Médina Mérika

Médina Mérika, texte et mise en scène d’Abdelwaheb Sefsaf 

img_6351La pièce s’inspire de Mon Nom est Rouge du grand écrivain turc Omar Pamuk: «Maintenant je suis mon cadavre». De la même façon, ici, un cadavre, avec une blessure sanguinolente au crâne, (Toma Roche, persuasif) se lève, et prend la parole face public : « Mais, s’il vous fallait une piste pour explorer dans la bonne direction le monde étrange des tueurs qui hantent nos quartiers, laissez-moi vous dire qu’il se cache certainement derrière mon assassinat, un complot contre notre monde, nos coutumes et notre religion. »
Avec humour et recul, le mort vivant, jeté sans égards dans un puits, espère qu’on retrouvera son cadavre grâce à l’odeur…Médina Mérika raconte l’histoire d’un rêve, sur fond de printemps arabe à la dérive.
Le cadavre est celui d’Ali, jeune réalisateur plein d’avenir, passionné de cinéma américain. Mais, dans la médina où il vit, parangon symbolique de la ville arabe, l’Occident est à la fois, emblème de  liberté qui fascine, et celui de la décadence qu’on méprise.
  La recherche de son assassin devient prétexte à explorer cette société en pleine mutation, lieu de frottements et de frustrations, et son rapport si ambigu à l’Occident. Soit le point de vue franco-algérien d’une tragi-comédie moderne au nom de «Printemps arabes», sous forme de nouvelle policière avec suspens et mobiles. On entend condamner les faux imams, ces prêcheurs à barbe longue et à la robe immaculée quittant leur campagne natale pour porter la bonne parole dans les grandes villes du Nord, « perverties par le monde occidental et les idées nouvelles »…
 Ainsi parle le Chien : «Si vous pouvez en croire un chien sans parole mais qui jacte, c’était le plus imbécile des « hmars » que cet imam-là. Mais il avait un don extraordinaire pour captiver les foules et les mener, comme il l’entendait, par le bout du nez.  Avec un verbe et une gestuelle magnétiques. «De même, les bars sont condamnés : on y joue aux dés, on y regarde passer les femmes en écoutant de la musique, qui touche les cœurs et pervertit les âmes . »
  Homme de théâtre et de musique, Abdelwaheb Sefsaf œuvre vaillamment, en dépit des opposants, à la rencontre entre  Orient et Occident. Un écran vidéo, avec les musiciens  du groupe Aligator, installés de part et d’autre, fait défiler les paysages de Beyrouth, avec entre autres, une chanson comme Beirut.
 Entre arabe et français, entre accents traditionnels et résonances électroniques, entre chansons swinguées et vrais monologues de théâtre, se crée  une poésie douce-amère, depuis les plaintes du lyrisme oriental à l’électro contemporain.
Amour, haine, refus des inégalités, désir de combattre, anti-héros et désespérance : reste à résister aux oppresseurs avec l’humour contestataire et la saine distance, l’autocritique, et la lutte contre un fatalisme légendaire. Nestor Kéa et Georges Baux, multi-instrumentistes, sont à l’orgue des années soixante-dix et aux guitares.
Abdelwaheb Sefsaf, leader charismatique, au chant et à la percussion, assure aussi la direction musicale  du groupe.  À mi-chemin entre conte et comédie musicale, il propose une vision haute en couleurs, tonique et enthousiaste, des bouleversements culturels dans les sociétés arabes.  Avec pour icône féminine Lila, l’épouse d’Ali, (Marion Guerrero) qui joue, danse et chante avec grâce.
Du théâtre musical à l’énergie radieuse, pour un idéal de partage…

 Véronique Hotte

Le spectacle s’est joué à la Maison des Métallos,  Paris, du 12 au 17 janvier.

 

 

 

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