La compagnie Martha Graham au festival CONtEXt de Moscou

La compagnie Martha Graham au festival CONtEXt de Moscou

IMG_6836Martha Graham, qui s’est éteinte en 1991, à 96 ans, a changé radicalement l’esthétique de la danse du XXème siècle, aux Etats-Unis d’abord, puis dans le monde entier. C’est pourtant la première fois que la troupe qui perpétue son œuvre, danse en Russie : trois programmes dans une même soirée couvrant soixante-dix ans de création…
Les vingt interprètes terminent ici à Moscou, une tournée mondiale débutée en octobre en Chine, avec un engagement, un professionnalisme et une énergie sans faille, soucieux de faire découvrir à un nouveau public, l’inventivité de la chorégraphe qui, à côté de ses créations, avait aussi engagé depuis 1926 un travail d’enseignement et de transmission  avec une grande rigueur. Merce Cunningham et Paul Taylor, entre autres, sont issus de son école.
Chronicle, un solo du répertoire créé en 1936, a été repris depuis par de nombreuses compagnies. Sur une musique très cinématographique de Wallingford Riegger, la danseuse, souvent immobile, presque statufiée, vêtue d’une robe rouge et noire, compose, assise sur un petit podium, un tableau vivant, très expressionniste. Puis, elle manipule sa robe qui, en un court instant, forme un cœur autour d’elle.

  À cette pièce, succède une chorégraphie axée sur une opposition : dix danseuses, pieds nus, en robe noire, courent, sautent, puis encerclent une femme en blanc, debout au centre de la scène et prenant des poses très graphiques. Une esthétique vraiment novatrice pour l’époque…
Vient ensuite Lamentations Variations, imaginé en 2007 par plusieurs chorégraphes, pour commémorer  la tragédie du 11 septembre à New York. Sur des musiques de Gustav Malher, Gabriella Montero et Frédéric Chopin, les interprètes se croisent, se touchent et se cherchent pour, dans un final émouvant et pathétique, s’affaisser lourdement au sol.
Difficile de ne pas lier ces images à celles qui ont tourné en boucle dans le monde entier, après les attentats du 13 novembre à Paris, d’autant qu’une des premières prises d’otages par des terroristes, eut lieu en 2002, au théâtre de la Doubrovk à Moscou …
Avant Le Sacre du Printemps, recréé en 1984 et qui clôt ce programme, le public russe a découvert, dans un silence religieux, un extrait de film en noir et blanc, Lamentation (1930) et interprété par Martha Graham elle-même.  Nicolas Roerich, auteur des costumes et décors du Sacre du Printemps à sa création en 1913, écrivait à Diaghilev : «J’ai voulu peindre la joie de la Terre et le triomphe du ciel, tels que les Slaves se les représentaient.»

Mais la joie ne domine pas dans cette nouvelle version du ballet qui,  très sombre, est centré, d’emblée, sur l’élue, la danseuse Peiju Chien-Pott, qui sera, plus tard, sacrifiée par le maître du rituel, un shaman solide et sauvage. Ben Schultz campe, lui,  une sorte de gourou tentateur, comme de nombreuses religions ou pseudo-religions en suscitent depuis les débuts de l’humanité! Les deux artistes , qui donnent de leur personne, sont absolument terrifiants…
Les autres interprètes accompagnent ce duo avec des sauts et des danses tournoyantes, associant un homme dominant et une femme dominée qui  tente parfois de s’échapper, mais en vain : le shaman lui fait subir une épreuve de « shibari » (bondage japonais) et l’emprisonne, des pieds à la tête avec une grosse corde. Une vraie folie semble alors s’emparer du groupe, avant le sacrifice final…
Ces trois chorégraphies marqueront pour longtemps le public moscovite mais on regrette que cette compagnie ne se soit pas venue depuis huit ans à Paris et en France!

