The old Testament

The Old Testament, mise en scène de The Loose Collective

 

g_MACCreteil14LooseTestament01bL’Ancien Testament recèle des histoires diverses qui font partie de la grande histoire. Celle des origines d’abord, telle qu’elle est racontée au début de la Genèse : origine de l’univers, de notre terre et de la vie qu’elle abrite et origine de l’homme, avant tout. Un homme et une femme sont créés à l’image de Dieu… un vrai couronnement. Mais… les voilà donc responsables d’une création qu’ils devront alors gérer.
L’Ancien Testament est aussi le récit des premiers pas de l’humanité sur la planète, et de sa prise de distance tragique avec son Créateur. L’homme, épris d’une liberté coupable et amère, l’a mis à distance.
Mais Dieu, père aimant, revient inlassablement à la rencontre de l’humanité souffrante pour lui offrir un nouveau départ et la remettre sur les rails. Ainsi, se lit l’histoire de la Bible et le sens de la venue du Christ vers lequel pointe tout l’Ancien Testament qui la prépare patiemment.
  La « formularité » de cet écrit capte étrangement l’attention : une écriture dans l’écriture, instituant, répétant et perpétuant, de texte en texte, et de période en période, les mots et les associations de mots : « Tout était bon, tout était bon, tout était très bon, tout était très bon, tout était très bon, donc tout était corrompu… », ou   »Car ils ont pris des choses dévouées par interdit, ils les ont dérobées, les ont dissimulées, et les ont cachées parmi leurs bagages » (Josué 07 ; 11)
  Créativité, inventivité, utopie, ambition  mais aussi frustration, tel est le propos vertigineux et amusant  du  The Loose Collective, un groupe viennois d’envergure internationale, composé de chorégraphes, musiciens et comédiens – tous, interprètes polyvalents éblouissants et performeurs exemplaires.
 Le mélange des arts est leur spécialité, de la culture pop – électro, reggae, post-punk-, à la danse et au théâtre musical…  Avec les compositeurs Guenther Berger et Stephan Sperlich, ils sont sept sur la scène, dont deux femmes, Marta Navaridas et Anna Maria Nowak, Alex Deutinger, Alexander Gottfarb, Thomas Kasebacher. Vêtus de façon kitch, avec une élégance désuète et moqueuse, robes et pantalons fluides rose saumon, et coiffés de perruques pop des années 70, ils jouent sur le mode comique mais dansent avec une grande rigueur. 
   Tout ce que la terre peut receler d’animaux, de coléoptères, d’insectes ou de chenilles, ces artistes fougueux et silencieux, quand ils ne chantent pas en chœur ou  en solo, en épousent collectivement les formes malicieuses, et se métamorphosent,  sous les yeux ébahis des spectateurs.
   Ils miment l’homme avec sa charrue, labourant les champs, et la tête baissée, à l’heure de l’Angélus. Imperturbables, ils marchent et parcourent la terre, les mains dans le dos, ou sur leurs fesses douloureuses : détails de figures allégoriques ancestrales – paysans ou nomades – s’imposent alors sur le plateau. Et, quand les musiciens saisissent avec impétuosité leurs guitares électriques, l’ensemble fait un spectacle tout à fait convaincant.     

 Véronique Hotte

Maison des Arts de Créteil-La Briqueterie,
le 26 septembre.                                                                                                         

 

 


