2014 comme possible

Festival d’Avignon in:

2014 comme possible,  conception et mise en scène de Didier Ruiz

 140723_rdl_2600« Faire ressortir de chacun, la petite histoire qui fait la grande », dit Didier Ruiz. A l’origine de ce projet, une volonté et une démarche, celles de la compagnie des Hommes, créée en 1998 : « Le théâtre doit se rapprocher des gens là où ils se trouvent. Rencontrer des nouveaux publics est une interrogation permanente pour notre devenir à tous, c’est ainsi que la Compagnie crée un théâtre documentaire  avec de nombreux projets, en  banlieue (…) en impliquant des vieux, des lycéens (…) des travailleurs »
2014 comme Possible convie le spectateur à une rencontre avec la jeunesse occidentale, mais d’origine diverse, soit quinze « volontaires» de quinze à vingt ans,  des quartiers périphériques d’Avignon.
  Cette création, a été écrite et est maintenant jouée par ces jeunes sans qu’aucun prérequis en théâtre ne leur ait été demandé », pour se raconter. Sous le regard, l’écoute et la direction de  Didier Ruiz, la parole jaillit en toute spontanéité et théâtralité !
  Sur le  plateau,  quinze chaises vides à l’avant-scène, les unes à côté des autres, en attente. En attente d’une parole poétique et dramatique, d’une parole-témoin. Celle du passage de l’adolescence au monde adulte, celle « d’un territoire plus intime que géographique ». Subitement, côté jardin, dans une même envolée, les corps s’élancent  et se posent sur les chaises.
En soixante-quinze minutes, c’est une série d’autoportraits d’une rare intensité dramatique et  d’une rare franchise.   Soixante-quinze minutes  où les corps, les chaises, le geste, la musique et la parole ne vont cesser de s’adresser, de danser, seul et/ou ensemble, de s’interrompre  et de reprendre.

Cette réalisation poétique et très vivante doit aussi beaucoup à un travail sur le corps, accompagné et associé à des exercices chorégraphiques menés en alternance, ou conjointement avec Didier Ruiz, par Tomeo Vergés, le chorégraphe de la compagnie Man Dake. Et dans une scénographie épurée de Charlotte Villermet, qui voue l’espace dramatique de ce projet collectif, à l’essentiel : le souffle, les mots de cette  jeunesse d’aujourd’hui bien souvent mal connue, « La scénographie se rendra toujours discrète devant la multiplicité des visages et leur richesse (…) elle sera là pour enchâsser mais non pour cacher les êtres humains et leur beauté si différente ».
De temps à autre,  des images urbaines, des graffitis projetés en fond de scène… laissent  la voix de chacun des participants prendre l’espace et nous émouvoir, nous éclairer, nous faire rire, nous perturber…Mais aussi nous révéler à nous-même.
 Et la magie théâtrale opère, et subitement, la mémoire de notre jeunesse et les bruissements de notre monde d’aujourd’hui sont là, tout proches, avec des traces d’interrogation, d’inquiétude, de joie…  Sur différents thèmes : la peur d’être, « moi ma peur c’est une phobie, j’ai peur d’avoir honte »; l’amour, « l’amour c’est se libérer, rendre l’autre libre… »; « C’est juste important l’amour, pour faire l’amour »; le corps, la sexualité : « De faire l’amour, c’est beau, moi à seize ans j’ai juste dit à ma mère: je suis prête ! », le bonheur :« Pour mes parents, le bonheur c’est d’avoir un métier et de l’argent. Ce qu’ils n’ont pas compris,  c’est que mon bonheur, ce n’est pas le leur »; la liberté, le travail…
Cette écriture  forme un kaléidoscope aux multiples couleurs et aux reflets changeants : écho sde la fragilité, mais aussi de la vivacité et  de la sensibilité de cette adolescence aux portes de l’âge adulte: « J’ai l’impression de passer d’une prison à une autre, de celle des parents à celle du travail ».
Sans aucun pathos, tout en énergie, en violence aussi et sans tabous,  avec autant de tendresse que d’humour, ces jeunes, dont  la plupart n’a jamais mis les pieds au festival d’Avignon, nous font prendre conscience de la possibilité encore présente à travers l’art du théâtre, de nous faire entendre une parole autre, sans doute plus juste et plus révélatrice, loin du brouhaha médiatique, que  les paroles alarmistes et à sensations…

Pour que, comme le souhaite la compagnie des Hommes et tous les acteurs de 2014 comme possible, le théâtre, « du grand espace à l’espace intime » puisse dans cette pratique singulière, continuer à s’inventer et à reprendre sous cette forme documentaire, une action concrète et citoyenne au sein du collectif que l’on espère voir se manifester en d’autres lieux.

Elisabeth Naud 

Spectacle joué au Théâtre de la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon du 24 au 27 juillet.


