Illusions d’Ivan Viripaev

Illusions  d’Ivan Viripaev, traduction de Tania Moguilevskaia et Gilles Morel, mise en scène de Galin Stoev

 836e97f6f1b7d3b9d6529cb93ffca599« Mais il doit bien y avoir un minimum de constance dans ce monde » se demandent ces treize jeunes comédiens, vifs et réjouis, aux personnages interchangeables, qui ont participé en 2013 à la création d’Illusions, du dramaturge russe Ivan Viripaev, qu’a mise en scène Galin Stoev, au Théâtre de l’Aquarium dans le cadre du Festival des Ecoles.
  Issus de la promotion sortante de l’E.S.A.D., ils jouent ici une sorte de « soap-opéra » à l’américaine. Paradoxe: ils doivent dire l’histoire de deux couples âgés, à travers discours, monologues, dialogues et chants dont Cry me a river à la sonorité émouvante, avec des danses et signes visuels de reconnaissance générationnelle. Mais avec des chansons bien plus anciennes qu’eux…
Au centre de la pièce, l’expérience au monde de quatre octogénaires, aguerris par une expérience de  vie de couple pendant une cinquantaine d’années… Albert marié à Margaret, et Dennis à Sandra sont toujours restés proches depuis leur jeunesse. Mais un jeu de quatre coins les a emportés en secret, et chaque duo a donc trouvé sa douce moitié chez l’autre qui lui fait face-miroir ou  diagonale-dans un amour absolu, dit réciproque.
Mais sans que cette passion soit jamais avouée ni découverte! La vie ne repose  en fait que sur une fiction, sur des illusions, dit Ivan Viripaiev et Galin Stoev appelle cela « auto-tromperie » : une capacité de survie, et de sauvegarde personnelle. Ainsi les songes et l’emprise de l’imagination se révèlent puissants, et générateurs d’un bon souffle existentiel. Alors que la réalité est souvent décevante…
Ces jeunes comédiens alertes rajeunissent donc, métaphoriquement et physiquement, ces couples âgés. Habillés pour les filles, de robes printanières aux  couleurs gaies, et pour les garçons, de costumes de ville aux tons chauds. Les émotions les plus enivrantes se déclinent d’une situation « réelle » à l’autre, aussitôt apparue puis disparue, ou mise à mal par un calcul de probabilités infinies.
Qui aime qui finalement ? Chacun aime l’autre, selon le passage aléatoire du temps mais un peu plus, ou un peu moins, à la folie, ou pas du tout.  Et cette dimension onirique provoque chez eux des hallucinations d’enfant inquiet : la vérité des sentiments leurs échappent et ils n’ont plus aucune certitude… Margaret se suicidera et les autres mourront de vieillesse.
Les acteurs jouent chacun des quatre personnages à tour de rôle, façonnant des portraits diffractés et énigmatiques, avec fraîcheur.
Mais on attend en vain une écriture significative du mystère existentiel. 

Véronique Hotte


Théâtre de l’Aquarium, Cartoucherie de Vincennes, jusqu’au 24 avril. T: 01 43 74 99 61.

Le texte de la pièce est édité aux Solitaires Intempestifs.

 


Archive pour avril, 2016

Old Times d’Harold Pinter

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Old times d’Harold Pinter, texte français de Séverine Magois, mise en scène de Benoit Giros

  La pièce  a été créée à Londres en 1970, et juste après, chez nous sous le titre C’était hier par Jorge Lavelli, avec Delphine Seyrig, Jean Rochefort et Françoise Fabian, mais nous ne l’avions pas vue. Moins jouée que L’Anniversaire, Trahisons ou Le Retour du grand dramaturge anglais, elle a pour cadre, une maison à la campagne au bord de la mer, figurée ici par une inévitable vidéo avec des nuages qui passent lentement.
Deeley et Kate, la quarantaine, attendent Anna, la grande amie de jeunesse de Kate qu’elle n’a pas revue depuis vingt ans et dont elle ne semble, curieusement, guère avoir conservé de souvenirs.

 Quant à Deeley, il dit ne pas connaître Anna, qui, d’abord silencieuse au début, se met à parler des moments qu’elles ont vécu ensemble. Il est question d’une jeune homme assis dans un fauteuil qui pleurait. Kate ne confirme rien de tout cela, comme assez étrangère à toute cette histoire qui semble ne pas la concerner vraiment. Elle se souvient juste qu’Anna avait la mauvaise habitude de lui piquer ses sous-vêtements. Anna dit juste qu’elle les avait à une fête où un garçon matait sa jupe.
Deeley, lui, dit qu’il a rencontré Kate dans un cinéma où on projetait  Odd man out (1947) de Carol Reed avec Robert Newton. Kate parle aussi du jour où elle a vu Anna morte dans un lit couvert de poussière, puis comment son corps avait disparu quand un homme est arrivé. Qui a  vu qui? Qui a vu quoi?
On peut penser que ce trio a réellement existé mais dans une vie bien antérieure, ou pas: on ne le saura jamais. Deeley ment-il, et aurait-il d’abord couché avec Anna comme le texte le laisse sous-entendre, avant de tomber amoureux de Kate qui s’en aperçoit et essaye alors de tuer Anna. La mort d’Anna aurait alors bouleversé Deeley. Ou bien tout cela se passe-t-il dans son  subconscient ?  
Il parle avec Anna, de Kate  comme si elle était morte. Bref, il y a de l’absurde et du désir sexuel dans l’air mais sans véritable communication entre des gens que l’on suppose avoir autrefois été proches.
«Le passé, dit Harold Pinter, est ce que vous vous souvenez, imaginez que vous vous en souvenez, vous convaincre que vous vous souvenez, ou prétendre que vous vous souvenez. (…) Une chose n’est pas nécessairement vraie ou fausse; elle peut être à la fois vraie et fausse « .

