Candide

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Candide, si c’est ça le meilleur des mondes… adaptation de Maëlle Poesy et Kevin Keiss, mis en scène de Maëlle Poesy, d’après le conte de Voltaire

Il en faut, des Candide, pour nous faire parcourir le monde, c’est-à-dire l’«humain trop humain». Et encore, Voltaire ne connaissait pas notre capitalisme financier ni le réchauffement climatique. Le jeune Candide, donc, a la chance d’être bâtard et par conséquent de n’être réellement chez lui nulle part, et soumis aux soubresauts (un euphémisme…) de toutes les institutions, à commencer par la famille.
Comme il n’a pas soixante-douze quartiers de noblesse, et qu’il est chassé du paradis terrestre: le château de Thundertentronk,  il ne peut, tant qu’il n’a pas la force de le décide, épouser sa chère baronnette Cunégonde. Les armées avec leur violence organisée rabotent les individus. Et les églises, avec leur intolérance érigée en dogme,  utilisent les inquisitions de toute sorte et la manipulation cynique des âmes rêveuses, pour mieux les gouverner. Là-dessus, son maître Pangloss, l’inaltérable optimiste, lui-même emprisonné, pendu, mutilé, continue à s’émerveiller de l’enchaînement des effets et des causes.
On connaît le voyage de Candide, de catastrophe en catastrophe, de rencontre en rencontre, de retrouvailles improbables, en retrouvailles encore plus improbables. Maëlle Poesy et Kevin Keiss y voient, bien sûr, un roman d’apprentissage, avec un personnage pourtant très résistant à l’apprentissage : il faudra au jeune homme toute l’étendue du récit et un tour du monde connu, pour commencer à s’interroger sur l’optimisme de son maître et  penser à cultiver son jardin.

 Mais surtout, au-delà de la satire (savoureuse revanche sur les critiques de théâtre et le public snob qui se donne un air inspiré), les maîtres d’œuvre du spectacle lisent dans le conte de Voltaire un humanisme lucide et, finalement, optimiste. À côté des grands inquisiteurs et des exploiteurs comme Vanderdendur, il existe aussi de bons anabaptistes, de braves Martin, de fidèles Cacambo, et même un Eldorado, trop beau pour qu’on s’y attarde. Ce n’est pas une consolation mais une réalité. Et puis, les supposés morts revivent, pour les nécessités du récit, au point qu’il faut parfois les tuer à nouveau. Enfin, Candide retrouve périodiquement (et par les hasards le plus fous!) ses amis perdus, mais peut surtout leur raconter ses aventures.
Dans la scénographie astucieuse d’Alban Ho Van, véritable machine à jouer, avec ses transformations express  en champ de bataille, bateau, chambre, mer déchaînée…, le récit joué, démultiplie les comédiens transformistes : Caroline Arrouas, Gilles Geenen, Marc Lamigeon, Jonas Marmy et Roxane Palazzotto, à l’exception de Candide, courant après le meilleur des mondes. Ils racontent, incarnent, illustrent, dansent la pièce, au point qu’aux saluts, on s’étonne qu’ils  soient seulement cinq!

Le tout porté par un travail impeccable du son et de la lumière :nous n’oublierons pas la violence des projecteurs aveuglants évoquant la guerre, ni la tendre caresse d’une lumière chaude sur un visage.Sans insister sur l’émotion, sans souligner à quel point parfois Voltaire «est Charlie»  et les religions, terribles, sans forcer le rire, cette jeune équipe nous donne un spectacle maîtrisé, joyeux, d’une belle maturité. Ni candide, ni, encore moins cynique; du beau, du bon théâtre…

 Christine Friedel

 Théâtre de la Cité Internationale, Paris jusqu’au 24 janvier. T : 01 43 13 50 50

 

 

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