Cut d’Emmanuelle Marie, mise en scène de Christine Massa

 

Cut d’Emmanuelle Marie, mise en scène de Christine Massa

IMG_0614 Elles sont trois à jouer les jeunes femmes avenantes et épanouies. L’une d’elles confie, avec amertume, larmes et déploration: «Ma mère pleura beaucoup le jour de ma naissance. Elle pleurait tant que le médecin fut forcé de la gronder : « Pourquoi pleurez-vous tant ?» demanda-t-il. «Je voulais un garçon, dit-elle… et c’est une fille… « 
 
Cette fille, devenue adulte, aurait même bien aimé que le bon Dieu soit une femme,et  sa mère qui était croyante, aurait sans doute moins pleuré le jour de sa naissance… Dans la mise en scène facétieuse de Christine Massa, les données du problème, si problème il y a, sont posées une fois pour toutes, mais les personnages d’Emmanuelle Marie  retournent l’affaire à leur avantage, avec toute la malice souhaitée.

« Femme est-on », entendez par là : pertes et fracas, inconvénients et atouts, malchance et bonheur. Et bonheur d’abord, comme la tonalité de la musique de ce spectacle pétillant. En dépit des remontrances maternelles traditionnellement assénées à la fille : «Serre les jambes, petite délurée. Serre les jambes. Serre les dents. Serre les fesses. Serre tout ça et tais-toi. » Qu’on ne voie surtout pas surgir le moindre signe de féminité qui pourrait traduire un abandon coupable, une légèreté insouciante, ou encore un plaisir d’être librement épanouie.

En échange,  pudeur, modestie et humilité sont de rigueur, s’il vous plaît , comme si un voile symbolique s’était déposé au tréfonds de chacune d’elles, entre censure et autocensure, recouvrant instinctivement tout obscur objet de désir. Que ce soit la position assise que toute femme adopte pour se soulager,  ou d’autres gestes intimes auxquels se livre la gent féminine, entre solitude ou partage consenti avec son partenaire, le plaisir n’est pas toujours là. Et après ? Les femmes ne dépendent pas uniquement d’une sexualité, dite épanouie.

Les scènes se succèdent grâce à la vivacité de ces trois actrices qui évoluent sur la piste de danse d’un cabaret, entourée tri-frontalement de rangées de sages spectateurs… Humour et jeu, drame et gravité, chacune de ces belles actrices raconte une part de son histoire personnelle:  rencontre de l’amour, perte de l’être aimé,  solitude subie ou vie à deux. On les perçoit mieux encore à travers les adresses, les répliques ou les regards qu’elles posent sur le mâle ou qu’il pose sur elles. Olivier Bordin, lui montre une présence virile insolite qui révèle leur part cachée à elles…  

La gracieuse Aloysia Delahaut, qui est aussi la chorégraphe du spectacle, danse un solo vif et plein d’élan, et ses compagnes se balancent aussi avec cœur et énergie sur la musique rock et blues de Faith et Spirit, dessinant un chœur au rythme éloquent. Jeune femme enjouée et habitée, Stéphanie Quint se met en colère  avec un verbe italien de conviction, avec quelque chose de la Magnani et la douce Tanya Mattouk fait montre de patience, de réserve et d’émotion, avec un sourire convaincu.

Le spectacle  glorifie, avec humour et panache, l’être-là féminin.

Véronique Hotte

Théâtre de la Reine Blanche, 2 bis passage Ruelle Paris XVIIIème, jusqu’au 22 avril. T : 01 42 05 47  31.

Le texte a été publié à L’Avant-Scène Théâtre (2003).

 

 

 

 


Archive pour mars, 2017

Never, never, never de Dorothée Zumstein

Never, never, never de Dorothée Zumstein, mise en scène de Marie-Christine Mazzola

© Gaël Ascal

© Gaël Ascal

Never, never, never dit le roi Lear , à la fin de la célèbre tragédie de Shakespeare. Trois mots que répondait l’Esprit quand le poète anglais Ted Hughes et son époque la poétesse américaine Sylvia Plath (voir Le Théâtre du Blog) faisaient tourner une table un soir de 1956  en demandant quel était le plus grand vers écrit par un poète anglais.
Cette nuit de 1984 précède le  jour où  on va décerner Ted Hughes le titre de « poet laureate », et il reçoit la visite successive de deux femmes : d’abord son épouse Sylvia devenue entre temps célèbre, qui se suicida en 1963, puis Assia Wevill, l’autre femme pour laquelle il quitta Sylvia, et qui se tua elle aussi en s’asphyxiant au gaz , six ans plus tard, avec son enfant.

La pièce s’inspire donc de la vie de Sylvia Plath, Assia Wevill et Ted Hughes qui restera marqué à vie par cette tragédie vécue au plus profond de lui-même, sans arriver vraiment à faire l’indispensable travail de deuil. Le langage, dans ces cas-là, ne fonctionnant pas bien.

