Nissim Aloni, il était une fois un roi

Nissim Aloni, il était une fois un roi de Doron Djarassi

 

nissimLe grand dramaturge israélien Nissim Aloni (1926-1998) resterait un parfait inconnu en Europe, sans ce documentaire original qui nous plonge dans l’univers des années cinquante et soixante,  grâce à des interviews d’acteurs, musiciens, producteurs et scénographes qui furent  les témoins de sa carrière. Héritier d’un Eugène Ionesco et du théâtre parisien des années cinquante, il bouleversa, tel un ovni, la scène israélienne, jusque là confinée dans le théâtre commercial ou classique.

Le  jeune réalisateur brosse un intéressant portrait de cet auteur-metteur en scène à l’humour décapant. Films et photos d’archives font revivre des répétions houleuses de ses spectacles et son acharnement à toujours, sur le métier, remettre son ouvrage. Des extraits de ses  mises en scènes et séances d’écriture montrent que sa fantaisie et son inventivité fulgurante sont compatibles avec une grande exigence littéraire : amoureux de la langue, il polit ses textes jusqu’à la dernière minute, à la recherche du mot juste, et prolonge le travail de répétition des mois entiers, au grand dam des comédiens et directeurs théâtraux.

Pour rendre la poétique et l’univers absurde de ses pièces, Doron Djarassi a fait appel au dessin animé : des croquis colorés, souvent naïfs, de son scénographe attitré, le peintre Yosel Bregner deviennent des personnages costumés qui s’envolent, emportés par des ballons rouges, des poissons sillonnent l‘espace, et des chevaux de bois cavalcadent… Et dans La Fiancée et le chasseur de papillons, étrange pièce surréaliste, un ballet de papillons envahit l’écran …

La réussite de Nissim Aloni n’eut qu’un temps : la critique, d’abord désarçonnée, puis enthousiaste, lui reprochera vite des productions trop coûteuses et des fables obscures. Après le succès des Habits du roi (1961), réécriture des Habits de l’empereur de Hans Christian Andersen, une pièce comme Napoléon mort ou vif  s’en prend indirectement à Moshe Dayan. Nissim Aloni y met en scène un tueur à gages aux trousses d’un dictateur polymorphe qu’il ne parvient pas à descendre; devenu fou, il se prend lui-même pour Napoléon et met fin à ses jours

Dans le même style, Eddie King (1976) ascension d’un maffieux, ne verra jamais le jour,  faute de financement. Le dramaturge, découragé, se reconvertira alors dans la traduction et écrira des sketches de cabaret, entrés depuis dans la culture de son pays. Puis Hanoch Levin, dans les années quatre-vingt, évincera cette étoile filante de la scène.

 Le cinéma parvient ici, sans recours à la captation de spectacles, à rendre le théâtre vivant, et nous fait découvrir une œuvre importante, même si elle paraît aujourd’hui un peu vieillotte. Les pièces de Nissim Aloni n’ont pas encore été traduites en français, cela viendra peut-être un jour…

 Mireille Davidovici

Musée d’art et d’histoire du Judaïsme, dans le cadre du festival Lettres d’Israël, jusqu’au 29 septembre.
Le 22 septembre à 18 heures : Le théâtre d’Israël, lectures par le Jeune Théâtre National, 13 rue des Lions Saint-Paul, 75004 Paris.

Le Hibou, recueil de nouvelles de Nissim Aloni, est publié aux éditions Viviane Hamy.

 

 

 

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