Les accroche-cœurs d’Angers
Festival des accroche-cœurs d’Angers
Voilà des années que la ville d’Angers organise ce festival qui propose à ses habitants plusieurs dizaines de rendez-vous plastiques, mais aussi de musique et de théâtre le week-end de rentrée consacré aux habitants de cette belle ville ancienne. Pas de festival off, des milliers de personnes dans les rues, mais une circulation agréable, sauf le samedi soir avec un banal et trop long feu d’artifice par France Arts et Feux, avec un funambule blanc entre les tours du château, accompagné par le Bagad Kemper.
Philippe Violanti, directeur artistique depuis trois ans avait soigneusement concocté un programme autour de l’Ouest.
Little big men par la Compagnie Sterenn
Assis sur une pelouse au soleil couchant devant une petite baraque de foire. Le rideau s’ouvre pour laisser apparaître deux hommes en noir qui entament un conciliabule silencieux autour d’une caisse et d’un disque. Jean Lucas (le clown Mr Wilson) et Anthony Gorius, musicien marionnettiste, apparaissent en pupazzi, marionnettes aux corps minuscules, dont les têtes sont celles de leurs manipulateurs.
Grotesques et ridicules, ils nous entraînent dans un petit ballet chinois, jonglent avec des balles blanches, font des exercices athlétiques, se tapent dessus en rigolant et chantent même Nous sommes deux sœurs jumelles en faisant appel à la participation du public.
Rien de très fin, mais une grande efficacité, du théâtre de foire… comme au bon vieux temps…
Meeting Charlie/ L’art du bricolage de et par Emmanuel Vérité, mise en scène de Benoît Lambert
Un solo d’Emmanuel Vérité dans la cour du cloître Toussaint en accès libre, où les spectateurs entrent et sortent. Mais cela ne perturbe guère Emmanuel Vérité qui joue Charlie Courtois-Pasteur, un passionné de cinéma et de bricolage. Avec sa chemise à fleurs, sa moustache et son ukulele, son chapeau, ses gants et lunettes, il évoque les vieilles vedettes, Dean Martin, Rahan des BD de notre enfance, L’homme qui tua Liberty Valance, et de vieux souvenirs des années 50…
Le spectacle n’en est pas à la première représentation et possède une réelle virtuosité mais est un peu longuet et tient des lazzi de la commedia del’arte….
Far West 2037, par la compagnie Jo Bithume
La compagnie, installée à Angers depuis 82, a fondé et dirigé les Accroche-Coeurs jusqu’en 2009, ainsi que la Paperie, devenu Centre National des Arts de la Rue, qu’ils ont quitté pour se consacrer à leurs spectacles. Far West 2037, « genre futur simple mais plus ou moins proche » relève des catastrophes spectaculaires auxquelles se livrent malheureusement certaines compagnies qui élaborent un spectacle pour plusieurs milliers des personnes, comme Générik Vapeur avec son récent Waterlitz.
Sur une grande tour métallique, se démènent une dizaine d’humains qui tentent de construire une cité radieuse sur une plateforme oubliée des cartes. Les acteurs ont beau se déployer dans tous les sens, se suspendre sur des chariots, lancer des musiques tonitruantes, jeter des sacs de plumes et des confettis, la débilité et l’absence de poésie du texte noyé dans un fracas technique sont des plus consternantes.
Les coproducteurs n’ont pourtant pas manqué en France, comme en Autriche et aux Pays Bas…
Le Cercueil par la Brigade d’intervention théâtrale haïtienne, Théâtre de l’Unité
Une nouvelle forme de ce spectacle élaboré il a quelques années par Hervée de Lafond et Jacques Livchine, a été revisité pour le Festival des Quatre Chemins en Haïti en 2011, et avait connu un bau succès l’an passé aux Préalables du Festival d’Aurillac à Morjou (Cantal) notamment, voir Le Théâtre du Blog).
C’est une sorte de rituel funéraire ironique. Puisqu’on essaye une maison, un lit, une armoire avant de l’acheter, pourquoi alors ne pas vivre sa propre mort avant son dernier soupir? Une spectatrice volontaire est soumise à un questionnaire précis: on calcule l’âge probable de sa mort, avant de lui proposer d’essayer son cercueil. Elle se soumet à cette épreuve et la brigade haïtienne se livre à une furieuse déploration dans une danse frénétique étonnante. Le rituel achevé, la « morte » est enfin ressuscitée.
Le Théâtre de l’Unité qui a aussi formé des brigades en Italie, au Niger, au Chili et ailleurs, devrait être accueilli dans le cadre de Tous Migrants aux prochaines Fêtes d’Amiens avec ces artistes venus des quatre coins du monde.
Rives et dérives par la compagnie Délices Dada, conception de Jeff Thiébaut
Comme toujours, Délices Dada nous a concocté une étrange promenade à travers les chemins d’un parc qui borde la Maine. Il faut prendre rendez-vous et l’on nous guide par petits groupes d’une trentaine de personnes jusqu’au bord du fleuve.
Une jeune femme s’est fait couper les pieds par une hélice de bateau, elle est assise devant un coffre attendant de se transformer en sirène. Puis Jean-Daniel traînant un lavabo qu’il doit réparer nous entraîne vers sa sœur qui remplit des seaux d’eau, les filtre et les rejette dans le fleuve.
La purification risque d’être longue…Plusieurs séquences se succèdent au cours de notre marche, un coureur de fond, un capitaine qui a mis pied à terre au moment de sa retraite. Gêné par le vacarme ambiant, ce Rives et Dérives n’a pas la dimension insolite des Visites Guidées ou de la Donation Schroeder.
Comme ils le disent « La poésie au secours ! » Mais ici, on ne l’a pas sentie vibrer.
Rapedondaine de Ragalendo
Ces quatre mignonnes bretonnes en costume traditionnel avec coiffe blanche, en font des tonnes avec leurs guitares, binious, basse, scratch galette, en rappant avec force sonorisation sur le quai des Carmes. Plutôt drôle, mais trop long, trop bruyant et surtout… pas très intéressant!
On peut toujours s’en aller mais on reste, parce qu’on n’a plus encore l’envie de marcher jusqu’au prochain spectacle.
Le Retour du grand renard blanc, par Fred Tousch et compagnie.
Le grand Fred Tousch nous fait toujours rire dans ses plus folles incartades, et ose l’invraisemblance jusqu’à la vulgarité en captivant son public. Nous sommes plusieurs centaines, assis par terre place de la Rochefoucauld. Fred Tousch est à la recherche du grand renard blanc , avec sa tribu d’indiens musiciens coiffés de fourrures et deux cow girls.
Tout le monde se déchaîne entre deux tippees, autour de la recherche de ce renard blanc introuvable, incarné par Jean-Pierre Camalessus du Gévaudan, alias Fred Tousch, enrobé de fourrures immaculées.
Edith Rappoport