De Dorothée Zumstein, Julie Duclos avait monté  à la Colline Mayday, l’ histoire d’une autre tragédie (voir Le Théâtre du Blog) où, en 1968, dans le nord de l’Angleterre, une enfant Mary Bell d’à peine onze ans, a été jugée pour avoir étranglé deux petits garçons âgés de trois et quatre ans. Ici, c’est le même climat d’oppression chargé d’onirisme et de tragique qu’elle semble avoir recherché.

«C’est à une traversée intense, dit Marie-Christine Mazzola, que nous souhaitons convier le spectateur, en vue de lui faire vivre ce voyage dont les personnages sortiront libérés et apaisés. L’atmosphère (sic)  instaurée par la mise en scène sera singulière et captivante, dès son amorce, afin que le public puisse plonger dans la représentation en retenant son souffle, avec cette impression diffuse que, si un geste ou un son brusque se propageait dans cet espace/temps de la hantise, les images fugaces de cette mise en scène pourraient bien disparaître.»

Atmosphère, atmosphère! Oui mais voilà, comment passer du drame intime de ce poète, à la fois victime mais aussi bourreau, à une tragédie universelle… Sur la scène nue, juste deux tables identiques, avec des chaises et des petites lampes: sans doute le symbole de ces femmes amoureuses du poète. Mais Dorothée Zumstein a commis un texte qui se voudrait poétique, mais qui se perd en longs, longs monologues et tout petits dialogues, dans une série de scènes guère passionnantes et vite ennuyeuses… Et dans une mise en scène assez statique, où justement rien n’est  « captivant », comme le souhaite Marie-Christine Mazzola qui a quand même bien choisi ses comédiens.

Les formidables Thibault de Montalembert, Sarah Jane Sauvegrain et Tatiana Spivakova ont une excellente diction, ce qui devient rare, et une grande présence; ils arrivent heuresement, malgré tout, à rendre crédibles des personnages assez falots.  Chapeau!  Mais si traiter cette histoire tragique au théâtre, surtout avec un dialogue aussi plat, n’était sans doute en fait qu’une fausse bonne idée?

En tout cas, on ne vous poussera pas à y aller, quel que soit l’intérêt que vous portez à la vie et à l’œuvre de ces jeunes poètes disparus…

 Philippe du Vignal

Studio-Théâtre, 16 Rue Marcelin Berthelot, 94140 Alfortville. T. : 01 43 76 86 56, jusqu’au 1er avril.

 

 

 

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La Justice des poissons

La justice des poissons, conception, écriture, mise en scène Henri-Jules Julien, (spectacle en français et en arabe)

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Une seule actrice, Nanda Mohammad, pour incarner trois femmes, avec trois points de vue différents sur le même texte, dans une première en français, la seule différence résidant dans l’emploi des pronoms, dans la seconde en effet l’énonciation se fait à la première personne du pluriel (« nous »),  distanciée, grâce à l’emploi de la troisième personne (« ils, eux »).
Dans la troisième version, le texte est en langue arabe. Autant de points de vue différents pour ne pas dire antagonistes. « Nous » assume les faits énoncés, c’est la voix de la culpabilité ; « eux » met en cause les agents : c’est la voix de l’accusation. Traduit en arabe, le même texte change de sens, et les mots n’ont plus la même résonnance : le contexte a changé, la musique du verbe n’est plus la même.
 Du réquisitoire, on est passé à l’ode. La mélopée, la musique, la plainte de la contrebasse ont fait leur œuvre. Et la mutation du texte s’opère, à la faveur de ce choral. La présence poétique des ombres et des lumières n’est pas étrangère à cette métamorphose. Traduit en arabe, déclamé comme un psaume, le texte se fait cantique.

La traduction joue pleinement son rôle de «belle infidèle»: qui peut dire que le mot français: liberté,  corresponde vraiment au mot arabe: Houria ? Ils ont peut-être un sens analogue, mais sûrement pas la même valeur ! La comédienne  syrienne a un français teinté d’étrangeté,  et un arabe, musical.

Alors, qu’est ce texte mystérieux ? Un récit, un conte philosophique, une méditation sur la justice qui trouve sa source dans la Bible, autour des notions de loi du talion et de villes-refuges qu’étaient les villes de Palestine, dont la vocation était de protéger le «meurtrier par inadvertance », un homme ni tout à fait coupable, ni tout à fait innocent : subjectivement innocent, objectivement coupable. Celui qui réclame justice n’est ni un vengeur sanguinaire,  ni un miséricordieux débonnaire.
Quant aux villes-refuges, elles sont à la fois protection et terre d’exil ! Côté justice, on est aussi en pleine ambiguïté. Partant de là, le texte poursuit son interrogation, et la comédienne nous invite à méditer sur cette aporie. Le confort des occidentaux ne serait-il pas installé sur la ruine des pays colonisés ? A qui profitent le crime et la terreur au Moyen-Orient? Qui sont aujourd’hui les «criminels par inadvertance» ? Que faisons-nous, que pouvons-nous faire, nous qui sommes là ?

