Macbeth, de William Shakespeare, Th du Soleil

Macbeth©Michèle-Laurent6

Macbeth de William Shakespeare, traduit et dirigé par Ariane Mnouchkine, musique de Jean-Jacques Lemêtre.

« – Qu’appelez-vous pouvoir ? Un logement dans un palais ?… La curiosité des foules ? … Les hommes qui se courbent ? Les hommes qui se couchent ? La télévision à la botte ? … La fierté familiale ? La visite des ambassadeurs ? (…) Un budget grevé? Une France triste ? Les jeunes sous un ciel vide, les pieds dans une poubelle ? Un président qui règne, qui gouverne, qui juge, qui légifère, qui commente lui-même les nouvelles qu’il inspire, monarque souverain d’un pouvoir absolu ? ». Ainsi, résonnent encore les questions de François Mitterrand dans Ici et maintenant.Autre temps, autres mœurs, qu’on soit à la fin de notre siècle passé, au début du XXIème ou du XVIème siècle avec le Macbeth de Shakespeare, le pouvoir d’un seul dépend toujours de l’obéissance ou de la résistance de tous les autres, éclairés ou aveuglés encore par quelques-uns.Rendez-vous est donné à des arrivées d'équipes gouvernementales sur un tarmac d’aéroport; les ministres font des réponses convenues à des questions convenues, à une traînée de journalistes. Les cameramen sont avides d’images et les techniciens tendent leurs micros pour recueillir des paroles éphémères… Un fouillis d’individus tente de s’approcher du pouvoir et de ses salons dorés et pénètre à l’intérieur de nos vies mêmes de téléspectateurs pour voir ces albums de photos papier glacé, résidus d’une existence mensongère, où chacun joue sa partition mondaine.La terre tourne, au rythme fébrile des captations audiovisuelles, et quand vrombissent les hélicoptères au-dessus des têtes, le spectateur s'imagine dans le personnage du patrouilleur d’Apocalypse now (1979) imaginé par Coppola, qui part, pendant la guerre du Vietnam, à la recherche d’un officier au parcours exemplaire, devenu fou sanguinaire.À la fin du spectacle, Macbeth se terre dans une sorte de bunker, rappel des fins tragiques de Saddam Hussein, Kadhafi, Hitler et bien d’autres. Le temps semble n'y rien faire…Shakespeare situe sa pièce à l’époque des batailles entre la Norvège et l’Écosse. Macbeth – cousin du roi Duncan et chef de son armée – étouffe une révolte, ce qui va le mener près du trône. Aussi imagine-t-il devenir roi, et sur les conseils, et avec l’aide de Lady Macbeth, il tuera le souverain légitime, les témoins de son crime et ceux qui le soupçonnent de l'avoir commis , puis les fils et les amis des victimes : «Dans le sang, j’ai marché si profond que je n’avançais plus. Revenir en arrière serait aussi pénible que continuer jusqu’au bout. » (III, 5)Le sanguinaire Macbeth, que Serge Nicolaï incarne avec force et rage, est hanté par l’obsession effrayante d’avoir tué le roi, et tourmenté par des images angoissantes, et son destin tourne au cauchemar… Nirupama Nityanandan joue une lady Macbeth tendue et efficace qui perd peu à peu les rênes, tragiquement seule auprès de son époux devenu fou. Saluons l'élégance de Duccio Bellugi-Vannuccini dans le rôle de Malcolm et de Martial Jacques dans celui de Donalbain, la ténacité de Vincent Mangado (Banquo) et de Sébastien Mottet-Michel (Mac Duff). Mention spéciale à Eve Doe-Bruce au comique de commedia dell’arte.La mise en scène d’Ariane Mnouchkine et du Théâtre du Soleil participe de leurs convictions citoyennes, et de leur engagement politique.Tout le spectacle témoigne en fait de la violence du monde. Le public est convié, avec le travail de cette compagnie cinquantenaire, à un spectacle entre vie et rêve, sorte de film irréel en trois dimensions, où, sur scène, s'impose avec rigueur le corps des acteurs accompagnés par la musique de Jean-Jacques Lemêtre.Une quarantaine de comédiens, en costumes coloniaux anglais, ou en uniformes militaires actuels, joue en effet les personnages principaux, les servants de scène, tout un personnel de maisonnée, des officiers et des soldats, des milices et des résistants investit le plateau en silence, avec la grâce d’un ballet chorégraphié jusque dans les moindres détails. Ses déplacements font frémir les rideaux de soie qui entourent la scène: c'est comme tout un peuple face aux mégalomanies des grands.On évoque ici l'Ecosse avec des tapis de landes et de bruyères, des troupeaux de moutons laineux, des vertes collines et de brumeuses forêts, et on devine la Tamise, en bas d’un café entouré de murets de briques. Les trois sorcières, fieffées et laides coquines, tiennent leur condition avec panache, coiffées d’une perruque façon maison de poupée. Dans l’écurie du château de Macbeth, deux chevaux (presque vrais) ruent dans leur box, quand ils sentent l’effroi de leurs maîtres qui viennent d’accomplir leur acte odieux.Quant au jardin de Macbeth, c'est une fresque vivante de toute beauté, une roseraie, avec des fleurs roses et blanches à foison, dont les pétales clairs jonchent le sol comme pour une cérémonie, remplacés ensuite par d'autres rouge sang qui s’incrustent partout, dans les décorations du mobilier, comme dans le fond sinueux des âmes.Ce rendez-vous de théâtre – véritable souffle d’une troupe – honore l’imaginaire.

