Salto mortale

Salto mortale, un film de Guillaume Kozakiewiez

 Antoine Rigot, funambule de profession, fonda en 1996 avec Agathe Olivier, la compagnie Les Colporteurs qui, de création en création, mêle cirque, théâtre, danse et musique. En 2000, victime d’un grave accident, il sait qu’il ne pourra plus danser sur un fil mais ne renonce pas.
C’est cette lutte pour maîtriser son corps à moitié paralysé, cette persévérance à reprendre le chemin du cirque, que montre le film. On le suit dans ce combat, et on voit comment, avec son handicap, il continue à faire son métier, à transmettre son art à de jeunes artistes, à réaliser des spectacles et aussi à évoluer lui-même sur la piste, en mettant en scène sa différence, face à des partenaires virtuoses.
Salto mortale, grâce à un montage rythmé, fait alterner l’interview d’Antoine avec des images d’archives où il danse, virevolte, saute à des hauteurs vertigineuses, comme dans le  très poétique Amore captus (1994). On assiste aussi aux répétitions d’un spectacle  où il va réussir à remonter sur un fil !
D’abord photographe, puis chef-opérateur,  Guillaume Kozakiewiez est passé à la réalisation de documentaires. Ici, en une série de plans serrés, gros plans ou plans larges, il capte au plus juste les corps des comédiens acrobates, et, fasciné par la volonté de cet homme « qui ne renonce pas », il s’attarde longuement sur celui d’Antoine Rigot qui « n’est pas un personnage triste, ni prisonnier de son fauteuil (…) Il ne lui reste qu’une chose à faire, avancer », explique le réalisateur. Il donne à voir la remise en marche d’un corps blessé, mais aussi combien le mental peut agir sur le physique et, comme dit  le funambule,  « l’intelligence animale du corps ».
Malgré l’empathie des images et la mise en contact souvent directe avec l’intimité du personnage, le film évite tout pathos, et nous donne une belle leçon de vie.

Mireille Davidovici

Sortie en salle le 26 novembre 2014

 


Archive pour 15 novembre, 2014

Juste avant que tu n’ouvres les yeux

Juste avant que tu n’ouvres les yeux par la compagnie Ktha

rue

Cela se passe dans la rue Notre-Dame des Victoires jouxtant la Bourse de Paris. Il y a une tente avec du thé chaud pour tout le monde,et plus loin, un camion avec des gradins à l’intérieur pour cinquante personnes; ce n’est pas le grand confort mais on est assis, et il y a même des polaires pour se protéger du vent d’automne.
Derrière le camion (19 tonnes et 12 m de long!),  trois acteurs d’abord immobiles, soit deux femmes et un homme en combinaison avec parements fluo jaune, bien éclairés par de petits projecteurs; le camion démarre et fera une fois et demi le tour du quartier Bourse à très petite vitesse.
Les comédiens qui marchent derrière le camion, regardent leur public droit dans les yeux et disent un texte qu’ils ont écrit, sur les réveils et les matinées d’un jeune couple: » Deux voix qui naissent des neuf minutes entre deux sonneries du réveil Deux voix simultanées qui parlent de la journée qui vient, la journée habituelle, le cours du quotidien, mais aussi de briser cette répétition, d’avoir le choix, de faire Ils ne disent pas exactement la même chose, les mots sont différents mais ça se comme ça me chante”. Ils ne disent pas exactement la même chose, les mots sont différents mais c’est comme ça que ça me chante. Recoupe parfois, ça créé du cœur soudain, comme si c’était un accident Qui disent tu, beaucoup  Ça n’est pas un accident, mais c’est un peu magique quand même Qui disent tu sais, tu te souviens, tu vois ce que je veux dire, toi aussi, non ? Qui décrivent le quotidien, subjectif, précis, ces petites choses que tu fais le matin,  Il y a toujours la beauté de l’habitude, la poésie de ta vie de tous les jours au réveil, comment tu fais ton café, comment tu te brosses les dents, Et puis le désir d’autre chose, de faire autrement, différent, plus fort, plus fou, plus même côté en premier, toujours, les toutes petites pensées, les tout petits gestes que   dangereux tu refais encore et encore et qui te font être toi, ou bien que tu fais parce que tu es  M’exalter toi, tu ne sais pas très bien… »

   Les comédiens continuent à marcher, tout en parlant, chose inhabituelle sur une scène; parfois le camion fait une petite pause. En alternance, ou parfois  à deux, quand l’un reste en arrière avant de les rejoindre pour une parole chorale. Ils ont une belle voix et une excellente diction, et malgré leur drôle de situation, sont tout à fait à l’aise.
En cette fin de soirée dominicale, il y a peu de circulation et donc un beau silence dans ces rues du XVIIIème siècle aux noms magiques qui les accueillent: rue notre-Dame des Victoires, Place des Petits Pères avec son église construite avec l’appui de Louis XIV, où Mozart venait souvent prier, rue des Petits Champs, Galerie Vivienne, Galerie Colbert, rue Georges Feydeau, que l’on redécouvre émerveillé. Avec des cafés ou brasseries, souvent plus que centenaires, Dédé la frite, Le Galopin, Le Grand Colbert, Le Select Bourse, Le Louis d’or.. Et des boutiques raffinées, au charme discret, comme sorties d’un livre d’images .

Les passants, tout aussi étonnés de voir ce drôle de camion, sourient et, presque tous, prennent des photos avec leur portable, une vieille dame du quartier sa baguette à la main, se retourne incrédule, une religieuse avec un habit crème aux plis impeccables, semble tout  droit sortie d’un film en costumes d’époque, quitte l’église Notre-Dame des Victoires avec un gros trousseau de clés à la main, deux amoureux saluent le public d’un grand geste en continuant à s’embrasser…
Mais une voiture suit ce drôle de convoi qui continue son chemin à la vitesse de celui d’une enterrement; le conducteur s’obstine à suivre le camion, s’impatiente et se met à hurler, finit par doubler sous les huées du public.
Le camion s’arrêtera après quarante cinq minutes de voyage. Fin  de cette aventure poétique, créée cet été au Festival de Chalon-sur-Saône et qui n’aurait pas déplu à Michel Crespin disparu le mois dernier (voir Le Théâtre du Blog)... Le texte sans doute un peu léger, n’est pas vraiment passionnant mais l’idée: un astucieux cocktail conte poétique/ballade images de la ville en travelling arrière fonctionne bien.
Que demande le peuple?

 

Philippe du Vignal

juste-avant Le spectacle, joué seulement quelquefois, sera repris du 25 mars au 12 avril 2015, programmation de 2r2c dans le 13e arrondissement (01 46 22 33 71 / reservation@2r2c.coop)

http://www.ktha.org/

 

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