Roberto Zucco de Bernard-Marie Koltès

 

Roberto Zucco de Bernard-Marie Koltès, traduction de Dimitris Dimitriadis, mise en scène d’Angela Brouskou


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Une pièce de théâtre à épisodes…  Et nous allons suivre le trajet de ce jeune Italien qui va commettre des crimes en série: étranglement de sa mère, assassinat d’un inspecteur de police et enfin d’un adolescent dans des circonstances particulières… Comme souvent  chez  Bernard-Marie Koltès, l’espace est un catalyseur et renforce l’impression que nous avons de dialoguer avec les personnages qui y habitent. L’auteur relate ici la véritable histoire de ces meurtres qui avaient bouleversé la société française à la fin des années quatre-vingt.

Il se sert de l’appareil mythique qui évolue en légende, pour enrichir le personnage avec des éléments empruntés entre autres, à la liturgie de Mithra. Pour mettre sur pied la dialectique de son héros. Roberto tue mais sans vouloir tuer: cela arrive comme naturellement, il passe, écrase et c’est tout. Ceux voués à la mort, meurent; quant aux autres, ils survivent pour raconter.

La réflexion du héros se complique quand l’auteur veut rendre moins cruelle la pulsion de l’assassin; il utilise alors certains effets stylistiques pour soutenir le passage du texte au plateau. Comme si les épisodes s’élevaient en unités théâtrales pour mener à l’extrême le spectacle, à travers les rencontres que fait Roberto Zucco. Bernard-Marie Koltès recourt alors souvent à des litotes, métonymies et surtout métaphores… Comme l’apparition,  très shakespearienne, de deux gardiens qui ont un regard attentif sur la personnalité du meurtrier. Et le dramaturge français met en doute la phénoménologie de la simple apparence : tout être vivant dans le meilleur des mondes possibles serait alors  un éventuel meurtrier !

Angela Brouskou s’appuie sur la théâtralisation d’un thème grave et cherche à «aliéner» les traits des visages mouvants.  Caméra à la main sur le plateau, elle filme les scènes pour créer un nouveau masque sur le masque du rôle… Elle filme aussi des miroirs reflétant un regard, une bouche mi-ouverte, une grimace, au moment même de son inscription sur le visage de l’acteur… Ainsi le discours photographique de la représentation laisse peu de place ici à l’incarnation de symbolismes. Le visage de Parthenopi Bouzouri (la Mère, la Dame au parc et la Patronne du Petit Chicago), demeure un masque unique, presque immobile dans ses nombreuses expressions, souvent moqueuses, avec une sorte de distanciation brechtienne.

Stratos Tzortzoglo tient lui aussi trois rôles : l’Inspecteur, le Grand Frère et le Vieux Monsieur  dans le métro. Georgianna Dalara (la Gamine) et Antonis Tsiller et Andréas Antoniadis (les Gardiens) incarnent leurs personnages de façon exceptionnelle. Angela Brouskou concentre les produits de la mythologie disons métaphysique et la cruauté des actes commis par ce gentil meurtrier, cet Ange de la mort qu’est Roberto Zucco. Kostas Nikouli a, lui, déjà l’aspect de ce personnage au beau et charmant visage qui a aussi un instinct de destruction.

Ce mélange de douceur et cruauté participe à la force de la pièce et on pourrait la définir comme une sorte de «tout ici et maintenant». Une fois la diachronie assurée, la boîte des idées n’est jamais vidée…

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre Technis/Karolos Koun, 5 rue Pesmatzoglou, Athènes. T : 0030 210 32 28 706, jusqu’au 7 février.

 

 

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