Véronique Hotte

Il y a foule et les places ont été réservées depuis longtemps. Ariane Mnouchkine est à l'entrée pour accueillir le public et valider les tickets d'entrée; ici, pas de lecture électronique du code, et c'est tant mieux. Ariane déchirant les tickets, c'est devenu une image mythique du théâtre contemporain depuis cinquante ans. Avec des spectacles souvent très bons, voire excellents, et jamais médiocres, depuis les premiers comme Les Petits bourgeois de Gorki que nous avions vu en 64, Barbe-Bleue d'Offenbach, monté par ses comédiens dans une salle de patronage, avec des costumes de cinéma prêtés par son père, une action de rue en six minutes près des usines Renault, et bien sûr, celui, fameux, qui avait lancé le Théâtre du Soleil: La Cuisine d'Arnold Wesker dans une petite salle de Montmartre qui accueillait les matches de boxe. Et enfin le célèbrissime 1789, à la Cartoucherie, encore très peu chauffée avant d'être vraiment restaurée, suivi de 1793.Souvenirs, souvenirs…Cinquante ans après, le Théâtre du Soleil est toujours là, Ariane aussi, toujours déterminée et combative, malgré les épreuves: « « Mes engagements ont toujours été idéalistes » dit-elle, avec raison. Les comédiens ne sont évidemment plus les mêmes, certains ont disparu comme Philippe Léotard, ou Louba Guertchikoff, qui, un an avant sa mort à 80 ans, disait crânement:  » Je ne veux pas de médicaments contre ce cancer, j'ai eu une belle vie, c'est bien comme cela ». Et les compagnons de la première heure, comme Françoise Tournafond, sa créatrice de costumes, Catherine Franck sa photographe, épouse de Cartier-Bresson, et Guy-Claude François, son excellent scénographe disparu lui, cette année ( voir Le Théâtre du Blog).Impossible de ne pas penser à eux quand on pénètre pour la x ème fois, avec émotion et respect à la fois, sous les fermes Polonceau du grand hall du Soleil, dont le sol est couvert des tapis-brosse de L'Age d'or. Les murs sont peints avec, entre autres, avec une grande fresque de Londres et un portrait de Shakespeare, des affiches des Macbeth: celui d'Henry Irvin à Londres, de Kean, de metteurs en scène russes ou japonais; il y a aussi, en clin d'œil sans doute, la couverture du texte de Macbeth, le premier sans doute qu'ait vu Ariane Mnouchkine, celui du T.N.P., quand Vilar avait monté et joué la pièce avec Maria Casarès. On est toujours accueilli chaleureusement au Théâtre du Soleil comme dans peu de théâtres français, institutionnels ou non… Et c'est, à chaque fois, comme une sorte de pèlerinage dans cette Cartoucherie, devenu un lieu mythique, et dont tous les gens de théâtre français, et même étrangers, connaissent au moins l'adresse… Et Macbeth? Nous ne somme pas tout à fait d'accord avec notre amie Véronique Hotte. Que dire en effet, sinon notre grande déception! Certes, on ne peut demander à Ariane Mnouchkine de refaire une mise en scène proche de celles de ses flamboyants Shakespeare des années 80, comme Richard II, La Nuit des rois, ou Henri IV, cela n'aurait aucun sens. Mais ici, désolé, on ne voit pas bien ce qu'elle a voulu réaliser avec cinquante acteurs, comme si elle voulait nous persuader que le nombre faisait l'efficacité. Et on ne voit pas bien ici ni la violence politique, ni non plus la folie qui s'empare du couple infernal après qu'ils aient tué le roi Duncan.Le spectacle a été réglé au cordeau et avec une exemplaire minutie: effets sonores et visuels, impeccables entrées et sorties de scène, avec une quinzaine de comédiens/serviteurs de scène chargés de balayer le sol et d'introduire puis de déménager aussi vite après une scène: lande en tapis de fibres de coco, ou arrière-boutique de fleuriste avec bouquets et de plantes en pot pour figurer un jardin, ou encore meubles et tapis de salon. C'est parfaitement orchestré et ressemble à une sorte de happening dont on apprécie la vision, même si, paradoxalement, il n'y a pas grand chose à voir… Cela fait partie intégrante du spectacle mais le rallonge inutilement. En fait, l'absence de Guy-Claude François se fait ici cruellement sentir et on peut mesurer combien il aura été aussi, et depuis longtemps, le véritable co-auteur des spectacles du Soleil, comme son ami Richard Peduzzi le fut pour ceux de Patrice Chéreau. Ariane Mnouchkine possède toujours cette très grande maîtrise de l'image et du son, mais ces déménagements incessants parasitent la mise en scène, en cassent et en ralentissent singulièrement le rythme. Tout se passe en fait comme si elle avait eu peur de rater le train de la modernité. En habillant les soldats en uniforme contemporain, et en suggérant la présence de dictateurs contemporains (Hussein, Khadafi…) avec vacarme d’hélicoptères et cohortes de photographes et reporters de télévision… Bref, ce ballet confus est bien peu crédible, et ne fonctionne pas. D'autant plus que les deux acteurs choisis pour jouer Macbeth et Lady Macbeth (Serge Nicolaï et Nirupama Nityanandan) ne sont pas du tout à la hauteur de leurs personnages. Lui, à la fin, enfermé dans une sorte de bunker, possède (mais c'est bien le seul moment!) une vérité tragique mais la comédienne, qu'on entend souvent mal, n'est pas convaincante et n'a rien de cette redoutable épouse, à la fois séductrice et monstrueuse qui pousse son mari au crime. Et comme ce couple infernal est peu crédible, la mise en scène déjà alourdie par ces déménagements inutiles et permanents, ne tient plus trop la route. Même si on entend bien le texte, articulé de façon presque caricaturale, (on ne sait pourquoi les acteurs tapent sur la fin des mots, comme aucun apprenti comédien n'oserait le faire), on commence à s'ennuyer assez vite d'autant que le spectacle, coupé d'un trop long entracte, dure quatre heures! Le public, toutes générations confondues, trouve le temps long… Bref, on est en effet dans l'imagerie, voire dans la bande dessinée (comme la scène dans l'écurie avec ces deux beaux chevaux, plus vrais que nature, dans leurs stalles) mais jamais vraiment dans l'action dramatique de cette pièce difficile mais souvent passionnante dont le texte recèle de belle pépites. Sauf à de trop rares moments, comme dans la scène du portier très bien jouée, ou celle du banquet avec une image sublime: des pétales de rose rouges en rivière de sang… Et il y a la partition sonore de Jean-Jacques Lemêtre en direct, aussi discrète qu'efficace, qui introduit un climat d'angoisse…Mais, comme beaucoup d'autres metteurs en scène plus jeunes qu'elle et qui n'ont pas sa formidable expérience, Ariane Mnouchkine semble s'être fait piéger ici par un sorte de primauté, voire de dictature de l'image, (la « médiacratie » comme dit Régis Debray), alors que nous sommes tous impressionnés par la seule force des images mentales que développe une simple phrase de Shakespeare. Ainsi comme dans les célèbres mots prononcés par Lady Macbeth:  » Tous les parfums de l'Arabie…A la question: avait-on besoin de tout ce bordel scénique pour jouer Macbeth, la réponse est non! Et c'est le défaut majeur de ce spectacle pourtant très soigné, très professionnel mais qui, la plupart du temps, tourne un peu à vide. Après quelque vingt représentations, Ariane Mnouchkine était encore à sa table de travail dans la salle, prenant des notes, comme si elle était insatisfaite … Il y avait ce soir-là, des fans inconditionnels du Soleil dans le public mais le spectacle a été fraîchement applaudi; donc, à vous de décider, si vous avez envie de tenter l'aventure ou non…. Le Théâtre du Soleil prépare un autre Macbeth « contemporain », écrit par Hélène Cixous… Croisons les doigts.

Philippe du Vignal

Théâtre du Soleil, Cartoucherie de Vincennes, route du Champ-de-Manœuvre, Métro Château de Vincennes, et navette gratuite. T. : 01-43-74-24-08. Les mercredi, jeudi et vendredi à 19 h 30, samedi à 13 h 30 et 19 h 30, dimanche à 13 h 30. Places de 15 € à 29 €€
Théâtre du Soleil.fr.

Le texte dans la traduction d’Ariane Mnouchkine, coédité avec les Editions Théâtrales,sera disponible en librairie à l’automne prochain, et est déjà en vente à la librairie du Théâtre du Soleil.

