Le travail des élèves de deuxième année au Conservatoire national

Le travail des élèves de deuxième année au Conservatoire National

 

Intérieur Jour Extérieur nuit, scènes d’Alfred de Musset, mise en scène de Sandy Ouvrier

 

 080616_PF_8903L’équation relève du défi: comment rendre compte en fin d’année, du travail de neuf filles et neuf garçons. En donnant le même morceau de gâteau à tous et convenant à chaque personnalité, avec une certaine unité dans les textes, et sans que cela dure cinq heures! En privilégiant la notion d’exercice, à la fois individuel et collectif- avec la quasi-obligation de doubler les personnages, mais sans nuire à la mise en scène qui doit être des plus solides, avec musiques, éclairages, éléments de décors et costumes dignes de ce nom. Bref, un exercice de haute voltige…
Sandy Ouvrier s’en tire remarquablement avec des scènes et textes d’Alfred de Musset. Soit dans une première partie des extraits d’A quoi rêvent les jeunes filles, Fantasio, Lorenzaccio, ces derniers particulièrement réussis avec la marquise Cibo (Louise Chevillotte), le duc Alexandre (Florent Hu) le cardinal Cibo (Jean-Frédéric Lemoues) Philippe Strozzi (Marceau Deschamps-Segura) et Lorenzaccio (Sonia Carvalho de Almeida).
Costumes contemporains mais de qualité assez inégale, mobilier des années cinquante: gros fauteuils de cuir usé, poste de radio à lampes, et quelques châssis/éléments de décor montés sur roulettes et que déplacent les apprentis-comédiens selon les scènes. 
Imaginés par Frank Echantillon et François Rey qui font un clin d’œil au tournage de films avec de gros projecteurs eux aussi sur roulettes, et participent avec une rare efficacité à la réussite du projet.
 Fil conducteur très malin: une voix off qui relie les différentes scènes d’une même pièce. Il y a aussi un extrait de La Nuit de mai, pas très convaincant et qui ne rend pas service à leurs interprètes et un morceau du Chandelier qui reste d’une étonnante actualité, non loin de François Truffaut.
 080616_PF_9209L’étonnant dans l’histoire: l’apparente facilité (mais il y a sûrement un gros travail derrière) et le plaisir évident avec laquelle ces élèves se coulent dans les phrases de ce dramaturge décidément inoxydable qui a toujours fait la joie des apprentis-comédiens. Diction et gestuelle parfaites: la moindre des choses dans un Conservatoire national mais  qui devient une denrée de plus en plus rare.
 Seule réserve: une nette tendance à la criaillerie, inutile car le théâtre possède une acoustique des plus formidables, même sur un plateau nu et sans aucun pendrillon. Comme le rappelle une plaque sur la façade du théâtre, c’et ici que les Parisiens découvrirent la musique du jeune Ludwig van Beethoven…
 La deuxième partie est consacrée de nouveau à Fantasio  et à La Nuit de mai mais aussi et surtout, à  l’incontournable On ne badine pas avec l’amour, qui clôt la soirée avec  bonheur. On y  retrouve les mêmes qualités de jeu et avec, pour une fois, celui des garçons à la même hauteur que celui des filles : notamment les trois Perdican: Selim Zahrani, Marceau Deschamps-Segura et Charlie Chabert)  Rosette (Louise Guillaume) et les deux Camille: Hanne Mathisen Haga et Louise Chevillotte  sont tout aussi bien.
On ne peut citer tout le monde et on sera sans doute injuste…
Cette présentation de travail s’apparente à un vrai spectacle, et Sandy Ouvrier a réussi à créer des images qui donnent une belle tonalité à l’ensemble comme, entre autres, cette jeune femme derrière une fenêtre éclairée de l’intérieur (bon travail de Lauriano di Rosa), ces fleurs éparpillées sur le plateau, ou cette marche en rythme sous la neige qui tombe comme dans les spectacles de Jérôme Savary), de cour à l’arrière jardin, très “pinabauschienne”, avec filles et garçons munis d’un parapluie qu’ils ouvrent en entrant sur la plateau et qui laissent échapper des feuilles mortes: remarquable…
  Seule réserve: cet ensemble de scènes tout à fait intéressant, réalisé avec intelligence et sensibilité, est, malgré un entracte, d’évidence beaucoup trop long. Pourquoi ne pas avoir fait deux volets? En tout cas, ces jeunes gens rêvés par Alfred de Musset semblent des plus actuels, et cette relation à un monde depuis longtemps évanoui, est sans doute, grâce à Sandy Ouvrier et à ses élèves, le plus émouvant dans cette présenatation…
 
