La nouvelle saison du Théâtre de la Ville à Paris
La nouvelle saison du Théâtre de la Ville à Paris
Comme l’ont souligné Dominique Alduy, présidente du conseil d’administration et Bruno Julliard, premier adjoint chargé à la Mairie, chargé de la Culture, le Théâtre de la Ville qui avait été construit en 1862 par Gabriel Davioud et dont la salle et l’accueil avaient été refaits en 1968 par les architectes Fabre et Perrotet, (qui ont aussi conçu le Théâtre de la Colline), avait besoin d’une sérieuse rénovation. L’idée de théâtre des architectes était, à l’époque, conforme avec celle d’un d’un théâtre populaire: plus de balcons d’une salle faussement à l’italienne (avec des places disait Marcel Pagnol, des places où on voit et où n’entend pas, des places où on n’entend mais on ne voit rien et des places où on ne voit ni n’entend rien!) mais une bonne visibilité avec un gradinage en béton, une ouverture de scène de 11, 60 m qui fut doublée, et des dessous de scène mécanisés. Oui, mais voilà quarante ans c’est peu; les techniques ont beaucoup évolué et la taille du public a grandi: et le confort de la salle devenait donc des plus limités, la machinerie et l’appareillage technique des cintres demandaient une mise aux normes, et l’accueil du public (toilettes, bar, etc.) avait lui aussi pris un sacré coup de vieux.
Ce qui imposait donc une révision drastique de l’ensemble du théâtre qui fermera donc en octobre pendant deux ans pour répondre aux exigences du spectacle contemporain; les travaux programmés depuis plusieurs années ont été confiés au cabinet d’architecte Agnès Blond-Stéphane Roux qui a remarquablement rénové Le Bateau-Phare à Dunkerque (voir Le Théâtre du Blog). Avec comme maître d’ouvrage, la Ville de Paris mais l’équipe du théâtre étant, bien entendu, associée à l’opération. Le plateau disposera ainsi d’un plancher intermédiaire, la cage de scène sera aussi mise aux normes, comme le chauffage, la ventilation, les installations électriques, la sécurité et la sonorisation. On créera des ateliers techniques et les régies actuelles seront totalement repensées. Le hall d’accueil -si peu accueillant!-sera revu, avec vestiaires et sanitaires dignes de ce nom, la mezzanine aura une meilleur vue sur la Place du Châtelet, la salle disposera de sièges nettement plus confortables, et la belle salle de la Coupole en haut du théâtre, sera plus accessible, et donc plus efficace pour accueillir les répétitions, voire même des représentations.
Le café des Oeillets , situé au sous-sol dans l’ancien restaurant, deviendra une véritable petite salle de spectacles fermé. Enfin l’accent sera mis sur l’efficacité du bâtiment, avec une réduction notable des consommations d’énergie. C’est dire l’importance des enjeux et des travaux et ce qui suppose aussi un engagement financier et humain considérable, a dit Emmanuel Demarcy-Motta, “ Cela n’a pas été facile à mettre en place, techniquement et humainement mais il fallait le faire, et le Théâtre de la Ville sera à même, de se réinventer pendant deux ans, et de trouver à la fois une nouvelle vitalité, en investissant l’Espace Pierre Cardin (photo ci-dessus) qui sera rénové pour l’occasion. Grâce aussi à une vingtaine de partenaires qui accueilleront nos spectacles comme Le Centquatre , le centre Georges Pompidou, le Théâtre de la Colline, le Grand Parquet, Le Théâtre des Champs-Elysées, le Monfort, le Théâtre National de Chaillot, le Théâtre 71 à Malakoff, le Théâtre du Châtelet qui va lui aussi connaître une période de grands travaux. Sans eux, nous n’aurions pas pu avoir un programmation aussi riche Sans tout détailler, nous accueillerons une fois de plus comme chaque année Le Berliner Ensemble avec le Faust de Goethe au Théâtre du Châtelet, L’Opéra de Quat’sous de Bertolt Brecht, au Théâtre des Champs-Elysées, et Letter to a man avec Mikhial Barysnikov, tous trois mis en scène par Robert Wilson. A la rentrée aussi, nous aurons un festival des opéras traditionnels chinois au Théâtre 71 de Malakoff. Et bien entendu, dans notre deuxième salle: le Théâtre des Abbesses, seront aussi présentés aussi nombre de spectacles importants, comme Déjeuner chez Wittgenstein de Krystian Lupa”.
On sent une certaine émotion chez Emmanuel Demarcy-Motta à l’idée de devoir quitter l’emblématique Théâtre de la Ville pour une si longue période, mais aussi la fierté de boucler la programmation d’une belle saison, en recevant des artistes majeurs, comme Lucinda Childs et son mythique Dance avec, en surimpression, la lecture filmique de Sol Lewitt, mais re-tournée à l’identique avec les danseurs de l’Opéra de Lyon. Ou la reprise de Bit de Maguy Marin, ou encore une création d’Anne Teresa de Keersmaeker.
Emmanuel Demarcy-Motta a aussi insisté sur le volet international: avec Alice et autres merveilles, Le Faiseur et Rhinocéros, des valeurs sûres de sa compagnie qui partiront en tournée française (et étrangère pour ce dernier). Et il y aura aussi l’échange entre son théâtre et le BAM (Brookyn Academy of Music) qui présentera les spectacles de Nora Chipaumire et de Steve Cosson à New York d’abord puis à Paris, et ceux de Yoann Bourgeois et de Wang Ramirez, après avoir été joués à Paris, iront à New York… Soit au total, 23 spectacles de théâtre dont onze créations, trente-cinq spectacles de danse, dont douze créations, vingt-quatre concerts de musiques du monde et de chanson, et dix-sept concerts de musique, quinze spectacles Enfance et jeunesse et enfin la huitième édition des Chantiers d’Europe! Comme l’avait fait remarquer Dominique Alduy, s’ouvre à la rentrée prochaine, une saison à la fois ambitieuse ( plus de cent-dix spectacles et concerts!) et décisive pour ce grand théâtre. Une fermeture même temporaire d’un théâtre, Emmanuel Demarcy-Motta le sait très bien-ne va pas sans risques:les lieux de programmation sont forcément nombreux et le public a horreur d’être bousculé: la fréquentation risque donc de s’en ressentir…
La Mairie de Paris, en tout cas, n’aura pas ménagé les moyens pour que cette programmation hors-les murs (solide mais sans grand risques) soit réussie, et à des tarifs raisonnables. Ce qui n’est pas un luxe par les temps qui courent…
Philippe du Vignal
Théâtre de la Ville, 2 Place du Châtelet Paris 4ème. T: 01 42 74 22 77 theatredelaville-paris.com A partir du 14 novembre, Espace Pierre Cardin 1 avenue Gabriel, Paris 8 ème