Shakespeare Celebration
Shakespeare Celebration par le Footsbarn Travelling Theatre
Entre voyageurs, ils se comprennent : la famille Romanès prête cet hiver leur installation à cette célèbre compagnie. Les riverains (séparés quand même d’elle par un large boulevard) n’ont pas du tout apprécié son cirque familial dont les roulottes et le modeste barnum ont fait l’objet de vandalisme. Les amis de Shakespeare ne leur plairont pas non plus! Raison de plus pour y aller, c’est juste en face du métro .
Donc ces éternels errants présentent deux spectacles : Nid de coucou (voir Le Théâtre du Blog) , et Shakespeare Celebration, un cabaret créé en l’honneur du quatrième centenaire de la mort de William Shakespeare. À supposer qu’il soit bien mort puisque, cette fameuse existence a été niée ou mise en doute par pas mal de penseurs (?) des origines (quatre cents ans !) à nos jours.
Ces soupçons font évidemment la joie des incurables shakespeariens que sont les Footsbarn. Tels ils ont sont, tels ils ont été quand ils créaient il y a quelques dizaines d’années, un mémorable Roi Lear avec six acteurs et en une heure et demi, avec des costumes somptueux taillés dans les lambeaux de leur chapiteau dévasté par la tempête et quelques joyaux de récupération du même acabit. Ils ont présenté bien d’autres spectacles depuis : toujours savants, populaires et festifs.
Ici, on retrouve l’écume de ce que tout le monde connaît de Shakespeare sans souvent le connaître avec Roméo et Juliette (savoureuse distribution carnavalesque et gracieuses marionnettes), Hamlet, avec un vieil Hamlet obstiné, son crâne à la main, Le Songe d’une nuit d’été et ses artisans, les combats féroces et les plaintes de Richard III… On entend aussi, avec gravité, le Shakespeare un peu moins connu des fameux Sonnets.
C’est fait, bien sûr, de la matière des songes, mais surtout de celle, artisanale et éternelle, du théâtre. Toiles peintes joliment patinées et costumes de bric et de broc constituant des images poétiques, musique gaillarde avec ses moments de pure beauté, masques et marionnettes : peu de choses devant nous, et tout se recrée sans cesse. Modestie des moyens, et ambition sans limites de la création, ce pourrait être leur credo.
Et cela, dans toutes les langues présentes, à savoir, l’anglais, avec des petits moments de traduction, et celles que parlent et chantent les acteurs. Tous musiciens, (excellents), tous comédiens (on n’a guère le temps de savoir s’ils sont bons ou non, tant cela va vite !), tous rapides, pleins d’humour sur eux-mêmes, toutes générations confondues.
Voilà comment le Footsbarn est inusable, voilà pourquoi on en redemande : leur technologie, c’est eux: corps habiles et imagination en alerte, humour toujours au rendez-vous. Et il y a même des effets poétiques inattendus comme ce buste de Shakespeare qui affiche, de face, une tête de bonhomme roublard, et de profil, en ombre portée, le visage d’un beau jeune garçon rêveur. Magique, non ?
Le Foostbarn est menacé dans ses bases arrière (le département de l’Allier) par Laurent Wauquiez, le président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, peu soucieux (et c’est un euphémisme) de la culture et du théâtre (voir Le Théâtre du Blog). Celui qui, comme vous le savez sans doute, s’en est déjà pris aux Ecoles de cirque ! Allez voir leur spectacle : vous saurez que ce monsieur aurait grand tort de vous en priver.
Ce ne sera pas une visite à un musée du théâtre de tréteaux, mais bien un moment de plaisir et de liberté. On pourrait-presque-avoir l’impression que le Footsbarn n’aurait besoin de rien pour exister ? Erreur : les hommes et les femmes ont besoin de manger, et nous, de William Shakespeare.
Christine Friedel
Chapiteau Romanès, les samedi à 20h30 et le dimanche à 15h30, durée 1h30, jusqu’au 26 février square Parodi, boulevard de l’Amiral Bruix, 75016 Paris T: 04 70 06 84 84. Métro : Porte Maillot.
Avec, en alternance, Nid de coucou : les jeudi et vendredi à 20h30, le samedi à 15h30, durée 1h45.. T. 06 61 39 26
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