Graceland
Festival d’Aurillac
Graceland
Une station-service un peu à l’abandon, au bord d’une route, avec un grand Elvis en plastique légèrement déglingué. Du déjà vu, ça vous a un petit côté Bagdad Café, film modeste des grandes solitudes et des grands espaces, et des tendresses de passage.
Grace, la tenancière, vit ici toute seule avec une animal de compagnie (une dinde imberbe…), que veient voir de temps en temps par Bernard et son camion. Échouent chez elle successivement un guitariste en panne de moto, puis une femme jetée là par son compagnon…
La vie s’organise, avec peu de mots. Ce ne serait pas grand-chose, si n’apparaissaient pas, la nuit, des êtres fantastiques, ours à vélo, renards écrasés reprenant vie (très jolie manipulations d’objets)… Mais le spectacle prend son rythme, et il y a surtout, au centre de ce quotidien lent et en marge, une comédienne d’une justesse et d’une simplicité parfaites.
Chantal Joblon n’en fait pas des caisses et il lui suffit de ne pas relâcher une minute son énergie, avec une bienveillance et un humour chevillés au corps. Du coup, le spectacle est dôle, tendre, d’une lenteur qu’on n’a jamais envie de lui reprocher.
Il y a là des bons sentiments, et parfois pas de sentiments du tout, sur fond de musiques nostalgiques. Cette fois l’expression est juste : les personnages sont dans un « vivre ensemble » tout simple. Voilà un beau spectacle, d’une poésie retenue, pudique. Un spectacle de plein air plutôt qui a besoin de ces espaces indéterminés qui entourent les villes, d’un bord de route un peu en friche, avec des arbres, et hors du temps.
Christine Friedel