Cette  méditation sur la justice emprunte à Emmanuel Levinas, à l’économiste indien Amartya Sen, avec notamment la notion de « justice des poissons, et a aussi des accents à la Camus. Que peut le théâtre, face à la tragédie syrienne ? Toute la question de la représentation est ici soulevée (en douceur, mais soulevée tout de même !). Et il faut bien répondre : c’est une aporie ! Même si on a aussi le sentiment que, seul, le théâtre est en mesure de représenter cette tragédie. Mais quel sens  a le mot « représenter » ?

 Aucune place ici pour le réalisme, ni pour la déploration ou la description ! Henri-Jules Julien, auteur et metteur en scène, donne à voir cette aporie, la fait mimer par la musique, le rythme textuel, la mélopée, les accents de la voix, le jeu des lumières et les vibrations de la contrebasse : bref, un pas de côté qui convient à la représentation. Minimalisme de la pudeur et du respect.

Dans cette gageure, la comédienne tient une place centrale. Sur son regard, sur sa voix, sur son chant, et sur sa présence naturelle et émouvante, repose ce fragile édifice. Mais pari gagné: elle sait nous toucher en s’adressant à nous, en toute simplicité, sans affectation. Avec une vérité et une sensibilité convaincantes qui portent le texte…

Un moment de partage bref, mais intense ; on ressort de là, ému et un peu frustré, mais toujours étonné par la force du langage théâtral qui peut faire son miel de rien, et aller là où personne ne peut.

Michèle Bigot

Spectacle vu le 18 mars au Tarmac/Scène internationale francophone 159 Avenue Gambetta Paris XXème. T : 01 40 31 20 96

 

 

Nachlass / pièces sans personnes par le Collectif Rimini Protokoll

 

Nachlass / pièces sans personnes par le  Collectif Rimini Protokoll

 

hqdefaultStefan Kaegi, Suisse d’origine, a fondé Rimini Protokoll  avec Helgard Haug et Daniel Wetzel à Berlin. Depuis,  il  pratique un théâtre documentaire hors-normes et souvent hors-les-murs, toujours en prise sur le réel, donnant la parole à des « experts du quotidien ».  Il les interroge, les invite à jouer leurs propres rôles, souvent sur le plateau, et invente à partir d’eux, des dispositifs généralement immersifs interrogeant les réalités sociales ou politiques de notre temps. Officiant souvent dans son pays natal, Stefan Kaegi y a réalisé Nachlass au théâtre Vidy-Lausanne. Après Deadline, qui donnait la parole à des spécialistes et experts de la mort, il aborde encore ce thème, mais cette fois-ci du point de vue de ceux qui vont bientôt mourir. Mais rien de sinistre dans cette démarche, au contraire…

 Fidèle à la méthode de son Collectif, le metteur en scène à choisi huit personnes en fin de vie, soigneusement sélectionnées, parmi de nombreux volontaires auditionnés.  En allemand   »Nachlass“ de   »nach » : après, et de « lassen » : laisser, désigne l’ensemble des biens matériels et immatériels que laisse un défunt derrière lui.  Que laisse-t-on après sa mort ? Le spectacle s’est construit à partir de cette  question.  » Il nous intéressait, explique Stefan Kaegi, d’investir l’ensemble des lettres, œuvres, documents qui dessinent le corpus de leur existence, bien loin des questions d’héritage. Capter des fragments de vie, explorer leurs désirs pour les offrir plus tard au public, quand ces êtres auront peut-être disparu. » 
Nachlass est une installation scénique  où les spectateurs circulent. Par petits groupes, ils  vont  pénétrer dans une succession de pièces inhabitées, disposées autour d’une salle d’attente, accueillis par la voix et les images de personnes défuntes  à ce jour.

 Dominic Huber a construit huit espaces sur mesure, conformément aux vœux des mourants, contenant des restes les symbolisant. Nadine, une française venue en Suisse pour bénéficier de l’assistance au suicide, aurait aimé devenir chanteuse. Toute sa vie secrétaire dans une entreprise d’automobiles, elle n’a pu réaliser ce vœu. Face à un théâtre miniature dont le rideau blanc ne se lèvera plus, on entend la chanson de son enfance qu’elle a enregistrée pour ce spectacle. Son rêve se réalise enfin mais post mortem et cela nous émeut aux larmes.