Philippe du Vignal

Conservatoire  National Supérieur d’Art Dramatique 2 bis Rue du Conservatoire, 75009 Paris. T:  01 42 46 12 91

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Archive pour 11 juin, 2016

June Events/ dixième édition

June Events/ dixième édition

 

Ce festival, créé par Carolyn Carlson en 2007, a pris de l’ampleur. Le Centre de développement chorégraphique/ Atelier de Paris présente trente-huit spectacles dans plusieurs lieux de la Cartoucherie de Vincennes mais aussi à Paris : une vitrine offerte à la  danse contemporaine dans tous ses états, en France en Europe, avec, cette année, une ouverture sur les Etats-Unis et le Québec.
Éclectique, la programmation panache spectacles, maquettes et performances, en laissant une large place à l’expérimentation. De découverte en découverte.

 Combustion  de et par Alban Richard

Combustion Alban Rcahrd Musée picasso(c)Patrick BergerAu sous-sol de l’Hôtel Salé, dans une vaste salle, antichambre de la rétrospective dédiée à  Miquel Barceló,  Alban Richard danse, entouré de toiles monumentales en relief aux couleurs chaudes rythmées par des noirs et qui fourmillent de figures bizarres, disséminées comme autour d’une arène.
Sol y sombra, titre de l’exposition, évoque le monde de la tauromachie, thème cher à Pablo Picasso, car à la corrida, on distingue les places à l’ombre ou au soleil. Alban Richard entre en dialogue avec l’univers de l’artiste espagnol.
 Il évolue en mouvements serpentins, dans des tempos impulsés par son souffle et sa voix,  sonorisés à la console par son fidèle complice, Félix Perdreau. Successivement torero puis taureau, il se confronte à la matière tellurique qui compose les toiles environnantes.
Deux heures durant, il occupera l’espace, improvisant par cycles, debout, puis au sol. Son souffle part en syncope, ou s’amplifie en bourrasque, réverbérée par le musicien.
Un spectacle étonnant que les visiteurs du musée captent en passant, ou savourent en faisant cercle autour d’Alban Richard qui opère une lecture pertinente de l’iconographie animale du peintre où contrastent matière épaisse, grossièrement façonnée, et délicatesse de traits creusés en négatif, pour créer des effets d’ombre et de lumière. Un nouvel éclairage pour la suite de l’exposition qui occupe tout le sous-sol du musée

  Directeur du Centre chorégraphique national de Caen depuis 2015, il n’en est pas à sa première performance : il a déjà investi le Musée d’art Moderne de la Ville de Paris, le Musée Guimet, l’Art Fair d’Abu Dhabi et le Musée de Cluny, «activant» les œuvres qu’il rencontre avec une gestuelle et une musique adaptée chaque fois au lieu qu’il explore… A suivre donc.

7 juin au Musée national Pablo Picasso, Paris

 

anan_1The Hidden Body projet chorégraphique d’Anan Atoyama

  La créatrice japonaise se réfère, dans la pièce qu’elle prépare, à l’immense Kazuo Ono, figure mythique de la danse nippone, fondateur du Butô, avec Tatsumi Hijikata. Avec deux autres interprètes, elle recherche l’essence de la danse par des gestuelles dépouillées et répétitives, faisant appel à la pesanteur des corps et à l’émotion que suscite leur simple présence, sur un plateau nu, jonché de verres de différentes formes…
Une pièce épurée et sensuelle, où les trois femmes déploient une animalité élégante…Le corps caché est-il cette aura qui se dégage d’elles, ou l’ombre de la mort qui plane sur la vie ?

 Installée depuis quelques années à Vaulx-en-Velin après avoir bourlingué des Etats-Unis à la Tunisie, puis d’ Italie au Nicaragua, Anan Atoyama ne nous en dira pas plus : elle s’exprime  mieux par la danse que par la parole, surtout en français. Du moins, cette maquette de vingt minutes le laisse espérer.

