on voit tout de suite qu’elle est passée par  l’Ecole Jacques Lecoq.
Il y a de la folie pure dans la fable de Gombrowicz, et donc un risque constant de dérapage mais ici, tout est parfaitement réglé. Mais ici, chez ces comédiens,  aucun geste gratuit et tout obéit à la dramaturgie qu’elle  propose avec une grand sens  du plateau où les scènes  s’enchaînent avec  aisance. Ce qui caractérise ce  spectacle, c’est sans doute son exceptionnelle unité (jeu, mise en scène,scénographie) .

Il y a sans doute quelques longueurs mais c’est dû à ce bavard impénitent de Gombrowicz, et non à la réalisation. En tout cas, on a rarement vu une Yvonne, princesse de Bourgogne d’aussi belle facture, et pourtant on en a vu…
Tiens, une idée aussi sotte que grenue, comme disait le grand Olivier Revault d’Allonnes (mais taisez-vous du Vignal, avec vos avis à deux centimes!):  si Olivier Py, qui va être aux manettes du in dans quelques semaines, demandait à des gens comme Anne Barbot de présenter son spectacle l’an prochain dans le in, par exemple dans le bel écrin de l’Opéra-Théâtre… ou à Arnaud Anckaert avec Orphelins de Dennis Kelly ( voir Le Théâtre du Blog)

Si lui ou un de ses conseillers lit ces lignes, qu’il aille au Théâtre des Lucioles voir de quoi il en retourne. Décidément, il y aura eu dans  le off cette année quelques belles réussites, ce qui n’aura pas toujours été le cas dans le in….

Philippe du Vignal

Théâtre des Lucioles 10 rue Rempart Saint-Lazare  à 19h 15; relâche le 18 juillet,  jusqu’au 28 juillet.

Altérité, chorégraphie de Bouziane Boutelja.

Altérité, chorégraphie de Bouziane Boutelja.  alterite

Altérité,  chorégraphie de Bouziane Bouteldja.

Au festival d’Avignon,  il existe un lieu destiné exclusivement à la danse contemporaine et au hip hop: Les  Hivernales où  la compagnie Dans6T propose  Altérité, une chorégraphie d’inspiration hip hop de  Bouziane Bouteldja qui rencontra  Coraline Lamaison.
Lui,  est un danseur hip hop dans la plus 
pure tradition, notamment auprès de Kader Attou et s’est formé à la danse contemporaine avec Preljocaj.
Elle,  a dansé avec  Jan Fabre et a créé ses propres pièces. 
Comme son nom l’indique  Altérité  propose des rencontres qui tournent souvent à la confrontation. Quand on entre dans la salle,  les danseurs s’échauffent mais c’est déjà le début du spectacle. Quelques clichés ne sont pas évités, comme  l’attitude hip hop, un peu caricaturale avec la capuche baissée en dessous du niveau des yeux.
Le début du 
spectacle tient de ça puis nous embarque peu à peu vers autre chose, la musique change,  se fait plus contemporaine, voire même classique et la danse évolue elle aussi vers une partition contemporaine qui réserve quelques fulgurances.
La danse  de Bouziane Bouteldja impressionnent particulièrement par la beauté et le côté posé du geste. Dans son  premier solo, il est comme ivre, va titubant sur le plateau, traversé de convulsions, le regard dans le vague. Dans le  second, les mouvements de bras,  lents et gracieux,  s’accélèrent et les jambes s’agitent dans un mouvement de  derviche tourneur très envoûtant. Les autres danseurs montrent muscles et tatouages,  et lui, danse, tout  simplement.
Quelques séquences peuvent aussi décevoir, il y a forcément (puisqu’on parle d’altérité) un moment 
féminin-masculin incarné par un danseur qui revêt une perruque et mets ses mains dans des escarpins rouges  (symbole ultime, s’il en est, de la féminité …). C’est un peu convenu, et même si il rugit très bien, ça n’apporte pas  grand chose. Idem quand un autre danseur fait le singe:  on ne sait en plus pas vraiment à qui cela s’adresse.
La danse est syncopée, maîtrisée, et, quand  les garçons se jettent par terre, on entend la peau qui claque sur le sol, des râles  d’efforts et leurs visages sont alors marqués par la souffrance. Malgré ce bel engagement, le rythme du spectacle et la  diversité des chorégraphies proposées on pioche certaines scènes et on en laisse d’autres…
On retiendra 
quelques très belles parties et une volonté de quitter le hip hop « pur et dur » pour tenter de  l’emmener vers autre chose. Rien que pour cette volonté,  le spectacle mérite d’être encouragé.

Julien Barsan

Les Hivernales,  jusqu’au 21 juillet à 15h 30.

Peter Brook, sur un fil

Peter Brook, Sur un fil, documentaire de Simon Brook.

