love and money

Festival des jeunes metteurs en scène au Théâtre 13. Love and money de Denis Kelly, traduction de Philippe Lemoine, mise en scène de Benoît Seguin.

Dennis Kelly  a 43 ans est né et a grandi à Londres dans une  famille  irlandaise de cinq enfants, où  son père était conducteur de bus.  Dennis a quitté l’école à seize ans et a  travaillé dans des supermarchés, puis il a  découvert le théâtre en intégrant une jeune troupe, The Barnet Drama Centre. A trente ans, il  écrit sa première pièce, Débris; il est aussi l’auteur,  entre autres,  d’ Osama the hero, Blackout, After theend, White pig, Orphans,  ou  Taking care of baby, qui a  été mise en scène par Olivier Werner en 2011 à la Colline et en Europe, mais aussi au Japon et aux Etats-Unis et au Canada… C’est aussi un auteur de télévision.
Love and money a aussi été montée plusieurs fois en France; ce n’est pas une pièce des plus faciles… Ecrite en sept tableaux,  on dira,  pour  faire simple,  que c’est l’histoire d’un jeune couple; Jess et David qui se bat assez mal  contre un dette écrasante qu’a contractée Jess. Mais il y a aussi nombre d’autres personnages, tous représentatifs de la société contemporaine. Un père et une mère qui parlent de la tombe de leur fille, un chœur d’hommes et de femmes parlant, à coup de petites phrases courtes business,  intérêts d’emprunts mais aussi  boudhisme et idée de cheminement. Et Val,  une jeune cadre de banque, au cynisme et au langage des plus crus, qui propose à son ancien petit ami  David un travail bas de gamme:  » Jess ou toi, pourriez sucer des bites, vous prendre en photo et les vendre sur internet. DAVID. Non, je ne vais pas sucer des bites. VAL. Je sais bien. Je sais bien David.
Il y a aussi Debbie: la jeune  femme va finir  par enlever sa culotte pour l’offrir à Duncan, qui le lui demande; c’est  un pauvre type imbibé d’alcool qui se raconte des histoires en n’omettant surtout pas d’en  raconter aux autres et qui la drague dans un café.

 Là aussi, les frontières entre  envies forcenées  de réussite sociale et pulsions sexuelles sont des plus floues. L’écriture  de Love and money, assez inégale a sans  doute été  influencée par celle de PInter.  Et, même si  la construction par fragments de la pièce exige du spectateur qu’il recompose le puzzle qu’il lui propose, après un un monologue interminable au début, les choses sont  ensuite plus claires et  les dialogues à deux ou trois personnages sont  d’une grande justesse et tout à fait somptueux dans leur violence glacée! 
Le travail sobre et efficace de Benoît Seguin a surtout des qualités plus que  les défauts d’une première mise en scène: il ne tombe pas dans la caricature et  il maîtrise bien l’espace et le temps( aucun cabotinage et pas de courses effrénées dans la salle ou autres bêtises) mais fait preuve au contraire  d’une grande  rigueur. Et  il sait diriger  ses sept acteurs, dont certains possèdent une belle  présence et sont remarquables de  force et de vérité :Emilie Cazenave, Fiona Chauvin ( Debbie) et  Cédric Colas. Dès qu’ils apparaissent sur scène surtout Emilie Cazenave, il se passe quelque chose: c’est assez rare pour  être signalé…

  Les  autres comédiens sont  moins convaincants et  la diction n’a pas  été vraiment prioritaire dans l’enseignement qu’ils ont reçu! Allez,  Martin-Barbaz encore un effort! Sur ce point, Benoît Seguin aurait intérêt à resserrer les boulons d’urgence.  Et il vaudrait mieux aussi qu’il évite de placer ses comédiens alignés face public comme Nordey  a la manie de le faire. Mais cela dit, il a aussi  un autre atout et non des moindres: la scénographie épurée de Charlotte Maurel  est intelligente et  fonctionne bien avec ses propositions dramaturgiques; on voit qu’il  a  dû mettre toute son énergie et ses petits sous dans l’aventure, cela se sent et c’est toujours agréable. En tout cas, chapeau.
Qu’il ait le Prix des jeunes metteurs en scène ou non, peu  importe, sa mise en scène intéressera plus d’un directeur de théâtre.

Philippe du Vignal

Spectacle vu au Théâtre 13 le 26 juin.


Archive pour juillet, 2013

Vingt-quatre heures de la vie d’une femme

Vingt-quatre heures de la vie d’une femme, d’après Stéfan Zweig, mise en scène de René Loyon.

 