Plus loin, c’est Michel, un adepte du parachute qui  nous entraîne à sauter avec lui, avec une caméra embarquée. Pour lui, « le saut, c’est vivre au présent, même si je sais que je peux mourir. Sauter égale exit ! » 
Jeanne, quatre-vingt onze ans, nous suggère de regarder des photos qu’elle a prises elle-même, témoignages d’une vie ordinaire avec ses joies et ses peines. Elle travaillait dans une usine de réveils et nous demande de régler deux exemplaires de sa production pour minuter son temps de parole. À nous tous, les heures sont comptées, se dit-on…
 Gabrielle nous lègue des monceaux de cartons bourrés de documents qu’on peut compulser. Elle nous parle de sa fondation, destinée à aider les artistes africains qu’elle a côtoyés, lors de ses missions d’ambassadrice européenne :  » Cette chambre transmettra mon message et rendra mon départ plus facile . » Une vie bien remplie comme cette habitacle réduit où s’entassent ses dossiers.

Rien de morbide dans ce parcours. Au-delà d’un documentaire brut, se jouent huit petits théâtres intimes, testaments ordonnancés de leur vivant par des personnes sans doute disparues, à l’intention d’autres vivants. « Les personnes en fin de vie, précise Stefan Kaegi, ont un vif désir de témoigner, contrairement à leur entourage, souvent très peiné. »

Dire que l’on sort joyeux de cette expérience, serait exagéré. Un spectacle troublant, bouleversant, parfois on sourit même quand l’un des protagonistes nous propose un verre d’eau, puis nous demande de bien vouloir jeter le gobelet usagé, avant de quitter sa chambre.

Si cette création a été élaborée à Lausanne, rien d’étonnant :  » Observer la mort en Suisse, dit  Stefan Kaegi, c’est un peu comme faire un voyage vers le futur, les avancées technologiques sont stupéfiantes.  ( …) En parallèle, il est désormais possible de décider de sa propre mort, grâce aux organismes d’assistance au suicide. La Suisse expérimente des projets avant-gardistes dont on discute actuellement dans toute l’ Europe. (…) Nachlass interroge des thèmes comme la médecine du futur, la mémoire, l’héritage immatériel. »

 Mais loin de s’arrêter à un sujet de société, ou à une expérience macabre, ce memento mori, partagé collectivement, dans une grande proximité avec les autres spectateurs, et grâce à une mise en scène distanciée, reste avant tout réconfortant. Il nous invite à regarder la mort, donc la vie en face. À voir…

 Mireille Davidovici

Spectacle vu le 26 mars, à Bonlieu/ Scène nationale d’Annecy (74).
Théâtre Vidy-Lausanne du 31 mars au 4 avril.

Festival Théâtre en mai, à Dijon,  du 20 au 27 mai;
Le Maillon, à Strasbourg, du 1er au 11 juin ; Staatsschauspiel de Dresde du 16 au 24 juin.

 

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Pierrot lunaire, théâtre lyrique avec marionnettes

Pierrot lunaire, théâtre lyrique avec marionnettes, d’après l‘œuvre d’Arnold Schönberg sur vingt et un poèmes d’Albert Giraud, précédé de Quatorze Manières de décrire la pluie d’Hanns Eisler, direction musicale de Takénori Némoto, avec l’Ensemble Musical Nigella, mise en scène de Jean-Philippe Desrousseaux (spectacle en allemand surtitré en français)

 

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©Gabriele Alessandrini

 Le Pierrot lunaire (1912) d’Arnold Schönberg, avec son « sprechgesang » (mélodie parlée), fait suite au Pelléas et Mélisande (1902) de Claude Debussy. Dans cet opéra rempli d’effervescence intellectuelle et de foisonnement artistique, la voix dit le texte, sous l’emprise d’une musique insinuante qui en magnifie les valeurs expressives.

Ici, avec la mezzo-soprano Marie Lenormand-ou Fiona McGown, le 31 mars-la musique du XXème siècle,  imprévisible ouverte aux formes de l’aléatoire, sort de la temporalité classique. Avec un mélange de provocation, d’ironie et de prétentions cosmiques…

 Arnold Schönberg lançait un défi aux valeurs reçues, avec  une autre manière de vivre et de sentir, au début de ce siècle tourmenté. La définition des arts volait en éclats, entre volonté de jeu, fantaisie, irrespect, sarcasmes et refus du sentimentalisme. Cette épopée en trois parties de sept mélodrames se situe dans une maison close japonaise, à l’époque Edo (1600-1868). Pierrot, amoureux de Colombine-une geisha soumise au vieux Cassandre et surveillée par une maquerelle-se morfond, jaloux, puisqu’il est impossible à Colombine de se libérer. Elle se suicidera avec le katana de ce Pierrot lunaire, jeune héros exposé au désir, à la faute meurtrière et à sa rédemption.