Peter Brook, l’icône de la pédagogie du théâtre et une légende vivante du théâtre contemporain depuis cinquante ans en France; on l’ avait déjà vu dans des films expliquer le pourquoi d’une mise en scène à un groupe de lycéens fascinés par un des plus grands metteurs en scène vivants qui a eu tellement de réussites à son actifs: entre autres: La Cerisaie, La Conférence des oiseaux, La TempêteLe Mahabharata… mais jamais on ne l’avait encore vu aussi longtemps diriger des exercices d’improvisation dans  un atelier de recherche qui est, par définition,  fermé au commun des mortels, avec autour de lui,  une dizaine d’acteurs et musiciens de différents pays.
C’est ici,  son fils Simon qui a réalisé ce documentaire exceptionnel où on le voit,  calme et attentionné diriger,  de main de maître,  différents exercices. A plus de quatre quatre vint ans, il a une lucidité exceptionnelle et une rigueur absolue dans le travail que pourraient lui envier nombre de jeunes metteurs en scène. Corriger, corriger encore corriger, c’est l’essentiel d’une pédagogie artistique mais Brook le fait avec beaucoup d’humilité, et souvent en ajoutant quelques réflexions personnelles pleines d’humour sur l’art et la pratique du théâtre.
La projection du films à l’Opéra-Théâtre d’Avignon commence par une formidable ovation quand il se dirige avec son fils sur la scène. « Très bonne précaution d’applaudir avant! mais attendez la fin. Je ne suis que le père. Et pour l’instant, nous n’avons rien à dire! ».
Brook fait faire à ses comédiens le fameux et très difficile exercice de la marche sur un fil qui n’existe pas: il y faut un calme qui est essentiel pour lui mais aussi une concentration,  une disponibilité physique extrêmes. Une comédienne indienne se lance, sous son regard exigeant mais bienveillant.
Brook insiste sur un point crucial pour lui: « Au théâtre, dit-il, c’est toujours l’imagination qui travaille ». L’exercice se prolonge avec d’autres comédiens et avec la scène de La Tempête entre le roi Prospéro et sa fille. C’est aussi brillant qu’intelligent et loin de toute prétention.    C’est un enseignement  comme on aimerait en voir dans les écoles de théâtre, et que nous  n’avons pas vue souvent, à l’exception  d’Andrewj Seweryn … qui fut longtemps comédien chez Brook.Quelle intelligence, par exemple,  de faire travailler ses acteurs avec l’aide d’un pianiste ou d’un batteur qui sont partie prenante dans cet acte pédagogique!

Le metteur en scène et enseignant chevronné insiste plusieurs fois sur le fait que » ce qui nous intéresse, c’est d’aller plus loin mais aucune de ces expériences n’a encore la qualité de ce que vous cherchez ». Brook n’est pas dupe et souligne que  » les écoles ont leur utilité mais jusqu’à un certain point ». C’est évident: Brook croit au travail d’une équipe mais aussi,  comme Jacques  Copeau,  à l’éclosion de la personnalité d’un comédien.  Il conclura en disant: « L’essentiel n’est pas d’avoir maîtrisé quelque chose mais de repartir le cœur plus léger ». Quelle leçon de théâtre!
  Le film de Simon  va à l’essentiel sait capter le regard de  Peter quand il parle au groupe. C’est un beau travail et d’une qualité d’images à la hauteur  de la pensée de Brook.  Cela aura été une des rares bonnes surprises de cette 67 ème édition d’un festival assez décevant.Le public  qui ne s’y est pas trompé,  a applaudi  les Brook père et fils, pendant de longues minutes… Enseignant de théâtre ou non, vous  aurez droit à une belle rencontre avec un homme exceptionnel. Offrez-vous ce DVD, vous le regretterez pas.

Philippe du Vignal

DVD 1h 26, coproduit avec Arte.

http://www.dailymotion.com/video/x11ael4

Festival d’Avignon: La Dispute de Marivaux.

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Festival d’Avignon : La Dispute de Marivaux mise en scène de Vincent Dussart

voir l’article d’Elise Blanc du 30 janvier 2011 dans Le Théâtre du Blog. http://theatredublog.unblog.fr/2011/01/30/la-dispute-2/

Théâtre des Lucioles 10, rue du Rempart Saint-Lazare, jusqu’au 28 juillet à 21h (relâche le 22 juillet)  T:  04 90 14 05 51.  Durée 1h

Festival d’Avignon: Shéda

Festival d’Avignon : Shéda, texte et mise en scène de Dieudonné Niangouma.

