Collectif: Ni guerres ni état de guerre
Notre ami, le critique et écrivain René Gaudy nous a demandé de publier ce texte fondateur du collectif Ni guerres ni état de guerre, ce que nous faisons bien volontiers. Comme tous les textes généreux, il n’a évidemment pas la prétention de régler les problèmes politiques qui agitent les nations dites civilisées mais il peut agir comme une très utile piqûre de rappel à l’heure où notre pays (par ailleurs l’un des premiers fabricants d’armes au monde!) est engagé dans plusieurs interventions militaires importantes… Et s’il fait prendre conscience que chez nous, dans les plus petits des hameaux de la douce France, une simple conversation sur nos chers téléphones portables ou sur nos ordinateurs, dépend de métaux suffisamment rares et coûteux pour leur fabrication par de très puissants trusts européens prêts à financer des dictatures et des achats d’armes, ce ne sera déjà pas si négligeable…
Ph. du V.
La France était en guerre bien avant les attentats du 13 novembre, lesquels ont largement servi de prétexte à intensifier ces engagements militaires. Les guerres de pillage pour le contrôle des ressources n’ont pas manqué depuis le début des années 2000, en Irak, en Afghanistan, en Libye, au Mali, en Centrafrique. Ces conflits doivent être désignés par leur nom : ce sont des guerres d’ingérence impérialiste. La France n’a aucun «rôle positif» dans ces interventions, malgré ses prétentions puisées à l’ancien répertoire colonial. Les interventions militaires que mène l’État français sont très largement invisibles dans les médias. Le peu qui en est dit impose un consentement, au nom d’une logique sécuritaire, avec ou sans habillage humanitaire ; le discours belliciste entend anesthésier et tétaniser la population. Pourtant, comment ne pas rappeler les désastres que sèment ces guerres, les millions de morts, de blessés et de déplacés, la misère, le désespoir jetant les populations sur les routes, tandis que s’enrichissent les profiteurs de guerre, les multinationales vendeuses d’armes -la France tenant en la matière le quatrième rang mondial-. Ce sont aussi des dépenses colossales, qui détournent l’argent public de dépenses sociales, culturelles et écologiques vitales. De surcroît, l’État qui mène ces guerres, en pompier pyromane, nous entraîne dans une spirale infernale, ayant pour effet de renforcer la haine qui débouchera sur d’autres attentats. Les avions Rafale tuent des civils aussi innocents que ceux du Bataclan. Ces bombardements sont des bombes à retardement. La guerre devient désormais un moyen de gouverner, et de gouverner par la peur. L’état de guerre proclamé justifie la privation croissante des libertés et des mesures directement inspirées de l’extrême droite comme la déchéance de nationalité. Cette situation, d’une extrême gravité, passe pourtant pour une évidence dans le discours politique dominant, comme s’il s’agissait de banaliser la guerre et de nous habituer à cet état martial et sécuritaire. Car l’état d’urgence vise à museler les colères et les luttes : cette guerre est aussi une guerre sociale. Nous nous opposons aux guerres d’ingérence et de spoliation, donc à tous les impérialismes. Mais nous sommes en France et c’est donc en France que nous pouvons nous battre en priorité contre «notre» propre impérialisme. Nous pouvons le faire concrètement, sans abstraction ni proclamation: parce que les questions géopolitiques qui se jouent parfois à des milliers de kilomètres ont des résonances fortes, ici, dans nos quartiers. C’est pour cela que la lutte de notre collectif passe par le combat contre le racisme antimusulman, contre les inégalités et les discriminations, le soutien aux migrants et aux sans-papiers, l’opposition aux mesures d’exception et au contrôle généralisé des populations qui ciblent en priorité les personnes musulmanes ou supposées telles, les quartiers populaires et les mouvements sociaux. Il nous faut donc nous organiser, riposter par une résistance à la hauteur de ce que nous subissons, à la hauteur des guerres qui se font contre les populations, contre nous et en notre nom. C’est pourquoi, nous avons décidé de lancer un Collectif contre la guerre qui: • exige l’arrêt immédiat des interventions militaires françaises, le retrait des bases militaires, la fin des traités et alliances (OTAN…) • dénonce le marché des ventes d’armes qui irrigue entre autres les pires dictatures • combat la militarisation de la société, le quadrillage des territoires et des esprits par le complexe militaro-sécuritaire • soutient le droit à l’autodétermination des peuples, apporte sa solidarité aux forces de résistance et d’émancipation. Nous voulons élargir ce comité, nationalement et localement, à toutes les organisations et toutes les personnes qui se retrouvent dans ce combat.
Pour tout contact et signature : antiguerre16@gmail.com