  Oui, mais  ces dialogues avec anecdotes personnelles vont un peu cahin-caha, et cette histoire de domination psychologique et/ou sexuelle, à coups de brèves répliques et d’auto-confession traîne un peu en longueur.
  Bref, le fameux cocktail Pinter sur fond d’onirisme et télescopage entre vrai et faux,  entre réalisme et fantasmes,  ici, ne fonctionne pas bien. Sans doute surtout à cause de la pièce aux personnages qui ne sont guère attachants, et de la mise en scène de Benoît Giros, un peu timorée et qui manque d’envergure; il aurait pu aussi nous épargner des vidéos pléonastiques (entre autres, la mer toujours recommencée, ou un extrait de Odd man out).
 Malgré la présence de la grande Marianne Denicourt qu’on a souvent vu chez Patrice Chéreau et Luc Bondy mais que Benoît Giros aurait pu mieux diriger, d’Adèle Haenel, César de meilleure actrice pour Les Combattants de Thomas Caillet en 2015, et qui sait dire comme peu de jeunes actrices, la nostalgie de ces old times, et malgré  Emmanuel Salinger, solide dans un rôle pas facile.
Mais on reste sur sa faim; le public a salué poliment les acteurs mais semblait un peu désemparé devant la pièce.
Alors à voir ? Oui, au cas où on voudrait compléter sa connaissance du théâtre d’Harold Pinter, sinon on peut s’abstenir ; et ce ne sera sans doute pas un des grands succès de cette fin de saison…

Philippe du Vignal

Théâtre de l’Atelier, Place Charles Dullin, Paris 18ème, du mardi au samedi à 21h et le dimanche à 15h 00.  

La Ménagerie de verre

La Ménagerie de verre de Tennessee Williams, traduction d’Isabelle Famchon, mise en scène de Daniel Jeanneteau

 

02-18Me047Entre les images libres de l’antilope gracile, de la chèvre vindicative ou du puissant rhinocéros, la licorne -animal mythique bienveillant- réserve sa grâce au rêveur contemplatif. Elle apparaît dans un monde féerique, en bête onirique, mi-sauvage, mi-domestiquée dont le crâne permet de lire les vieux rêves.
  La licorne existe aussi en modèle réduit, merveilleux, que ne se lasse pas d’admirer la fragile Laura, la jeune sœur de Tom, qui fait collection d’une ménagerie de verre (1944) comme la pièce éponyme de Tennessee Williams. Mais cette licorne perdra sa corne à cause de la maladresse d’un jeune homme.
Après avoir créé en 2011 à Tokyo en japonais, ce joyau du dramaturge américain, Daniel Jeanneteau en propose aujourd’hui une version occidentale française -sorte de palimpseste d’une vision du Japon. 
La scénographe qu’est aussi Daniel Jeanneteau a conçu un espace somptueux et vide, un cube à peine serré entre quatre murs transparents de tulle blanc, avec un sol blanc cotonneux à la sensualité laiteuse où le pied s’enfonce avec douceur. Ainsi, s’annonce visuellement, et de façon presque fantasmatique, la chambre claire de la conscience du narrateur qui se souvient d’un passé douloureux dont il ne parvient ni à s’extraire, ni à le mettre à distance. Ce qui lui serait pourtant salutaire. Le personnage de Tom, fils d’une histoire familiale pathogène, fait référence à la vie maudite de Tennessee Williams dans sa famille.
Sur le devant de la scène, au début et à la fin du drame, Tom à la fois narrateur et frère de Laura (Olivier Werner à la puissance tranquille), ouvrier dans une fabrique de chaussures mais aussi poète,  tente de comprendre les énigmes existentielles, prenant à témoin le public.
Le père de famille s’est enfui et le fils a dû donc prendre en charge  dans un premier temps sa mère Amanda et Laura, très pauvres, avant de rompre peu après avec un tel enfermement mortifère. Elles
nient la vie du dehors et la rencontre avec les autres, refusant le principe de réalité pour n’écouter que celui du plaisir, des rêves, sur lequel personne n’a prise.  La lumineuse et ludique Dominique Reymond, qui, en ballerine diaphane, pourrait ne pas en faire autant ! se projette en jeune fille éternelle à l’enfance heureuse (vraie ou mensongère ?) qu’elle a passée dans le Sud. En robe de tulle romantique à la Scarlett O’Hara d’Autant en emporte le vent, elle évoque sa jeunesse à jamais perdue, quand, entourée d’admirateurs, elle aurait pu épouser l’un d’eux  qui avait une plantation prometteuse, si la vie n’en avait décidé autrement. Figure de mère possessive, Amanda porte sur sa scène personnelle des atours luxueux japonais, dessinant à traits dansés, de ses bras et jambes, des lignes de fuite.
 Un lustre coloré qui rappelle une méduse translucide, a été installé  dans la pièce de réception pour l’accueil d’un galant destiné à Laura. (Pierric Plathier). Tom a en effet invité à la demande de sa mère, ce collègue de travail qui respire la vie du dehors et attentif à Laura, son ancienne camarade de lycée, et amoureuse muette. Solène Arbel (Laura) cette sœur naturellement aimée, diffuse la pudeur du personnage de Tennessee Williams. Elle parle peu mais exprime beaucoup, absente et très présente à la fois, observatrice impuissante de la folie maternelle.
Un moment de théâtre radieux et précieux entre salle et scène, et entre conscience et  rêve.