Archive pour 28 juillet, 2014

2014 comme possible

Festival d’Avignon in:

2014 comme possible,  conception et mise en scène de Didier Ruiz

 140723_rdl_2600« Faire ressortir de chacun, la petite histoire qui fait la grande », dit Didier Ruiz. A l’origine de ce projet, une volonté et une démarche, celles de la compagnie des Hommes, créée en 1998 : « Le théâtre doit se rapprocher des gens là où ils se trouvent. Rencontrer des nouveaux publics est une interrogation permanente pour notre devenir à tous, c’est ainsi que la Compagnie crée un théâtre documentaire  avec de nombreux projets, en  banlieue (…) en impliquant des vieux, des lycéens (…) des travailleurs »
2014 comme Possible convie le spectateur à une rencontre avec la jeunesse occidentale, mais d’origine diverse, soit quinze « volontaires» de quinze à vingt ans,  des quartiers périphériques d’Avignon.
  Cette création, a été écrite et est maintenant jouée par ces jeunes sans qu’aucun prérequis en théâtre ne leur ait été demandé », pour se raconter. Sous le regard, l’écoute et la direction de  Didier Ruiz, la parole jaillit en toute spontanéité et théâtralité !
  Sur le  plateau,  quinze chaises vides à l’avant-scène, les unes à côté des autres, en attente. En attente d’une parole poétique et dramatique, d’une parole-témoin. Celle du passage de l’adolescence au monde adulte, celle « d’un territoire plus intime que géographique ». Subitement, côté jardin, dans une même envolée, les corps s’élancent  et se posent sur les chaises.
En soixante-quinze minutes, c’est une série d’autoportraits d’une rare intensité dramatique et  d’une rare franchise.   Soixante-quinze minutes  où les corps, les chaises, le geste, la musique et la parole ne vont cesser de s’adresser, de danser, seul et/ou ensemble, de s’interrompre  et de reprendre.

Cette réalisation poétique et très vivante doit aussi beaucoup à un travail sur le corps, accompagné et associé à des exercices chorégraphiques menés en alternance, ou conjointement avec Didier Ruiz, par Tomeo Vergés, le chorégraphe de la compagnie Man Dake. Et dans une scénographie épurée de Charlotte Villermet, qui voue l’espace dramatique de ce projet collectif, à l’essentiel : le souffle, les mots de cette  jeunesse d’aujourd’hui bien souvent mal connue, « La scénographie se rendra toujours discrète devant la multiplicité des visages et leur richesse (…) elle sera là pour enchâsser mais non pour cacher les êtres humains et leur beauté si différente ».
De temps à autre,  des images urbaines, des graffitis projetés en fond de scène… laissent  la voix de chacun des participants prendre l’espace et nous émouvoir, nous éclairer, nous faire rire, nous perturber…Mais aussi nous révéler à nous-même.
 Et la magie théâtrale opère, et subitement, la mémoire de notre jeunesse et les bruissements de notre monde d’aujourd’hui sont là, tout proches, avec des traces d’interrogation, d’inquiétude, de joie…  Sur différents thèmes : la peur d’être, « moi ma peur c’est une phobie, j’ai peur d’avoir honte »; l’amour, « l’amour c’est se libérer, rendre l’autre libre… »; « C’est juste important l’amour, pour faire l’amour »; le corps, la sexualité : « De faire l’amour, c’est beau, moi à seize ans j’ai juste dit à ma mère: je suis prête ! », le bonheur :« Pour mes parents, le bonheur c’est d’avoir un métier et de l’argent. Ce qu’ils n’ont pas compris,  c’est que mon bonheur, ce n’est pas le leur »; la liberté, le travail…
Cette écriture  forme un kaléidoscope aux multiples couleurs et aux reflets changeants : écho sde la fragilité, mais aussi de la vivacité et  de la sensibilité de cette adolescence aux portes de l’âge adulte: « J’ai l’impression de passer d’une prison à une autre, de celle des parents à celle du travail ».
Sans aucun pathos, tout en énergie, en violence aussi et sans tabous,  avec autant de tendresse que d’humour, ces jeunes, dont  la plupart n’a jamais mis les pieds au festival d’Avignon, nous font prendre conscience de la possibilité encore présente à travers l’art du théâtre, de nous faire entendre une parole autre, sans doute plus juste et plus révélatrice, loin du brouhaha médiatique, que  les paroles alarmistes et à sensations…

Pour que, comme le souhaite la compagnie des Hommes et tous les acteurs de 2014 comme possible, le théâtre, « du grand espace à l’espace intime » puisse dans cette pratique singulière, continuer à s’inventer et à reprendre sous cette forme documentaire, une action concrète et citoyenne au sein du collectif que l’on espère voir se manifester en d’autres lieux.

Elisabeth Naud 

Spectacle joué au Théâtre de la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon du 24 au 27 juillet.

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