 


Archive pour mai, 2014

SHE par Rihoko Sato

SHE, interprétation de Rihoko Sato, direction artistique de Saburo Teshigawara

 

photosheeMoment unique à la Maison de la Culture du Japon: un solo d’une grande intensité émotionnelle. «Si le cycle de la vie ne se répétait pas, SHE souffrirait-elle de ne pas mourir plusieurs fois? Cette pente abrupte, la monterait-elle, ou la descendrait-elle? Éprouverait-elle de la peine, ou de la joie,  à la gravir? Serait-elle grisée par la descente, ou effrayée à l’idée d’une chute?» dit Saburo Teshigawara, de son interprète (qui est aussi son assistante et  qui collabore avec lui depuis 1996.
Il a créé sa compagnie Karas (Corbeau) en 1985, et est respecté dans le monde entier pour son talent,  en particulier à l’Opéra de Paris, où il a réalisé un spectacle cette saison. Artiste complet, il est à la fois chorégraphe, dessinateur, costumier, scénographe et créateur des lumières.
Rihoko Sato, elle, a suivi une formation de gymnaste, et a reçu plusieurs prix de danse ; elle dit de Saburo Teshigawara : «Sa danse est unique, incomparable. Sa méthode nous enseigne qu’avant de danser, il faut d’abord revenir à un point important: ressentir son corps et l’environnement où il se trouve. À partir de là, il propose une technique qui permet à chacun de questionner son corps et d’inventer des mouvements d’une grande nouveauté».
La réussite de ce solo fascinant, où existe une part d’improvisation, tient d’abord aux déplacements de la danseuse:  lents ou d’une vivacité animale, mais aussi à des éclairages  très mouvants
d’une grande précision et remarquables par les multiples propositions qu’ils offrent au corps de l’artiste sur le plateau nu, (la danseuse et les lumières semblent se fondre dans un acte amoureux), sur des musiques contemporaine  ou  classiques choisies par le chorégraphe. Il y a, entre autres, celle de Georges Delerue  pour  Le Mépris de Jean-Luc Godard, où le narrateur,  à propos du cinéma, cite le critique André Bazin,. «Il substitue, dit-il,  à notre regard un monde qui s’accorde à nos désirs».
Remarque qui  convient parfaitement à ce solo d’une beauté sensuelle totale…

 

Jean Couturier

Maison de la Culture du Japon du 7 au 9 mai; un autre spectacle de Saburo Teshigawara DAH-DAH-SKO-DAH-DAH sera joué au Théâtre National de Chaillot du 13 au 16 mai. 

Peer Gynt

Frédéric Cussey 

 

Peer Gynt d’Henrik Ibsen, traduction de François Regnault, mise en scène de Christine Berg.

 

Comment définir le mythe de Peer Gynt quand l’œuvre entière d’Ibsen se lit comme une mise en question des valeurs sociales et morales de la bourgeoisie du XIX ème siècle? Il a écrit la pièce en 1867,  trois ans après  être allé vivre  en Italie. Certains voient son héros comme l’antithèse du patriote volontaire de Brand (1865),  qu’avait mise en scène avec grâce Stéphane Braunschweig en 2005.
Mais  Peer Gynt est un esthète désinvolte qui joue avec la vie, sans jamais trouver le noyau de sa conscience. En quête de reconnaissance, ce menteur et hâbleur reste pour autant attachant, faible créature soumise à la loi d’un désir impérieux et d’une imagination fantasque. Coureur de jupons, il tombe amoureux de la pure Solveig à laquelle il reste lié en pensée. Le vaurien cherche, en parcourant le vaste monde, une vérité qui lui échappe -«être soi-même»-,  mais est forcé  aux rencontres de hasard, comme avec le Grand Courbe,  et avec  le roi des trolls qui lui scandent leur foi : «Suffis-toi, toi-même ».
Malgré les honneurs entrevus,  Perre Gynt refuse d’abandonner sa condition et retourne chez sa mère qui se meurt. Vingt ans plus tard, après avoir fait commerce d’or et d’esclaves en Afrique, il perd son butin et son navire sur le chemin du retour. On le retrouve prophète d’une tribu sauvage, puis, après avoir été  volé par la belle Anitra en Arabie, il est proclamé empereur des fous dans un asile d’Égypte.
De retour une nouvelle fois vers son pays, il rencontre le fondeur de boutons qui l’engage à faire don de son âme, un bouton mal fait qui sera refondu dans le grand chaudron. Il refusera ce pacte, et échoue après un nouveau naufrage chez Solveig qui lui apprend que sa vie est loin des bonheurs éphémères et près de la solitude d’exister…
Mettre en scène Peer Gynt à travers voyages, montagnes, désert et brousse, n’est pas chose facile, mais Christine Berg est bien à son affaire,  avec ses comédiens rageusement  énergiques et infatigables, et  elle emmène le spectateur  dans un tournis scénique qui débute à merveille avec la fameuse chevauchée fantastique rêvée par ce sacré bonimenteur.
Il suffit d’un rideau au voilage transparent que l’on tire,  et voici des images d’envols d’oiseaux, tandis que la silhouette du rêveur apparaît, chevauchant dans les airs un inquiétant bouc noir. Plus tard, vogue une goélette majestueuse.  Antoine Philippot,  est un très bon interprète d’un
Peer Gynt naturel et sans esbroufe, et  il joue de son physique d’athlète  mais aussi de l’art plus subtil de déclamer ou de chanter,  accompagné par un chœur de sept comédiens éblouissants (Moustafa Benaibout, Loïc Brabant, Céline Chéenne, Vanessa Fonte, Julien Lemoine, Marine Molard, Stephan Ramirez) qui  maîtrisent le plateau avec un rare brio. Ils savent qu’ils sont là pour s’amuser et divertir le public, et c’est une victoire.
Ces acteurs performants – ils chantent aussi – épousent tous les rôles de ce théâtre sombre et envoûtant,  aux parois de bois brut de baraque de foire, éclairé de guirlandes de loupiotes colorées, avec piste de cirque et clown blanc, costumes scintillants et habits d’arlequin, trapéziste aux jambes nues, travestis pleins d’humour. C’est  comme un cocktail de figures imaginaires et mythiques échappées d’une lanterne magique.
Dans 
la scénographie très réussie de Pierre-André Weitz, ils figurent des présences diaboliques à la démarche boitillante, ou des invités au mariage, avec des  costumes sombres et en haut de forme noir, ou ils inventent des silhouettes troublantes de gnomes ou de bêtes démoniaques à moitié humaines et à la longue queue de rat, accroupis ou avachis, grimés et méconnaissables, mimant encore des étirements de chat, vociférant et agressant le pauvre Peer Gynt. Et  le public reste fasciné par la justesse des poses, et l’élan des mouvements esquissés
L’accompagnement musical à vue de Gabriel Philippot avec Julien Lemoine – percussions, piano et trompette – ajoute une  note joyeuse à ce rendez-vous festif dans les bas et hauts fonds de l’être.