 Véronique Hotte

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Notre amie a très bien dit tout le bonheur de cette interprétation, en particulier d’Olivier Werner et de Solène Arbel qui possède sur le plateau une concentration et un jeu exceptionnels pour jouer ce personnage difficile, que les actrices tirent souvent du côté du mélo.  Et cela ne mouffete pas dans la salle quand elle embrasse Jim 0’ Connor. Des moments d’émotion comme celui-ci, on peut toujours en chercher dans le théâtre contemporain…
Dominique Reymond est juste et sublime dans la première partie, mais pourquoi se met-elle ensuite à en faire des tonnes, c’est à dire un peu n’importe quoi sur le plan gestuel, comme une actrice de boulevard qui veut montrer qu’elle est bien là. Curieux !

Nous serons aussi plus réservés sur la scénographie; le cordonnier serait-il le plus mal chaussé ? Daniel Jeanneteau semble s’être pris les pieds dans cet épais tapis cotonneux blanc et des pans de tulle doublés par un rideau également de tulle coulissant pendant la plus grande partie de la pièce.  Il y a une table et des chaises style art minimal, un peu à la manière de celles que concevait autrefois Bob Wilson. Le tout dans une incroyable pénombre.
On comprend bien que Daniel Jeanneteau ait voulu gommer dans sa mise en scène tout un pittoresque de mobilier et de vêtements des années 40 mais le monde de Tennessee Williams est celui de gens démunis qui ont sans doute justement besoin de tout un amas d’objets-fétiches pour les aider à supporter leur pauvre vie. Comme Laura
avec sa petite ménagerie de verre ici placée à l’avant-scène, sur-dimensionnée et d’une laideur absolue.
Reste à trouver la juste mesure pour imaginer la maison où vit cette famille pauvre et en chute libre sur le plan sentimental, mais la concevoir comme un espace absolument nu, assez obscur,et beaucoup trop vaste où les personnages semblent être comme en lévitation, paraît être le type même de la fausse bonne idée, un peu facile et déjà souvent vue. Nous imaginons la tête du regretté Guy-Claude François qui fut longtemps le directeur de la section scénographie à l’Ecole Nationale des Arts déco, si un(e) élève lui avait remis une telle proposition…
Cela dit, cette Ménagerie de verre  participe d’un spectacle tout à fait honnête; on entend bien le texte, souvent émouvant qui retrouve ici comme un nouveau souffle, avec une jeune actrice exceptionnelle qui mériterait un prix d’interprétation.

Philippe du Vignal
 

 Théâtre National de la Colline rue Malte Brun, Paris XX ème, jusqu’au 28 avril. T: 01 44 62 52 52.

La Traversée Invasion ! adaptation et mise en scène d’Eva Dumbia

La Traversée Invasion ! adapatation et mise en scène d’Eva Dumbia

 

eva-doumbia-2_0L’afropéenne Eva Dumbia propose une traversée des rivages africains jusqu’au Havre, port négrier, en passant par les Antilles. Avec un triptyque construit à partir de cinq textes qu’elle a revisités : Insulaires ou Seul l’impossible pourra m’apaiser, d’après Jamaïca Kincaid et Fabienne Kanor, La Vie sans fards, précédé de Ségou, d’après le récit autobiographique et le roman de Maryse Condé, et enfin La Grande chambre de Fabienne Kanor.
En trois volets, sont mis en scène les destins et paroles de ces romancières qui racontent quelque quatre cents ans d’histoire: Maryse Condé, Guadeloupéenne née en 1937, a mené une partie de sa carrière universitaire sur le continent africain, Fabienne Kanor,  quarante six ans, née à Orléans de parents martiniquais, et Jamaïca Kincaid, soixante sept ans, née dans l’île d’Antigua à cinquante kms au Nord de la Guadeloupe.
Soit une histoire de la traite négrière et de l’esclavage revisitée au féminin. Eva Dumbia, elle,, née d’une mère normande et d’un père malinké, a grandi en banlieue du Havre.
  L’histoire coloniale nous est ici contée dans un langage marqué par le métissage des techniques, le chevauchement des époques et des voix. Narration romanesque, récit autobiographique et dialogue théâtral s’appuient sur le cinéma, la photo, la danse, le chant et la lumière.
Chaque partie se déroule sur un continent : l’Afrique, l’Amérique des Caraïbes et l’Europe, et évoque l’identité noire de descendantes d’esclaves. Second point commun : le  brassage de moments historiques dans un aller et retour permanent entre siècles passés et vie contemporaine. Illustrant au mieux la thèse de Walter Benjamin qui refuse de voir dans le passé une époque révolue ; le passé ne passe pas, dit-il, c’est une autre forme du présent…

