Marguerite et moi Duras

Fabienne Boueroux

Fabienne Boueroux

Marguerite et moi,  mise en scène  de Fatima Soualhia Manet et Christophe Casamance.

Marguerite Duras aurait eu cent ans en 2014, d’où le grand nombre de reprises de pièces d’elle, ou de spectacles autour d’elle (voir Le Théâtre du Blog).  Marguerite et moi, rassemble des textes d’entretiens télé et radio et  quelques extraits de son œuvre, où elle nous propose sa façon de penser, de voir le monde  avec  des thèmes aussi différents que la cuisine, le rire, la politique, les hommes et les femmes…
Fatima Soualhia Manet incarne  Marguerite Duras face à un journaliste discret  et  la plupart du temps, hors du plateau. Duras se laisse aller, mais s’écoute aussi parfois parler, jouant habilement de son personnage et sachant bien qu’elle sera écoutée ou lue. « Toujours saisie sur le vif, cette parole pleine de férocité, de roublardise et de drôlerie donne à voir des prises de position nettement tranchées »? dit Fatima Soualhia Manet. C‘est tout à fait ça: une sagacité de tous les instants.
Bien sûr, c’est Duras mais c’est parfois tout simplement du bon sens, des choses qui pourraient être entendues dans la bouche de n’importe qui. Mais souvent, c’est quand même très fin, très engagé et habilement exprimé…  Quand, parfois, elle répond parfois à des questions que seuls certains journalistes (malins) sont capables de poser comme, par  exemple la différence entre l’homme et la femme, elle développe une théorie intéressante sur la féminité, en évacuant la maternité pour parler de sorcellerie.
La question de l’enfance revient aussi très souvent, au début du spectacle,  comme un faux exotisme sur lequel
elle en a assez d’être interrogée, et, à la fin, comme d’un souvenir ému, lointain. La question politique est aussi très présente, avec des termes et des engagements qui représentent bien une époque avec  le communisme stalinien, la logique de parti, la nécessité d’être « de gauche », l’idéologie...
  Ce découpage nous permet de mieux fixer Duras dans son temps, et la mise en scène alterne intelligemment des détails, voire des anecdotes et des points de vue forts, parfois douloureux comme son rapport à l’alcool qui l’a amené à se détruire et presque à aimer ça. Fatima Soulhia Manet produit un travail d’acteur impressionnant, d’une grande minutie, dans la ressemblance mais jamais dans l’imitation.
La période couverte dure environ vingt ans et on voit bien Duras évoluer. Quelques détails nous y aident: la tenue bien sûr mais aussi les cigarettes, qui changent de marque au fil des années, le fameux camion, « personnage » de  son film. Et l’actrice-caméléon propose donc plusieurs visages de Duras, une évolution en trois temps qui est  saisissante.
Les quelques interventions du journaliste permettent de bien rythmer le jeu, d’offrir des pauses et
aussi de préparer de beaux monologues. Une vidéo occupe aussi le fond de scène pour quelques minutes, mêlant Fatima Soulhia Manet et Duras elle-même. Pas vraiment indispensable, elle nous permet cependant une respiration  poétique par l’image, alors que ce sont plutôt les mots qui fusent.
Après cette heure passée avec une Marguerite Duras plus sincère que nature, mais plus cabotine aussi, on se dit qu’il n’y a guère d’écrivain  aujourd’hui qui supporterait la comparaison…

Julien Barsan

Théâtre de Belleville, du mardi au samedi 19h15, et le dimanche à 20h30.


Archive pour 22 février, 2014

Marguerite et moi Duras

Fabienne Boueroux

Fabienne Boueroux

Marguerite et moi,  mise en scène  de Fatima Soualhia Manet et Christophe Casamance.

Marguerite Duras aurait eu cent ans en 2014, d’où le grand nombre de reprises de pièces d’elle, ou de spectacles autour d’elle (voir Le Théâtre du Blog).  Marguerite et moi, rassemble des textes d’entretiens télé et radio et  quelques extraits de son œuvre, où elle nous propose sa façon de penser, de voir le monde  avec  des thèmes aussi différents que la cuisine, le rire, la politique, les hommes et les femmes…
Fatima Soualhia Manet incarne  Marguerite Duras face à un journaliste discret  et  la plupart du temps, hors du plateau. Duras se laisse aller, mais s’écoute aussi parfois parler, jouant habilement de son personnage et sachant bien qu’elle sera écoutée ou lue. « Toujours saisie sur le vif, cette parole pleine de férocité, de roublardise et de drôlerie donne à voir des prises de position nettement tranchées »? dit Fatima Soualhia Manet. C‘est tout à fait ça: une sagacité de tous les instants.
Bien sûr, c’est Duras mais c’est parfois tout simplement du bon sens, des choses qui pourraient être entendues dans la bouche de n’importe qui. Mais souvent, c’est quand même très fin, très engagé et habilement exprimé…  Quand, parfois, elle répond parfois à des questions que seuls certains journalistes (malins) sont capables de poser comme, par  exemple la différence entre l’homme et la femme, elle développe une théorie intéressante sur la féminité, en évacuant la maternité pour parler de sorcellerie.
La question de l’enfance revient aussi très souvent, au début du spectacle,  comme un faux exotisme sur lequel
elle en a assez d’être interrogée, et, à la fin, comme d’un souvenir ému, lointain. La question politique est aussi très présente, avec des termes et des engagements qui représentent bien une époque avec  le communisme stalinien, la logique de parti, la nécessité d’être « de gauche », l’idéologie...
  Ce découpage nous permet de mieux fixer Duras dans son temps, et la mise en scène alterne intelligemment des détails, voire des anecdotes et des points de vue forts, parfois douloureux comme son rapport à l’alcool qui l’a amené à se détruire et presque à aimer ça. Fatima Soulhia Manet produit un travail d’acteur impressionnant, d’une grande minutie, dans la ressemblance mais jamais dans l’imitation.
La période couverte dure environ vingt ans et on voit bien Duras évoluer. Quelques détails nous y aident: la tenue bien sûr mais aussi les cigarettes, qui changent de marque au fil des années, le fameux camion, « personnage » de  son film. Et l’actrice-caméléon propose donc plusieurs visages de Duras, une évolution en trois temps qui est  saisissante.
Les quelques interventions du journaliste permettent de bien rythmer le jeu, d’offrir des pauses et
aussi de préparer de beaux monologues. Une vidéo occupe aussi le fond de scène pour quelques minutes, mêlant Fatima Soulhia Manet et Duras elle-même. Pas vraiment indispensable, elle nous permet cependant une respiration  poétique par l’image, alors que ce sont plutôt les mots qui fusent.
Après cette heure passée avec une Marguerite Duras plus sincère que nature, mais plus cabotine aussi, on se dit qu’il n’y a guère d’écrivain  aujourd’hui qui supporterait la comparaison…

Julien Barsan

Théâtre de Belleville, du mardi au samedi 19h15, et le dimanche à 20h30.

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