 

Véronique Hotte

 

Théâtre de la Tempête à La Cartoucherie, du 8 mai au 8 juin, du mardi au samedi à 20h, dimanche à 16h. T : 01 43 28 36 36

 

 

 

 

Élégie

Élégie, chorégraphie d’Olivier Dubois, musique de Wagner par le Ballet National de Marseille

photoAu cœur du volcan pourrait être le sous-titre de cette création conçue par le chorégraphe, qui s’est inspiré de la première des Elégies de Duino, de Rainer Maria Rilke, avec un plateau envahi par la fumée dans une semi-obscurité et  la bande sonore, faite de pluie, de tonnerre et de vibrations telluriques. Au milieu d’un magma noir mouvant,  apparaît alors le corps à demi-nu de Gabor Halasz, qui veut se défaire de cette masse protéiforme sans y parvenir.
Il s’ensuit une lutte violente entre cet homme  qui réussit à pénétrer ce magma d’ombres noires des seize autres danseurs et danseuses qui se laissent faire mais aussi parfois le rejettent.Au bout d’une vingtaine de minutes, une paix de courte durée, s’installe et l’ensemble des corps forment un piédestal à la gloire du danseur, qui prend alors une posture de statue antique,  sur la musique au piano d’une Élégie de Wagner.
Le spectacle dure une heure, et la deuxième partie de cette heure de spectacle révèle cette fois le corps de
Malgorzata Czajowska,une belle danseuse aux longs cheveux blonds; comme l’homme, elle nait progressivement de ce même magna, et si ses gestes sont plus doux, la lutte est identique, et elle aussi, sera portée en gloire,  avant d’être à nouveau combattue par le groupe.
Cet impossible dialogue entre un individu et la masse de corps qui forme un décor mobile, est d’une grande beauté plastique, et révèle un  beau travail d’écoute tactile entre les danseurs de noir vêtus, et la danseuse. On sent qu’une vraie confiance les relie entre eux…
Cette Elégie constitue un des points forts de ces riches Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine Saint-Denis.

 

Jean Couturier

 MC93 les 6 et 7 mai.

Les ateliers de formation continue à la mise en scène du Conservatoire national

Les ateliers de formation continue à la mise en scène du Conservatoire national.

  « Présentation  publique du travail des stagiaires en formation continue à la mise en scène qui présenteront des formes courtes, ainsi qu’une création collective. Accompagnés dans cette aventure par Matthias Langhoff »dit l’invitation.  Donc, cela pouvait mettre l’eau à la bouche…
Et, pour faire bon poids, le programme s’orne d’une belle citation de Louis Jouvet attirante: « Le metteur en scène est une manière d’amoureux qui tire son talent, son invention et la joie de son travail, du talent, de l’invention et de la joie qui emprunte aux autres ou qu’il suscite en eux ».
Cela se passe en trois  moments: d’abord, la première partie de  cette présentation:
Bêtes, chiennes et autres créatures, de Luis Enrique Gutiérrez Ortiz Monastero qu’a mise en scène Luca Antonuci. Il s’agit, dans cette pièce, d’un jeune couple avec  leur  fils, figuré ici par une grande poupée,  qui ne quittent guère l’espace intime  d’un lit conjugal affaissé.  Ils sont visiblement très pauvres, et leur quotidien a les couleurs du tragique et de la violence les plus absolus.
L’auteur de cette pièce est un écrivain de quarante-six ans, bien connu au Mexique, tant par son théâtre que par ses nouvelles et poèmes. 
La pièce, créée en 2005 dans son pays, l’a été, il y a deux ans en France, et est construite en trois moments qui parlent de la rupture amoureuse, du bien et du mal, et des rapports complexes entre une femme et un homme.
C’est le premier moment qu’a choisi de mettre en scène Luca Antonuci mais rien ne décolle vraiment dans cette confrontation qui devrait être beaucoup plus physique; ce travail reste assez approximatif, sans doute à cause d’un éclairage des plus parcimonieux, et de projections de peintures en fond de scène anecdotiques. Et surtout à cause d’une direction d’acteurs  faiblarde. Bref, mieux vaut oublier…
Le second projet, d’après La Comédie du langage de Jean Tardieu, parue en 1987,  et mise en scène ici par Bénédicte Budan, est le seul qui soit réussi. Elle fait entrer, en file indienne impeccable, ses neuf acteurs,  filles en mini-robe et bas noirs, garçons en costume et chemise noirs, qui, trente secondes après, ressortent sans avoir prononcé un seul mot, entrée qu’ils répéteront une nouvelle fois. Avant de s’installer, munis de pupitres pliants mais sans partition, comme un petit orchestre vocal, dirigé, avec un sérieux imperturbable, par l’un des garçons.  Cela a un petit parfum Pina Bausch, disparue il y a déjà trois ans, mais c’est bien vu.
Cette courte pièce, à la fois intelligente et jubilatoire, pleine de la poésie de cet écrivain fabuleux disparu en 1995 et qui savait utiliser au théâtre toute la matière sonore de la langue française. Bénédicte Budan a, sans prétention aucune, réussi son coup. Bref, cela fait du bien par où cela passe, comme disait Monseigneur Marty.
Oui, mais voilà, il y a la suite, dont il faut aussi parler, et là, on frise l’encéphalogramme plat… Cela s’appelle  Britannicus Follies ( Pour en finir avec Jean Racine)
(sic) soit l’acte II et la scène II de l’acte IV de la pièce. « Racine, dit l’auteur de la chose, est une référence tellement pesante qu’il fallait m’en débarrasser pour avancer. Cette année au C.N.S.A.D était l’occasion  parfaite de questionner mon patrimoine(…) Un rapprochement m’a alors semblé possible entre le théâtre baroque, Artaud et le cabaret pour faire entendre ce furieux mélange de  cruauté, d’humour et d’amour, de jubilation et d’orgueil ». Bref, la Palme d’or 2014 dans la catégorie: notes d’intention aussi convenues que bêtes et prétentieuses.
Sur le plateau, une cuvette de toilettes maculée de sang installée sur roulettes
(sans doute la métaphore visuelle de la notion de « s’en débarrasser », chère à celui qui se prend sans doute pour un metteur en scène d’avant-garde inspiré. Où s’assied Néron en grande folle… C’est une sorte de très mauvaise semi-parodie de Racine, façon BD,  avec des images et un style poissants de vulgarité et d’effets faciles, et dénuée du moindre talent. Les personnages ont le visage maquillé de blanc, Julie joue les idiotes, Britannicus a la voix très rauque, Narcisse, lui, est chaussé d’escarpins dorés, et Agrippine, en vieilles pantoufles, est affublée d’une robe de chambre informe rouge sang.
Plus grave: la direction d’acteurs est ici aux abonnés absents… et  les pauvres élèves criaillent, font, côté gestuelle,  dans le n’importe quoi, avec une diction des plus médiocres, et sans jamais dire correctement un seul alexandrin. Ce qui serait pourtant le minimum syndical! Bref, la honte absolue, surtout dans une maison comme le Conservatoire. Tous aux abris!
A côté de nous, deux jeunes filles, élèves de première année, nous ont dit être écœurées, et on les comprend! L’auteur de cette chose a le droit de faire ce qu’il veut (on est encore en démocratie!), de pratiquer tous les exorcismes personnels qu’il veut. Mais… chez lui, avec ses copains mais pas en présentation publique d’un établissement national, ce qui a forcément un coût. On lui rappellera cette belle mise en garde de Marcel Bozonnet, ancien directeur du Cons à ses élèves: « N’oubliez pas qu’ici vous êtes des privilégiés et que la formation que vous suivez, vous la devez aussi au plus pauvre des Français imposables ».
On ne comprend pas que Matthias Langhoff (oui, vous avez bien lu, le grand Matthias Langhoff,  qui a suivi ces  projets! et qui n’était d’ailleurs pas là, le soir de la première, on ne sait pourquoi), ait laissé  atteindre ce sommet de suffisance et de vulgarité où on ose se réclamer d’Artaud, et du cabaret, l’une des plus  exigeantes et des plus respectables écoles qui soient!
Une mienne consœur a vite déserté, et un autre mien confrère m’avouait son accablement devant tant de médiocrité et de suffisance. On se demande comment Claire Lasne, metteuse en scène des plus remarquables, et nouvelle directrice du Cons, a pu valider cette présentation, sans doute programmée du temps de Mesguisch qui, lui, était là, et semblait béatement heureux! Le Conservatoire s’en remettra mais ce genre d’incroyable ratage met en cause la crédibilité même de l’enseignement qui y est dispensé…
En tout cas, méfiez-vous: si on vous invite à ces présentations de projets: si elles sont du même tonneau, vous n’aurez pas grand chose à y gagner, sinon une bonne dose de tristesse,  et une soirée perdue.

