Toute ma vie, j’ai fait des choses que je savais pas faire

Festival d’Avignon :

 Toute ma vie, j’ai fait des choses que je savais pas faire de Rémi de Vos, mise en scène de Christophe Rauck 

IMG_5714-crédit-simon-gosselin-780x520 Première bonne surprise du off:  un monologue, créé en novembre dernier au Théâtre du Nord, que Rémi De Vos, à la demande de Christophe Rauck, son vieux complice, a écrit pour Juliette Plumecocq-Mech, remarquable comédienne de nombreux spectacles du metteur en scène depuis Le Cercle de craie caucasien que nous avions vu au festival de Blaye, il y a … quelques années.
  Rien sur la scène qu’un écran blanc posé sur un sol noir (aucune vidéo, ouf !) pour ce texte de quarante-cinq minutes. On discerne à peine un corps allongé par terre, celui d’une femme habillée d’un pantalon  et blouson noirs. Une victime allongée.
En fait, c’est l’histoire d’un homme qui boit tranquillement une bière dans un bar quand il se fait injurier. Il y a-sinistre-la silhouette de cet homme dessinée comme à la craie d’un gros trait blanc.
  D’une belle voix rauque, Juliette Plumecocq-Mech raconte en termes simples, une histoire somme toute banale, dans le registre de celles de l’auteur mais qui ne peut laisser indifférent : «Ok les gars, écoutez-moi. C’est pas moi qui ai commencé, c’est pas moi qui cherchais les histoires, c’est pas moi qui a dit : toi, tu vas t’en prendre une et ça va pas traîner… » (…) Le type est entré d’un coup, il s’est planté entre moi et la porte, et il a commencé à me dire que les mecs dans mon genre il avait jamais pu les blairer, et que rien ne lui faisait plus plaisir que de leur faire leur fête, et qu’il allait maintenant se faire le très grand plaisir, de me faire complètement regretter d’être entré dans le bar.»
Investissement physique maximum, voix rauque inimitable de l’actrice rendue sans doute plus rauque grâce au micro (pour une fois, c’est justifié,). On ne sait plus très bien homme ou femme, quelle est son identité.
Qu’importe, elle réussit avec panache à faire passer toute une palette de sentiments: peur, orgueil, volonté de se sortir… On comprend petit à petit qu’un homme a été tué dans un bar, et que le meurtrier poursuivi, essaye malgré tout de s’en sortir. La scène finale est d’anthologie; il raconte comment où il a enfoncé un verre dans la gorge de la victime: “La partie du verre avait disparu dans sa gorge et le reste qui se trouvait dans la partie du verre encore visible et le verre est devenu rouge. Presque aussitôt, ce qui m’a moi aussi sidéré car j’ai pensé de façon absurde que j’avais pris un verre de vin et non de bière.”
   On n’oubliera pas cette histoire où la gestuelle compte autant que les mots précis, durs, bien servis par la mise en scène de Christophe Rauck,  et seulement accompagnés de  brefs extraits de Sonates de Beethoven.
  Un seul regret: au début , on ne voit pas bien l’actrice, trop près du public, et comme la scène est peu profonde, impossible de faire autrement. C’est l’inconvénient des petites formes destinées à être jouées partout. Donc, placez-vous au premier ou deuxième rang pour voir ce solo qui est, cette année encore une des formes les plus répandues du festival. Mais celui-ci tranche nettement par ses qualité d’écriture et d’interprétation.

Philippe du Vignal

La Manufacture, 2, rue des Ecoles, Avignon, tous les jours à 13h30, relâche les lundi 11 et 18 , jusqu’au 24 juillet.
Et le 17 septembre,  au Nest Théâtre, Centre dramatique national de Thionville-Lorraine. Le 8 novembre, Le Manège, scène nationale de Maubeuge (à la gare numérique de Jeumont).

Les 28 et 29 avril 2017, Festival Coup de théâtre, Mirecourt. Le 20 mai 2017, Théâtre Ducourneau, scène conventionnée, Agen, et du 7 au 24 juin 2017, Théâtre du Nord, Lille.

Les pièces de Rémi de Vos sont publiées aux éditions Acte-Sud.

 

 

 

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