Vingt-quatre heures de la vie d’une femme rene-loyon-met-en-scene-vingt-quatre-heures-de-la-vie-dune-femme-de-stefan-zweig-242x300 C’est un bref récit aux angles aigus qui rapporte le coup de folie d’une femme, observant les tables de jeux, un soir, au Casino, et qui s’immobilise face à l’un des joueurs en train de perdre, puis de gagner, puis de tout perdre à nouveau, définitivement. Cette observation du jeu, puis du joueur, dans ses accès de pertes et de gains, l’électrise, elle, veuve, d’ordinaire si sage et si rangée :
« Jamais encore, je n’avais vu un visage dans lequel la passion du jeu jaillissait si bestiale dans sa nudité effrontée… J’étais fascinée par ce visage qui, soudain, devint morne et éteint tandis que la boule se fixait sur un numéro : cet homme venait de tout perdre ! Il s’élança hors du Casino. Instinctivement, je le suivis… Commencèrent alors 24 heures qui allaient bouleverser mon destin » !
C’est ce basculement que décrit Zweig, ce moment où elle perd le contrôle et laisse aller son désir, moment d’une brève rencontre. Mais c’est aussi et surtout le récit de la passion du jeu, dévorante, à côté de laquelle la passion tout court s’efface. Zweig écrit la nouvelle en 27, à Salzbourg, après un parcours de littérature et de poésie, de traductions et de voyages, dans un contexte intellectuel effervescent, où Freud et sa révélation de l’inconscient, donne de nouvelles idées.
Le récit est ici à peine théâtralisé. Marie Le Galès qui en a assuré l’adaptation, l’interprète. Elle met des mots sur la passion et refait devant nous, mentalement, le chemin de la tentation. René Loyon la met en scène, avec discrétion, c’est le moins qu’on puisse dire. Une table, une chaise, un personnage digne et hiératique qui fait sa confession. On peut fermer les yeux et écouter. Que demander d’autre ?

Brigitte Rémer

 

Théâtre du Lucernaire, 53, rue N.D. des Champs, métro Vavin, du 5 juin au 7 septembre, du mardi au samedi à 20h, les dimanches à 15h. Tél : 01-45-44-57-34. www.lucernaire.fr

L’Insurrection par la Communauté invouable

L’Insurrection par la Communauté inavouable, d’après L’Insurrection qui vient du Comité invisible, du Manifeste des  Pussy Riots et autres textes, sous la direction de Clyde Chabot.

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Cela se passe au 6 b à Saint-Denis dans les anciens ateliers de la société Alstom.  Le 6B est né du rassemblement  d’ artistes  qui y ont  créé des espaces de travail. Initiative privée, il est auto-géré et met à la disposition de ses membres: créateurs, architectes, musiciens, éditeurs, cinéastes, graphistes. Avec plus d’une centaine d’espaces privatifs- ateliers ou bureaux-sur 3500m2 et  sur six étages … Et un restaurant associatif, une salle de concert (200 places),  un cinéma  (50 places assises)  et une salle d’exposition modulable de 350m2.
Le 6B  a les soutiens de la Mairie de Saint-Denis,  de Plaine-Commune , des Canaux de Paris d’ Alstom  et de la DRAC Ile-de-France, du département de Seine-Saint-Denis et de la Région Ile-de-France

Depuis 1992, au sein de La Communauté inavouable, « compagnie théâtrale expérimentale », Clyde Chabot  monte, elle,  des spectacles qui mettent en jeu les rapports entre le texte, les acteurs, les spectateurs, l’auteur, les techniciens et le metteur en scène. Avec des créations  interdisciplinaires (théâtre, danse, vidéo, musique, arts numériques)   sur des textes d’Hubert Colas, Robert Pinget, Heiner Müller, Yan Allegret, Alain Béhar et d’elle-même…
L’Insurrection se passe dans une surface d’une centaine de m2, éclairée par de grandes baies vitrées donnant sur les berges du canal et par juste une baladeuse. Les sept intervenants, en jeans et tee-shirt, resteront debout ou  parfois allongés. Au fond,  il y a  sur un écran relié par Skype,  un complice québécois, André-Eric Létourneau. Seul, un guitariste est assis sur un tabouret.
Clyde Chabot annonce chacun des cinq rounds de douze minutes. Il y a une trentaine de spectateurs assis sagement dans des fauteuils de cinéma. Les textes sont « travaillés comme matière poétique et politique, rythmique et scénique, au travers du souffle et du corps des comédiens, et soutenus et interrogés par les compositions musicales réalisées ou improvisées par les musiciens ». Sic.

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©’Emmanuel Rioufol

En fait, cela donne quoi?  Il y a la douce tiédeur de juin, le silence paisible du lieu, et la fatuité de la plupart des textes, sauf celui des  Pussy Riot  (émeute de chattes), groupe de punk-rock féministe russe  créant des performances artistiques non autorisées pour promouvoir les droits des femmes en 2012, contre  la campagne de Poutine.  À la suite d’une « prière punk »  dans une église orthodoxe, elles avaient été condamnées à deux ans de camp de travail, pour  vandalisme et  incitation à la haine religieuse.
Est-ce l’inanité de la réalisation, et l’écran souvent vide de la relation Skype, la petite musique à la guitare, ou encore les fragments de textes dits avec lenteur? Mais tout, ici, invite au profond sommeil…

« L’Insurrection, une soi-disant performance, est d’une rare prétention et « interroge l’actualité et l’obsolescence de discours politiques contemporains, sur un plateau de théâtre du côté de la performance ». Cela rappelle les happenings et performances des années 70 qui fleurissaient dans des galeries, ateliers ou usines désaffectées. Mais  Clyde Chabot distille un ennui singulièrement efficace. En une heure, c’est quand même un exploit!  D’autant plus qu’il n’y a ici ni plateau de théâtre, ni véritable performance. On peut juste sauver de cette chose, la belle présence  de Catherine Ducastel.
Pour le reste, autant en emporte la brise qui soufflait sur le canal, et sur l’étonnant bidonville qui,  lui, « interroge vraiment l’actualité »,  comme dirait Clyde Chabot qui proposait une rallonge avec d’autres rounds précédents. Tous aux abris! N’écoutant que notre courage, nous avons donc fui rapidement!

Philippe du Vignal

« La création finale du spectacle » (sic) aura lieu les 8 et 9 octobre dans le cadre du festival ZOA,
77 rue de Charonne, Paris XIème.

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