 Cette œuvre écrite pour le cabaret,un lieu à la fois savant et canaille, celui de l’élégance et de la transgression, possède, pour Jean-Philippe Desrousseaux, des personnages de la commedia dell’arte qui peuvent être saisies par un théâtre de marionnettes, notamment le fameux bunraku, le théâtre japonais traditionnel  de marionnettes. Le goût de la parodie, entre provocation et burlesque, se glisse dans les figures grimaçantes de Pierrot, Colombine, Cassandre, et d’une vieille femme rouée, à travers une fête bergamasque qui tournera au drame, et le bunraku, avec son esthétique, répond techniquement et scéniquement à ce Pierrot lunaire.

Une narratrice-chanteuse nous raconte ici ce drame de figures solitaires, ici japonisées et animées à vue et avec précision par Gaëlle Trimardeau, Bruno Coulon, Antonin Autran, Jean-Philippe Desrousseaux, entièrement drapés de noir. Dans ce beau cauchemar, les personnages évoluent dans un univers fantastique très  sombre. Violence, désir cruel et nostalgie: le bunraku traduit avec finesse, la musique intérieure des personnages.

Ici, apparait une lune mystérieuse dans les tableaux imaginés par le metteur en scène, avec un vaste firmament de lumières brumeuses ou pures conçues par François-Xavier Guinnepain; on peut ainsi voir, en ombres, de souverains et magiques instruments de musique et leurs interprètes. La création vidéo de Gabriele Alessandrini qui, dans  les Quatorze manières de décrire la pluie dHanns Eisler, montre, grâce au graphisme numérique, l’apparition puis la disparition de taches noires et de couleur, sur fond blanc, entre abstraction et figuration, entre les images d’archives du Japon traditionnel, et  celles de la modernité. Un moment d’attention délicate pour un drame musical, avec le théâtre de jeux d’ombres et de lumières qui fascine le public …

Véronique Hotte

Athénée-Théâtre Louis-Jouvet, 7 rue Boudreau, Paris (IXème) jusqu’au 31 mars. T : 01 53 05 19 19

 

 

 

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Les Bas-Fonds de Maxime Gorki

 

 Les Bas-Fonds de Maxime Gorki, d’après la traduction d’André Markowicz, adaptation et mise en scène d’Eric Lacascade

 IMG_0611Une immense cave aux allures de vaste grotte, avec voûte de pierre grisâtre lézardée : c’est un refuge douteux qui accueille, pour une nuit ou deux, des misérables et marginaux en vrac, des sans abri, sans domicile fixe, exemples involontaires et criants d’une exclusion, entre pauvreté et quart-monde, admise par la société. Ici, des êtres incapables de résistance, même individuelle, sombrent dans la folie, jouent et assistent aux histoires de cœur et aux affaires des maîtres et malfrats du lieu, comme Vassilissa et son mari véreux. Elle est la maîtresse de Pepel, un jeune voleur au service des sales besognes du couple; mais il en pince désormais pour Natacha, la sœur, plus jeune, de Vassilissa.

Le succès vint à Maxime Gorki avec  la première des Bas-Fonds au Théâtre d’Art de Moscou.  Sur la scène russe, en 1902, la vie des marginaux est un thème nouveau avec une mise en lumière pittoresque d’un asile de nuit accueillant «ses hôtes, des ci-devant mêlés à des hommes du peuple, déchus, compliqués, passionnants», comme l’a écrit Nina Gourfinkel.

Constantin Stanislavski (1863-1938) découvre dans Les Bas-Fonds qu’il va créer, «un nouveau ton, une nouvelle manière de jeu, un nouveau réalisme, un romantisme particulier». La langue, très vivante, résonne entre spontanéité et didactisme et le héros de la pièce  héros a l’allure d’un vagabond fantaisiste qui ne plaide pas pour le changement de l’homme mais pour ses conditions d’existence. C’est un personnage moderne, tourmenté et contradictoire, «un instrument de démolition du monde ancien, un explosif révolutionnaire».

Satine, l’un des personnages de cet asile de nuit dégradé, montre sa foi en l’homme et en sa capacité de création, mais aussi en son lien avec la nature. Eric Lacascade qui avait monté Les Barbares de Maxime Gorki, au Festival d’Avignon 2006 puis Les Estivants en 2008 au Théâtre National de Bretagne, monte à son tour cette pièce-culte qui révéla il y trente cinq ans, les metteurs en scène Gildas Bourdet et Alain Milianti, et le comédien Jacques Bonnaffé.

La direction d’acteurs des Bas-Fonds, que ce soit le chœur ou les personnages irradiants, offre une matière théâtrale mobile et vivante avec un élan d’humanité vivifiante. Tous envahissent l’espace, l’ouvrier et son enclume, sa femme malade qui va et vient, une jeune fille égarée qui lit beaucoup, le Baron, l’Acteur, et les autres… dont Louka qui, différent en cela des autres, amers et hargneux,  offre à tous une parole de réconfort.

