Fumiers

Fumiers d’après un épisode de l’émission Strip Tease de Florence et Manolo d’Arthuys, adaptation et mise en scène de Thomas Blanchard

 

2016_01_28_FUMIERS_004Alain_Monot-2000x1331Le gros tas de fumier qui trône au milieu du plateau annonce la couleur. Autour du monticule majestueux se jouera, pendant une heure quinze, une comédie de la haine entre voisins. A Brioux Saint-Juire, une guerre de dix ans oppose Nicole Vaucher et les époux Dejousse, condamnés à partager une cour mitoyenne.

Nicole n’en démord pas, la cour lui appartient et, bien qu’elle perde procès sur procès, elle continue à déverser tous les jours des brouettées d’excréments à trois mètres de la résidence secondaire de ses voisins. Les villageois s’en mêlent, constitués en comité de soutien à Nicole, et mènent la vie dure aux « parigots-têtes de veaux ».

Les parties se connaissent de longue date mais la brouille s’envenime au jour le jour, sans autre issue que la violence. Ici, le ridicule irait jusqu’à tuer. Cet épisode rocambolesque est tiré de la mémorable série documentaire belge qui, dans les années quatre-vingt a fait les belles heures de la RTBF et de France 3, avant de tomber en disgrâce pour voyeurisme et atteinte à la vie privée des petites gens. La pièce suit au plus près l’intrigue mais n’en conserve pas la sobriété: les réalisateurs montraient les choses mais sans commentaires. Il appartenait aux téléspectateurs de se faire leur opinion. Mais ici tout est surjoué, démonstratif.

 Pour échapper au réalisme, le metteur en scène pousse les situations vers un grotesque débridé: les acteurs forcent le trait jusqu’à transformer leurs personnages en caricatures d’eux-mêmes. En monstres affublés de costumes de mauvais goût : trop clinquants pour Liliane Dejousse (Christine Pignet), laids ou sales pour les villageois. Nicole (Johanna Nizard)  particulièrement repoussante sous un empilement de hardes, a les mains rougies par le placenta d’une vache qu’on a entendu vêler derrière le tas de fumier.
Lutin ou sorcière, elle s’active, dure à la tâche, comme on le voit dans le documentaire d’origine diffusé dans le hall du théâtre. Du plus bel effet : montagne infranchissable, tour de guet, perchoir, ce fumier s’anime parfois étrangement grâce à des projections vidéo. Ce qui donne au spectacle une dimension onirique.

Le micro-drame social, réalisé par Florence et Manolo d’Arthuys, destiné à montrer la misère humaine, psychologique et sexuelle des protagonistes, et la naissance insidieuse d’un conflit irréversible, devient ici une farce trop énorme pour nous toucher ou nous renvoyer à un questionnement sur le violence quotidienne ou la discrimination. Les acteurs, aussi talentueux soient-ils, prennent plaisir à en faire des tonnes mais se trouvent entraînés dans la spirale d’un jeu outrancier qui ne fait même pas rire…

 Mireille Davidovici

 Théâtre du Rond-Point, Paris, jusqu’au 2 octobre. T: 01 44 95 98 21 www.theatredurondpoint.fr

 

 

 

 

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Archive pour 9 septembre, 2016

Le Grand Parquet fait peau neuve

Le Grand Parquet fait peau neuve

lieu-grand-parquet En 2014, au départ de son directeur, François Grosjean, et suite à l’agression d’une employée par un détraqué du quartier, on crut un moment à la fermeture de cet ancien parquet de bal, transformé en salle de spectacle de 364 m² au sol pour une capacité de 170 à 450 personnes.
Il avait ouvert ses portes en 2005, rue du Département, puis  migré il y a deux ans sur l’esplanade des jardins d’Éole. Situé au cœur des quartiers de La Chapelle et Flandre- Aubervilliers, à la limite des 18e et 19e arrondissements, ce théâtre avait pour ambition de croiser les publics, tout en favorisant le dialogue entre les cultures. Ce qui fut fait, malgré un contexte d’insécurité permanente. Car la demande était forte.

Sauvé in extremis, et après bien des rumeurs et polémiques, ce lieu atypique va revivre sous la houlette du Théâtre Paris-Villette et accueillir des créateurs en résidence. Il sera une « maison des artistes », tremplin pour de futurs projets, la plupart en lien avec des publics locaux. Tout au long de la saison, les équipes en création pourront y répéter et y  présenteront aussi des lectures, des travaux d’atelier, des maquettes et des formes brèves, annoncent ses nouveaux directeurs, Valérie Dassonville et Adrien de Van.

 En cette soirée de réouverture, élus et partenaires associatifs se pressent derrière de hauts grillages enfin installés autour du Grand Parquet, sécurité oblige. Après les discours officiels de rigueur, le public rencontre deux des vingt compagnies choisies parmi les 210 candidats de l’appel à projet. Chacune va improviser une petite forme, prélude à sa prochaine création…

 Que faites-vous dans la vie ? de Valérie Mréjen, dispositif de Julien Fišera

Une fois qu’on a décliné sa profession, on a droit à une série de questions souvent attendues. « Tu as lu beaucoup de livres ? » demande-t-on à une bibliothécaire ; à un éleveur de brebis : « Vous êtes pour ou contre l’ours dans le Pyrénées ? » ; à un ostéopathe : « Comment vous faites pour toucher autant de gens ? » ; ou encore à un poissonnier : « Vous mangez du poisson tous les jours ? » ; à un gendarme : « Est-ce que tu as une arme ? Est-ce que tu as déjà tué quelqu’un ? Et si tu n’es pas d’accord avec les ordres ? » Enfin, à une comédienne : « Est-ce que tu as déjà couché pour un rôle ? » Et à un comédien : « Comment tu fais pour apprendre ton texte ?» 

Valérie Mréjen a interrogé différents corps de métier et nous donne un échantillon des fantasmes que suscitent chez autrui nos diverses occupations. Le metteur en scène Julien Fišera appelle des spectateurs à rejoindre le plateau pour lire, à tour de rôle, ces questions stéréotypées. Ils s’acquittent tant bien que mal de cette tâche ce qui n’occulte en rien la saveur du texte.

Un impromptu sympathique concocté par une équipe artistique qu’on retrouvera au Paris-Villette avec Eaux Sauvages et, en résidence, au printemps au Grand Parquet, pour préparer un prochain spectacle.

 

Villes/Témoins de Stéphane Schoukroun

Le metteur en scène improvise, avec deux de ses complices, la présentation de son prochain spectacle documentaire, en avril 2017 au Grand Parquet :  issu d’un dialogue entre des élèves comédiens de l’École supérieure d’art dramatique de Paris et des femmes isolées habitant au Centre d’hébergement et de réinsertion sociale. Sans texte préalable, il s’agit de s’interroger sur la place de chacun dans la vie, dans la ville puis sur scène. De donner la parole à chacun pour y prendre cette place.

Depuis 2011,  Villes/Témoins se forge à travers le récit des habitants sur leur rapport à la ville et aux territoires: Alfortville, Guyancourt, Naves et Uzerche en Corrèze, l’échangeur autoroutier de Bagnolet et, en 2015, le Parc de la Villette, puis la Maison des métallos de l’automne 2015 à l’été 2016: autant d’étapes d’une recherche sur notre capacité à habiter l’endroit où nous nous trouvons.A suivre…

Mireille Davidovici

 

 

35, rue d’Aubervilliers ; T. 01 40 03 72 23 ; www.legrandparquet.fr

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