Fair-Play

Fair-Play, un spectacle de et avec Philippe Thibaud et Philippe Leygnac, mise en scène de Jean-Marc Bihour, Jean-Michel Guérin, Patrice Thibaud, musique de Philippe Leygnac

  p213431_2-fair-playOn l’a vu autrefois dans les spectacles de Macha Makeieff et Jérôme Deschamps, et il a aussi créé des solos comme Cocorico et Jungles. Clown, mime et danseur, à la fois ridicule et touchant, et incroyable travesti…
 Il y a chez lui, on l’a dit souvent, du Charlie Chaplin mais aussi du Jacques Tati chez cet artiste grand et assez enveloppé, ce qu’il reconnaît en se pinçant ses bourrelets, ou en faisant ressortir son gros ventre nu. Sans aucun état d’âme et, avec une parfaite impudeur. Satisfait et ridicule donc comique
Le spectacle  utilise un des meilleurs ressorts du rire avec un couple en décalage complet, l’un grand et assez gros, grimaçant, à la gestuelle expansive, marchant, courant, soufflant, transpirant, dansant sans arrêt…  Et l’autre, son merveilleux complice, Philippe Leynhac, petit et  très svelte, à l’agilité et l’impassibilité d’un Buster Keaton, musicien, pouvant jouer au besoin de la trompette d’une main, et du piano, de l’autre.
Il faut le voir suspendu en dessous du grand piano à queue, puis arrivant, grâce à plusieurs rétablissements, à se retrouver sur le tabouret et se mettant à jouer, de l’air le plus naturel du monde.
  Patrice Thibaud s’en prend au monde de l’exploit sportif, tous genres confondus, avec des échauffements ridicules, des courses à pied qu’il impose, à coups de sifflet impitoyables, à son complice et souffre-douleur, et aux massages pour garder une forme… qu’il n’a jamais eue, et n’aura jamais.
 Il caricature aussi bien le joueur de tennis que le footballeur. Bref, à l’heure de l’Euro, il compose une charge assez lucide pour, dit-il, «souligner le contraste entre l’image noble qu’il donne du sport et la réalité moins glorieuse, faite de triche, de coups bas, de prétention et de souffrance que je voulais raconter sur scène».
  L’univers sonore participe aussi de ce même côté déjanté, avec des annonces faites au haut-parleur dans une langue incompréhensible, aux sons épouvantables mais aussi à la fin, avec les délicieuses et poétiques impros de Philippe Leynhac, au piano.
  Et on rit ? Oui, souvent, mais pas toujours : le spectacle  manque souvent de rythme, et a encore visiblement besoin d’être rodé. Il a du mal à démarrer et a une redoutable fausse fin. Cela dit, le public, souvent très jeune, a fait une véritable ovation aux deux compères.
La faute à quoi ? A une dramaturgie qui aurait dû être plus soignée.
La seule solution, simple et efficace, comme, surtout et souvent, dans les spectacles comiques : éliminer les répétitions, élaguer, élaguer encore de quelque quinze minutes, et revoir d’urgence la toute fin.
Allez, Jean-Marc Bihour, comédien exemplaire des Deschiens, revoyez cette mise en scène et imposez des coupes. Michèle Guigon, la comédienne votre partenaire chez Deschamps, et celle ensuite autrefois de Patrice Thibaud,  aurait aimé ce spectacle et vous encourage, du haut de son petit nuage.

 Philippe du Vignal

 Théâtre du Rond-Point 2 bis avenue Franklin-Roosevelt Paris 8ème, jusqu’au 3 juillet. T : 01 44 95 98 21

 

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