Murielle Colvez, Jérôme Bidaux, Mohamed Bouadla, Arnaud Churin, Christophe Grégoire, Alain d’Haeyer, Pénélope Avril, Laure Catherin, Georges Slowick, Leslie Bernard, Arnaud Chéron, Stéphane E. Jais, Christelle Legroux et Gaëtan Vettier et Eric Lacascade lui-même entrent fougueusement dans le jeu. Quand ils interprètent cette armée de laissés-pour-compte, via l’art théâtral, ils diffusent un souffle libérateur, un ouragan d’espérance et une foi dans la bataille livrée contre les bas de la vie, en quête d’un équilibre minimal, pour rester debout, et dans la dignité.

 Telle une danse silencieuse, des habits de ville descendent des cintres et désignent ceux qui les portent comme des êtres appartenant à la société des hommes à part entière, enfants devenus trop grands, entre les rangées de petits lits bordés de couvertures, comme ceux des nains de Blanche-Neige… Quand la crise survient à l’acmé des tensions conflictuelles entretenues par les autorités de l’asile, les lits sont renversés, cassés et amassés en gravats informes. Plus alors d’enfance, plus de repos  ni d’un peu de confort pour aider pour cette  pauvre humanité !

 Restera l’oubli dans l’alcool, le rêve et les chansons conviviales, grâce à un tour de passe-passe où excelle Eric Lacascade:  à la fin, il y a un bar à canettes de bière dansantes, sonnantes et trébuchantes, un festival de jets de liquide entre cirque et jonglage: les buveurs s’en donnent à cœur joie! Reste la passion de l’homme qui n’en finit pas de détruire, pour toujours reconstruire…

 Véronique Hotte

Théâtre des Gémeaux-Scène nationale de Sceaux/Théâtre de la Ville à Paris (fermé pour travaux) du 17 mars au 2 avril. T. : 01 46 61 36 67.

 

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Edith Piaf intime par Clotilde Coureau

 

Edith Piaf intime  par Clotilde Coureau

Piaf

Devant un public chaleureux, concentré mais riant parfois, Clotilde Courau et son accompagnateur l’accordéoniste Lionel Suarez  jouent cet Edith Piaf intime. De conserve, ils inventent pour « répondre » à Edith Piaf, et ainsi lui rendre le plus bel hommage qui soit. Un hymne à la vie, à la difficulté d’être et aux élans qui ne la laissaient pas en place. Edith Piaf inquiète, malheureuse. Depuis plusieurs années, Clotilde Courau interprète les lettres écrites par Edith Piaf à un homme qu’elle fréquenta, après que son amant, le boxeur Marcel Cerdan soit mort dans un accident d’avion en 1949.

Tout se passe sur l’avant-scène nue. Le musicien et l’actrice, assis côte à côte sur des  tabourets, s’écoutent sans se voir. Etre côte à côte accentue le fait qu’ils semblent provenir de l’ombre située en fond de scène qui garde en elle les chansons, ne cesse de s’éclaircir en voix et en musique. Et nous n’entendrons aucune chanson

 Clotilde Courau passe du silence de l’écrit des lettres, à la voix vers laquelle elle fait remonter l’écrit, en respectant ce silence initial. C’est comme un enfant qui passe du ventre de la mère, au bruit : « La volonté de dieu a voulu que je naisse dans la rue. Des gendarmes m’aidèrent à voir le jour. Quant à moi, il parait que je me mis tout de suite à hurler. Ce fut ma première chanson » écrivait Edith Piaf. Gilles Deleuze disait d’elle qu’elle ne cessait d’inventer sur scène.

La voix de Clotilde Courau se double ici d’une articulation silencieuse. Il s’agit de passion. Et de l’absent. Edith Piaf écrit simplement les lignes brisées, espoirs, attentes, tendresses, mais aussi les abattements, les élans et relances : « Ecrire, disait Marguerite Duras, c’est aussi ne pas parler. C’est se taire. C’est hurler sans bruit. » Et l’actrice donne une voix à ces silences de la passion, tout en en gardant les fluctuations. Avec, justement, des silences entre deux moments phrasés. Elle interprète une partition et ne cesse d’offrir des contrepoints à la présence d’Edith Piaf. On connait la gouaille de la chanteuse. Clotilde Courau en invente une qui se situe sous la longueur d’onde naturelle: c’est une gouaille de théâtre, mais elle ne s’y appesantit pas et ne la transforme pas en cliché.

Parfois, sa voix prend subitement tout l’espace, comme on écarte les bras, et frôle alors le chant parlé. Elle ne surplombe pas le texte des lettres d’Edith Piaf mais résonne sans le blesser, dans leur silence présent, dans l’ombre du fond de scène, entre les mots, entre deux séquences, ou encore dans les gestes fluides de l’actrice qui ouvre les bras, se recroqueville, s’allonge sous une fausse apparence de vie quotidienne, selon le rythme de la passion du moment.