Philippe du Vignal

Conservatoire national, Paris mercredi 7 mai.

 

 

Ouverture du Carreau du Temple

Ouverture du Carreau du Temple

Un nouvel espace culturel de la Ville de Paris

 

carreau-du-templeLe 25 avril 2014, le Nouveau Carreau du Temple ouvrait ses portes. 6500 m2 au coeur du 3ème. Sauvé de la démolition en 1975, grâce à une longue et tenace mobilisation des habitants de l’ arrondissement, il a été désigné, trente ans après, par une votation locale, « espace pour tous », dédié à la culture, au sport, à l’événementiel et à la jeunesse. Une expérience de démocratie participative portée par le comité des habitants du 3è, l’ atelier local d’urbanisme (ALU)* et la Ville.
En ce week-end end de printemps, la halle rénovée par l’architecte Jean-François Milou révèle les arabesques aériennes de sa structure métallique mises en valeur par un fond en bois de chêne clair.
La halle centrale de 1800 m² est, pour l’occasion, flanquée de deux scènes : l’une accueille un concert de l’Orchestre national de jazz, coup d’envoi d’ une résidence au long cours de la formation, au Carreau. Malgré le bois, l’acoustique se prête mal à la musique programmée par le nouveau directeur de l’ONJ, Olivier Benoît, un free jazz radicalement épuré qui aurait mieux sonné dans l’auditorium de 250 places situé en sous sol.
Sur la scène d’en face se déroule un spectacle concocté par Guy Alloucherie, parti avec son équipe et la compagnie Hendrick van der zee, à la rencontre des habitants du quartier pour composer un portrait théâtral et vidéo du Carreau et de sa mémoire. Les interviews s’égrènent ponctuées par les évolutions d’un circassien sur un petit à vélo…
Au gré de la programmation, on découvre le vaste sous-sol. Dans le studio de Flore, 335 m2 destinés aux pratiques chorégraphiques et aux cultures urbaines, on assiste à une répétition publique d’Aux corps prochains.  » Nul ne sait ce que peut être un corps« , à partir de cette phrase de Spinoza commentée par Deleuze dans ses cours sur Spinoza, Denis Guenoun (en résidence au Carreau) entraîne ses comédiens dans une exploration cinétique des corps. Les artistes se déploient dans l’espace, se touchent se repoussent, selon leur propre pesanteur, les tempos et les respirations de chacun car, selon Deleuze, « Savoir danser, c’est précisément présenter son corps sous l’aspect sous lequel il se compose, en termes de danse, avec le corps du ou de la partenaire. C’est généralement ça qu’on appelle un rythme. » C’est une question de vitesse et de lenteur, et ce qu’expérimentent les comédiens devant nous, en improvisant, illustre bien ce que Spinoza indique lui-même « que le corps peut beaucoup de choses dont son esprit reste étonné ». Un travail passionnant à regarder et dont on pourra apprécier le résultat au Théâtre national de Chaillot au printemps 2015. Prochaines étapes du travail à suivre les 13-et 14 juin prochain.
De corps il sera aussi question avec deux chorégraphies dans l’auditorium. Toi et Moi, duo de la compagnie Chatha, met les danseurs à l’épreuve des bruits du monde. Ils réagissent aux vrombissements d’un hélicoptère, aux tirs de missiles, au fracas des bombes en se rétractant et se redéployant, levant un doigt accusateur vers le ciel, appelant au secours. Puis retrouvant le calme. Un jeu nerveux, tendu à l’extrême. Sans répit. Le solo ochestré par Herman Diephus, Let it be , offre un contrepoint plus décontracté sur la musique du tube mondial. En crooner ou en rocker, le danseur Teilo Troncy épouse les différents styles musicaux de ce standard chanté notamment par Elvis Presley, les Everly Brothers et nombre d’autres interprètes. Une bonne idée mais qui s’épuise en cours de route.
Par ailleurs, une exposition des travaux d’élèves de l’Ecole Duperré voisine, montre les recherches des Arts appliqués en matière de meubles et de vêtements. Un bel espace est dévolu à cette manifestation.
Le lieu comporte d’autres espaces dont un studio son, une salle de réunion, des vestiaires, des loges et des bureaux… Et un bar, bien sûr.
Des événements culturels sont déjà programmés en cette fin de saison ( théâtre, cinéma, danse, cirque, conférences…) ainsi que le salon du dessin.
Ce nouveau lieu est plein de promesses mais « restera-t-il un espace pour tous ? « , se demandent les membres de l’ALU qui distribuent un tract à l’entrée. Ces derniers craignent que les tarifs des prestations payantes écartent les habitants aux revenus modestes. Les contraintes budgétaires sont en effet énormes. Le Carreau est exploité par une société publique locale selon un contrat de délégation de service public. Il est subventionné pour un tiers seulement par la Ville, en contrepartie d’actions culturelles en direction des écoles, des Parisiens, via des associations de quartier. Il devra donc trouver en recettes propres deux tiers des trois millions d’Euros que représentent les charges d’exploitation.

À vos calculettes !

 

Mireille Davidovici

L’inauguration officielle a eu lieu du 25-27 avril

 

Le Carreau du Temple 4, rue Eugène Spuller- 75003 – www.carreaudutemple.eu

 

*ALU : www..alu3.fr

Festival Ado au Préau

Festival Ado au Préau, Centre Dramatique Régional de Vire.

