Ballets russes, the Art of Costume
Ballets russes, the Art of Costume
Dans Histoire du Ballet russe (1950), Serge Lifar écrivait: «Les Ballets russes furent accueillis comme un miracle précurseur d’une ère nouvelle en art. Tout d’abord, on apprécia les décors et les costumes ; on les apprécia tant au point de vue artistique (l’orgie des couleurs de Bakst eut un retentissement considérable) qu’au point de vue des innovations qu’ils apportaient à l’art de la scène.»
C’est cet art précurseur de toute la danse du XXème siècle que le public japonais a eu le bonheur de découvrir à travers une collection de costumes d’une richesse incroyable.
Après le décès de Diaghilev en 1929, Léonide Massine «hérita» de la plupart de ses biens mais dès 1934, se sépara d’une partie de sa collection; les costumes dispersés lors de ces premières ventes seront mis aux enchères entre 1967 et 1973; l’Albert Museum de Londres, le Danse Museum de Stockholm, le Theatre Museum d’Amsterdam et enfin la National Gallery of Australia (à l’origine de cette exposition) acquièrent alors ces collections.
Aucune structure culturelle française n’était, bien sûr, présente (l’Opéra de Paris a déjà ses propres archives, mais est-ce suffisant !). Ce qui explique que les plus grandes expositions dédiées aux Ballets russes sont organisées hors de France… À Tokyo, est ainsi exposée une petite dizaine de dessins originaux d’Alexandre Benois et Léon Bakst et trois exemplaires originaux de la revue Comédia Illustrée de 1910, 1912, et 1914 avec ses photos de scène des danseurs et danseuses des saisons russes, et quelques programmes de théâtres londoniens et parisiens, dont le Châtelet et l’Opéra de Paris.
Une grande partie de l’exposition est consacrée au début de ces ballets, de 1909 à 1913 et, à son terme, le public a découvert plus de quatre-vingt costumes remarquablement conservés, malgré la dispersion de l’héritage artistique de Diaghilev après 1929, et symbolisés par des personnalités telles que Leonide Massine, Georges Balanchine, Boris Kochno et Serge Lifar!
Parmi toutes les créations des Ballets russes, quelques costumes de spectacles moins connus du grand public, mais d’une grande richesse, comme la tunique du Dieu bleu créé par Léon Bakst en 1912 au Châtelet, ou l’étonnant hippocampe de l’opéra Sadko, créé en 1916 à l’Opéra de Paris par Natalia Goncharova.
Il est très émouvant de voir enfin le véritable costume de Petrouchka porté par Nijinski et réalisé par Alexandre Benois en 1911. Tant de richesse enivre, et se perdre entre les costumes de Schéhérazade, de l’Oiseau de feu, ou de l’Après-midi d’un faune, est délicieux. Un jour peut-être, cette mémoire de la danse viendra-t-elle en France… Dans ce même National Art Center de Tokyo, le Musée d’Orsay délocalisé connaît un grand succès !
Jean Couturier
The National Art Center de Tokyo jusqu’au 1er septembre.