  Vrai pour toutes les époques, mais l’histoire des Noirs le dit de façon exemplaire. Si L’histoire coloniale n’en finit pas de coller à la peau de l’Europe, celle des Noirs, s’est écrite dans l’esclavage et continue encore! Ainsi, dans La Grande Chambre, la jeune Dorylia, Antillaise née au Havre, part à la recherche de son ancêtre africain, premier noir doté du statut de domestique libre… Pour elle, la frontière entre hier et aujourd’hui s’avère ténue,  comme celle entre rêve et réalité.
Se rencontrent ici les héros d’hier et d’aujourd’hui, dans un lieu au nom lourd de symbole : la «grande chambre» située dans l’entrepont des bateaux négriers où étaient enfermés les esclaves.  Tout fait écho à cet événement traumatique inaugural : cela se passe au Havre, haut lieu du commerce dit triangulaire, avec des personnages à la recherche d’une généalogie, et surtout avec l’humiliation, celle qu’ont vécue les parents et celle qu’on reçoit en partage.
Dans le langage théâtral qui fait vivre cette quête de mémoire, la parole s’articule aux cris et au chant. Musique, danse et rythme tiennent ici une place importante, traduisant une force vitale et le spectacle devient alors une cérémonie qui tire sa force du féminin,  où on célèbre l’écriture, et où on dit la vie de femmes laissées dans l’ombre : écrivaines, poétesses, danseuses et chanteuses qui font de la création artistique leur planche de salut.
A ce métissage artistique, s’ajoute la vidéo, qui,  loin d’être ici un support illustratif ou décoratif, redouble la scène du récit, en lui conférant une profondeur géographique et/ou historique, et en  convoquant un ailleurs où se joue le destin d’un peuple. Avec émotion, mémoire et puissance d’évocation dans une belle rencontre entre Eva Dumbia et ces  écrivaines….
Bravo à Macha Makeïeff qui a accompagné Eva Dumbia qui reviendra cet automne à La Friche de la Belle de Mai avec Massilia Afropéa.

 Michèle Bigot

Spectacle créé au Centre Dramatique national de La Criée, Marseille du 29 mars au 2 avril.

 

 

La vie bien qu’elle soit courte de Stanislas Stratiev

La vie bien qu’elle soit courte de Stanislas Stratiev, mise en scène de Sophie Accard

AStanislas Stratiev, dramaturge et scénariste bulgare (1941-2000), connu dans son pays pour ses pièces et ses films, a aussi été joué dans toute l’Europe, la Russie, la Turquie et les Etats-Unis. Il a jusqu’à sa mort été directeur littéraire du Théâtre satirique de Sofia.
La vie bien qu’elle soit courte (1986) a reçu le premier prix du festival de Théâtre International de Maubeuge en 1990.
  On attend Stilianov, un architecte qui doit donner son agrément à une série d’immeubles, décision indispensable avant la livraison des appartements. Mais  décide de marquer ce jour d’une pierre blanche: il a pris conscience que tous ces immeubles-d’une laideur confondante-ne rendent service ni à l’architecture ni aux locataires.
Stilianov se rend compte qu’il fait partie de l’intelligentsia molle qui règne sur la ville ;  de toutes les premières au théâtre ou à l’Opéra, il  peut  discourir sur la vie culturelle de la cité.
 Oui, mais… il donne son agrément à ces architectures sans âme dans des périphéries inhospitalières. Il décide donc de ne plus le faire, quand elles dénaturent la ville !
Prenant  ses jambes à son cou, il court alors avec courage vers les immeubles où il est attendu, pour accomplir son acte de bravoure. En chemin, il doit sauter par dessus les flaques qui jonchent le sol défoncé. Et le malheureux Stilianov va en perdre le bouton de son pantalon et se retrouve donc condamné à le tenir des deux mains, de peur de se retrouver dans une situation plus qu’embarrassante, et indigne du grand architecte qu’il est.
Sans attendre, il se lance dans une tentative de réparation et va sonner aux portes pour  glaner une épingle à nourrice ou, mieux, du fil et un bouton.  Il pensait régler l’affaire au plus vite mais se trouve confronté à la méfiance, et au refus des habitants de ces immeubles qu’il a pourtant dessiné pour eux.
  Stilianov se croira sauvé en découvrant un atelier de couture   mais le personnel lui en fera voir de toutes les couleurs dans une spirale infernale qui manquera de le rendre fou.
On pense bien sûr, à l’œuvre de Franz Kafka, tant l’absurde est présent dans cette écriture, efficace, toute  en abyme….
  Il s’agit d’une version plus légère de la pièce qu’a choisi la comédienne et metteuse en scène Sophie Accard : «Bien sûr, dit-elle, à la première lecture, on pourrait croire qu’il nous dépeint seulement un monde inerte, échoué, où toute action serait vouée à l’échec. Cette première impression ne résiste pas à un examen plus attentif du texte. La Vie bien qu’elle soit courte n’est, à mes yeux ni un pamphlet politique ni un drame individuel mais le récit d’un rêve grandeur nature ».
   Blandine Vieillot a conçu une scénographie efficace, avec tubulures, fenêtre et grillages qui permet de créer des décors différents avec un minimum de manipulations et quelques éclairages.
  Avec un bon rythme, et quelques trouvailles dont un petit théâtre d’ombres qui illustre élégamment l’épisode de la perte du pantalon, la mise en scène, pleine d’humour, force un peu le trait (jeu parfois outré avec perruques et accessoires.) Ce qui fait un peu perdre au texte de sa coloration absurde. Dommage…
   Léonard Prain incarne un Stilianov assez magnétique, Sophie Accard et Tchavdar Pentchev jouent les autres personnages dans cette même tonalité, soutenus par la musique pop du groupe français Cascadeur.
Mais malgré ces réserves, une occasion de découvrir un auteur bulgare intéressant,  un choix audacieux pour la jeune compagnie C’est pas du jeu.

