Affabulazione

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Affabulazione de Pier-Paolo  Pasolini, texte français de Michèle Fabien et Titina Maselli, mise en scène et scénographie de Gilles Pastor.


Au centre de la scène, un espace vert qui se révèlera être un jardin et, à d’autres moments, un terrain de foot, où se trouve le père, (Jean-Philippe Salerio), à la voix douce même aux pires moments, les yeux écarquillés. Ce père, omniprésent, vient de faire un cauchemar dont la violence le bouleverse jusqu’à le rendre physiquement malade. En effet « il s’est vu aimer son fils », ce qui,  à priori, ne semble pas épouvantable, sauf qu’il s’est vu l’aimer d’un amour charnel, dont il parle en termes très crus. Dans le discours qu’il tient à ce fils, il évoque son sexe dressé entre lui et son enfant…
Lorsqu’il écrit Affabulazione (1973), Pier-Paolo Pasolini se souvient de l’histoire d’Œdipe dont il avait fait un film en 67, et se propose de réinventer le mythe en inversant les rôles. Il ne s’agit plus ici du meurtre du père par le fils, mais de celui du fils par le père. Mais nous sommes toujours dans le registre tragique et il est même précisé: « Une tragédie qui finit mais ne commence pas. » Et, comme pour bien le prouver, Pasolini convoque, par deux fois, le spectre de Sophocle.
Par ses partis-pris de mise en scène, Gilles Pastor joue la carte de la tragédie en faisant intervenir un chœur de cinq jeunes footballeurs, dont les passes sont réglées selon une véritable chorégraphie, qui investissent l’espace à chaque fin de scène; si leur présence peut déconcerter quelques spectateurs, il faut se souvenir que Pasolini avait une passion pour le foot.«Après la littérature et l’éros, disait-il, le football est pour moi l’un de plus grands plaisirs ». Et le corps des jeunes footballeurs et athlètes le troublait…
La mise en scène n’éclaire pas toujours les propos du texte—mais peuvent-ils l’être ?— mais construit un très beau spectacle. Gilles Pastor  choisit d’entrer dans le fantasme du père, dans ce rêve effrayant, immoral, qui va empoisonner sa vie et le conduire au meurtre. Dans un décor très sobre, il utilise savamment la lumière pour créer une atmosphère surréelle, et emploie avec beaucoup d’invention la vidéo qui est un de ses moyens d’expression privilégiés, pour permettre l’émergence d’une autre réalité.
La bande-son participe aussi à ce décalage. Gilles Pastor va même donner au spectre de Sophocle, la voix de Jeanne Moreau, fantasme dans le fantasme, qui fait naître de multiples références, où le théâtre est étroitement lié au cinéma.

Elyane Gérôme

 Théâtre National Populaire, 8 place Lazare Goujon. 69627 Villeurbanne jusqu’au 16 novembre, puis les 19 et 20 novembre au Théâtre du Vellein. 38090 Villefontaine. 

 

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