La Révolution des escargots

La Révolution des escargots, à partir de textes de Joël Egloff, conception et mise en scène de  Christelle Harbonn,

 

SAUT 2C’est une première répétition publique d’un spectacle en devenir, avec Marianne Houspie, Solenn Keravis, Sébastien Roullier et  Gilbert Traina. Derrière un transparent, une jeune femme s’angoisse avant de quitter son appartement. Elle ferme tout, l’eau l’électricité, et décroche toutes les prises, débranche le téléphone, vérifie et revérifie tout plusieurs fois de suite.
Mais le téléphone sonne, elle hésite encore un moment. Il y a des projections élégantes dans la pénombre sur les rideaux, on empile des chaises dans un grand brouhaha. « Plus je vieillis, plus je me transforme en point d’interrogation ! (…) Combien de temps déjà que je ne suis pas sortie de chez moi ? »… Une femme secoue tous les jours son linge par la fenêtre, « ma mère est morte, il faut que je parte avant 13 h…(…) il y a des choses qui ne meurent pas, même si le corps meurt ! ».
Le spectacle se termine par un suicide, pas très gai, tout ça !

 

 Edith Rappoport

 

Prochaines représentations 7 et 8 mars à la Friche de la Belle de mai Marseille les 21 et 22 mars Théâtre Eurydice Plaisir et les 28 et 29 mars aux Lilas en scène.

 


Archive pour 17 janvier, 2014

À tous ceux qui

À tous ceux qui de Noëlle Renaude, mise en scène de Sophie Thebault.

 

Nolwenn-Marthe-CatherineLes Robichon, Oscur, Gloriette, Moulard, Gloton, Faitard et branches collatérales, soit trente-six personnages, ou plutôt trente-six voix, peuplent cette pièce initialement écrite pour la radio : quinze hommes, vingt-et-une femmes de quatre  à quatre-vingt seize ans ans, pris dans l’instantané d’un dimanche de fête.
Une table est dressée pour un banquet. Il règne une gaîté nostalgique induite par de vieilles chansons françaises :« Et hop en s’en sortira, on s’en tirera, comme toujours en France » ou « « Non, je ne me souviens plus du nom du bal perdu », etc… Douze comédiennes investissent la scène : elles feront entendre tous les personnages (ou presque).
Tour à tour, elles se présentent : nom, prénom, âge. Puis elles racontent : leurs vies, leurs amours, Elles parlent de ce qu’elles ont perdu : un mari, un frère, les cheveux, la raison, des illusions. Disent leurs rêves, leurs joies et leurs chagrins. Des existences déballées, au féminin mais aussi au masculin car les actrices, par le truchement de la mise en scène, lisent la partition des hommes manquants.
À travers les petites
histoires de ces familles, dont les versions diffèrent selon les protagonistes, se compose une fresque sociale de la France profonde. La guerre hante encore les mémoires: 14-18, 39-45, l’Algérie… Les chronologies se brouillent d’une génération à l’autre.  Mais on chante et on danse, on mange et on boit à la paix toute nouvelle, à l’avenir, au progrès, au bachot d’Albert, à la fiancée de Bouboule, aux absents, aux morts, à tous ceux qui …
De libation en libation, il appartient au spectateur de remonter le fil des généalogies, des alliances et des cousinages, depuis Salut-photos MarieDarnis-rectola petite fille au seuil de sa vie qui, en ouverture du spectacle, serre un oiselet mort dans sa poche, jusqu’au vieillard de «l’âge des déjà morts» à qui elle va l’offrir à la fin. Celui-ci conclut, en voix off, venue de l‘au-delà, que, comme l’oiseau, il « n’a vu de la vie qu’un fragment de ciel ».
La mise en scène, précise, directe, prend le texte à bras le corps. Le pari de faire interpréter la pièce au féminin, en constituant un chœur de femmes aux personnalités et aux morphologies contrastées, confère une délicatesse et une élégance au spectacle. L’auteure ne se sent pas trahie : « Ce choix s’inscrit dans une cohérence scénique et textuelle bien décidée : qu’on dise le texte ou qu’on le lise, au fond, l’histoire se racontera d’elle-même, les corps s’inventeront d’eux-mêmes, et la question du genre (risquée) se dissout d’elle-même pour laisser juste la place à de l’humain. »
La justesse de l’interprétation, le travail des rythmes, des silences, jusqu’aux hésitations et aux flottements, collent à l’écriture acérée, alerte, drôle, grinçante, toujours musicale de Noëlle Renaude. Ce flot de paroles, conçu comme un oratorio, constitue une partition brillante mais d’une grande simplicité, d’où naît une série de portraits hauts en couleurs.
Sophie Thébault monte essentiellement des textes d’auteurs contemporains, de Philippe Minayna à Remi De Vos ou Urs Widme
r en passant par Christophe Pellet ou Jean-Luc Lagarce : elle a une fois de plus tenu son pari.

 

Mireille Davidovici

 

À tous ceux qui est paru aux éditions Théâtrales- 2002 – 68 pages.

 

 

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