 Julien Barsan

Théâtre du Lucernaire, rue Notre-Dame des Champs, Paris (6ème) jusqu’au 7 mai, du mardi au vendredi à 19h. T. 01 45 44 57 34.

 

La Notte

La Notte d’après La Nuit juste avant les forêts de Bernard-Marie Koltès, conception et mise en scène de Pippo Delbono (dans le cadre du voyage dans le monde musical de Pippo Delbono, Adesso Voglio Musica e Basta (À présent, je ne veux que musique et basta)

   pd_ln_10_c_francesco_pulleL’homme-orchestre Pippo Delbono fait un constat de lassitude quant à la terminologie et aux objectifs savants que seraient ceux d’une «famille du théâtre» un peu rigide : travail de l’acteur, et travail aussi sur la fiction, fidélité au texte, etc. Tout cela vécu par lui comme des illusions.
 En échange, la musique et ses interprètes, de Frank Zappa, du rock, aux musiques du monde et en passant par l’art lyrique, apportent au créateur et comédien, une harmonie profonde en accord avec sa vision du monde, sur une esthétique fondée sur le rythme et la musicalité, et non plus sur la seule interprétation des mots : «La musique tombe dans la musique, comme ma voix tombe dans les autres voix. Je ne veux que musique, et basta. »
Pippo Delbono séjourne à Syracuse d’où il observe de loin les bateaux de migrants qui déversent sur la plage des enfants au milieu d’autres semblables plus heureux, siciliens ou touristes, en plein été insouciant.

Là-bas,il reçoit en 2013 une lettre amicale de François Koltès, le frère de Bernard-Marie, dramaturge emblématique d’une écriture déjà post-moderne, à qui il avait demandé les droits de La Nuit juste avant les forêts pour tisser sa propre Notte à lui.
Que peut bien faire ce drôle d’étranger auquel on rappelle sans cesse qu’il n’est jamais tout à fait chez lui, quoi qu’il fasse? Où aller ? Le narrateur, Pippo Delbono, auteur par procuration et personnage, pose la question à l’inconnu qu’il désire aborder, senti instinctivement comme différent et autre.
On a envie, dit-il,  «de se barrer d’ici (si on savait où aller), d’être dans une chambre, vieux, où je puisse parler, ici, je n’arrive pas à dire ce que je dois te dire, il faudrait être ailleurs, personne autour de soi, plus cette question d’argent et cette saloperie de pluie, … »

A l’usine, ou sans emploi ni domicile, migrant ou réfugié, on devient de plus en plus étranger à soi et au monde ; de moins en moins chez soi, poussé toujours vers l’avant, sans savoir où s’arrêter, avec le désert comme tout passé. C’est à l’ombre des arbres qu’il faudrait pouvoir s’expliquer : « Je vais d’une berge à l’autre, d’une passerelle à une autre, je remonte le canal et reviens à la rivière, je regarde les péniches, … je m’assieds au bord de l’eau ou je me penche au-dessus, moi, je ne peux parler que sur les ponts ou les berges, et je ne peux aimer que là. »
Installé dans les murs vieillis par le temps du Théâtre des Bouffes du Nord, somptueux, Pippo Delbono, est accompagné par les improvisations à la guitare électrique de Piero Corso, larmoyante ou stridente, mélancolique ou tonique.

