De Passage

De Passage de Stéphane Jaubertie, conception et mise en scène de Johanny Bert

Unknown «Il faut que je te dise. Il n’y a que trois jours importants dans la vie d’un homme : hier, aujourd’hui, et demain», premières paroles philosophiques de ce spectacle à la prose poétique cadencée, dite  par  un conteur; sur un écran, il y a aussi toute la magie animée d’un théâtre d’ombres, encadré d’un manteau d’arlequin orné d’une guirlande festive de loupiotes  rougeoyantes.
Johanny Bert poursuit  la création de son propre langage scénique avec des acteurs et des « formes marionnettiques », et le spectateur, , entend l’histoire, casque sur la tête. Une voix intime lui dit: «D’où tu es, si tu regardes bien, tu peux voir dans le noir. Tu peux voir l’enfant seul, dans son lit. Regarde. Tu verras qu’il ne dort pas. Il a les yeux ouverts, et, dans ses yeux, il y a des images.»
C’est bien ici la matière onirique de l’imaginaire ardent et enfantin d’un garçon de neuf ans, combinée avec des images familières et standard que chacun véhicule et dont se saisit le metteur en scène.
Le garçon pense à des jolies choses le soir, tandis que sa mère travaille de nuit à l’unité des soins palliatifs de l’hôpital; le matin ramène la mère et le jour près de l’enfant. Mais, ce soir-là, le sommeil ne lui vient pas: les images qui l’habitent sont trop fortes. Attiré alors par la lumière, il se lève et, en pyjama, met ses chaussures et son manteau, avant de sortir dans la nuit froide rejoindre sa mère à l’autre bout de la ville.

La voix douce demande au spectateur de regarder le garçon marcher dans le noir : lui seul, le voit, en temps réel et en ombre chinoise, traverser solitairement la nuit des autres qui dorment, telle une apparition :«Aster, mimosa, véronique de Perse…neige, nivéole, primevère. Il se dit que les fleurs, à peine, on les nomme, que déjà elles s’effacent.»Les fleurs déclinent toutes les saisons, d’une année à l’autre ; il faut savoir les saisir.
L’enfant  est le symbole des jeunes qui découvrent les lois de l’existence; entre ce qui est dit et ce théâtre d’image, c’est  tout  un apprentissage du temps, ce fabricant d’expériences… Les personnages du récit apparaissent, puis s’en vont comme cette mère élégante en talons, figures graphiques ou silhouettes se mouvant entre ombre et lumière.
Le conteur, de son côté, surgit, se retire mais entre aussi dans l’image, comme par un tour de magie gracieuse.  Le spectateur a, lui, le sentiment d’une épreuve existentielle, de la fragilité de la vie, et de la brièveté du bonheur, puis de la longue lutte contre le malheur, avant l’abandon final à la mort. Entre-temps,  des jours  s’effeuillent pour nous tous êtres de passage, au-delà des infortunes et des maladies qui nous happent. Passage qui est celui aussi de la filiation, de la mère au fils, du fils à l’adulte qui se détache  de la mère originelle pour en trouver une autre d’adoption, ou inversement, entre secrets, aveux tardifs ou inavoués,  et mensonges déjoués.
Saluons l’engagement serein et efficace de Maxime Dubreuil, Ludovic Molière, Laëtitia Le Mesle, Christophe Luiz et Cécile Vitrant dans ce conte d’aujourd’hui, à la fois sombre et lumineux, destiné aux enfants que nous sommes restés.

 Véronique Hotte

 Le Théâtre de Lorient-Centre Dramatique National, spectacle familial à partir de 9 ans,  joué les 29 et 30 avril.

 


Archive pour 5 mai, 2015

De Passage

De Passage de Stéphane Jaubertie, conception et mise en scène de Johanny Bert

Unknown «Il faut que je te dise. Il n’y a que trois jours importants dans la vie d’un homme : hier, aujourd’hui, et demain», premières paroles philosophiques de ce spectacle à la prose poétique cadencée, dite  par  un conteur; sur un écran, il y a aussi toute la magie animée d’un théâtre d’ombres, encadré d’un manteau d’arlequin orné d’une guirlande festive de loupiotes  rougeoyantes.
Johanny Bert poursuit  la création de son propre langage scénique avec des acteurs et des « formes marionnettiques », et le spectateur, , entend l’histoire, casque sur la tête. Une voix intime lui dit: «D’où tu es, si tu regardes bien, tu peux voir dans le noir. Tu peux voir l’enfant seul, dans son lit. Regarde. Tu verras qu’il ne dort pas. Il a les yeux ouverts, et, dans ses yeux, il y a des images.»
C’est bien ici la matière onirique de l’imaginaire ardent et enfantin d’un garçon de neuf ans, combinée avec des images familières et standard que chacun véhicule et dont se saisit le metteur en scène.
Le garçon pense à des jolies choses le soir, tandis que sa mère travaille de nuit à l’unité des soins palliatifs de l’hôpital; le matin ramène la mère et le jour près de l’enfant. Mais, ce soir-là, le sommeil ne lui vient pas: les images qui l’habitent sont trop fortes. Attiré alors par la lumière, il se lève et, en pyjama, met ses chaussures et son manteau, avant de sortir dans la nuit froide rejoindre sa mère à l’autre bout de la ville.

La voix douce demande au spectateur de regarder le garçon marcher dans le noir : lui seul, le voit, en temps réel et en ombre chinoise, traverser solitairement la nuit des autres qui dorment, telle une apparition :«Aster, mimosa, véronique de Perse…neige, nivéole, primevère. Il se dit que les fleurs, à peine, on les nomme, que déjà elles s’effacent.»Les fleurs déclinent toutes les saisons, d’une année à l’autre ; il faut savoir les saisir.
L’enfant  est le symbole des jeunes qui découvrent les lois de l’existence; entre ce qui est dit et ce théâtre d’image, c’est  tout  un apprentissage du temps, ce fabricant d’expériences… Les personnages du récit apparaissent, puis s’en vont comme cette mère élégante en talons, figures graphiques ou silhouettes se mouvant entre ombre et lumière.
Le conteur, de son côté, surgit, se retire mais entre aussi dans l’image, comme par un tour de magie gracieuse.  Le spectateur a, lui, le sentiment d’une épreuve existentielle, de la fragilité de la vie, et de la brièveté du bonheur, puis de la longue lutte contre le malheur, avant l’abandon final à la mort. Entre-temps,  des jours  s’effeuillent pour nous tous êtres de passage, au-delà des infortunes et des maladies qui nous happent. Passage qui est celui aussi de la filiation, de la mère au fils, du fils à l’adulte qui se détache  de la mère originelle pour en trouver une autre d’adoption, ou inversement, entre secrets, aveux tardifs ou inavoués,  et mensonges déjoués.
Saluons l’engagement serein et efficace de Maxime Dubreuil, Ludovic Molière, Laëtitia Le Mesle, Christophe Luiz et Cécile Vitrant dans ce conte d’aujourd’hui, à la fois sombre et lumineux, destiné aux enfants que nous sommes restés.

 Véronique Hotte

 Le Théâtre de Lorient-Centre Dramatique National, spectacle familial à partir de 9 ans,  joué les 29 et 30 avril.

 

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