Lui répond, en soutien, l’accordéon de Lionel Suarez qui suggère les refrains des chansons, traversées par un écoulement musical qui lui aussi « joue » la vie quotidienne. Et une seule fois, une chute de lumière noire revêt la comédienne d’une robe d’obscurité. N’appartient-il pas au sentiment d’être irrégulier, anarchique et un peu déséquilibré? N’appartient-il pas à l’intelligence de la vie, de rendre supportable ses incessantes variations, la fièvre et la simple émotion de vivre.

Marguerite Duras, qui connaissait par cœur le répertoire d’Edith Piaf, aurait aimé ce spectacle et le côté abrupt de la passion qui s’exprime ici en courtes phrases. On se souvient sans doute que Savannah Bay tournait autour des Mots d’amour… une chanson d’Edith Piaf.

Bernard Rémy

Spectacle vu le 26 mars à l’Auditorium Jean-Pierre Miquel à Vincennes (Val-de-Marne).

 

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Clytemnestre ? d’Andréas Staïkos

 

Clytemnestre ? d’Andréas Staïkos, mise en scène de Georgina Tzoumaka.

 

      ClytenmestreLa pièce (1974) est classée chez nous parmi les textes emblématiques de l’esthétique méta-moderne qui fait coexister modernité et des éléments qui la dépassent, tout en amplifiant sa signification et sa manière de faire. Cela veut dire que le méta-moderne s’ouvre à une vision du monde, contrôlée par le besoin de créer une nouvelle possibilité. L’objet artistique, qui apparaît pour la première fois quelque part, est censé porté en lui une espèce de révolte.

Clytemnestre ? en constitue un tout syntagmatique, mais classique dans une première approche. Mais le titre même de la pièce est à la fois porteur d’une mise en doute avec ce point final d’interrogation… Andréas Staïkos a inventé ici une dramaturgie contemporaine et s’appuie sur la technique de l’intertexte, s’éloignant ainsi considérablement de la pièce d’origine: deux comédiennes, issues de la société  actuelle, sont en tournée, en raison de nécessités artistiques et… financières. Elles se lancent dans l’apprentissage de leur rôle mais en oublient les paroles, et commencent donc à proférer un nouveau texte fondé sur  celui de Sophocle.

Georgina Tzoumaka a voulu mettre en relief les figures mythologiques de Clytemnestre et d’Electre,  tout en offrant au public le plaisir d’un spectacle sensuel. Le  public devient ainsi le témoin d’une  rivalité naturelle, voire d’une inimitié entre mère et fille. La metteuse en scène a doublé les personnages des comédiennes, fatiguées par leur tournée, par ceux des héroïnes bien connues de l’Antiquité. Christina Dendrinou et Maria Branidou les incarnent avec ardeur et définissent aussi l’espace qui les entoure comme entité spécifique…

 Nektarios-Georgios Konstantinidis 

 Théâtre ΜΠΙΠ, Αγιου Μελετιου 25 και Κυκλάδων Κυψέλη 113 61 Athènes.

Amer d’Amine Adjina

 

cbeb11d0ff120268b9f94dcbba4d69c9Amer d’Amine Adjina

 Le Tarmac, Scène parisienne de la francophonie, organise ce mois-ci un temps fort autour des écritures d’Orient. Ces Traversées du monde arabe sont l’occasion de découvrir dix spectacles qui nous conduisent de la Syrie au Maroc, en passant par le Liban ou l’Algérie (voir Le Théâtre du Blog). : «Dans cette période sombre que nous vivons où le monde arabe est, à tort, de plus en plus souvent perçu par certains comme une menace, ou comme, et de façon irréconciliable,  étranger à nos sociétés européennes, j’ai construit cette manifestation avec l’envie de dépasser nos propres limites, nos projections fantasmées », dit Valérie Baran, directrice du Tarmac .

 On a pu voir Amine Adjina, comédien et auteur, diplômé de l’Ecole Régionale d’Acteurs de Cannes, chez Jean-Pierre Baro. Il rencontre Azyadé Bascunana dans un spectacle sur l’Algérie où tous les deux jouaient. La comédienne qui avait promis à sa grand-mère de répandre ses cendres dans cette Algérie qu’elle a tant aimée, propose alors à Amine Adjina d’écrire cette histoire qui évoque des souvenirs, parfois très sensibles avec des odeurs et des couleurs particulières: les dattes, les mouettes, la musique de la mer et les traditionnels taxis jaunes algériens. Cette relation grand-mère petite-fille, à l’image des rapports entre la France et l’Algérie, apparaît comme un grand enchevêtrement de passions, mais aussi  parfois tissé de tristesse et d’incompréhension.