Il marche sur le plateau, regarde son public dans les yeux, lui sourit, puis retourne s’asseoir, un commentaire plein d’humour deviné sur ses lèvres muettes ; il a à la main, les feuillets d’un texte en italien dont il se dessaisit au fil du spectacle.
On ne pèse pas bien lourd, quand on n’a rien dans les poches, et on pourrait s’envoler, et comme si le moindre souffle le faisait effectivement décoller, le comédien-diseur lève les bras avec humour et grâce, et fait mine de s’élever dans les hauteurs  de la scène.

    Le spectacle poétique de Pippo Delbono se clôt sur la lecture d’une lettre de Bernard-Marie Koltès, et sur la réponse affectueuse à sa mère qui s’offusquait de la vulgarité des allusions au sexe dans La Nuit juste avant les forêts. Son fils lui avait écrit : « … il y a parfois un degré de connaissance, de tendresse, d’amour, de compréhension, de solidarité etc., qui est atteint en une nuit, entre deux inconnus, supérieur à celui que parfois deux êtres en une vie ne peuvent atteindre ».
Ce mystère accède à l’au-delà de toute misère sociale ou morale, et dépasse la nécessité luxueuse des mots et du langage pour s’exprimer. Avec art, Pippo Delbono nous livre ses secrets comme ses révélations.

 Véronique Hotte

 Spectacle joué au Théâtre des Bouffes du Nord, Paris, les 1er et 2 avril.

 

 

Magic par l’Equipe de France de magie

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Magic  par l’Équipe de France de Magie

   Cette équipe dépend de la Fédération Française des Artistes Prestidigitateurs (FFAP), institution française fondée dans les années 1900 par Jules d’Hôtel, héritier du fameux  Robert Houdin, le plus célèbre illusionniste du XIXème siècle. Dans sa petite salle  du boulevard des Italiens, il avait installé des machines aussi efficaces qu’invisibles, avec déjà l’aide de l’électricité… Georges Méliès en 1896, réalisa un film sur son escamotage d’une dame.
La plupart des tours encore utilisés aujourd’hui nous viennent de lui, même si la magie moderne n’échappe évidemment pas à l’électronique et aux télécommandes de toute sorte.
  Magic se présente comme «expérience unique et extraordinaire, un spectacle drôle, envoûtant, et poétique » (sic). Mais à y aller voir de plus  près, les choses sont moins évidentes! Magicien confirmé,  Gaetan Bloom présente les numéros, et réalise au passage, quelques tours traditionnels du genre petite bouteille escamoté dans un sac en papier. Ou fil coupé par une paire de ciseaux qui disparaît puis réapparait. Pamplemousse, orange et kiwi coupés menu, puis jetés dans un carton mais retrouvés intacts quelques secondes plus tard au fond du même carton. Mais Gaetan Bloom, en présentateur, en fait des tonnes, demande à la salle d’applaudir pour un rien, bavasse au micro. A la limite du supportable. Dommage…
  Plus intéressant et cette fois réellement poétique, le numéro de Suk et Silhouette, deux hommes, avec tout un jeu sur le vrai et le faux, sur la notion d’automate, et la notion de double. Un beau travail.
Il y a aussi un numéro de Beryl, une jeune femme (il n’y en pas tellement dans le monde de la magie), qui, seule en scène, change de masque de façon absolument magique. Ce qui suppose une belle concentration et un art de la manipulation porté à un haut niveau.
  Le clou de la soirée : celui d’un très jeune homme Alexandre Laigneau, seul en scène, au langage gestuel très graphique, avec juste un banc, et un composteur et une pendule. On entend l’annonce d’un train 58794. Les billets de train se multiplient à partir d’un seul, une canne laisse apparaître un journal, et des cartes naissent au bout des doigts d’Alexandre Laigneau. Brillant et poétique à la fois. Modeste et discret, il fait les choses avec facilité, ce qui suppose bien entendu un très gros travail. Le public lui a fait une formidable ovation.
 Il y a enfin d’une grande poésie, le numéro d’une grande poésie de Gwenaelle, qui sort de la Chavez school de Las Vegas, Avec des apparitions de cartes qui se transforment en éventails. Et pour finir, un numéro d’escamotage par Mahnvi et compagnie d’une jeune femme, avec  fumigènes et accessoires assez laids comme cette grosse théière où on l’enferme et où on la perce de coups d’épée.
Le spectacle, on l’aura compris, très inégal, traîne parfois en longueur à cause d’une mise en scène trop approximative. Mais bon, dans la belle salle du Théâtre d’Yerres, le public, très jeune,, était fasciné.

 Philippe du Vignal

Spectacle vu au Théâtre d’Yerres (Essone), et en tournée mais avec des numéros qui peuvent être différents.

