Rouge
Rouge, texte d’Emmanuel Darley, mise en scène de Maïanne Barthès
Dans la pénombre, un haut mur de cageots de bois empilés, traversé par des rais de lumière, et des fumigènes enveloppent l’espace. On se sent projeté dans une atmosphère de vieille halle aux vins, de barricades, voire de rue malfamée. Sur une passerelle, au-dessus de nous, une caissière de supermarché raconte comment elle a été renvoyée pour avoir voulu récupérer des fruits, plus très frais mais encore consommables, dans les poubelles du supermarché où elle travaille. Pour son employeur, c’est du vol...
Le ton est donné: vont se succéder des personnages archétypaux, issus de milieux divers qui vont s’unir et chercher ensemble une réponse à l’injustice et à la frustration d’une société qui les bafoue dans leur dignité, leurs droits, et leur envie de vivre pleinement leur humanité. Ils vont donc former un groupe d’activistes: Quartier libre, qui a sa base dans un squat de la ville.
Emmanuel Darley veut nous montrer, de l’intérieur, comment ce groupe d’indignés, rouges de colère, va grossir en nombre, s’organiser, agir, et comment un des leurs va s’imposer, et devenir leur leader emblématique. Leurs actions vont vite se radicaliser, évoluant du symbolique comme des tags à la bombe de peinture rouge sur des distributeurs à billets, à la lutte armée, puis au meurtre! Le groupe se déchirera alors de manière irrévocable, et abandonnera son leader à lui-même, enfermé dans ses certitudes.
A partir du matériau écrit par Emmanuel Darley, Maïanne Barthès et les comédiens, Hugues Chabalier, Fanny Chiressi, Charlotte Ligneau, Mathieu Lemeunier, Marc Menahem, Anne-Juliette Vassort ont élaboré et bâti Rouge. Avec des allusions aux groupes armés du XXème siècle, notamment en Allemagne, et en Italie pendant les années de plomb… Et avec des chansons engagées ou révolutionnaires, et des textes qui sont comme autant de manifestes.
Bonnes intentions et sincérité sont bien là… Mais le collectif a voulu mélanger les écritures et on assiste donc plutôt à un atelier de travail qu’à un spectacle. Les acteurs manipulent les éléments de décor: tribunes, étagères, podiums, comptoirs…, se recoiffent, changent de costume, courent, mais on est ici plus proche de l’agitation, que d’un véritable montage cut.Il n’y a guère d’unité, et le jeu, la mise en scène et les textes, manquent d’engagement…
On repense à ce Foucault 71, monté par le collectif 71 il y a quelques années, à Alfortville, qui était un exemple marquant de théâtre sur le militantisme…
Gérard Cherqui
Théâtre-Studio d’Alfortville, jusqu’au 31 janvier, du lundi au vendredi à 20h30, les samedis à 15h30 et 19h30, relâche le lundi 19 janvier.