Conversations ou le voyage d’Ulysse de Primo Levi

Conversations ou Le Voyage d’Ulysse d’après Conversations avec Primo Levi de Ferdinando Camon, adaptation de Gérard Cherqui et Dominique Lurcel.

 Primo Levi  Le récit de Primo Levi, Si c’est un homme, a été publié et lu dans le monde entier, au vingtième siècle, et il faut souhaiter qu’il ne soit pas oublié au vingt-et-unième. Parce qu’il n’est pas seulement le récit méticuleux d’une année au Lager –Primo Levi prend soin d’employer le terme qui replace le crime dans sa géographie et dans son histoire-, c’est aussi l’analyse du fonctionnement et des effets de la perversion nazie, qui détruit l’Homme en tout homme, les prisonniers, les bourreaux et les témoins.
  Difficile de résumer la parole de Primo Levi, tant elle est dense et précise : sa discipline d’ingénieur-chimiste lui a sauvé la vie dans le camp (associée à quelques coups de chance qu’il relate, non sans ironie), mais aussi à son retour. «Personne ne nous croira» : c’était sa hantise, sa certitude. Il a pourtant écrit ce livre, édité d’abord de façon confidentielle, puis, quand l’opinion a été capable de le recevoir, largement diffusé ensuite.
L’écrivain Ferdinando Camon, plus jeune que lui, a raconté à nouveau l’implacable et absurde organisation du camp, par exemple, la future usine de produits chimiques reconstruite sans cesse, entre deux bombardements, par des Sisyphes mourant de faim de froid; il a, aussi et surtout, dit l’humiliation et la dégradation systématique des hommes.

  Ferdinand Camon cherche à comprendre, questionne avec discrétion, fait part, brièvement de ses pensées. Primo Levi, réfléchi, soucieux d’exactitude dans le souvenir comme dans la formulation, pèse ses réponses  dont l’humour n’est pas absent.
On aurait pu se contenter de lire ces entretiens (publiés chez Gallimard). Ce qu’apportent ici les voix est vital : il fallait que ce texte passe par une respiration, par d’infimes mouvements des corps. Une mise en scène démonstrative n’aurait aucun sens. Eric Cenat et Gérard Cherqui ont trouvé le juste niveau de présence nécessaire, le minimum et le maximum de ce qu’un comédien doit apporter à cette conversation ; ils se font les passeurs vivants de cette parole, préservant sa qualité concrète, singulière.
On n’ira pas chercher au Théâtre Essaïon des prouesses de mise en scène, mais écouter une voix précieuse, généreuse, au-delà de la mémoire des camps.

 Christine Friedel

 Théâtre Essaïon, les lundi et mardi à 19h 30, jusqu’au 26 mai.

 

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