Un deux Un deux

Un deux Un deux de François Bégaudeau, en dialogue avec Mélanie Mary, mise en scène de Mélanie Mary.

 

 Un deux Un deux  undeuxAgrégé de lettres modernes, et professeur de lycée,  Bégaudeau publia très vite son premier roman Jouer juste, puis un autre  Dans la diagonale en 2005, et une « fiction biographique », Un démocrate, Mick Jagger 1960-1969.   Il est aussi réalisateur au sein du collectif Othon qui a réalisé trois documentaires.
Un troisième roman de lui parut en 2006,  Entre les murs,  inspiré par son expérience d’enseignant qui  deviendra un film réalisé par  Laurent Cantet.  Sa première pièce Le Problème a été créée en 2011 au Théâtre du Nord puis à Paris.  Et en 2012, il publie Au début, un roman composé de treize récits pris en charge par des narratrices.
Bégaudeau revient au théâtre avec cette courte pièce  « en dialogue avec Mélanie Mary » (sic). Une histoire d’amour entre Elle et Lui, un couple d’acteurs,  dans une série de courtes séquences numérotées de 1 à 9, dont le titre inscrit sur un carton blanc que l’assistant/guitariste vient poser délicatement l’une après l’autre contre le mur du fond…
C’est donc successivement: On pourrait se voir un jour,. Je crois que tu me plais. J’ai très envie de t’embrasser. T’aimes moins le faire que moi. Dis-moi que tu m’aimes. Ce serait bien d’habiter ensemble. On fait plus rien. Tu m’aimes plus ou quoi. Faudrait qu’on se parle.

  » Cette deuxième pièce a le statut particulier de matrice d’une jeune œuvre théâtrale »  nous  dit le projet (sic). On y parle aussi de  » périmètre tendre, de suspense délicieux »…  Et Mélanie Mary qui a réalisé la mise  en scène et qui joue le rôle de la jeune femme dit,  dans sa note d’intention, « qu’on y voit Elle et Lui se transformer d’acteurs en vrai couple ».  Pour Bégaudau, « c’est une pièce sur le vrai et sur le faux, donc sur l’amour et la pièce se tient dans le moment où l’amour permet encore du jeu ».
On veut bien mais  tout ceci semble un peu prétentieux et, sur le plateau, cela ne se traduit pas vraiment. La pièce a en effet du mal a prendre son envol mais il y a ensuite quelques petits moments où on sent percer une certaine tendresse chez ce jeune couple dont on ne saura finalement pas grand-chose.

Délicatesses de la découverte amoureuse, émois érotiques puis cristallisation avant la redescente et l’inévitable rupture. Sur une scène nue, juste quelques livres, boîtes, etc..  à la fois réalistes et pas du tout, puisqu’ils sont en céramique émaillée. Comme c’est plutôt pas mal joué par Mélanie Mary et François Nambot, on se laisse prendre, du moins au début  mais sans grande passion, et  malgré plusieurs erreurs de mise en scène comme  cette inutile exposition de panneaux avec le titre des séquences ou cette fausse fin redoutable qui casse le spectacle. Et c’est souvent un peu long…
La pièce  et  la mise en scène ont quelque chose d’assez naïf et on a bien du mal à en distinguer le second degré  du premier. Elle est  encore brute de décoffrage-on peut se tromper mais cela  sentait encore furieusement des séances d’impro!-du genre gentil mais pas franchement convaincante…

Alors à voir? Pas sûr,  d’autant plus que,  si  les deux acteurs  font leur boulot, ils  semblent ramer. Il faut dire qu’il il n’y avait pas grand monde ce soir-là mais, à 25 euros la place… on ne voudrait pas être pingre mais cela fait quand  même cher pour 80 gentilles petites minutes. Et on a le droit de préférer les autres textes-plus substantiels- de François Begaudeau…

Philippe du Vignal

Théâtre de Belleville jusqu’au  1er décembre


 


Archive pour 26 septembre, 2013

Letzte tage, Ein Vorabend, Derniers jours. Une veillée

Letzte tage, Ein Vorabend, Derniers jours, Une veillée, texte et mise en scène de Christoph Marthaler (spectacle en allemand surtitré).

 

Letzte tage, Ein Vorabend, Derniers jours. Une veillée photo2Une part fondamentale de l’histoire de l’Europe avec ses meurtrissures indélébiles s’invite aujourd’hui au théâtre de la Ville.  Chistoph Marthaler nous convie à assister à une séance publique  de l’ancien parlement de Vienne. qui, contrairement à ce que montre la photo de l’’affiche, ( ci-contre),  n’est pas recréé ici. Les 500 spectateurs sont en effet assis sur la scène, face à la salle. De quoi perdre un peu nos repères spatio-temporels.
Cela se passe  à la veille de la première guerre mondiale. Mais nous sommes aussi au 200 ème anniversaire de la libération du camp de Mauthausen-Gusen. Nous pourrions être aussi au Parlement hongrois  où le président de la République, le  nationaliste Victor Orban  prononce  un  discours.

