Exposition Tadeusz Kantor
Exposition Tadeusz Kantor
Organisée conjointement par l’Ambassade de Pologne en France et par la Cricothèque de Cracovie, cette exposition marque le début des manifestations culturelles célébrant les cent ans de la naissance de Tadeusz Kantor, né le 6 avril 1915.
De petite dimension, elle occupe les trois salles du rez-de-chaussée de la magnifique bibliothèque, et est consacrée au mythique spectacle Wielopole, Wielopole, créé à Florence en 1980.
À la fois peintre, plasticien, metteur en scène et théoricien, Tadeusz Kantor est l’un des plus grands créateurs du XXe siècle, et ses œuvres singulières ont bouleversé l’art du théâtre contemporain. Paradoxalement, ses pièces, de plus en plus oubliées par les jeunes générations polonaises, sont étudiées par les chercheurs du monde entier.
Dans la première salle, nous découvrons un affiche de Wielopole, Wielopole, des photos de son petit village Wielopole Skrzynskie, et de ses parents, en particulier, le portrait de son père, en tenue militaire, qui va devenir avec son grand-oncle, le curé du village, un des personnages emblématiques de la pièce.
Il a construit, pour cette œuvre, ce qu’il nomme sa Chambre de l’Imagination: une chambre de l’enfance reconstituant, en les modifiant, ses propres souvenirs. On peut voir aussi onze photos du spectacle en noir et blanc, de Jacquie Bablet, et sept dessins de Tadeusz Kantor des personnages manipulant les objets conçus par lui.
Objets que l’on retrouve dans la deuxième salle, posés sur un plancher en bois, aux dimensions d’origine. Il s’agit de répliques, et depuis qu’il est mort le 8 décembre 1990, ils ont figuré dans différentes expositions. Une porte, des chaises, le mannequin du prêtre, des croix… ces uniques témoins de l’œuvre avaient leur propre autonomie artistique et prenaient vie au contact des personnages.
Dans la dernière salle, l’auditorium Jean-Paul II -tout un symbole, tant l’œuvre de Tadeusz Kantor est liée à la religion-, on trouve des photos en couleurs du spectacle par Caroline Rose. Près d’un piano recouvert d’une toile protectrice (ultime clin d’œil au créateur passionné par les emballages, au point d’envelopper, vers la fin de sa vie, toutes ses boîtes de médicaments), un auto-portrait de l’artiste nous questionne du regard.
Cette exposition, très émouvante pour les connaisseurs du théâtre de Tadeusz Kantor, n’est pas assez didactique pour le néophyte, et on aurait aimé y voir des extraits de Wielopole, Wielopole avec ses personnages, ses mannequins et les décors présentés. Signalons, pour tous les nostalgiques de Tadeusz Kantor à la librairie Le Coupe-Papier, et à La Librairie polonaise, Bd Saint-Germain, tous les DVD de ses spectacles, publiés par la Cricothèque, et un recueil de ses textes Ma Pauvre Chambre de l’Imagination, récemment paru aux éditions Les Solitaires Intempestifs.
Tadeusz Kantor écrivait dans le dernier texte (1990, l’année de sa mort) de ce livre, à propos de sa Chambre de l’Imagination, qui a brûlé : «Car les ténèbres m’entourent complètement. Mais dans ces ténèbres je continue à bâtir mes cloisons, fenêtres, portes. A nouveau ! Dans l’imagination. Seulement dans l’imagination ! Et dans la solitude. Quelle obstination ! Et la cheminée se dresse. Comme le squelette de la maison ! Il est déjà tard. Il est sans doute temps de fermer ma Pauvre Chambre de l’imagination.»
Jean Couturier
Bibliothèque polonaise du 3 au 23 avril, 6 quai d’Orléans 75004 Paris. T: 01-55-42-83-83; http://www.bibliotheque-polonaise-paris-shlp.fr/ . L’exposition sera ensuite présentée au festival Passages du 6 au 17 mai, puis à la Filature de Mulhouse, et enfin à l’Hôtel de la Mirande pendant le festival d’Avignon.
Les Ecrits de Tadeusz Kantor sont sont aussi publiés aux Solitaires intempestifs dans leur ordonnance chronologique: le premier volume est paru en avril à l’occasion d’une grande soirée à l’Odéon, le second paraîtra pour le festival d’Avignon.