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En votre aimable compagnie, textes des résidents du Glandier

 

En votre aimable compagnie  textes des résidents du Glandier, mise en scène de Marie-Pierre Bésanger

 

nouvelles-zebrures_1« Les auteurs vivent au Centre du Glandier, certains travaillent au Centre d’aide par le travail,  d’autres sont en foyer de vie. Ils ont écrit leur urgence à dire, à être entendus, Ils parlent de «l’implosité du vivant» et c’est à nous que leur écriture s’adresse. »
Gianni Fornet,  en résidence à la Maison des auteurs de Limoges,  a mené un atelier dans ce foyer de Tulle, où il a recueilli des textes étonnants. Leur force et leur profonde réalité, intime et universelle,  l’ont poussé à partager cette parole avec un public «extérieur».
 Deux comédiens se sont emparés de ce matériau brut, avec une distance telle qu’ils  font ressortir le style de chaque auteur. L’humour n’est pas loin ; en tous cas, nous sourions à l’impact des mots. Gianni Fornet nous  livre sur le vif ses commentaires, éclairant le contexte, et de petites vidéos nous mettent dans l’ambiance. L’un des résidents, Nicolas, ne sait pas parler mais, jovial, s’exprime à sa manière: filmé, il en nous fait visiter l’ancienne chartreuse corrézienne de son point de vue, poétique. On découvre aussi l’étrange graphie de Marc Gleiser dont la prose somptueuse charrie la chair des mots dans son Texte aux acteurs.
«Parler, écrire, c’est tendre vers l’autre », résume la metteuse en scène qui a donné à entendre ces personnes, avec finesse, sans appel à la compassion. Mais dans ce va-et-vient entre oralité et écrit, on entend très bien la différence entre dire et mettre à distance en racontant. « Jadis, j’ai eu beaucoup d’ennuis, écrit une femme.» Dans ce «Jadis» («Il était une fois»), réside la posture de l’écrivain, fût-il dans l’autofiction.

  Certaines rencontres d’écriture aboutissent à de belles expériences théâtrales. En votre aimable compagnie en fait partie, comme le spectacle de Laurence Vielle, René qu’est qui te fait vivre, joué l’an dernier à la Maison des Métallos à Paris (voir Le Théâtre du Blog). Cette lecture, présentée aux Rencontres littéraires francophones de Limoges,  pourrait avoir une suite.
Et on retrouvera Marie-Pierre Bésanger aux prochaines Francophonies en Limousin en septembre prochain, avec Tu iras la chercher de Guillaume Corbeil,  et Gianni-Gregory Fornet avec les jeunes de la ville de: Ceux qui marchent-Itinérance de la jeunesse dans la ville: résidence d’écriture in situ, et réalisation d’une pièce multi-media sur la vie d’un groupe de jeunes de Niš (Serbie) en septembre 2015 (festival Urban Fest 11).

 Mireille Davidovici

 Nouvelles Zébrures, organisé par la Maison des auteurs jusqu’au 9 avril. www.les francophonies.fr

Les Créanciers

Les Créanciers d’August Strindberg, mise en scène de Frédéric Fage

  LES CRÉANCIERS 17 © La Cabane Aux FéesCette tragi-comédie (1889) et huis-clos infernal entre trois personnages s’inscrit, avec Camarades (1886) et Mademoiselle Julie (1888) dans le cycle naturaliste du dramaturge suédois.
Avec toujours comme thèmes, la jalousie, la vengeance et le calcul, indissociables chez lui de l’amour conjugal. Et, omniprésents dans son théâtre, l’antagonisme entre époux.

Gustave  son premier mari, et Adolphe, peintre et sculpteur, son second époux sont successivement amoureux de Tékla. Gustave, n’a pas disparu et, au début de la pièce… apparait chez le nouveau couple : «Les liens qui se tissent, les serments qui s’échangent, chacun est créancier de l’autre, et peut à tout moment venir reprendre ses gages», dit la note d’intention.
Frédéric Fage, a transposé cette pièce au temps présent: «Le sentiment amoureux et d’abandon, la créance affective, dit-il,  est un sentiment intemporel et trans-générationnel. Je veux donc que cette pièce soit jouée par de jeunes comédiens, encore fraîchement meurtris par leur première expérience. »
   Une façon de faire découvrir plus facilement par les jeunes générations, un auteur majeur du XIX ème siècle.  Et de montrer à quel point l’écriture des grands dramaturges est toujours d’actualité. Projet intéressant mais risqué, avec, comme souvent, un pari non tenu: ici les comédiens, très irréguliers, jouent rarement ensemble !
 Adolphe et Gustave sont de tempérament opposé et Tékla, belle, séductrice, intelligente et écrivaine renommée,  habitée par un désir fou de liberté,  se trouve dans un premier temps sous l’emprise absolue de son époux qui l’éduque et va en faire une femme adulte. Et le pauvre Adolphe va donc subir une femme forte, extrême et néfaste; malgré elle, peut-être? Maroussia Henrich (Tekla), parvient, de temps à autre, à donner corps et esprit à cette figure féminine complexe. Avec des scènes où elle joue avec  chacun de ses deux hommes, plus abouties et donc plus intéressantes.
Ce violent huis-clos se déroule dans un clair obscur : option dramaturgique  possible comme le choix de placer des photos des personnages en fond de scène. Laissant entendre qu’une autre parole, plus intérieure et secrète, serait cachée dans cette tragi-comédie.
 Mais, dommage, les acteurs ne maîtrisent pas le spectacle : Frédéric Fage n’a sans doute pas su emmener avec lui ces jeunes comédiens qui, avec un travail plus approfondi, auraient pu être à la hauteur de sa mise en scène.

