S’embrasent de Luc Tartar
S’embrasent de Luc Tartar
L’histoire se passe dans une cour de collège, dont le train-train quotidien va être bouleversé par un événement de la plus haute importance : Latifa, la nouvelle élève a été embrassée par Jonathan, le plus beau des garçons. On apprend aussi que Jonathan cristallise l’attention des filles, des garçons mais aussi du directeur. Et que cette voisine, une vieille dame qui se présente elle-même comme une rescapée de la canicule, observe, connaît chaque enfant, et laisse des préservatifs à disposition sur le rebord de sa fenêtre.
C’est un récit sur l’amour, dans le microcosme de l’école. Luc Tartar aborde un sujet aussi universel que banal; pourtant S’embrasent est un texte tendre et rafraîchissant sur l’amour où se développe une vraie poésie. «Ce qui m’intéresse avant tout, dit-il, dans l’émoi amoureux, c’est l’envahissement des sens, des corps, c’est l’énergie qui circule entre les êtres et qui agit forcément sur l’équilibre intérieur des personnes. Tomber amoureux, (…) c’est bousculer, heurter, et, in fine remettre en cause l’ordre établi (…) L’amour est un vertige qui nous fait avancer. Je pense à la sculpture d’Alberto Giacometti, L’homme qui marche. »
Deux jeunes filles et deux garçons jouent en alternance les séquences. Et au début, une grand-mère traverse le plateau de cour à jardin, de manière un peu fantomatique, puis s’incarne peu à peu, sur un sol marqué par des lignes comme dans les gymnases, et que la lumière viendra surligner. En fond de scène, un tableau noir qui sera rempli de paroles. La mise en scène d’Éric Jean colle bien avec cette fougue de la jeunesse, et ses comédiens, tous justes, ne tombent pas dans l’imitation des enfants qu’ils sont censés être. Sur de nombreuses musiques, avec, entre autres, La belle Histoire de Michel Fugain et Where do I begin, un délicieux play-back où la vieille dame qui se prend pour Shirley Bassey-des lumières changeantes rendent compte de cet état de sidération où plonge les amis de Jonathan et Latifa.
Pour le spectateur, c’est donc comme devenir amoureux, il en prend plein les yeux et les oreilles, ça bouge de partout, et la pièce est bien rythmée: Luc Tartar possède une belle écriture et se révèle être un excellent dialoguiste. Un beau moment de spectacle très frais que nous offre le Théâtre Bluff, venu du Québec pour quelques dates en France. Bravo et merci au Théâtre Paris-Villette de nous avoir offert cette pépite. Une petite heure qui nous replonge dans l’adolescence et les premières amours…
Julien Barsan
Spectacle vu au Théâtre Paris-Villette. Treize Arches de Brive, le jeudi 2 février. T : 05 55 24 62 22.