Rachel

Festival d’Avignon off

Rachel et ses amants de Rachel Monnat, mise en scène de Dominique Othenin-Girard

art rachel«On ne va tout de même pas aller voir un spectacle sous prétexte qu’à la fin, la comédienne se met à poil ! » : voilà une réflexion entendue dans les rues d’Avignon, adressée par une jeune femme à son compagnon. La nudité, même partielle comme ici, interpelle plus dans les spectacles du Off que dans ceux du In, où elle est considérée comme «artistique».
L’affiche du spectacle est explicite :  Rachel,  totalement nue, est figée dans un mouvement de «pole dance». Cette comédienne de trente ans, ancienne infirmière, est Suisse et a côtoyé les corps en souffrance,. Cette sensation fréquente que les soignants ont de notre mort imminente, peut expliquer le dévoilement autobiographique de sa jeune vie sexuelle.
Nous découvrons les différentes étapes de son existence, depuis qu’elle a trois ans, présentées avec une naïveté désarmante. Même si elle joue, elle semble assez sincère. Le public, ce soir là, était composé d’un quart de femmes, et ce sont elles qui se sont montrées les plus sensibles à ses propos.  Comme souvent, les hommes, eux, restent en retrait à cause d’une certaine peur du plaisir féminin qui les dépasse.
La comédienne ose mettre des mots sur sa propre jouissance, et évoque sa découverte de la sexualité, seule, à deux, ou à plusieurs, et abordant la notion de « femme fontaine ». Ponctuant son solo d’extraits de chansons françaises, interprétées par des figures de la séduction comme Édith Piaf, Maurice Chevalier ou Mistinguett, elle nous livre une partie de sa vie.

, «Je dédie cette danse, signale-t-elle, juste avant d’entreprendre son effeuillage, à tous les hommes que j’ai rencontrés, et à toutes les femmes, car j’aurai tellement voulu être à votre place pour pouvoir oser regarder librement cette danse.»  Le spectacle sera repris à Paris, comme pour nous prémunir de l’arrivée de l’hiver, une période propice au calfeutrage des corps, où nous entrons souvent dans une certaine forme d’hibernation!
 
Jean Couturier

Atelier 44, jusqu’au 26 juillet,   T.:04 90 16 94 31 et à  Paris du 4 septembre au 29 novembre, les jeudi, vendredi et samedi au théâtre du Gouvernail.   T:  01 48 03 49 92


Archive pour 21 juillet, 2014

Jean la chance de Brecht

Jean La Chance (Hans Im Glück) de Bertolt Brecht, mise en scène de Margarete Biereye et David Johnston par le Théâtre itinérant « Ton und Kirschen » du Wandertheater

 

Jean la Chance5©JP EstournetSur le site somptueux du cimetière à bateaux de Kerhervy, sur la rive du Blavet,  du côté de Lanester, le festival du Pont du bonhomme organisé par la Compagnie de l’Embarcadère  illumine l’espace, sous un bel arc-en-ciel improvisé et accompagné par  les cris stridents des mouettes.
  Avec le Théâtre itinérant Ton und Kirschen du Wandertheater, l’inspiration céleste est au rendez-vous pour ce spectacle, face à l’horizon marin et au  firmament, dans la magie de deux miroirs inversés.
Jean La Chance est une pièce de jeunesse inachevée de Bertolt Brecht, d’après un conte populaire collecté par les frères Grimm. L’histoire de Hans/Jean est celle d’un homme « fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui ».
La femme de Hans, simple paysanne, a quitté son mari un peu rêveur pour un séducteur,  mais elle lui a pourtant légué sa maison, qu’il va troque maladroitement contre une charrette et son cheval, un bien dégradé qu’il va de nouveau troquer contre un carrousel sommaire,  avant de se dénuder jusqu’à brader sa vie.
Escrocs et faux amis dépouillent et pillent à n’en plus finir leur victime maltraitée. Hans subit sans colère les vols qui l’accablent, il va même jusqu’à comprendre les « méchants » qui en sont les auteurs : « Ceux-là n’ont pas oublié qu’ils ont eu beaucoup de malheur. »
L’économie n’est fondée aujourd’hui que sur le faux marchandage de bénéfices financiers fulgurants de certains, au détriment de tous les autres, bref une morale inique… Quel est l’échange qui puisse tenir lieu de bonheur et de plénitude personnelle ? Les relations humaines ont beau être crues et cruelles, il reste à l’anti-héros, la saveur de la vie envers et contre tout, et la jouissance douloureuse d’être au monde.
  Hans échange à perte le peu qu’il possède, en ces temps d’hiver et d’arbres recouverts de neige, métaphore d’un temps de grande misère. L’homme volé reste la dupe et la proie débonnaire de fieffés trompeurs et menteurs.
Le public se laisse vite entraîner avec lui par l’intensité de tableaux vivants et poétiques qui s’enchaînent naturellement dans une ambiance foraine de théâtre ambulant. Les comédiens allemands, anglais, français, colombiens et russes, possèdent une belle unité de jeu et une  gestuelle vive et déliée, avec des mouvements presque dansés.
Autour des metteurs en scène, Margarete Biereye et David Johnston  qui sont aussi acteurs, musiciens et chanteurs, six autres interprètes aguerris:  Polina Borissova, Regis Gergouin, Richard Henschel, Rob Wyn Jones, Nelson Leon et Daisy Watkiss, qui sont à la fois musiciens, acrobates, mimes, chanteurs, décorateurs, éclairagistes,régisseurs techniques…
Les changements de scène se font à vue, avec des matériaux de récup de petit cirque ambulant : planches, roulotte aux couleurs joyeuses, costumes et uniformes de soldats d’époque, comme dans un conte pour enfant…
Des panneaux mobiles à claire-voie verticale laissent entrevoir des visions oniriques, petit cheval de bois ou bien rêve de fée. Un axe en fer rouillé et deux roues gigantesques tiennent lieu de carrousel, un mât élevé et de jolies guirlandes colorées deviennent une immense tente imaginaire. Cette scène théâtrale festive est généreuse avec chœurs de chanteurs et orchestre instrumental.
Ce spectacle de fête foraine aux accents de tragi-comédie, à la façon de pièces mythiques comme Liliom, Casimir et Caroline, Woyzeck  ou celles  de Karl Valentin, s’amuse de poésie et de philosophie de la vie.
Le  troupe ici,  fignole les détails de la farce, en passant  du jeu d’acteur à la manipulation de marionnettes, du chant à l’invective, du numéro de cabaret à l’échappée en solitaire, du sommeil du drôle de héros à l’admiration des étoiles.
Un théâtre solide théâtre de tréteaux… Jean La Chance est une chance pour le public du festival du Pont du Bonhomme.