9 juin, Cartoucherie de Vincennes

 

L'Aveuglement - M Benoit (c) Patrick Berger 160527278L’Aveuglement chorégraphie de Mylène Benoit

Cette pièce  pour trois danseurs-chanteurs,  un musicien et un éclairagiste, se déroule dans l’obscurité. La chorégraphe, par ricochet plasticienne et vidéaste, aime jouer sur tous les registres à la fois. Dans la première partie, avec un ballet de projecteurs activés par le chant, onomatopées et susurrements du trio, vibrations sonores et lumineuses se marient en une sorte de symphonie sensorielle, provoquant une expérience synesthésique intense. 
 Entre deux éclairs de lumière aveuglants, le public, plongé dans le noir complet, peut entrevoir les interprètes assis dans un coin de la scène ; ils se déchaîneront ensuite, silhouettes fantomatiques,  dans une pénombre se dissipant progressivement. On sort étonné et dubitatif de cette aventure sensorielle expérimentale.

9 juin, Cartoucherie de Vincennes

Mireille Davidovici

(Chronique à suivre) Cartoucherie de Vincennes et hors-les-murs. T. 01 41 74 17 07 jusqu’au 18 juin, www.junevents.fr

Les Noces de Figaro de Mozart

Les Noces de Figaro, de Wolfgang Amedeus Mozart, mise en scène de Silvia Paolio

 

Le-nozze-di-Figaro_Scena-1_Rocco_Casaluci_2016La Révolution arriverait-elle par les femmes ? C’est en tout cas ce que semblait déjà nous dire Beaumarchais et à sa suite le Mozart des Noces de Figaro où la lutte contre les privilèges de l’aristocratie s’engage dans une complicité entre femmes.
La Rosine du Barbier de Séville, devenue Comtesse d’Almaviva, et sa camériste Suzanne s’allient, toutes classes sociales confondues, contre le droit de cuissage que le Comte prétend s’autoriser en la poursuivant de ses assiduités peu avant les noces de celle-ci avec Figaro, lui-même au service du Comte.
Pourtant, en adaptant la pièce de Beaumarchais, Lorenzo Da Ponte, le merveilleux librettiste qui écrira encore pour Mozart le livret de Don Juan puis celui de Cosi fan Tutte, avait dû diminuer la virulence des critiques portées par l’écrivain contre l’Ancien Régime.
Mais la musique de Mozart comme l’œuvre d’Anton Tchekhov, dépasse la simple critique politique pour donner à chacun de ses personnages un espace de liberté et d’humanité. Dans Les Noces de Figaro, aucun personnage principal : chacun dépend de l’autre et, même si Figaro donne son nom au titre, Suzanne a plus d’importance sur le plan musical.
Dans la version présentée au Teatro Comunale de Bologne, la mise en scène est minimaliste : pas de grands effets, mais une rigueur dans les déplacements et un parti pris de distance ironique et joyeuse par rapport à l’action.

Le décor d’Andrea Belli se veut lui aussi résolument arte povera :  caisses en carton en guise de meubles, et quelques portes astucieusement placées qui s’ouvrent juste pour créer la surprise.
Mais le véritable bonheur est dans l’orchestre et les voix ; le chef Hirofumi Yoshida, emporte ses musiciens à un rythme soutenu et la distribution, très jeune, insuffle aux airs les plus graves un caractère d’allégresse insolente.
Alessandra Contaldo, vive et espiègle, comme l’exige son rôle, interprète une Suzanne enjouée, sensuelle, particulièrement rouée. A ses cotés, le Figaro de Lorenzo Malagola Barbieri apparaît très tendre et ingénu.  Alexandra Grigoras, dont le physique plébéien semblait de prime abord peu compatible avec le rôle de la Comtesse, emporte tous les suffrages grâce à une voix d’une grande pureté.
Quant au Comte, il sait jouer la séduction avec retenue. Seule, Shahar Lavi  (Chérubin)  donne par sa désinvolture trop appuyée qui confine à la vulgarité, une note tout à fait déplacée dans cette version qui pour le reste, est d’une simplicité élégante, cohérente et très attachante.

Sonia Schoonejans

Teatro Comunale de Bologne

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