La dernière idole

La dernière idole , écriture, mise en scène et scénographie d’Hélène François et Emilie Vandenameele

 

ladi_acm_mars15_11-1024x631Sur scène, rien qu’une longue table nappée de noir, avec les restes d’un dîner pour une dizaine de convives : bouteilles à moitié vides, assiettes avec quelques restes, verres dispersés. L’idole, ou du moins ce qu’il en reste, est là, affalé, en proie à un spleen évident.
Cette star du rock adulé depuis des décennies- et évidemment l’image de Johny vient tout de suite à l’esprit- ne se voit pas faire autre chose que continuer à chanter devant un public fidèle…
Mais l’âge est là et Hélène François et Emilie Vandenameele ont bien mis en scène ce chanteur avec une vie de tournées épuisante pour le corps et l’esprit. Il il a vieilli comme ses fans d’autrefois, entre autres cet ami agriculteur cantalien aujourd’hui à la retraite qui avait fait 80 kms avec sa vieille voiture pour aller le voir à Saint-Flour…
Etre encore la seule bête de music-hall qui reste d’une époque, cela se paye au quotidien, et
l’histoire de ce chanteur populaire, c’est aussi celle d’un travailleur et de toute une équipe: “Je travaille avec des professionnels de la profession. Des américains. Des anglais. Ce qu’on fait de mieux. De plus en plus de gens autour de moi. Roadies, chorégraphes, préparateurs physiques, accessoiristes, maquilleuses, coiffeurs, stylistes, barbier.
Mon producteur, mon répétiteur et mon attaché de presse me courent après. J’essaie de les semer. Toujours des choses à signer. Des accords à donner. Je voulais être tranquille dans ma loge. Ils n’arrêtent pas. Des gens sont dans ma loge. Je veux juste être seul dans ma loge pour chier. »
  Le langage ici est parfois des plus crus, quand il évoque ses amours en tout genre, voire tarifés : « Une fille est montée sur scène. M’a attendu en coulisse, m’a attendu devant la loge. Je lui fais signe d’entrer. Je bande. Elle m’embrasse, me dévore littéralement la bouche. Je bande. Je me rends compte que je bande. J’en profite, j’en profite sévère. Je lui remonte sa robe. Je suis excité. Très excité. Je la soulève par les fesses. L’assois sur ma table de maquillage. La plaque contre le miroir. Allume la lumière. Avec la lumière, c’est mieux. Je sautille jusqu’à l’interrupteur. Reviens sur elle. Dans elle. Je me vois dans le miroir. Je vois une ruine. J’ai perdu en élasticité. Je débande. Qu’est-ce qui se passe ? Je me suis déconcentré. J’ai pensé à autre chose.
Pierre-François Garel que l’on avait remarqué dans Qui a peur de Virginia Woolf (voir Le Théâtre du Blog) et qui  a  été nommé cette année aux Molière « meilleur second rôle », arrive ici,  avec une excellente diction, à être tout fait convaincant malgré un texte faiblard, comme écrit sur un coin de table et dont la dramaturgie est tout aussi faiblarde. Il es loin d’avoir l’âge du personnage mais arrive à l’incarner au plus serré.

Les deux jeunes complices (voir Le Théâtre du Blog) ont cette fois mieux cerné leur mise en scène et leur direction d’acteur, grâce aussi sans doute à leur collaboration avec Stéphanie Chêne à qui est attribuée “l’écriture physique” de ce monologue, tout à fait efficace. Et dont dépendent des images d’une grande beauté, comme à la fin, l’idole ensevelie par une pluie de matière indéterminée qui tombe lentement des cintres.
  Le spectacle créé l’an passé possède de vraies qualités, et on ne peut qu’applaudir à la scénographie de cette table-qui participe d’une sorte de vanité picturale, très finement représentée-à la mise en scène et au jeu remarquable de Pierre-François Garel mais, à moins de n’être pas difficile, mieux vaut vraiment oublier le texte de ce monologue…

Philippe du Vignal

Festival d’Avignon
 : Artéphile du 7 au 17 juillet  à 22h40. Théâtre Jean Arp de Clamart 
du 18 au 22 avril et à L’Avant-Seine, Colombes, le 25 avril.


Archive pour 25 juin, 2016

Le Musée Nicéphore Niepce en danger

Le Musée Nicéphore Niepce en danger!

Le Musée Nicéphore Niepce en danger

Nous avons reçu cette pétition que bien entendu, nous relayons avec plaisir: décidément, après les lamentables déclarations sur l’enseignement du cirque de Laurent Wauquiez, le président de la  Région Auvergne-Rhône-Alpes, la culture n’est pas bien vue dans ce territoire de l’hexagone.

Ph. du V.

