Hôtel particulier par la compagnie Carabosse
Festival d’Aurillac:
Hôtel particulier par la compagnie Carabosse, direction et coordination artistique de Gérard Court et Nadine Guinefoleau, mis en scène et direction d’acteurs de Martin Petit Guyot
Carabosse, un collectif d’artistes concepteurs, scénographes, comédiens, constructeurs, musiciens, inventeurs, et plasticiens s’est surtout fait connaître par ses spectacles en plein air, résultant d’une écriture collective, favorisant la proximité avec le spectateur, et utilisant la musique et le feu vif, à une échelle qui dépasse largement celle des plateaux de théâtre, pour atteindre parfois des images de grande beauté. Son espace : les petites rues, lieux et places publiques des centres ville, voire les sinistres zones semi-industrielles à la périphérie d’un seul coup transformées avec poésie à la nuit tombante…
Cela se passe sur le terrain de sports à côté du gymnase de la Jordanne, là où il y a quelques années nous avions vu le tournage d’un western par le Royal de Luxe.
Nous attendons devant l’entrée d’un hôtel aux fenêtres désespérément fermées, et aux murs sales qui tombent en loques, et à la véranda possédant encore quelques vitres; deux grooms minables en uniforme noir accueillent le public qu’ils invitent à entrer sur un terrain sablonneux rectangulaire, fermés de murs en contre-plaqué quelques colonnes de faux-marbre, et sous l’éclairage d’une merveilleuse et grosse lune pâle, et surtout de torchères et de quelques projecteurs-mal disposés ils éblouissent souvent le public. Debout il peut voir et revoir: soit un chambre d’hôtel un assez minables, à deux portes portant le numéro 13, encombré de valises avec une femme de chambre en robe noire et petit tablier blanc, d’autrefois, et une cliente très exigeante. Ou plus loin,en face, une salle à manger des années trente avec une grande bourgeoise qui reçoit à dîner un professeur de sciences neurologiques il y a aussi un bureau-bibliothèque où deux hommes en noir discutent poésie et littérature.
Sur deux des murs, une reproduction d’une œuvre du douanier Rousseau, de la Joconde, des nus, une vanité style XVIIème, et des tableaux d’inspiration cubiste et surréaliste… Au fond, sur une petite scène, une affichette plaquée sur un ancien pare-feu en bois, annonce une conférence du professeur Pélissard sur les implications du cerveau et du sommeil dans la production des rêves: au mur, quelques photos d’artistes dédicacées comme celle de Fred Astaire, etune jeune femme chante au micro face public. Elle se plaint de l’influence grandissante qu’exerce un homme imposant, chauve, à rouflaquettes, en costume noir rayé qui lui dit que son nouveau piano va arriver.
Le public debout comprend vite qu’il doit se déplacer, pour recomposer un scénario qui finalement lui échappera, même si les petites scènes se répètent, de façon à ce que tout le monde puisse avoir vu l’ensemble.
Petit ennui : on entend très mal les dialogues joués sans micro, et trop bien la chanteuse… Et passé l’étonnement que présente cet univers pictural, les quelque deux cent cinquante spectateurs qui vont d’un univers à l’autre, sans y trouver vraiment un grand intérêt, essaye de se trouver une place assise sur le petit escalier d’arrivée. Comment s’intéresser en effet à ces personnages qui sont plutôt des silhouettes, certes intéressantes sur le plan plastique mais qui évoluent dans une dramaturgie qu’on a du mal à saisir. Et ces deux heures d ‘un spectacle qui commence déjà en retard deviennnent interminables
D’autant qu’il y a une seconde partie avec une fausse/vraie conférence- heureusement au micro, sur les sciences neurologiques du professeur Pélissard mais guère convaincante. Et cette fois l’hémorragie de spectateurs s’accentue.
«Il n’y a pas l’ombre d’un doute qu’un bon scénario est absolument essentiel, peut être même l’essentiel pour un film dit le grand Sydney Pollack ». Et cela vaut aussi pour un spectacle, surtout en plein air.
“L’écriture de nos créations et nos multiples manières de les offrir, porte un regard sur le monde plein de revendications, de coups de gueule, de tendresse, d’humour et de liberté dit la compagnie Carabosse. » Peut-être mais ici dommage, on reste sur sa faim, et on s’ennuie vite, malgré la beauté visuelle de certains moments et une bonne direction d’acteurs. Mais cela ne suffit pas.
Quelle déception !
Philippe du Vignal
Gymnase de la Jordanne jusqu’au 19 août. Accès payant.
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