Transe
Transe, conception de Danielle Gabou.
D’emblée, la présence physique de Danielle Gabou est impressionnante, quand elle s’avance dans la pénombre avec son filet de pêcheur comme seul partenaire. En même temps, débute la projection du film de Jean Rouch, Mammy Water tourné en 1956.
Ce spectacle de 45 minutes se compose d’un dialogue entre le récit dit par Jean Rouch, (sans que l’on entende sa voix) et la chorégraphie créée par Julien Ficely pour la danseuse. La vidéo a été retravaillée et parfois redimensionnée en 16/9 ème, ce qui donne une autre perspective à l’espace de jeu.
Le public est transporté dans un double voyage, celui des croyances et des rituels d’un village de pêcheur ghanéen des années 50, et celui du solo de la danseuse que ces rituels inspirent.
Danielle Gabou le dit: « Le corps a sa vérité, on ne peut mentir avec le corps ». Le sien est massif, presque androgyne suivant la façon dont il est mis en lumière. Ce solo n’illustre pas ce qui se déroule sur l’écran, il a sa propre esthétique, ce qui donne au corps parfois des allures de statue grecque.
Il n’existe pas de «transe», à proprement dire mais, comme elle le dit, « un lâcher du mouvement », et elle nous fait assister à une danse très libre. Il ne faudra pas hésiter à revoir le film de Jean Rouch dans son intégralité, qui nous parle d’une époque révolue, où, pour résoudre la crise d’une micro-société, la population locale se livrait à des offrandes en faveur de la déesse de la mer Mammy Water ou sacrifiait des animaux, plutôt que d’égorger leurs voisins au nom de pseudo-argumentations religieuses…
Jean Couturier
Spectacle dansé au Théâtre National de Chaillot, salle Maurice Béjart du 5 au 9 novembre.