Depuis déjà cinq ans, le Centre Dramatique Régional de Vire a organisé ce Festival Ado, pour et (aussi un peu), par les adolescents du bocage virois. Pendant cinq jours, la paisible bourgade normande vit au rythme des parades, défilés, expositions, rencontres, et, bien sûr, des spectacles qui sont joués un peu partout dans la ville. Aborder frontalement la question de l’adolescence et des spectacles qui conviendraient à cette période est courageux. D’habitude, les programmateurs éludent la question, soit en proposant des œuvres pour le jeune public et pour un autre un peu plus âgé, soit en raccrochant les lycéens aux propositions tout public. Ce festival tenait un peu du marathon mais on pouvait voir quatre spectacles dans la même journée…

Madison , chorégraphie de Sarah Crépin.

madison-Vincent-BoscSur le sol d’un gymnase, quinze danseurs dont dix jeunes amateurs, sont en tenue de football américain, pantalon court et serré, plastron et casque jaune rutilant. D’abord assis puis se lançant dans une marche réglée et effrénée, comme pour se présenter à nous.
Les passages s’enchaînent peu à peu, avec ou sans musique. Quand c’est en silence, le clapotis des pieds sur le sol crée un son étonnant. Au moment où ils enlèvent leurs casques, on découvre enfin ces jeunes danseurs professionnels et le voile se lève : d’interprètes un peu robotiques, ils  incarnent alors de vraies personnes.
Avec un micro qui circule, ils déclinent chacun leur prénom, nom et profession, au début de manière sérieuse et  ensuite un peu moins… On se laisse porter par le rythme, notamment du madison  dans plusieurs tableaux, et qui est le dénominateur commun entre tous: amateurs/professionnels, adolescents/adultes, garçons/filles…
Dans une sorte de superbe clair-obscur, les rayons du soleil couchant s’écrasent sur le sol. Il y a une atmosphère de série avec le football américain et ces mais  ces jeunes  expliquent leurs rêves : devenir comédien, pharmacien, super-héros… Et il y a une attention bienveillante des professionnels qui les accompagnent et qui leur communiquent sourires et plaisir de danser.
Le spectacle comporte une seule séquence où ces professionnels sont seuls sur le plateau. Dans un moment de danse bien calé et visuellement très réussi,  les tableaux à plusieurs se font de façon naturelle, sans télescopage et sans qu’on ait l’impression que les jeunes comptent les temps. Bref, c’est fluide, et jubilatoire pour le public…même s’il ne faudrait pas que ça dure plus longtemps..

Extraits de répétitions: http://vimeo.com/32165462

 

Chercher le garçon de Thomas Gornet, mise en scène de Marie Blondel.

chercher-le-garcon-Thierry-LaporteThomas Gornet, metteur en scène et comédien associé au Fracas de Montluçon, avait présenté une version superbe de Tout contre Léo de Christophe Honoré, qu’avait aussi mis en scène Marie Blondel. Il est aussi auteur pour la jeunesse, édité à L’Ecole des Loisirs/Medium et aux éditions du Rouergue.
Il s’est récemment trouvé au cœur d’une invraisemblable campagne de dénigrement de son livre Le Jour du slip / je porte la culotte, coécrit avec Anne Percin, par les mêmes gens qui avaient tenté de mettre en difficulté les auteurs de  Tous à poil. Thomas Gornet affronte ici les questions de la jeunesse et, pour lui, « l’adolescence est ce lieu mouvant de la rencontre entre l’enfant et l’adulte. Une sorte de passage de relais. C’est troublant quand l’enfant ne passe pas le relais, ou quand l’adulte refuse de le prendre ».
Dans  Chercher le garçon, il dépeint une adolescence comme une période tiraillée entre rêves légitimes,  obstacles du présent et sentiments naissants. Tony, un jeune lycéen, se réfugie dans la chaufferie de son lycée pour y pleurer seul ; il est surpris par Tom qui s’est installé là et qui enjoint Tony de ne pas le balancer.
Tom est un garçon mystérieux et fascinant, et on ne sait pas qui il est vraiment ni d’où il vient. C’est le début d’une histoire très forte, d’une attraction entre l’un et l’autre. On n’est pas loin de Koltès et de sa solitude des champs de coton.
Les deux garçons forgent le projet de tout quitter, et de le faire ensemble.
On pourrait s’attendre à ce qu’à la fin, ils tombent dans les bras l’un de l’autre, mais c’est beaucoup plus compliqué que cela! Le spectacle révèle deux comédiens, Pierre Bidard et Nicolas Dupont, et  on retrouve Rama Grinberg qu’on avait déjà appréciée dans  Le Nez dans la serrure (voir Le Théâtre du Blog).
Les deux garçons ont presque l’âge du rôle ; élèves au conservatoire de Caen, ils ont fait leurs études à Vire, et il y a dans le public leurs anciens professeurs et leurs amis. L’émotion était palpable. Incandescents, ils se lancent dans leur rôle à tel point qu’on à l’impression que leurs personnages leur ressemblent. Nous ne pouvons nous empêcher de penser à ce que nous étions, et comment ce temps de l’adolescence peut nous emmener vers des chemins différents en une fraction de seconde.
Comme dans Tout contre Léo, on retrouve ici la patte de la metteuse en scène, Marie Blondel et de la scénographe Lucie Joliot qui a conçu une structure de grilles suspendues créant de belles perspectives, qui peut aussi symboliser l’enfermement de cet âge.
La musique aussi a sa part dans la réussite de ce spectacle avec un moment de toute beauté. On pense aussi à  On est pas sérieux quand on a 17 ans  parce qu’on devient sérieux bien assez tôt. Des quatre pièces,  Chercher le Garçon semble la plus adaptée au thème de ce festival, celle qui touche au cœur sans éviter les sujets difficiles que l’on a tous traversés. Dans ce texte d’une actualité furieuse, l’universel côtoie le personnel.

 

Notre Jeunesse, conception de Nathalie Garraud et d’Olivier Saccomano.

IMG_8335©Camille-Lorin-1024x682La nuit du 14 juillet, habituellement nuit de fête, se croisent une jeune fille, téléconseillère et un garçon qui organise sa fuite … L’étau de l’histoire se resserre et on perçoit vite les rapports entre les personnages. Il est question ici de la jeunesse comme d’un passage, qui amènera vers des choix déterminants. C’est aussi le temps de tous les risques; dans une société qui ne fait pas de cadeau, comment avoir de l’espoir ? comment développer ses rêves quand on voit ses propres parents à bout de souffle ?
Il y a une réelle écriture de plateau, une dramaturgie très étudiée, et les scènes s’enchaînent avec beaucoup de métier et on ressent dès le début un vrai plaisir. Avec un plateau profond et bien utilisé, avec des lumières superbes, et un système de châssis en toile ajourée qui sert à la fois d’écran et de beau voile à peine opaque devant les comédiens. Il y a un mystérieux épicier arabe, une mère hirsute … Est-ce un choix de jeu pour mieux capter l’attention des jeunes spectateurs ?
La pièce est assez longue (1h45) mais riche en idées : comment faire un choix ? Comment vivre dans cette société ? Quelle place y-a-t-il pour les sentiments ? Mais on perd parfois l’objectif du titre, comme dans cette longue scène où il est question de dépannage au téléphone (les plates-formes téléphoniques sont à la mode au théâtre en ce moment !)
Le spectacle parle aussi d’engagement, de place dans la société, thèmes difficiles à traiter au théâtre et dont on a souvent tort de penser qu’ils n’intéressent pas les jeunes. Notre Jeunesse  a déjà fait l’objet de deux années d’études et de petites formes dans les lycées. Malgré tout, on peut se demander quelle réception  en ont les jeunes : en tout cas, l’intelligence qui nourrit ce projet théâtral les emmènent assez loin. Mais sans attendre un happy end, la vision du monde proposée ici laisse quand même peu d’espoir, c’est un peu dommage.

Le Monstre du couloir de David Greig, mise en scène de Philippe Baronnet.