 Elisabeth Naud   

 Studio Hébertot  78 bis boulevard des Batignolles 75017 Paris. T : 01 42 93 13 04 jusqu’au 23 avril.

L’Opéra de quat’sous

L’Opéra de quat’ sous, texte Bertolt Brecht, musique Kurt Weill,  mise en scène  de Joan Mompart

 

4 sous Inspirés par l’Opéra des gueux, de John Gay, Bertolt Brecht et Kurt Weill ont réussi leur coup. Leur Opéra de quat’ sous a trouvé tout de suite sa popularité.
Leurs groschen (la petite monnaie du schilling autrichien avant l’euro) réunissent le prestige de l’opéra et l’accès facile pour tous à ses plaisirs.
Mais ils ajoutent aussi au plaisir du divertissement, le désagrément nécessaire de rappeler que le monde réel est un peu plus dissonant et grinçant qu’une opérette.

  Donc, les rois et reines de cette histoire sont monsieur et madame Peachum, chefs d’une entreprise de mendicité, leur fille Polly, des policiers corrompus, des prostituées amoureuses, tout ce petit monde tournant autour de Mackie-le-surineur, fascinant voyou.
Passions, jalousies, trahisons : on se croirait à l’opéra mais ici on ose parler d’argent (mal acquis, bien sûr). Et, comme à l’opéra, les «songs» sont devenus des standards inoubliables, que ce soit celui de Mackie, celui de Polly, La Fiancée du pirate, ou la chanson de Jenny des lupanars.
La troupe joue franchement le jeu, posant d’emblée la devise : D’abord bouffer, ensuite la morale ». L’énergie y est, l’humour aussi. L’orchestre, sous la direction de Christophe Sturzenegger, impeccable et brillant, respire bien. Il a sans doute une question d’ajustement : il domine un peu trop les comédiens-chanteurs vaillants et talentueux, dont la partition n’est pas si facile : Polly (Charlotte Filou) rattrape astucieusement, en y mettant beaucoup d’expressivité, des aigus délicats, Jenny  (Lucie Rausis) s’en sort avec grâce, et les chœurs ont l’allant qu’il faut.
Mais le spectacle est ralenti par une lourde et massif plateau tournant où on a placé au premier étage l’orchestre de dix musiciens. Fonctionnel, et qui,  apparemment, ne vise pas le beau, comme les costumes, à une exception qu’on vous laissera découvrir. À vrai dire, avec des comédiens-chanteurs chantant au micro, face public, alors que les moments parlés de la pièce sont souvent coupés, ce spectacle va vers le music-hall.
Le jeune public et le public jeune de Malakoff, sensibles à la bonne musique, à l’énergie et à la sincérité de cet Opéra de Quat’sous, ont fait une ovation à l’œuvre, montée avec force et loyauté, pour ceux qui la découvrent.

Christine Friedel
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4 sous2Oui, au dynamisme de la mise en scène, oui, aux chœurs de la fin. Mais, quant au reste, nous sommes beaucoup moins enthousiaste…
Nous avons affaire ici à une version concert de la pièce, au texte largement amputé, où l’orchestre prédomine un peu trop et où les chanteurs-comédiens pour se faire entendre, hurlent le plus souvent au micro.

Bref, la Comédie de Genève où le spectacle a été créé, n’est pas réputée pour son acoustique, alors que celle du Théâtre 71 est impeccable. Bon, question de balance: cela devrait s’améliorer.
  Mais il y a un peu tromperie sur la marchandise : nous n’avons pas vraiment droit au texte de Brecht comme indiqué sur le programme, puisque les dialogues ont presque disparu. Du coup, les interprètes (qui font leur boulot), ont bien du mal à imposer leurs personnages en quelques répliques. Normal.
Et du coup aussi, les acteurs-chanteurs qui ne sont plus ici que huit au lieu d’une trentaine, nous offrent une succession de songs qui devient assez lassante.
  Côté scénographie : ce plateau tournant qui semble fasciner (merci, Thomas Ostermeier !) les jeunes metteurs en scène pouvant se l’offrir,  tourne de temps en temps mais ne se justifie pas vraiment ici. Et l’orchestre (sauf le piano), ainsi surélevé, prend encore plus de puissance jusqu’à devenir envahissant, et à transformer la représentation théâtrale en version music-hall, comme le dit notre amie Christine…
 On peut comprendre le souci de Joan Mompart de ne pas tomber dans le pittoresque… mais mieux vaut oublier les costumes et masques en tissu transparent, franchement laids, et qui ne sont pas au service des acteurs.
   Bref, nous sommes peut-être exigeant mais cette mise en scène de L’Opéra de Quat’sous  aux airs populaires si souvent chantés (Frank Sinatra, etc.) mais si peu représenté à cause du coût, nous a déçu…

Philippe du Vignal

Théâtre 71 / Scène nationale de Malakoff. T : 01 55 48 91 00 jusqu’au 14 avril.

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