Quartett d’Heiner Müller, mise en scène de Michel Raskine

Quartett d’Heiner Müller, texte français de Jean Jourdheuil et Béatrice Perregaux, mise en scène de Michel Raskine

QuartettOn peut considérer la pièce  (1980) comme une réécriture des Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos , voire comme une transposition, et une prolongation du jeu de l’amour et de la mort, auquel se livrent la marquise de Merteuil et le vicomte de Valmont, .
Heiner Müller indique dans une didascalie initiale: «un salon d’avant la Révolution française et un bunker après la troisième guerre mondiale ». Mais Quarttet participe aussi d’une formidable proposition pour  des comédiens : la marquise et le vicomte se rejouent leur scénario dramatique et cynique, convoquant leurs victimes : la présidente de Tourvel et la jeune Cécile de Volanges.
 Ils échangent leurs rôles et endossent ceux des autres. Et la pièce a donc souvent été montée avec des partis pris différents : un homme âgé et une jeune femme, une femme âgée et un homme jeune, deux femmes…
Michel Raskine vit depuis longtemps une grande aventure théâtrale avec Marief Guittier, et lui offre ici  un rôle où elle peut développer son talent, celui d’une Merteuil âgée, marquée dans sa chair par les sévices du temps, face à un Valmont (Thomas Rortais) d’une insolente jeunesse, à tel point qu’on se demande s’il n’est pas un fantasme  né de son invention.
  Le metteur en scène emprisonne la comédienne jusqu’à la taille dans un monticule de terre, la forçant à l’immobilité. Référence évidente, voire même un peu gênante, à la Winnie de Samuel Beckett dans Oh! Les beaux jours: devant la Merteuil déjà prise dans la terre de sa tombe, Valmont, plein d’énergie, saute, virevolte, se déshabille, se rhabille, enlève sa perruque, boit un Coca…
  La bande-son trop présente! surligne cette agitation mais le vicomte est ce que la marquise veut bien qu’il soit. Et, du haut de son tombeau, elle mène la danse-de mort-qui conduira au sacrifice de Valmont. Les anciens amants se livrent à un duel féroce et pervers où tous les coups sont permis. Le but: faire souffrir l’autre pour jouir de cette souffrance, et prendre le pouvoir sur lui. Ce rituel qu’ils s’imposent,  rappelle aussi la parade mortifère des bonnes chez Jean Genet.
Toute leur stratégie les conduit à la mort et Quartett porte ce désir et ce jeu sexuel exprimés en termes crus par Heiner Müller qui se souvient aussi des romans du marquis de Sade. Réduits au silence, les personnages se figent et, nouvelle pietà, la Merteuil à la fin, tient dans ses bras le corps nu de Valmont, image superbe dont la symbolique permet bien des interprétations…

Elyane Gérôme

Théâtre des Célestins à Lyon, jusqu’au 24 janvier et les 15 et 16 mars au Granit-Scène nationale de Belfort.

 

 

 

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