Tartuffe (reprise) mise en scène de Luc Bondy

Tartuffe de Molière mise en scène de Luc Bondy (reprise)

 tartuffeLuc Bondy, récemment disparu, avait  adapté Tartuffe en version allemande en 2012 à Vienne, puis l’avait créé à l’Odéon-Ateliers Berthier, il y a presque deux ans. Son épouse Marie-Louise Bischofberger et Vincent Huguet ont  repris le flambeau, dans la même mise en scène mais avec quelques acteurs différents.
 Chantal Neuwirth (Dorine) a quelque chose d’espiègle et de roué qui voit clair dans cet impasse où s’est fourré Orgon mais dommage, ne la comprend pas toujours bien comme Christiane Cohendy dans madame Pernelle (à la place de François Fabian), par moments presque inaudible…  Marie-Louise Bischofberger aurait eu intérêt à se faire assister par quelqu’un qui sache faire dire correctement les alexandrins… On ne voudrait pas jouer les puristes mais, de ce côté-là, le compte n’y est pas tout à fait !
 Samuel Labarthe qui remplace Gilles Cohen, propose une autre conception d’Orgon avec un personnage plus effacé, plus mou, mais tout aussi fasciné par ce curieux parasite/escroc des plus cyniques, qu’il connaît depuis peu, jusqu’à lui promettre sa fille en mariage et à lui faire une donation !
 Audrey Fleurot, que l’on connaît surtout par la fameuse série Un Village français, mais qui a joué aussi au théâtre, notamment avec Laurent Pelly, a remplacé Clotilde Hesme; elle apparaît plus comme une victime de Tartuffe, trop discrète sans doute, que comme l’épouse d’Orgon capable d’une certaine séduction pour arriver à prendre le faux dévot sur le fait.
Micha Lescot, longiforme, toujours étonnant, reprend le rôle de Tartuffe, et nous a semblé pousser, davantage que lors de la création, le personnage vers une espèce de gourou, noir d’habit et de cœur, très porté sur le sexe féminin, et sans aucun scrupule, quand il s’agit pour lui d’escroquer une famille honorable mais fragilisée par le laisser-aller d’Orgon. C’est parfois un peu gros (comment cet être aux pieds nus, au pantalon effrangé,et somme toute assez repoussant, peut-il avoir une certaine influence sur Elmire?).
Mais cela fonctionne quand même grâce à la formidable présence de Micha Lescot qui concentre tous les regards dès qu’il entre en scène.

 Et on retrouve avec grand plaisir les deux scènes muettes de la création,  intelligemment imaginées par Luc Bondy qui en disent beaucoup sur la pièce : au début, celle du petit déjeuner où l’on sent déjà un véritable malaise dans cette grande maison, et celle à la fin, avec un dîner où toute la famille grande bourgeoise, enfin réunie et délivrée du maléfique Tartuffe, déguste du poulet que les deux femmes de chambre apportent sous des cloches en argent.
Au total, un spectacle sur lequel nous avons toujours les mêmes réserves qu’à la création (voir Le Théâtre du Blog), dont le rythme demanderait à être resserré et qui doit encore se roder… Mais dans les meilleurs moments, comme cette fameuse scène où Tartuffe essaye de séduire Elmire, on entend l’essentiel de cette  pièce, absolument unique dans le théâtre français, dont les dialogues, trois siècles après, sont restés d’une précision et d’une radicalité étonnantes. Et c’est loin d’être négligeable…

Philippe du Vignal

Théâtre de l’Odéon-Ateliers Berthier 1 rue André Suarès Paris XVIIème. T: 01 44 85 40 40. A 20 h du mardi au samedi et à 15 h, le dimanche jusqu’au 25 mars. 

 

 

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