Seeds (Retour à la terre)
Seeds (Retour à la terre) de Carolyn Carlson
Dans la salle Maurice Béjart (80 places) à Chaillot, donc en toute intimité, s’est joué Seeds, un spectacle composé d’une succession de tableaux symboliques sur le thème de la reconnexion à la terre. De la graine, à l’humus, à l’arbre, en passant par les racines, les origines, la rencontre avec soi, la découverte de l’autre, du monde, la naissance, l’évolution, la mort et la vie. L’humanité. Nous.
Avec une belle association de talents : scénographie et lumières simples et efficaces, costumes magnifiques, mise en scène pleine de poésie et de rythme, musique de qualité, vidéos animées originales, interprètes porteurs d’un univers singulier.
Les enfants regardent, fascinés. À mesure de l’avancée de Seeds, certains montrent du doigt les éléments de la scénographie qui attirent leur attention.
Le thème? Une graine primordiale éclot et fait naître Elyx ,l’ambassadeur du sourire, dessiné et animé par Yacine Aït Kaci. Ce petit personnage joyeux, aux traits simples, représente la part d’humanité existant en chacun de nous. Il impulse les directions de Seeds, veille sur les humains et communique avec eux, du haut de son écran.
Le premier danseur (Alexis Ochin), est longiligne et gracieux, avec une gestuelle entre mime et danse; ami d’Elyx, il joue avec lui avec humour. Chinatsu Kosakatani et Ismaera Takeo, sont les Adam et Ève de la pièce. Lui, danseur-acrobate, a des mouvements puissants et sans fard, précis comme ceux d’un art martial. Elle, d’une grande beauté, développe une expression corporelle toute en finesse.
À la fin de la pièce, une petite fille a dit: «J’ai adoré mais je n’ai rien compris! » Nous aussi, avons eu parfois l’impression de passer à côté du message. Cette fable écologique a sans doute été conçue pour nous envoûter, de nous faire entrer dans un état altéré, d’oublier le temps, et de nous faire vivre une immersion qui exclut la question du sens. Les messages, symboliques, devant passer directement dans l’inconscient du spectateur…
Mais certains moments donnent à voir un amalgame de créations juxtaposées les unes aux autres, où chaque micro-univers reste fermé sur lui-même. Alors que, si, dans chaque scène, les liens entre danseurs, dessin-animé et accessoires étaient approfondis, le spectacle serait total et gagnerait encore en beauté. Heureusement, la pièce possède déjà quelques-uns de ces instants magiques: par exemple, quand les trois interprètes dansent en même temps qu’Elyx et interagissent avec lui, le virtuel s’incarne: on en oublie l’écran et la limite entre réel et imaginaire s’efface.
À voir, pour vivre une expérience à la fois poétique artistique, au delà des mots, et qui parle à l’enfant encore présent en chacun de nous.
Laurie Thinot.
Le spectacle s’est joué au Théâtre National de Chaillot, Paris.