 Véronique Hotte

 Le Festival du Pont du Bonhomme du 19 au 25 juillet à Lanester. Tél : 02 97 81 37 38

 

L’Echange de Paul Claudel

L’Echange de Paul Claudel, mise en scène de Jean-Christophe Blondel

vz-355132d2-a5b1-48c3-8332-d068d5e5440cAu sommet de la colline des Mourgues, au coucher du soleil, cette mythique pièce de Claudel prend un relief étrange.  Tormod Lindgren a imaginé une scénographie très simple: une vieille caravane, installée devant une piste latérale de plancher, une balançoire munie d’un  pneu usé en guise de siège, et, dans le lointain, une autre caravane  fermée qui sert d’écran  à des projections liquides.
Marthe déroule un tapis, puis se balance. Louis Laine, arrive  nu, prend un arc, monte sur le toit de la caravane, puis descend, et étreint sa femme. « Le théâtre, attention il y a quelque chose qui est vrai (…) le théâtre, c’est l’endroit de nulle part ! »
L’arrivée de Thomas Pollock Nageoire et de Lechy Elbernon va perturber cette passion amoureuse. Le fameux échange va se faire: Lechy, primesautière et folle de ses caprices, arrache Louis Laine à Marthe, avant de mettre le feu à la maison de son Pollock Nageoire qui, ruiné, retrouve devant Marthe qui l’accepte, car Laine est mort.
Malgré la beauté du site et de certaines scènes, les deux heures de la représentation sont bien longues! Valérie Blanchon en fait trop dans le jeu de sa folie destructrice, Pauline Uruguen (Marthe) est très juste, Yannick Landrein  ( Laine) en  impose, et Pierre-Alain Chapuis est un solide Thomas Pollock Nageoire. Mais on reste sur sa faim…

Edith Rappoport

   Festival Villeneuve-en-scène à Villeneuve-lès-Avignon, colline des Mourgues, jusqu’au 20 juillet à 20 h 15.

I am .

Avignon Festival In

I am, conception, scénographie, chorégraphie et mise en scène de Lemi Ponifasio

photoNous attendions avec curiosité cet événement, programmé par Olivier Py dans la cour d’honneur du Palais des Papess mais, après une heure cinquante qui semble s’éterniser, nous sommes ressortis déçus. Ce spectacle, d’une réelle beauté plastique, laisse le spectateur de côté, du fait d’une absence de lisibilité!
Toutes les images ne peuvent s’expliquer par la seule notion de rituel, très présente ici.
Lemi Ponifasio, originaire des Îles Samoa, a crée sa compagnie : MAU, qui signifie «affirmation solennelle de la vérité d’un sujet» et «révolution», notions témoignant d’ une certaine ambition! Tout comme le titre du spectacle qui, selon lui, est un cérémonial en l’honneur des victimes de la première guerre mondiale dont on célèbre cette année le centenaire.
Les spectacles de ce chorégraphe sont très clivants, et les spectateurs l’adorent ou le détestent. Il travaille avec les artistes de sa compagnie, ainsi qu’avec des personnes rencontrées dans chacune des villes de sa tournée. Un grand plan incliné noir barre toute la scène de la Cour, réduisant l’espace de jeu à l’avant-scène. Le travail sur les lumières est remarquable, c’est un bonheur pour les photographes de plateau.
La composition sonore, faite principalement de basses dont on ressent les vibrations jusque dans les sièges,  est fatigante. Le spectacle débute par une Marseillaise qui surprend le spectateur, seule vraie référence peut-être à la Grande Guerre.
Puis,  se succèdent des danses individuelles proches de la transe, ou des mouvements de groupe remarquables par leur lenteur contrôlée. Mais quand certains artistes prennent la parole, que cela soit avec une voix en anglais entendue dans le lointain, ou la longue vocifération de cet homme, ou de cette femme, totalement incompréhensible, il y a problème!
Quelques images resteront cependant dans notre mémoire, comme l’arrivée de ce petit homme en tenue militaire au début du spectacle qui, avec  un jet de projectile, va déclencher le cataclysme guerrier, ou cette femme au crâne rasé, victime symbolique de la barbarie de la guerre, qui, assise à l’avant-scène, reçoit à la fois des fleurs et les crachats des autres personnages. Et enfin et surtout cette belle image finale d’un  homme qui, s’écroule sur le plan incliné,  dans une position christique…
  Mais tout cela reste insuffisant pour un spectacle dont nous pouvions attendre beaucoup, vu l’ambition du projet initial.

Jean Couturier

Cour d’honneur du Palais des Papes jusqu’au 23 juillet.     

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