Le metteur en scène fait alterner passé et  futur pour nous mieux faire  percevoir  le présent, et  nous mettre en garde  contre les risques de l’avenir. Pour lui, l’histoire n’est qu’un éternel recommencement.  On entend  le discours antisémite de Karl Lueger, maire de Vienne en 1913, ou celui d’une député viennoise du parti nationaliste de Jörg Haider en 2007,  et ses propres écrits à lui, Chistoph Marthaler, où il reprend parfois des notices biographiques de musiciens juifs morts dans les camps de concentration.
  Comme en contrepoids des discours racistes et antisémites, la musique  constitue le personnage central du spectacle et a une sorte d’action cathartique. Le metteur en scène a repris  les musiques de compositeurs juifs déportés, en particulier ceux qui sont  passés par Terezin, comme Viktor Ullmann ou Pavel Hass. Terezin qui était un  exemple de camp «privilégié» et constituait un élément  primordial de l’entreprise de propagande nazie. Mais aussi  un  lieu de transit pour les artistes juifs, allemands ou tchèques  avant d’être envoyés à Auschwitz.
  La vie culturelle y tenait une place essentielle, soutien de vie et d’espoir mais aussi travestissement de la réalité et de son avenir meurtri par les nazis. Et de nombreux compositeurs y ont écrit leurs musiques. Karel Fröhlich, un  violoniste,  témoigne, dans La Musique à Terezin,  de la puissance de l’action créatrice: « Pour un artiste, cela a représenté une formidable opportunité de travailler pendant la guerre dans le domaine qu’il s’était choisi. Nous n’avions rien d’autres à faire que jouer. Cependant, il fallait tenir compte d’un facteur essentiel. Nous ne jouions pas vraiment pour un public, puisqu’il disparaissait continuellement! ».
Pour Chistoph  Marthaler,  la musique est à la fois un témoignage du passé, et un  cri d’alerte pour le futur. Il a, pour ce spectacle, travaillé avec des comédiens, des chanteurs et des interprètes, et quatre pianistes jouent dans la salle et  un autre, sur la mezzanine du hall d’entrée. Malgré certaines longueurs, ce spectacle est essentiel: le théâtre devient ici un lieu de mémoire et de commémoration pour un public, qui  est de plus en plus éloigné  de ce moment cruel de l’Histoire.

Les voix entendues sont d’une beauté douloureuse, et la dernière demi-heure, presque exclusivement consacrée à la musique, retentira longtemps dans la mémoire sensorielle du public. Goethe disait: « Vivez le moment présent, vivez dans l’éternité ».  Ce qui s’est produit pour de nombreux artistes, il n’y a pas si longtemps en Europe … 

Jean Couturier

 

Festival d’Automne/Théâtre de la Ville,  jusqu’au 2 octobre.

 

  

Traces d’Henry VI

Traces d’Henry VI d’après Shakespeare, mise en scène d’Agnès Bourgeois.

 

Traces d’Henry VI  dscf5852C’est « un travail å la table » auquel se livrent les élèves de première année de l’EDT91 (École départementale de théâtre): les voici donc attablés, tous identiquement vêtus, décortiquant en 90 minutes, cette trilogie fleuve qui  ne compte pas moins d’une centaine de personnages mais ils sont une douzaine à incarner les protagonistes de cette guerre de succession, qui se terminera, une pièce plus tard, par la prise de pouvoir d’un Gloucester, Richard lll…
En attendant, le couvert est mis pour le repas funèbre: les pairs d’Angleterre,  réconciliés pour l’occasion, pleurent la mort d‘Henri V. Trêve de courte durée. Ils auront tôt fait de reprendre les querelles qui opposent les clans irréconciliables de York et de Lancaster : roses rouges contre roses blanches. Ainsi débute le règne chancelant du jeune Henri Vl, encore sous la tutelle d’un Lord Protecteur, corrompu et contesté. Un mariage malheureux avec Marguerite d’Anjou, le fille du roi René, n’affermira pas son autorité:  le nouveau règne est constamment menacé par les luttes intestines.
Agnès Bourgeois a pris le parti radical de choisir l’intrigue politique plutôt que la fresque historique et de resserrer l’action sur un lieu unique, la table qui sera, tour à tour, scène de banquet, débarcadère, promontoire, jardin ou champ de bataille. Elle constitue l’espace symbolique « plein de bruit et de fureur » où se dévoilent les appétits féroces de chacun.
Pour traduire les soubresauts qui agitent le royaume,  s’instaure autour de cet espace circonscrit une ronde sans fin. Les apprentis-comédiens tournent jusqu’à ce qu’obéissant aux  coups de cymbale de la metteuse en scène  en fond de scène, ils s’immobilisent à une place. En s’asseyant sur l’une des chaises portant les noms des grands du royaume (Gloucester, Suffolk, York,  Somerset…, etc.) ou des deux seules femmes ici présentes (Marguerite et Eleonore), ils vont endosser le rôle assigné par le siège qu’ils occupent temporairement.
Pris dans  ce mouvement perpétuel, ils jouent ainsi une partition différente d’une représentation à l’autre. ce qui demande une certaine virtuosité. La pièce se trouve donc  réduite à une succession de figures, à un jeu de rôles où les personnages se fondent les uns dans les autres jusqu’au brouillage des repères…
Ce qui exige du public un effort constant de compréhension. L’exercice est formateur,
tant du point de vue de la dramaturgie que de l’interprétation, pour les comédiens en herbe. lancés sur les traces d’Henri VI . Mais ce jeu de chaises musicales exige  de chacun qu’il maîtrise la totalité du texte et réagisse promptement à toute situation.
C’est  un terrain de jeu et un beau laboratoire de travail offerts aux élèves mais cela constitue une  limite. Il  faut quand même saluer l’originalité de cet Henri Vl et la pertinence de la mise en scène…
Et, même si le acteurs ont parfois du mal à tenir le pari jusqu’au bout, on ne peut contester l’aspect ludique du spectacle. Les spectateurs s’amusent comme les élèves-comédiens à reconstituer la pièce livrée en fragments.

Anis Gras à Arcueil  jusqu’au 22 septembre 2013

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