À l’écriture d’Amine Adjina, simple et sensible, répond une scénographie  faite d’un grand store: fenêtre sur l’évasion et support d’images, et d’une table encombrée d’objets, livres, vêtements, comme une sorte de petit autel dédié à cette grand-mère disparue. Azyadé Bascunana, seule en scène, est touchante mais paraît tendue. On aurait aimé qu’elle se fasse un peu plus confiance et s’abandonne à son rôle.

Cet Amer, dont le titre fait référence aux oranges amères évoquées dans un poème par Mahmoud Darwich, reste quand même un beau moment de théâtre, empreint de douceur, ce qui n’est pas toujours le cas quand un metteur en scène s’attaque à  un sujet aussi épineux que celui des rapports franco-algériens.

Julien Barsan

Spectacle vu au Tarmac-Scène internationale francophone 159 Avenue Gambetta Paris 20ème . T. : 01 40 31 20 96, dans le cadre des Traversées du monde Arabe qui se poursuivent jusqu’au 31 mars.

L’Histoire d’une femme, texte et mise en scène de Pierre Notte

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@ Victor Tonelli

L’Histoire d’une femme, texte et mise en scène de Pierre Notte

Pas de scène dans la petite salle du sous-sol du Théâtre de Poche, avec des banquettes pour soixante-dix places, et c’est bien ainsi: juste une chaise et une tablette noire où sont disposés un verre, une bouteille d’eau et une serviette. Muriel Gaudin est là, debout, très proche des spectateurs et lance les imprécations de Pierre Notte : «J’ai voulu, dit-il, écrire l’histoire d’une femme qui n’en peut plus d’avoir à supporter une société d’hommes».

Et cette jeune femme, incarnée avec une impeccable diction et une grande sensibilité, une grande justesse par  la comédienne, n’a même pas de nom. Elle a sans doute une petite quarantaine d’années et doit subir au quotidien, dans la rue, le métro ou  dans son entreprise, des petites phrases perfides, voire des insultes des hommes,  ou des attouchements, ou encore claques sur les fesses. Constat évident : la société française contemporaine est encore très phallocratique, quel que soit l’interlocuteur de la jeune femme : son père, son patron, un médecin, un passant qu’elle ne connaît pas… Aucun ne rattrape l’autre ! Et la jeune femme doit subir au quotidien, humiliations et brimades sexistes, avec l’intime et insupportable conviction qu’on s’en prend à son identité la plus profonde. Jusqu’à ne plus avoir envie de dialoguer avec un homme…

Muriel Gaudin joue ce remarquable récit/monologue avec une superbe maîtrise, et cela dès le début de la représentation, en incarnant avec fluidité-dans ces petites scènes qui s’enchaînent-quelque trente personnages, avec des mots parfois crus mais qui correspondent bien aux situations de soumission exigées, au moins mal: paternalistes et d’un autre âge, au pire: méprisantes et misogynes, vécues dans un monde machiste impossible à vivre, et cela quel que soit le milieu social:  « ça se passe n’importe où, dit-elle, dans une rue à l’extérieur je tombe je suis tombée un type est passé à vélo devant moi juste là je traversais il a fait ça en passant il a claqué sa main il a, comment je peux dire ça il m’a claquée là, sur les fesses en passant à vélo et il a ri fort très fort il a claqué très fort et il a ri très fort aussi et il est parti et je suis tombée, voilà comment je suis tombée je suis à terre et je ne réponds plus (…).

 Bref, il y a un manque total de communication entre les deux sexes, encore au XXIème siècle…Y compris à l’Assemblée Nationale où il y a cinq ans, la ministre Cécile Duflot se faisait chahuter par certains députés parce qu’elle était en robe… Chapeau ! Rappelons que la France est au 34ème rang en matière de femmes élues au Parlement (27%) entre l’Afghanistan et la Tunisie!

Côté mise en scène, la direction d’acteurs est encore un peu brute de décoffrage et on se demande bien pourquoi Pierre Notte  a demandé à Muriel Gaudin de boire sans arrêt un verre d’eau, ou de s’éponger le visage avec une serviette : cette gestuelle inutile parasite le jeu de cette jeune actrice qui dit avec précision et magnifiquement son texte. Avec une belle voix grave et une intelligence du propos qu’on n’entend pas tous les jours. Une belle leçon de théâtre.
A voir donc pour le jeu remarquable de Muriel Gaudin qui passe par tous les registres : drôlerie, émotion, ironie, douleur contenue.. pour dire, avec toute l’intensité nécessaire, ce beau texte qui va faire un tabac auprès des apprenties-comédiennes quand elles le découvriront.

Philippe du Vignal

Théâtre de Poche-Montparnasse 75 boulevard du Montparnasse, 75006 Paris. T. : 01 45 44 50 21 jusqu’au 17 mai.
Théâtre des Trois Soleils, Festival d’Avignon, du 7 au 30 juillet.

 

 

 

 

 

 

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