Belgrade
Festival Impatience : La Viecca Vacca par la compagnie Salavatore Calcagno.
Ce festival initié par Olivier Py, alors directeur de l’Odéon, a pour but de révéler de jeunes troupes émergentes, il a, aujourd’hui, été repris par l’équipe du Cent-Quatre et depuis l’an dernier par le Théâtre du Rond-Point. Sept compagnies, pour la plupart des collectifs, présentent des créations inédites, pour deux représentations seulement.
Parmi elles, un étonnant spectacle, La Viecca vacca avec Florian Bardet, Clément Bondu, François Jaulin, Nicolas Mollard, et Julie Recoing: c’est une bizarre ronde de femmes en folie dans une cuisine, autour d’un jeune adolescent qu’elles cernent d’un amour dévorant. C’est la deuxième pièce d’un jeune Sicilien de 24 ans, né en Belgique, et formé à l’Institut National des Arts de Bruxelles.
Quatre femmes se déchaînent autour d’un jeune homme muet, pétrifié par ces manifestations d’amours étouffantes. Dans des images baroques et insolites, les femmes caquètent en italien, avec des échappées en français, seins nus posés sur la table, dans une baignoire où se trouve le jeune homme muet, et tel qu’il est sorti du ventre de sa mère.
La beauté des images qui se succèdent à un rythme rapide avec un certain humour, annihile toute vulgarité. Malgré des longueurs à la fin du spectacle qui font décrocher une partie du public, cette équipe solide semble avoir un bel avenir devant elle.
Belgrade, d’après Belgrade (chante ma langue le mystère du corps glorieux) d’Angelica Liddell, traduction de Christilla Vasserot, mise en scène de Thierry Jolivet, composition musicale de Jean-Baptiste Cognet et Yann Sandeau.
C’est un oratorio parfois chanté et accompagné par la musique très (trop?) puissante de deux musiciens rock sur un balcon surplombant le plateau, avec en bas, une chambre d’hôtel avec salle de bain.
Il y ainsi des hommes et des femmes dont un SDF, un employé d’hôtel, un admirateur de l’ancien dictateur et criminel, un croque-mort et une journaliste d’abord muette, puis furieuse dans les dernières minutes du spectacle, qui crient, chacun en monologuant, leur mal-être dans un Serbie post Milosevicienne, avec un langage des plus crus comme nous y habitués Angelica Liddell, avec des phrases de textes liturgiques en début de scène. Ces victimes ou complices disent la douleur, la violence et les haines, la misère collective de tout un peuple .
Les personnages, victimes ou complices croisés à la faveur d’une enquête menée par un jeune Occidental pour son père, sont à l’image de ce pays : meurtris jusque dans leur chair.Cette guerre qui a dévasté la Serbie est ici clamée avec désespoir… Devant ces affrontements fous, dans une ville à feu et à sang, notre Occident impuissant verse des larmes de crocodile. Une belle rage théâtrale mise en scène par un jeune metteur en scène qui dirige La Meute, un collectif d’acteurs lyonnais.
Édith Rappoport
Festival Impatience au Cent Quatre. www.104.fr
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