Création du Préau pour ce festival Ado, elle a été confiée à Philippe Baronnet, jeune comédien qu’on avait déjà vu s’adresser aux jeunes dans  De la salive comme oxygène, spectacle présenté à Odyssées en Yvelines. Dans ce texte de David Greig, auteur écossais, la jeune Duck  doit s’occuper de son père, un ancien biker,  veuf, atteint de sclérose en plaques et qui perd peu à peu la vue. Duck doit préparer au mieux la venue de l’assistante sociale qui vient faire son inspection, déterminante pour les aides accordées à cette famille qui ne roule pas sur l’or.
En marge de cela, Duck vit sa vie de jeune fille, cachée derrière des grosses lunettes et une coiffure qui ne révèlent pas sa vraie beauté. Amoureuse d’un garçon qui lui demande une chose horrible afin de prouver son hétérosexualité aux yeux de tous. L’écriture est vigoureuse, anticonformiste et passionnante, les rebondissements ne manquent pas, et on ne s’ennuie guère.
Même si la mise en scène de Philippe Baronnet est assez marquée « jeune public »: sur-jeu vocal et gestuel,  costumes exagérés. Mais les comédiens sont remarquables, et le musicien propose une belle partition rock , avec quelques chansons qui rythment bien cette pièce. Mention spéciale à Olivia Chatain qui campe Duck! Les jeunes s’y retrouveront : un peu de Twilight, un peu d’Harry Potter : il y a ici un côté séries américaines pour adolescents.
C’est un peu du Ken Loach, avec des thèmes graves mais on rit beaucoup; le texte est d’un bel humour et d’une écriture savoureuse et ciselée qui joue avec le politiquement correct. Mais il ne faut pas trop se fier au titre qui fait lui aussi très spectacle jeune public sur les peurs enfantines! En tout cas, bravo pour les deux heures de ce délire bien organisé, même si l’histoire est invraisemblable.

 

Julien Barsan

 

Théâtre de la Colline / Saison 2014-2015

La saison 2014-2015 au Théâtre de la Colline.

schema_theatre_collineExercice obligé, la présentation de la nouvelle saison de la Colline fait salle comble. Jusque dans la petite salle où l’événement est retransmis par vidéo au public qui n’a pu trouver place dans la grande. Il faut dire que le théâtre affiche le chiffre record de 6700 abonnés !
Stéphane Braunschweig, entouré des artistes invités, ouvre la sixième et dernière année de son premier mandat. Placée sous le signe de la contradiction, et de la porosité entre l’intime et le monde : « The personal is political « , disait un slogan des années 1970, mais aujourd’hui, les univers privés se fissurent de partout, comme l’évoque la dernière pièce d’Arne Lygre, Rien de moi, où le protagoniste,  dans l’incapacité de faire bouger le monde, en invente un nouveau par la force des mots. Après Je disparais et Tage Unter, Stéphane Braunschweig poursuit son compagnonnage avec l’auteur norvégien. Cette création fera suite à Le Capital et son singe, une exploration d’un texte de Marx trop mal connu (son nom masque l’œuvre)  par Sylvain Creuzevault et ses treize acteurs.  » Il ne s’agira pas de rêves ni d’utopie…Ce sera de la comédie, pure et dure’ », annonce le metteur en scène, très intéressé par les circuits et le fétichisme de la marchandise,  et par la rotation du capital.
De révolution, il est aussi question dans
La Mission d’Heiner Müller. La révolution trahie par Bonaparte qui renie l’abolition de l’esclavage qu’allaient prêcher trois envoyés de la Convention en Jamaïque. Le metteur en scène allemand Michael Thalheimer, déjà venu à la Colline pour monter Combat de nègre et de chiens en 2010, s’intéresse à la radicalité de cette écriture de la pensée et aux anachronismes abrupts de Müller qui font résonner les idéologies à travers les siècles.
Il  va mettre en scène
Histoires de la forêt viennoise, où Von Horváth traite de la montée du nazisme dans une société gangrenée par les méchants. Cette effondrement est aussi vécu par le couple de La Ville de Martin Crimp, qui parle  de la contamination de l’intime par le malaise social. Le jeune metteur en scène Rémy Barché a monté la pièce de l’auteur anglais à Reims, et son travail a convaincu  Braunschweig,  qui l’a programmé. Hinkemann, (l’homme qui boîte), du grand dramaturge d’outre-Rhin Ernst Toller qui s’est suicidé en exil en 1939, est lui aussi un mutilé de la société réduit à l’impuissance physique et morale dans une Allemagne vaincue et revancharde : Christine Letailleur en a confié le rôle-titre à Stanislas Nordey qu’on retrouvera en fin de saison, avec Pasolini dont il avait fait découvrir le théâtre en France avec une pièce en vers proche de Théorème par son onirisme.
Célie Pauthe  mettra en scène
La Bête dans la jungle d’Henry James, adapté par Marguerite Duras. La tendance du moment est aussi  à l’adaptation de films au théâtre. Avec Il faut toujours terminer qu’est-ce qu’on a commencé , Nicolas Lieutard relit Le Mépris, à l’aune de Godard, Moravia et Homère, avec un spectacle qu’il avait déjà monté au Studio-Théâtre de Vitry (voir Le Théâtre du Blog).
Le collectif In quarto, dont l
‘écriture s’élabore au plateau revisite avec Du pain et des rolls  le fameux La maman et la putain avec des personnages d’aujourd’hui. C’est le choix des nombreux collectifs constitués actuellement pour survivre par les jeunes acteurs au sortir des écoles d’art dramatique.
Ainsi Les Hommes approximatifs réaliseront
Le Chagrin, à partir d’improvisations entre fiction et documentaire. La compagnie des Possédés, va, elle, tenter de réaliser une adaptation collective des onze cahiers de
Platonov, la pièce-fleuve de Tchekhov écrite avec l’ardeur fiévreuse de ses  vingt ans, qu’ils abordent comme celle d’un cousin de Dostoïevski.
C’est donc une saison contrastée avec des pièces du passé et d’autres récemment écrites… Avec une préoccupation commune à  ces collectifs: « Ouvrir des yeux de fougère sur le monde [...] Sur un monde où les battements d´ailes de l’espoir immense se distinguent à peine des autres bruits qui sont ceux de la terreur…. », comme l’a écrit André Breton
dans Nadja, cité en exergue dans le programme.

Mireille Davidovici

Théâtre de la Colline T. 01 44 62 52 52 – www.colline.fr

Albertine en cinq temps

Albertine en cinq temps, de Michel Tremblay, mise en scène de Lorraine Pintal.


