Le Songe d’une nuit d’été
Le Songe d’une nuit d’été de William Shakespeare, mise en scène de Tim Robbins.
Quelle bonne idée d’ouvrir les Nuits de Fourvière, le festival estival de Lyon dont c’est la soixante-dixième édition, par ce Songe qui prend une nuit d’été pour cadre ! Le metteur en scène est l’américain Tim Robbins plus connu comme acteur (on se souvient de Dave le personnage tragique du film Mystic River réalisé par Clint Eastwood), ou comme cinéaste La dernière Marche. Artiste complet, il est aussi musicien et donne un concert dans le cadre du festival.
Dans les différents entretiens qu’il a accordés, il dit son malaise vis-à-vis du cinéma hollywoodien, un monde d’affaires régi par la rentabilité. Mais au théâtre, il apprécie de se mettre au service d’un texte et d’un public, si bien qu’il mène avec The Actors’Gang, la troupe qu’il dirige, à Los Angeles, depuis 1981, un travail régulier dans les écoles des quartiers populaires et les prisons.
Dans le théâtre romain de Fourvière, par une nuit d’été qui ne demande qu’à être hantée par Obéron, Titania, leurs fées et leurs elfes, avec une lune pleine et lumineuse qu’aucun décorateur n’aurait pu inventer, la troupe de The Actors’Gang a fait la démonstration de son talent. Comédiens, danseurs, ils jouent plusieurs rôles et rendent au texte toute sa vitalité. Pas de décors, simplement des vestiaires autour d’un plateau nu. Sur le côté, quelques musiciens ponctuent les actions des personnages et soulignent des moments du texte, selon une partition originale.
Le metteur en scène a réglé les déplacements des acteurs avec la minutie d’un chorégraphe et a travaillé avec une grande économie de moyens : ainsi pour symboliser la forêt omniprésente, les acteurs deviennent arbres ou fleurs, en utilisant simplement une branche ou un bouquet. Ce n’est pas sans charme, et même joli et drôle, mais un peu mince sur l’ensemble de la pièce.
Tim Robbins manque d’audace pour faire pétiller ce monde surréel où il suffit d’un peu de poudre, déposée sur les yeux par un elfe étourdi, pour que les sentiments amoureux s’emballent et, se trompant d’objet, ébranlent l’harmonie d’une société !
Mais la mise en scène, au demeurant efficace, ne rend pas compte de la dimension poétique de la pièce et nous donne à voir un univers simplement sautillant et primesautier. Tim Robbins s’attache surtout à bien distinguer les trois mondes qui s’interpénètrent dans la pièce : celui des aristocrates autour du mariage du duc, celui d’Obéron et Titania, le conte de fées proprement dit, et celui des villageois préparant un spectacle, pour le mariage ducal. Ainsi, il privilégie le théâtre dans le théâtre, avec la pièce que jouent les villageois dans la tradition, très savoureuse, de la commedia dell’arte.
Mais ne boudons pas notre plaisir dans ce beau théâtre romain dont les gradins de pierre étaient encore tièdes de la chaleur de la journée; deux heures et quarante plus tard, ils devenaient cependant moins agréables ! Mais le public bon enfant, avait accepté volontiers de se serrer pour que tout le monde puisse s’assoir.
Elyane Gérôme
Spectacle vu le 2 juin. Festival des Nuits de Fourvière. T : 04 72 32 00 00 www.nuitsdefourviere.com