Lady Macbeth, reine d’Ecosse

Lady Macbeth, reine d’Ecosse, de Colette Garrigan

colette-garrigan-reinterprete-macbethColette Garrigan née à Liverpool, scénographe, après avoir été élève de l’École de marionnettes à Charleville-Mézières, a travaillé avec le Nada Théâtre, au Royaume-Uni, puis à la Réunion; elle  a monté, entre autres: Après la pluie, Cent ans dans la forêt et Sleeping Beauty, version pour adultes de La Belle au Bois dormant qui se passe dans un quartier pauvre de Liverpool, où la drogue plonge la jeunesse dans un sommeil funeste.
Dans Crowning Glory (recréé sous le titre: De l’Autre côté du miroir), elle jouait, cette fois, une coiffeuse qui, dans son salon, raconte son parcours vers le bonheur, alors que tout avait mal commencé dans son enfance.  Et Mary Brown traitait de la réconciliation entre deux amies brouillées, à la suite de médisances.
Cette Lady Macbeth, reine
d’Ecosse qu’elle interprète aussi seule, avec beaucoup de délicatesse, commence presque à la fin de la tragédie à l’acte V. La Reine vient de se donner la mort… Dans un salon des plus bourgeois,  à l’heure du thé, posées sur un guéridon, des carafes figurent le couple royal, un grille-pain, leur château,  des fourchettes, les soldats, et des chaises, les sorcières.
Elle nous fait découvrir l’ascension vers le trône de son époux, Macbeth, le général, devenu roi d’Écosse  par le biais de ses crimes pour s’emparer du pouvoir et surtout le garder, l’anéantissement dans la folie, puis la guerre…
La comédienne dit les célèbres répliques de Shakespeare en anglais mais aussi en français. Au loin, on entend les voix du roi assassin et des trois sorcières. Et planent aussi les ombres d’Elizabeth I et de Mary Stuart, ces reines, femmes de pouvoir, qui voulaient vivre leur destin jusqu’au bout comme Lady Macbeth, ont aussi inspiré  Colette Garrigan.
Mais il est parfois difficile de retrouver ici dans un tel cadre, les fils de cette épopée mortelle, vue tant de fois… Jouer, même en partie, Macbeth en solo avec quelques objets/marionnettes tient du pari, et on ne retrouve pas vraiment ici les moments-clefs de la tragédie.
La malédiction concernant cette pièce  n’est pas nouvelle, et plus des metteurs en scène confirmés, comme Jean-Pierre Vincent ou la grande Ariane Mnouchkine, ont eu le plus grand mal à relever le défi. Au Mouffetard, le jeune public, très concentré a, malgré tout, paru apprécier le spectacle, comme on a pu en juger dans le court débat qui a suivi.

Edith Rappoport

Le Mouffetard, jusqu’au 31 janvier, du jeudi au samedi à 20 h, dimanche à 17 h. T: 01 84 79 44 44, www.lemouffetard.com


Archive pour 26 janvier, 2016

Children of nowhere

Children E. WoronoffChildren of nowhere, texte et mise en scène de Fabrice Murgia, conception musicale et installation sonore de Dominique Pauwels

Le jeune auteur et metteur en scène belge avait remporté le prix du Festival Impatience à Paris,  avec Le Chagrin des ogres. Avaient suivi plusieurs beaux  spectacles comme Ghost Road (2012), une analyse pénétrante du système capitaliste américain avec des images de maisons abandonnées et des témoignages de gens âgés très pauvres (voir Le Théâtre du Blog). Dans Notre peur de n’être créé pour le festival d’Avignon 2014, Fabrice Murgia questionnait les crises de notre époque. Comme celles que vivent au Japon, les Hikikomori, qui refusent tout contact avec la société.   Les spectacles de Fabrice Murgia, on l’aura compris, sont ceux d’une sorte d’archéologue du futur comme il le dit lui-même; il a aussi acquis une remarquable maîtrise des technologies les plus pointues en matière d’imagerie et de conception sonore, doublé d’un ethnologue, avide de recueillir la parole de ceux qui ont vécu  des années difficiles, voire atroces dans un pays (le leur !) où ils n’étaient plus les bienvenus.

Children of nowhere se passe à Chacabuco, au nord du Chili, dans un désert, où avait été construite une cité pour les ouvriers des mines où l’on extrayait du salpêtre. Reconvertie en camp de concentration par le sinistre dictateur Pinochet, elle avait reçu en 1973 et 74, quelque 1.880 prisonniers politiques : médecins, avocats, artistes, professeurs et travailleurs, bref, tous ceux  qui n’avaient pas l’heur de plaire au régime de terreur mis en place… Fabrice Murgia reprend ici la même construction scénique: film, musique, chant et jeu monologué. Avec son équipe et sa comédienne  préférée, Viviane De Muinck, il est allé filmer les ruines de Chacabuco, maintenant ville-fantôme située dans un désert aride et sinistre.

Il a aussi recueilli au Chili, les témoignages très émouvants d’anciens déportés, souvent torturés et marqués par la mort tragique de centaines de leurs camarades, ce qui a évidemment laissé des marques profondes dans la société chilienne d’aujourd’hui. Le spectacle créé au Chili l’an passé, se situe, comme les précédents de Fabrice Murgia, au croisement d’interviews filmés avec beaucoup de pudeur, et de courts monologues et poèmes de Pablo Neruda, dits sur scène par Viviane de Muinck mais aussi de moments musicaux joués par le quatuor Aton’ & Armide de violoncelles, ou chantés par la soprano Lore Binon.

L’ensemble de Children of nowhere bénéficie d’une réalisation exemplaire. Mais il n’y a pas toujours de lien évident entre les différents modes d’expression : les courts monologues, bien dits, mais dont le texte n’a rien de fascinant  (et assez statiques: la comédienne est filmée, souvent assise dans un fauteuil sur la scène) le chant et la musique, et enfin la partie documentaire, ici capitale, qui a tendance à étouffer un peu le reste. D’autant plus que Fabrice Murgia utilise volontiers comme d’habitude le très gros plan, avec la projection d’un visage sur un écran occupant tout le fond de scène. Ce qui, à la longue, frise le procédé. Reste un documentaire très sobre et d’une remarquable qualité qui en dit long sur l’horreur et le climat socio-politique du Chili à l’époque,  avec déportations  et répressions sanglantes à la clé, comme les dictatures en ont le secret.

L’Amérique du Sud, c’est loin mais les dictatures, elles, ne sont jamais très loin: dans le temps comme dans notre espace européen, ou du moins dans ce qu’il en reste: au cas où on aurait tendance à l’oublier, Children of nowhere peut agir comme une efficace piqûre de rappel…

 Philippe du Vignal

Théâtre de Vitry-sur-Seine le 12 février  et samedi 13 février. Navette aller-retour depuis Châtelet (angle place du Châtelet/café Sarah Bernhardt) une heure avant la représentation.
En Belgique, à Bruges, Cultuurcentrum Brugge, le 16 février. Le Théâtre de Namur, les 23 et 24 février et  à Gand, NTGent, les 8 et 9 mars.
Le Maillon de Strasbourg, du 2 au 4 mars. Théâtre Universitaire de Nantes, les 22 et 23 mars. Saint-Nazaire/Scène Nationale, le 25 mars.
Et au Rotterdamse Schouwburg, le 6 avril. 

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