Marcellin Caillou
Festival d’Avignon:
Marcellin Caillou, texte adapté de Sempé, mise en scène de Caty Jouglet et Fabrice Roumier
La conteuse (Caty Jouglet) prend place à côté d’un immense plan blanc, incliné, et ouvre un livre. Magie, le récit prend vie ! D’une fente, émerge un petit personnage cartonné. C’est Marcellin Caillou, humble héros de Sempé, doté d’une maladie aussi bizarre qu’incontrôlable : il rougit sans raison. Le visage de papier se teinte aussitôt d’un adorable rouge vif. Les autres enfants ne sont pas tendres, le traitent de fraise tagada et de camion de pompiers.
Quelle tendre histoire que celle de l’amitié entre cet enfant solitaire qui rencontre son alter ego, René Rateau, reconnaissable à ses cheveux en bataille et à son cou télescopique qui s’allonge pour annoncer d’énormes « atchoum ». Entre le timide aux rougeurs intempestives et son copain aux éternuements incontrôlables, la mayonnaise prend à merveille. Elle se passe de mots. Moments de grâce…
Personnages aimantés qui déambulent à la surface du carton, paysages en papier et vidéo sont mis au service d’une scénographie aussi sobre que leur amitié. Quand un adulte intervient, la conteuse se saisit d’un bâton, et revêt un des fabuleux visages revêches croqués par le célèbre dessinateur.
La peinture du monde décevant des grands, justement, est une des réussites de ce conte. Quand les deux enfants sont séparés par un déménagement, les parents de Marcellin ne réagissent pas. Ils perdent même la lettre de l’ami : «On la cherchera quand on l’aura trouvée. »
Des micro-saynètes dessinées dans des boîtes éclairées montrent la mère perpétuellement plongée dans le frigo et le père dans sa paperasse. Ils n’ont jamais le temps ! Dans le public, des enfants acquiescent. Vie trépidante et répétitive, bus, boulot, dodo. Le temps passe… Mais la vie réserve de belles surprises.
Ce petit théâtre de papier est absolument réjouissant. Caty Jouglet, la conteuse, sait pointer les moments forts et Fabrice Roumier, à couvert, manipule avec bonne humeur et célérité les trappes et les petits personnages à qui il donne des voix facétieuses.
L’univers humaniste de Sempé est restitué ici avec générosité…
Stéphanie Ruffier
Maison du théâtre pour enfants, Monclar, jusqu’au 25 juillet, 15h20, relâche le dimanche.