Albertine5Temps7Albertine, un des personnages mémorables de la grande famille montréalaise créée par Michel Tremblay,  refait surface en 2014, après sa création  en 1982,  mise en scène à l’époque par André Brassard.
La pièce est un dialogue entre deux personnages, Albertine et sa sœur Madeleine,  assumé  par six voix dont chacune s’inscrit dans un espace/temps différent.  Chaque discours produit le fragment du récit  concernant la décennie représentée par la comédienne; cinq voix représentent Albertine à  30 ans, à 40 ans, à 50  ans, à 60 ans et à 70 ans.
La somme de ces fragments résonne comme une partition musicale où la superposition des lignes mélodiques distinctes constitue une construction musicale en contre-point comme dans une fugue de Bach.
L’orchestration des répliques commence par l’arrivée en douceur d’Albertine, à 70 ans, une revenante qui sort des coulisses, monte sur la scène, salue la salle,  retrouve son espace de jeu, et s’installe sur son fauteuil au milieu d’une  grande sculpture qui remplit la scène.
Ce volume scénographique comporte un grand collage d’éléments qui évoquent des détails architecturaux caractéristiques des vieilles maisons du quartier du  Plateau de Montréal, le quartier d’origine de la famille d’Albertine. Rapidement, la voix de  70 ans  accueille les quatre autres  voix et  chacune retrouve son espace prévu à l’intérieur de cette structure néo-constructiviste où, ensemble, elles vont  jouer les moments les plus difficiles  que le personnage ait  vécu pendant les différentes périodes de sa vie.
Ces espaces ne sont pas étanches pourtant, et même si la temporalité représentée par chaque Albertine délimite le contenu des discours, les  comédiennes transgressent les frontières spatio-temporelles en montant les marches, en traversant les passages, pour engager des conversations imaginaires avec celles qu’elles allaient devenir, ou celles qu’elles avaient déjà oubliées.
À travers le portrait d’Albertine, on retient avant tout, le calvaire de sa fille Thérèse dont le sort tragique est dû à l’ignorance de sa mère.  Vers la  fin du spectacle, les voix hurlant leur colère, retrouvent une étrange harmonie, une  manière d’exprimer  la rage  avec  un fil rythmique  cohérent, reliant  toutes ces différentes étapes de cette vie tragique. Albertine se heurte à sa sœur Madeleine, la contre-voix qui n’a jamais partagé la douleur d’Albertine, mais dont la présence est nécessaire pour rétablir l’équilibre dans cet oratorio de douleur. La parole proférée par ces voix dépassées par la réalité,  devient un espace confessionnel qui revêt un caractère thérapeutique pour les revenants, une manière de régler les affres de la mauvaise conscience.
Le texte n’a certainement rien perdu de  sa puissance mais la conception scénique de Lorraine Pintal ne valorise guère l’oralité de ce scénario qui repose autant sur la parole des comédiennes que sur les rapports avec ce décor.  Dès les premiers moments, la grande structure conçue par Michel Goulet, qui n’est pas laide en soi, impose une présence trop lourde. Elle incite les comédiennes à crier trop fort et  rend leurs mouvements maladroits, ce qui déplace l’attention vers l’interprétation individuelle et étouffe les nuances de la parole, sans le plus petit  moment  harmonieux, et  l’orchestration du  chœur  semble se faire  presque par hasard. Toute la mise en scène vocale ainsi que le décor,  font obstruction à la langue et  travaille  contre le texte.
Vers la fin, les variations de chaque voix parlante, les plaintes, les douleurs, les rages et la voix rêveuse d’Albertine à 60 ans, bourrée de drogues pour ne plus sentir la mort de sa fille, commencent à évoquer une harmonie sonore  plus douce, où les colères grinçantes   sont moins désagréables. Mais le spectacle  souffre  beaucoup  de cette mise en scène  restée insensible  aux  possibilités musicales de la langue de Tremblay.
Pourtant, la mise en espace de ce sextuor avec ses éléments rythmiques et sonores suffisait. On aurait pu éliminer tout  le décor et la pièce n’y aurait rien perdu. La metteuse  en scène semble avoir oublié  que Tremblay adore l’opéra; les qualités  musicales de la voix qui sous-tendent son écriture scénique, en sont les clefs! Bref,  cette  création est  passée à côté de l’essentiel…

Alvina Ruprecht

Centre national des arts d’Ottawa, du 30 avril au 3 mai.

 

 

Passion simple

Passion simple, d’Annie Ernaux, mis en scène de Jeanne Champagne.

 

ernauxLe titre est direct, imparable, comme ce que raconte Annie Ernaux. La passion est-elle simple? Sûrement pas, mais elle est entière, pleine, elle rejette tout le reste dans une périphérie pâle et inconsistante, en même temps qu’elle contamine tout autour d’elle. « À partir du mois de septembre, l’année dernière, je n’ai plus rien fait d’autre qu’attendre un homme : qu’il me téléphone et qu’il vienne chez moi ».
C’est tout, et c’est TOUT. Le corps, la peau, le sexe deviennent plus que le centre du monde : le seul monde réel, y compris dans l’acte sacré d’acheter des vêtements ou de la lingerie pour « lui », ou d’écouter des chansonnettes parfaitement sentimentales.
Il se trouve que l’homme, A.,  est étranger. Ce qui arrange bien la narratrice, comme l’auteur le fait observer dans ses cahiers : beaucoup de ces détails qui froissent, qui séparent un homme d’une femme sont mis sur le dos de cette autre culture. Du coup, ne reste que la passion, pure et simple, « ce qui s’approche le plus du néant » et de l’absolu.
Et puis la passion évolue. Aux joies torturées de l’attente,  succèdent les tortures de l’attente et de la jalousie, et puis le projet de rompre, pour échapper à cette nouvelle douleur, en même temps que le souhait que cette rupture n’arrive jamais. Un jour, ça se défait comme c’était venu, le monde se désenchante de LUI et retrouve son propre et modeste enchantement.
On pense parfois aux rituels d’Ariane dans Belle du seigneur, mais sans l’ironie cruelle de cette écriture masculine. Annie Ernaux, dans sa quête « d’écrire la vie », d’être au plus près du vrai, de l’essentiel, peut nous faire sourire de la passion sans succomber jamais à la tentation de l’ironie, ni du lyrisme. C’est comme ça : cette chose presque indicible qu’est la passion, est faite de toute une série de détails dérisoires –comment il remet ses chaussettes « après »- qui participent du sublime.
Le récit est apparemment simple à porter à la scène : il suffit de lui donner la voix et le corps d’une actrice. Jeanne Champagne est allée chercher un peu plus loin. Elle donne sur scène les signes conventionnels, cinématographiques, de la passion amoureuse : draps défaits, cheveux en liberté, combinaison de satin noir, jeu avec une chaussure veloutée à haut talon … L’imperméable, signe d’abandon précisément parce que c’est un vêtement de protection, marque le rejet dans les ténèbres extérieures, dans la ville illuminée, de la femme encore dans sa chambre d’amour. Un jour, on sort de la passion… Le théâtre abolit le temps d’ « après » la passion, comme la passion abolissait le temps.
Marie Matheron se tient avec finesse à la limite exacte entre le récit et le jeu, esquissant, savourant un geste qui serait un souvenir du corps, laissant monter de brefs éclats, aussitôt repris, comme des traces de ce qui se serait passé. Si l’on avait un reproche à lui faire, ce serait d’être trop docile à sa metteuse en scène : l’actrice, la comédienne a aussi sa vérité propre à dire sur la question.
Jeanne Champagne a l’habitude de dompter les textes de ces « femmes puissantes » que sont Anita Conti, Marguerite Duras, George Sand. Annie Ernaux est de la même trempe, de ces femmes libres qui ne se donnent que la contrainte d’être vraies. Cette lecture et cette mise en scène intelligente nous donnent encore plus envie de la lire et de la relire.

 

Christine Friedel

Théâtre du Lucernaire  à 18h30, T: 01 45 44 57 34, jusqu’au 7 juin

 Annie Ernaux, Ecrire la vie (anthologie de ses œuvres autobiographiques), édition Quarto.

 

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