Le NowShow
Le NoShow par le collectif Nous Sommes Ici/ Théâtre DuBunker
A l’entrée du théâtre, chacun choisit le prix de son billet avant de le payer, dans l’anonymat, et de rejoindre la salle. Les raisons de cette procédure nous seront dévoilées par la suite. La troupe demande aux critiques de ne pas en faire état. Sachez seulement que le montant des recettes aura une incidence sur la représentation.
« Parce que c’est comme affronter une tempête. » «Parce que j’aime le mode de vie nocturne. » Parce que j’aime le direct, l’éphémère, l’imprévisible.», «Parce que j’aime chercher à vivre dans le doute»… Ainsi débute l’assemblée générale installée sur scène. Les sept comédiens déclinent tour à tour leurs motivations personnelles à faire du théâtre, quand on leur apporte les comptes: la recette du soir s’élève à 1.361 euros pour 110 spectateurs…Que faire ?
D’une façon où d’une autre, Le NoShow se poursuivra, riche en rebondissements et en surprises. Instructif pour le public, il s’interroge sur la place du théâtre et de la culture dans la société. Argent, reconnaissance, avenir et désillusion des artistes sont les quatre grands thèmes à partir desquels la troupe interpelle les spectateurs, à titre collectif et individuel, pour mesurer la valeur qu’ils accordent à l’art. Elle les implique gentiment mais radicalement par des coups de fils passés au hasard dans la salle, des votes impromptus selon les questions qui leur sont adressées par les comédiens sur scène, ou par d’autres qui se réchauffent dehors autour d’un feu, relayés en direct par une caméra.
« Au Québec, en pratiquant le théâtre, même si on a du succès, il est impossible de joindre les deux bouts.» C’est à partir de ce constat qu’est né Le NoShow. Deux collectifs, l’un venu de Montréal et l’autre de Québec, se sont réunis pour construire un spectacle interactif qui démonte et analyse les aspects économiques de la culture dans un pays où les subventions sont maigres et le régime des intermittents du spectacle, inexistant. «Les subventions financent-elles les artistes ou les spectateurs ?» est l’une des questions posées. Et qui s’applique aussi, bien sûr, au mode de production en France.
Au-delà de cet aspect comptable, ces jeunes gens en colère nous font partager leur engagement, leurs convictions et leurs déboires, chacun rapportant avec humour sa propre expérience du métier, dans une série de sketches. Même s’il n’y a pas de quoi rire, ils veulent toujours faire drôle… au risque de quelques lourdeurs. Ils forçent parfois le trait, et leur jeu paraît alors outré, peu naturel, si bien que les situations traînent en longueur et que Le NoShow tourne en rond, voire s’enlise. Heureusement, de nouveau pris à partie, le public sort de l’ennui qui menace de s’installer.
Le projet reste insolite, ludique; on passe une bonne soirée et on sort du théâtre un peu mieux informé sur les difficultés que rencontrent les artistes au quotidien, et heureux d’avoir partagé un moment joyeux avec eux.
Mireille Davidovici
Théâtre Paris-Villette T.: 01 40 03 72 23, jusqu’au 28 novembre. www.theatre-paris-villette.fr.
Théâtre Benno Besson, Yverdon-les-Bains (Suisse) les 2 et 3 décembre.