Soutien au musée Nicéphore Niépce:

Nous demandons au maire de Chalon-sur-Saône de garantir les moyens financiers nécessaires au bon fonctionnement du musée Nicéphore Niépce, dont les missions de service public culturel et les activités  sont  remises en cause par les restrictions budgétaires imposées par la municipalité : près de 60 % de budget en moins sur deux ans et un budget d’acquisition qui chute de 43. 000 € en 2015 à 14. 000 € en 2016.
Coupes budgétaires qui vont avoir de graves conséquences sur la collection, les expositions et la médiation culturelle! La renommée de cette institution, une des rares à faire le lien entre l’invention de la photographie et les pratiques actuelles, est une référence affirmée et dépasse largement les frontières de la ville de Chalon-sur-Saône.
La collection, pensée et construite depuis 1974, compte près de trois millions d’images, d’objets et de livres. C’est l’une des plus riches, consacrée à la photographie en France et en Europe. La politique d’acquisition active, ciblée sur la création contemporaine, offre une reconnaissance institutionnelle et internationale aux photographes.
Les expositions temporaires, exigeantes et variées, relèvent d’une haute considération de la mission de service public culturel. Par la diversité des écritures photographiques présentées, elles ont l’ambition de susciter la réflexion du public et s’adressent à l’intelligence des visiteurs.
Les liens tissés avec la population sur le territoire, grâce aux opérations de médiations culturelles, sont riches. Pour beaucoup, le musée Nicéphore Niépce est un outil de liberté au service des citoyens, ouvert à tous.
Artistes, chercheurs, étudiants, journalistes, éditeurs, visiteurs et citoyens, contestons les choix politiques et financiers de la Ville de Chalon-sur-Saône.

Le Groupe de soutien au musée Nicéphore Niépce.

Pour en savoir plus et pour signer, c’est ici:

https://www.change.org/p/m-le-maire-de-chalon-sur-sa%C3%B4ne-soutien-au-mus%C3%A9e-nic%C3%A9phore-ni%C3%A9pce?recruiter=45378704&utm_source=share_petition&utm_medium=email&utm_campaign=share_email_responsive

 

Comédies barbares de Ramon del Valle-Inclan

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Comédies barbares de Ramon del Valle-Inclan, traduction d’Armando Llamas, mise en scène de Catherine Marnas, avec les élèves-comédiens de troisième année de l’École supérieure de Théâtre Bordeaux-Aquitaine

   Ramon del Valle-Inclan (1866-1936) évoque, avec L’Aigle du blason (1907), Romance des loups (1908) et Visage d’argent (1922)-trois drames réalistes de sa trilogie Comédies barbares-un paysage d’une autre époque… c’est à dire, il y a, à peine plus d’un siècle…   Domine ici le personnage éponyme de Visage d’argent, le plus jeune et le plus beau des enfants de don Juan Manuel Montenegro, un hobereau galicien fantasque de Galice qui y règne comme un seigneur médiéval, despote et hidalgo coureur de jupons, portrait en pied poussiéreux mais encore vivant d’un suzerain en armure possesseur de terres féodales appauvries.
Il a interdit le passage sur ses terres, décision arbitraire qui a provoqué aussitôt  la colère des paysans. Pour se libérer de cet interdit-une oppression inique-le peuple fait appel au curé, figure de notable, à la fois pittoresque et fort douteuse. La douce Isabel, filleule de Montenegro qui en a fait sa concubine, provoque l’affrontement du chevalier, avec le curé qui veut l’arracher à l’emprise de ce parrain, et avec Visage d’argent, le cadet de ses fils, amoureux d’Isabel.
Soit un précipité d’épisodes violents et passionnés, entre fureur, sexe, ambition, orgueil et sacrilège. Les hommes sont vaillants mais les épouse, sœur et concubine qui ne sont pas dévotes mais séductrices, lui résistent. La Magicienne, la Rouge et le Fuseau noir, une femme-bouffon comique et céleste, sont réinventés avec humour. Catherine Marnas propose ici une lecture sarcastique de l’œuvre de Ramon del Valle-Inclan où sont dénoncées la crédulité populaire, la dévotion mais aussi l’appât du gain, chez des bandits à la fois violents et/ou sympathiques. Les scènes pathétiques et cruelles se succèdent à grand rythme, avec l’argent comme moteur: l’argent, celui des fils de Montenegro, sauf un, qui part à la guerre, pour défendre son pays. Ces fils de famille, sans foi ni loi, vont piller l’héritage chez leur mère défunte, restée fidèle au mari indigne.
Grâce à la traduction crue et persifleuse d’Armando Llamas, le spectacle de Catherine Marnas s’amuse de cette trame annonciatrice de la fin d’un monde non révolu où dominent le bruit et la fureur, et dont il ne reste qu’à faire le deuil. La dimension physique du jeu de ces élèves-comédiens, avec chœurs, chorégraphies, gestuelles singulières et acrobaties, est  très soignée.
Une vie désordonnée s’installe au milieu des vociférations et des injures. Plus rarement, se fait entendre la sonorité du rire, ou du plaisir de couples amoureux d’être dans l’intimité. La vie est ici confinée à la guerre, dans une lutte sans merci, où l’homme est un loup pour l’homme. Les jeunes acteurs jouent très bien leur partition et des images pittoresques défilent: tempêtes sous une bâche en plastique, courses effrénées du chien du chevalier, enfant-Jésus coiffé d’une couronne de petites lumières qui s’exprime avec facétie, Pardons typiques de la campagne, grenouilles de bénitiers et chapelains en chasubles blancs.
Ramon del Valle-Inclan dénonce un monde étriqué et la musique traditionnelle gasconne et landaise avec Xabi Etcheverry, au violon traditionnel basque, Valentin Laborde, à la vielle à roue, Martin Lassouque, à la cornemuse landaise et Jordan Tisné, à la flûte à trois trous, insufflent à cette fresque une grâce bienfaisante… dans un ouragan de théâtre brut et rageur
.

Véronique Hotte

Théâtre de l’Aquarium, festival des Écoles du Théâtre public, jusqu’au 26 juin, à la Cartoucherie de Vincennes. T : 01 43 74 99 61 Le texte est publié aux éditions Actes Sud-Papiers.

 

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