Archive pour 27 septembre, 2014

Tartuffe de Molière

 Tartuffe  de Molière, mise en scène de Galin Stoev

Tartuffe, dont le première version date de 1664, fut interdite à cause du scandale qu’elle provoqua, et reprise cinq  ans plus tard, un peu moins virulente, (on dirait aujourd’hui auto-censurée!), après encore une nouvelle interdiction. C’est une sorte d’emblème du théâtre français, avec des personnages et une construction dramaturgique incomparables; pas de hasard, c’est aussi la pièce la plus jouée de la Maison de Molière, et régulièrement montée, avec plus de 3.000 représentations! Mais c’est la première fois que la  réalisation est confiée à un metteur en scène étranger à la troupe de Molière.
C’est aussi une des pièces les plus représentées en France, et un Tartuffe peut souvent en cacher un autre; c’est le deuxième de la saison,  après celui pas très réussi de Luc Bondy (voir Le Théâtre du Blog),  et avant celui de Benoît Lambert en novembre au Centre dramatique national de Dijon…
tartuffeLa réalisation de Galin Stoev est un curieux mélange de savoirs-faire indéniables, et d’erreurs stratégiques sur la pièce. Il y a un « beau » (donc pas très intéressant!) décor d’Alban Ho Van, qui ressemble à un appartement moderne des années soixante, avec des dégagements par derrière, ornés de très grands miroirs rectangulaires aux cadres dorés qui, bizarrement,  ne servent à rien.
Sur les murs, un revêtement en velours synthétique rouge foncé, décoloré par le soleil, un peu poussiéreux, et par terre, entassés des abat-jours à côté de lampes allumées (???), et des rideaux de tulle blanc dont ne voit pas bien l’utilité. Et dans la deuxième partie, une grande table pour un buffet avec bouteilles de vin, cloches métalliques  pour plats chauds, et corbeilles de fruits, où trois jeunes valets viennent picorer en douce quand ils passent. (une affaire de lutte des classes?)
Avec cette scénographie très prégnante, Galin Stoev veut sans doute symboliser une sorte de décadence de cette famille bourgeoise où Tartuffe pourra entrer sans difficultés et essayer de la ravager sans scrupules? Côté jardin, il y a une porte trop étroite…  où il arrive que se coince une des ces robes longues très bien réalisées, très amples, d’un style indéterminé, comme les autres costumes, dans un curieux cocktail 17ème/18ème/début vingtième siècle, conçus par Bjanka Adzic Ursulov.
Orgon (Didier Sandre) – veste, cravate, et pantalon blanc impeccables très début vingtième – semble échappé tout droit du paquebot  du Partage de midi. Mais Elmire (Elsa Lepoivre) comme Dorine (Cécile Brune) portent des robes très amples, presque identiques, mais on ne saura jamais pourquoi (encore la lutte des classes?). Ce qui brouille tout,  quand on ne connaît pas la pièce.
Quant à Tartuffe, en habit noir de clergy-man à faire peur, il est très inquiétant,  dès qu’il entre en scène et son valet Laurent ne l’est  pas moins: tout cela  frise le non-sens! On se demande en effet comment Orgon d’abord a pu être séduit par ce personnage, ( on sent par moments Didier Sandre pas très à l’aise dans cette mise en scène) et  on a du mal à concevoir comment Elmire ensuite pourrait être un tant soit peu intéressée par cet homme qui a envie d’elle, et que l’on  sent capable tout de suite des pires turpitudes.
Quant à Cléante, le beau-frère d’Orgon (Serge Baldassarian), il a une espèce de costume clownesque avec jabots de dentelle exagérés… Il n’y a donc aucune unité,  et comprenne qui pourra! Valin Stoev aurait été bien inspiré de lire Roland Barthes, qui écrivit des pages magistrales sur ce qu’il nomme, avec raison, les maladies du costume de théâtre.
On est ici un peu dans une peinture de réceptions aristocratiques, avec des valets et des dames aux belles robes virevoltantes, mais sûrement pas dans  le mode bourgeois de Tartuffe.
Et tant pis pour ceux qui ne connaissent pas la pièce! Visiblement, Galin Stoev s’est fait plaisir en s’offrant une lecture personnelle de Tartuffe mais, devant ce genre de chef-d’œuvre absolu de la comédie, mieux aurait valu rester humble, au lieu de faire joujou avec  le texte…

Cela dit, et heureusement, on entend très bien le texte de Molière, qui frappe une fois de plus, et trois siècles après sa création, par la fabuleuse modernité du dialogue. Et il y a quand même quelques bonnes  scènes comme celle de dépit amoureux entre Marianne (Anna Cervinka, nouvelle jeune pensionnaire, remarquable de présence et d’efficacité),et Damis (Christophe Montenez), scène remarquablement arbitrée par Dorine (Cécile Brune).
Chaque rôle est bien tenu, surtout Tartuffe (Michel Vuillermoz), mais aussi Orgon, Elmire, Dorine, Marianne, Damis,Valère( Nâzim Boudjenah), Cléante ( Serge Bagdassarian).
Mais, c’est dans une mise en scène sèche,  dénuée de rythme, sans véritable unité de jeu, et, ce qui est plus grave, sans ombre de comique, comme si Galin Stoev n’avait pas compris que la pièce était vraiment une comédie, même si c’est évident. Et non sinistre, comme il voudrait nous le faire croire, comme à la fin, quand Orgon, dans son délire, voit trois grosses têtes de Tartuffe qui le narguent.
Dans toute comédie, des situations basculent: Tarfuffe, enfin surpris par un Orgon furieux, quand il essaye de  séduire Elmire, entend bien se venger en voulant s’offrir sans scrupules la maison d’Orgon, faute de n’avoir pas réussi à  épouser sa fille, ni à séduire sa femme. Mais  même la célèbre scène où Orgon est caché sous la table pour écouter les déclarations d’amour à Elmire de Tartuffe qui commence à se déshabiller, n’est pas vraiment bien traitée et donc peu crédible.
Dans un magistral renversement de situations, Orgon récupère de justesse sa maison et Tartuffe est arrêté. Mais la pièce patine, et le dénouement est ici un peu brouillon; bref, on a vu de meilleures fins de Tartuffe. L’ensemble de ce travail reste sec comme un coup de trique. Dommage, on pouvait faire dix fois mieux avec ces acteurs exemplaires.

Alors, y aller ou pas? Oui, pour certaines scènes et le texte, mais sûrement pas pour cette mise en scène décevante; en tout cas,  mieux vaut éviter d’y emmener de jeunes gens qui n’ont jamais vu cette pièce formidable dont il ne verront ici qu’une  pâle copie. Quant à ceux qui la connaissent, ils n’y trouveront pas vraiment leur compte…

Philippe du Vignal

Comédie-Française, salle Richelieu, place Colette, Paris. T : 0825-10-16-80 (numéro surtaxé), en alternance, jusqu’au 17 février.

DAROU L ISLAM |
ENSEMBLE ET DROIT |
Faut-il considérer internet... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Le blogue a Voliere
| Cévennes : Chantiers 2013
| Centenaire de l'Ecole Privé...