Depuis 84 et Le Mahabharata de Peter Brook, la carrière de Boulbon est devenu un lieu incontournable du Festival mais l’ouverture du plateau est d’une quarantaine de mètres! Il faut donc savoir l’apprivoiser. Le grand metteur en scène russe Anatoli Vassiliev avec un chant de l’Iliade, œuvre collective de son Théâtre-École d’Art dramatique, y avait effectué un véritable crash mais  d’autres, comme Jérôme Savary avec Le Songe d’une nuit d’été, ou comme Bartabas avec Lever de soleil s’y étaient mieux adaptés:  » J’ai choisi de faire ce travail au lever du soleil, avait-il dit, car c’est le moment où le corps et l’esprit sont le plus disponibles pour une écoute profonde. »
Sur le plan esthétique,  le spectacle de l’acteur-metteur en scène de Brazzaville, « artiste associé du festival, » est une réussite et la scénographie de Patrick Janvier, impressionnante: il y a, à l’avant-scène, des restes de vêtements et des cadavres desséchés dans un terrain vague qui ressemble  à une mine d’or désaffectée;  les couches  moyennes ou supérieures de la carrière de Boulbon sont aussi utilisées par les onze comédiens  (quatre hommes et sept femmes) qui, avec une belle énergie, occupent  cet espace où il y a une cheminée en fer rouillé, une carcasse de voiture, une vieille motocyclette et quelques structures en bois. Il y a une petite étendue  d’eau à côté de termitières et la poussière envahit régulièrement l’espace:  Bref, l’Afrique est bien là!
La création musicale,  jouée en direct par ses auteurs, Pierre Lambla et Armel Malonga,  complète les tableaux. Mais ce spectacle( 4h40)  est beaucoup trop long, et on se lasse  vite de  ces monologues  successifs!  On en retiendra quand même trois, à la fois pour leur intensité et pour la beauté de la langue parlée, dont deux joués  par  Dieudonné Niangouma et un autre par l’acteur qui interprète le gardien de la ville.
Festival d'Avignon: Shéda zz7-d9a93dfLe jeu des comédiens est très inégal, mais les compatriotes du metteur en scène congolais sont beaucoup plus crédibles. Ils auront sans doute vécu une belle aventure collective, mais les propos comme le scénario de l’auteur ont paru  des plus confus à la majorité du public qui a applaudi… poliment mais pas plus.
Certains répondront que c’est justement cela l’Afrique, un continent difficilement abordable avec nos critères européens et, de ce point de vue,  Shéda est réaliste! Dieudonné Niangouma devait  se douter de la réaction des spectateurs! L’un de ses personnages dit en effet:   « Le but n’est pas que vous compreniez mais que vous entendiez » et enfin:  « Ne dis rien sur les Africains,  tu aurais forcément tort ».

Jean Couturier

Carrière de Boulbon jusqu’au 15 juillet.

La Guerre de 1812

La Guerre de 1812 1812-22

La Guerre de 1812
cabaret vidéo  conception  et mise en scène de Michael Hollingsworth.

Cette troupe de Toronto qui s’est  spécialisée  dans les spectacles fantasmagoriques de l’histoire du Canada a fait le bonheur du public au  Festival Magnetic North qui s’est déroulé à Ottawa en  juin.
Une vraie découverte,  puisque la troupe, qui quitte rarement la ville « reine  » brille par ses trouvailles esthétiques et sa dramaturgie  de qualité.  Cette fois,  il s’agit d’une parodie farouche de la guerre frontalière si controversée entre les États-Unis et la colonie britannique, bien avant la création du Canada.
Les quatre acteurs, transformés  en marionnette grand-guignolesques aux visages blancs,  zombies aussi  cauchemardesques  que ridicules, portent  des costumes d’époque, des coiffures sculpturales, et des traits d’une laideur  fascinante. Soutenus par un  éclairage qui efface tout ce qui les entoure,  les quatre acteurs apparaissent et disparaissent  selon la technique de la lanterne magique, ce  qui permet des changements de costumes rapides et des illusions scéniques remarquables.
Ils ne sont que quatre mais les batailles sont épiques, les tueries sanglantes, les têtes tombent, les membres s’envolent et les parties de « thé » à l’anglaise sont d’une élégance nauséabonde.  La confrontation entre les deux camps,  ridiculisés du début à la fin, finit  dans un bain de sang absurde où tous les grands généraux meurent.
Et pour quelle raison? C’est la question que pose La Guerre de 1812.   C’est une vision revue et corrigée de l’histoire , nécessaire, inoubliable: le spectacle fut la grande réussite de ce  Festival…

Alvina Ruprecht

 Magnetic North Festival à Ottawa en  juin.

Festival d’Avignon: une femme libérée dans une France occupée

 

Festival d’Avignon Une Femme libérée dans une France occupée texte et mise en scène de Gil Galiot.

 

C’est l’évocation d’une époque trouble, celle de l’occupation de la France par les nazis. Une jeune femme de vie légère, s’ébat sans complexes en vendant ses charmes. Mais elle s’éprend sincèrement d’un beau militaire allemand qui doit quitter Paris.
La Libération arrive et la voilà prise comme beaucoup d’autres femmes dans le tourbillon haineux déchaîné contre celles qui ont fauté avec l’ennemi. Tondue, rasée, humiliée, elle est en proie à la vindicte populaire.
Sandra Gabriel, seule en scène, mutine et avenante dans une  troublantes guêpière, est confrontée à un film en noir et blanc sur ses amours illicites. Un documentaire sur les représailles exercées contre ces femmes, met en lumière les excès de vengeance des « patriotes »…
Ce solo qui sort de l’ordinaire dans la forêt des spectacles du off aux titres souvent vulgaires, nous ramène à une réalité oubliée.

Edith Rappoport

Le Petit Chien à 20 h 45 jusqu’au 28 juillet.  T: 04 90 86 04 68

 

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