Jean Couturier

Théâtre Mossoviet de Moscou le 28 novembre. Marthagraham.org


Archive pour 9 décembre, 2015

La compagnie Martha Graham au festival CONtEXt de Moscou

La compagnie Martha Graham au festival CONtEXt de Moscou

IMG_6836Martha Graham, qui s’est éteinte en 1991, à 96 ans, a changé radicalement l’esthétique de la danse du XXème siècle, aux Etats-Unis d’abord, puis dans le monde entier. C’est pourtant la première fois que la troupe qui perpétue son œuvre, danse en Russie : trois programmes dans une même soirée couvrant soixante-dix ans de création…
Les vingt interprètes terminent ici à Moscou, une tournée mondiale débutée en octobre en Chine, avec un engagement, un professionnalisme et une énergie sans faille, soucieux de faire découvrir à un nouveau public, l’inventivité de la chorégraphe qui, à côté de ses créations, avait aussi engagé depuis 1926 un travail d’enseignement et de transmission  avec une grande rigueur. Merce Cunningham et Paul Taylor, entre autres, sont issus de son école.
Chronicle, un solo du répertoire créé en 1936, a été repris depuis par de nombreuses compagnies. Sur une musique très cinématographique de Wallingford Riegger, la danseuse, souvent immobile, presque statufiée, vêtue d’une robe rouge et noire, compose, assise sur un petit podium, un tableau vivant, très expressionniste. Puis, elle manipule sa robe qui, en un court instant, forme un cœur autour d’elle.

  À cette pièce, succède une chorégraphie axée sur une opposition : dix danseuses, pieds nus, en robe noire, courent, sautent, puis encerclent une femme en blanc, debout au centre de la scène et prenant des poses très graphiques. Une esthétique vraiment novatrice pour l’époque…
Vient ensuite Lamentations Variations, imaginé en 2007 par plusieurs chorégraphes, pour commémorer  la tragédie du 11 septembre à New York. Sur des musiques de Gustav Malher, Gabriella Montero et Frédéric Chopin, les interprètes se croisent, se touchent et se cherchent pour, dans un final émouvant et pathétique, s’affaisser lourdement au sol.
Difficile de ne pas lier ces images à celles qui ont tourné en boucle dans le monde entier, après les attentats du 13 novembre à Paris, d’autant qu’une des premières prises d’otages par des terroristes, eut lieu en 2002, au théâtre de la Doubrovk à Moscou …
Avant Le Sacre du Printemps, recréé en 1984 et qui clôt ce programme, le public russe a découvert, dans un silence religieux, un extrait de film en noir et blanc, Lamentation (1930) et interprété par Martha Graham elle-même.  Nicolas Roerich, auteur des costumes et décors du Sacre du Printemps à sa création en 1913, écrivait à Diaghilev : «J’ai voulu peindre la joie de la Terre et le triomphe du ciel, tels que les Slaves se les représentaient.»

Mais la joie ne domine pas dans cette nouvelle version du ballet qui,  très sombre, est centré, d’emblée, sur l’élue, la danseuse Peiju Chien-Pott, qui sera, plus tard, sacrifiée par le maître du rituel, un shaman solide et sauvage. Ben Schultz campe, lui,  une sorte de gourou tentateur, comme de nombreuses religions ou pseudo-religions en suscitent depuis les débuts de l’humanité! Les deux artistes , qui donnent de leur personne, sont absolument terrifiants…
Les autres interprètes accompagnent ce duo avec des sauts et des danses tournoyantes, associant un homme dominant et une femme dominée qui  tente parfois de s’échapper, mais en vain : le shaman lui fait subir une épreuve de « shibari » (bondage japonais) et l’emprisonne, des pieds à la tête avec une grosse corde. Une vraie folie semble alors s’emparer du groupe, avant le sacrifice final…
Ces trois chorégraphies marqueront pour longtemps le public moscovite mais on regrette que cette compagnie ne se soit pas venue depuis huit ans à Paris et en France!

Jean Couturier

Théâtre Mossoviet de Moscou le 28 novembre. Marthagraham.org

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